I- 4.4. De nouvelles colonies allemandes ?

La déportation, l’interdiction de retour vers les anciens lieux d’habitation et les mouvements migratoires intérieurs entraînèrent une nouvelle répartition de la population sur l’ensemble du territoire, bien différente de celle d’avant-guerre, avant 1939. Les Allemands étaient désormais principalement répartis en Asie Centrale, en Sibérie occidentale, au nord de la Russie et dans l’Oural notamment 269 . Différentes statistiques 270 , que nous avons déjà présentées, montrent que la communauté a largement évolué entre 1926 et 1979, contre son gré ou de plein gré.

Pour ce qui est du Kazakhstan, en 1959, la plus grande partie des Allemands est concentrée dans la région de Tselinograd (12,7 %), à Karaganda (10,6 %), à Pavlodar (10,1 %) et à Koustanaï (10 %) 271 . Avec l’emploi croissant dans l’industrie minière et dans l’industrie en général, on a assisté à une restructuration sociale. Alors qu’en 1926, 15 % des Allemands étaient installés dans les villes, ce taux monta jusqu’à 50 % pour la moyenne nationale en 1979. C’est seulement au Kazakhstan et au Kirghizstan que le taux d’urbanisation était un peu plus faible, oscillant entre 41 et 45 %. La population allemande des villes est employée essentiellement dans les usines ou dans le secteur tertiaire. En général, dans l’industrie, il s’agissait d’emplois non qualifiés. Dans le secteur des services, les activités professionnelles étaient très mal rémunérées (pour les femmes de ménage, les vendeuses, etc.). Depuis les années 1960, le nombre d’ingénieurs, de techniciens, d’enseignants, de médecins et autres métiers académiques augmente. La création des kolkhozes permit aux Allemands de jouer un rôle économique à nouveau important. Les kolkhozes et les sovkhozes allemands surpassaient leurs voisins russes. La solidarité sociale des Allemands empêchait le départ des jeunes vers l’industrie et garantissait une structuration normale des tranches d’âge dans les exploitations. Ces conditions et les subventions supplémentaires des exploitations agricoles permirent jusque dans les années 1970 aux villages allemands de maintenir une prospérité croissante 272 . Au final, environ 50 % des Allemands vivant dans les zones rurales y travaillent. La plupart habitent des territoires de culture de blé et de coton, au Kazakhstan et en Sibérie où ils travaillent en tant que techniciens, conducteurs de tracteurs et maçons 273 . En 1970, la population était composée à 32,6 % de Kazakhs, 42,5 % de Russes, 7,2 % d’Ukrainiens et 6,6 % d’Allemands. Des années 1980 à 1989, ces pourcentages ont régulièrement évolué. En 1989, les Kazakhs représentaient 39,7 % de la population, dépassant ainsi les Russes (37,8 %). Venaient ensuite les Allemands avec 5,8 % tandis que les Ukrainiens restaient loin derrière. Les Russes restaient cependant majoritaires dans les territoires suivants :

La population allemande du Kazakhstan a augmenté de 11,6 % entre 1970 et 1989 soit 957 518 personnes. C’est la population allemande qui avait la meilleure croissance (35 %). La population allemande avait connu une croissance de 6,3 % dans l’est du Kazakhstan et 17 % dans le territoire de Pavlodar mais était en recul dans les territoires du Sud Kazakhstan. Ainsi, la population allemande a diminué entre 1979 et 1989 de 12,3 % dans le territoire de Tchimkent, de 17,3 % dans celui de Gouriev et de 5,4 % dans celui de Kzyl-Orda 274 .

Notes
269.

Aussiedler, Informationen zur politischen Bildung, Munich, 1991, n°222 , p. 17. Voir les cartes en ANNEXES LIX, carte des colonies allemandes dans le nord de l’U.R.S.S. en 1960 et ANNEXE LX, carte des colonies allemandes dans l’Oural en 1960.

270.

Voir ANNEXES LIII.

271.

Voir ANNEXE LXI, cartes des colonies allemandes fermées, des villes ou territoires à population allemande au Kazakhstan en 1961. Cette carte est à mettre en rapport avec le tableau que nous avons commenté sur la répartition des Allemands au Kazakhstan par territoire et par ville en 1959, voir ANNEXE LIII.

272.

H. KLÜTER, « Die deutschstämmigen Sibiriens, zwischen regionaler Autonomie und Auswanderung », in Geographische Zeitschrift, 1992, n°1, p. 135.

273.

S. STEENBERG, Die Russland-Deutschen, Schicksal und Erleben, Munich, 1989, p. 37.

274.

Staatliches Komitee für Statistik der Republik Kazakhstan (éd.), résultats du recensement d’U.R.S.S. de 1989, Volume II, Alma-Ata 1992, tableau 31. Voir ANNEXE LXII, carte des territoires d’installation d’Allemands en Union soviétique à la fin des années 1980.