3.2.4. Discussion

Cette expérience permet de répondre à la critique formulée par Spillman et Kurtenbach (1992). En effet, pour ces auteurs, les contours d’une forme, placés dans un fond bruité, n’apparaissent pas nettement. Bien que les auteurs n’y font pas référence, cette idée est confortée par l’existence de l’inhibition intra-canal dans le modèle de Breitmeyer (1984) (voir partie théorique). Ceci aurait pu expliquer l’absence de contour dans les expériences précédentes. Or, cette nouvelle expérience permet de rejeter cette hypothèse. En effet, les résultats indiquaient que les contours sont disponibles, puisque l’observateur peut utiliser spécifiquement cette information pour répondre. Par contre, cette dimension n’est pas traitée de façon automatique et est coûteuse. Ainsi, les contours sont utilisés si l’attention de l’observateur est dirigée vers ces derniers comme critère de réponse.

Les résultats de nos deux premières séries d’expériences ont montré que la surface était une dimension prépondérante. Le résultat que nous obtenons dans cette dernière expérience, un peu paradoxalement, est un argument fort en faveur de l’importance de la dimension de surface. En effet, bien que la dimension de contour puisse être utilisée par les observateurs, elle n’est pas donnée de façon automatique.

Nos premières expériences n’ont pas permis de montrer l’importance des bords pour la détection. Toutefois, nous pouvons supposer que dans la détection ce traitement ne s’applique pas, et il se pourrait très bien qu’un traitement de type « coarse-to-fine » (ou du global au local) permette d’expliquer nos résultats (Ginsburg, 1986 ; Navon, 1977). Cette hypothèse peut se résumer de la façon suivante : il est certainement plus efficace pour le système visuel d’encoder une description globale de l’image (donc imprécise) avant de faire une description détaillée de l’image. Cette idée est sous-tendue par l’existence des fréquences spatiales basses (« coarse ») et des fréquences spatiales élevées (« fine ») (DeValois & DeValois, 1988). Par ailleurs, cette hypothèse a également un corrélat physiologique puisque nous avons vu, au cours de la partie théorique, que les voies M et P répondaient de façon spécifique à ces deux canaux de fréquences spatiales respectivement. Or, la voie M est activée 20 msec avant la voie P. Ce traitement neuronal de l’information permettrait de valider l’hypothèse « coarse-to-fine ». Ainsi, nous avons pu mettre en évidence un avantage de la surface qui serait un traitement global de la forme, et notre dernière expérience a permis de montrer que les bords sont utilisés si l’attention de l’observateur se focalisait sur cette dimension, ce qui pourrait être interprété comme un traitement plus local.