Jusqu’en 1920, beaucoup de journaux étaient indépendants ou relativement indépendants, mais après 1920 soit ils étaient dirigés par des bolcheviques, soit placés sous le joug d’organisations à but politique strict. Plusieurs journaux ou magazines de langue allemande furent ainsi publiés par les sections du Parti communiste dans les républiques ou des autorités étatiques qui souhaitaient influencer la population allemande. Nous avons relevé parmi eux Nachrichten des Gebietskomitee der RKP(B) der Wolgadeutschen (après Vorwärts 1918, 1920-1941) ; Arbeiterschule, Saratov 1919 ; Der Bauernkalender, Marxstadt (1919-1920 avec David Schmidt), le journal des jeunes communistes de la Commune du Travail des Allemands de la Volga (Arbeitskommune) ; puis Der Kolonist, Katharinenstadt (rédacteur Adam Emich) fondé en 1917 et renommé en août 1918 Der Kommunist (rédacteur Erich Kufeld*, paru dès avril 1919) ; Vorwärts fondé en mars 1918 à Saratov, organe de l’association socialiste des Allemands de la Volga ; Die Rote Fahne, Moscou (1919-1922), organe des sections allemandes du comité central du Parti ; Die rote Krim, Simferopol (1920) ; Arbeit und Kampf, Marxstadt (1920) ; Der Dorfrat, Omsk, Novossibirsk (1920-1921).
L’histoire du journal Kaukasiche Post peut constituer pour les années 1920 un exemple de la main-mise des bolcheviks sur le journalisme, en particulier allemand. Il s’agissait de l’un des plus jeunes journaux parmi les journaux et magazines allemands qui existaient en Russie. Son premier numéro parut le 1er juillet 1906. Le sous-titre était Einzige deutsche Zeitung des Kaukasus. Anzeigeorgan für Cis- und Transkaukasien, Transkaspien, Südrussland und Persien. Il paraissait tous les dimanches et était composé de 4 à 24 pages selon les numéros. Les journalistes de la rédaction étaient Arthur Leist, Alexander Mosler, Johannes Schleuning*, Karl August Fischer, entre autres. Le comité rédactionnel était composé de Arthur Leist, Alexander Fufajew, Erich Bernstein, Franz Schulz, Alexis Walling, Otto Mader, Kurt von Kutschenbach.
‘« L’édition du Kaukasische Post était un germe d’espoir puiqu’il manquait une base financière sûre. Les apports manquants pouvaient être difficilement couverts. Les fondateurs furent déçus dans leurs attentes et décidèrent de cesser la parution à la fin de la 3ème année, en juillet 1909. Le comité rédactionnel fut alors dissout » 523 . ’Alexander Mosler, tout droit venu de Berlin, se proposa de reprendre le journal mais ne put tenir que deux ans et demi car les dettes s’alourdissaient et il ne pouvait plus redresser la situation financière du journal. Pour le remplacer fut créé un comité de rédaction sous la présidence de Johannes Schleuning, ancien pasteur adjoint à Tiflis, qui était très idéaliste. Il fut décidé, après de longues tractations, de reprendre la forme qu’avait le journal auparavant dès le début de l’année 1912. Il en fut le rédacteur, succédé rapidement par Karl Gustav Fischer de mars 1912 à octobre 1913. Le Kaukasiche Post était publié dans une région où la population allemande n’était pas aussi concentrée que dans la Volga, dans le territoire de Saint-Pétersbourg ou dans le sud de l’Ukraine. En effet, le territoire comptait 3 000 Allemands à Tiflis, un peu plus de 3 000 à Bakou, 13 000 colons en Transcaucasie et quelques centaines de colons souabes dans le Nord persique. Dès le début, le Kaukasische Post s’adressa aux habitants allemands :
‘« Tous les thèmes ont été traités durant l’année par le Kaukasische Post, notamment les questions religieuses, scolaires, agricoles, viticoles, la délicate question rurale, le système coopératif, mais aussi le théâtre, les festivités, en bref toutes les questions de la vie spirituelle, économique, sociale qui sont épineuses dans la vie de ces petites communautés. Et il y a beaucoup de points délicats pour les colons » 524 .’Avec l’éclatement de la première guerre mondiale le Kaukasische Post connut le même sort que les autres journaux allemands de Russie, il fut rapidement interdit. Sa recréation en mars 1918 en faisait un organe de l’association des Allemands du Caucase. Durant l’été, au Caucase, les troupes allemandes envahirent le territoire. La République de Géorgie nouvellement fondée avait besoin de soutien, soutien apporté par le journal qui gagnait ainsi en popularité et en importance. Le nombre de lecteurs augmenta. Le journal n’était plus le porte-parole des Allemands d’une région mais un journal patriotique géorgien. Cependant, en février 1921, le journal fut suspendu par les bolcheviques qui avaient envahi le territoire et ne put reparaître avant juillet 1921 en tant que journal apolitique. Néanmoins, même sous cette forme, il gênait le pouvoir et fin 1922 il s’arrêta complètement. Le dernier rédacteur du journal (de mai 1918 à décembre 1922) fut Alexander Foufaïev, Allemand de son côté maternel. Parmi ses collègues, on comptait Arthur Leist, Erich Bernstein, Franz Schultz, Alexis Walling, Adam Briem, Karl Hahn, Theophil Hoffmann, Martin Jaeckel, Gustav Schaal. En 1922, le pays étant en plein chaos, une stabilisation certaine de la vie culturelle et économique du pays se fit sentir. Les bolcheviques s’efforçaient d’imprégner davantage le monde littéraire d’idéologie. La résolution du comité central du Parti du 18 juin 1925 sur « la politique du Parti sur le territoire des belles-lettres » constituait un document cadre pour les écrivains mais aussi les publicistes. Il était souligné que la hausse du niveau de vie du peuple assurait une croissance des exigences et des besoins culturels. La montée en puissance de la littérature était un des résultats de cette croissance : la production artistique et littéraire idéologique prit de nombreuses formes, parfois justes embryonnaires (correspondances entre ouvriers et fermiers, journaux muraux, etc.). Á l’époque on dénombrait en U.R.S.S. 70 organes de presse de langue allemande. En 1912, le Parti bolcheviste ayant alors lancé son offensive légale, sur 100 journaux libéraux un seul était marxiste, et en Russie après 1922 presque tous les journaux et les magazines étaient bolcheviques. Parmi eux, nous pouvons relever :
K. A. FISCHER, « Die Kaukasiche Post », in Heimatbuch 1961, Stuttgart, 1961, p. 124 : « Die Herausgabe der K.P. war eine Saat und Hoffnung, da eine gesicherte geldliche Unterlage fehlte. Die jeweiligen Fehlbeiträge konnten immer nur seh mühsam gedeckt werden. So sahen sich die Gründer in ihren Erwartungen getäuscht und beschlossen, die Zitung mit dem Ende des 3. Jahrgangs, mit dem Juli 1909, eingehen zu lassen, der Redaktionsausschluss löste sich auf ».
K. A. FISCHER, ibid. p. 124-125 : « Alle ihre Angelegenheiten wurden im Lauf der Jahre in der K.P. behandelt, die Kirchen- und Schulfragen ebenso wie die Landwirtschaft, der Weinbau, die schwierige Landfrage, das Genossenschaftswesen, Thearterspiel und Festlichkeiten, kurz, alle Fragen des geistlichen, wirtschaftlichen, gesellschaftlichen Lebens, die jeweils für diese kleine Gemeinleben – jedes eine Sprachinsel für sich – brennend wurden. Und es gab viele Dinge, die den Kolonisten auf die Nägel brannten. Aus den Dörfern fanden sich auch immer wieder schreibgewandte und sachkundige Männer, deren Beiträge stets willkommen und wertvoll waren ».