III- 3.2. Évolution des confessions religieuses au XXe siècle en Russie

Au début du XXe siècle, se formèrent de nombreuses paroisses indépendantes : le 21 mai 1909, le Ministre de l’Intérieur autorisa l’installation d’une paroisse, St Johannes, dans le cercle d’Omsk, dans le volost d’Alexandrovskaïa. Au même moment s’établit également la paroisse St Petri qui comprenait les colonies dans le cercle d’Akmolinsk (avec Romanovka, Roschdestwenka et Mayonovka entre autres). Fin 1913, les paroisses indépendantes furent recensées : St Marien dans le cercle (Kreis) de Pavlodar, ainsi que dans le territoire de Semipalatinsk et pour les colonies Akimovka, Oulianovka, Lougansk et Anastaïevka avec la paroisse de Rosovka. La paroisse St Michaelis se partageait huit colonies avec la paroisse de Novo-Ivanovka. Il était difficile de trouver pour les contrées les plus éloignées une personne compétente et convenable pour le service pastoral. Dans quelques cas, des étrangers sont arrivés malgré l’interdiction générale de la part du gouvernement et ont tout mis en œuvre, jusqu’à la construction des bâtiments. Ce fut le cas, par exemple, dès mars 1913, dans la paroisse de St Johannes près d’Omsk pour le jeune diplômé du séminaire missionnaire de Berlin, Georg Alfred Hugo Heidengsfeld, qui devint temporairement pasteur. Le ministère de l’Intérieur l’a ensuite confirmé à son poste mais pour deux ans seulement à la condition qu’il passe un examen de russe et qu’il dépende d’une association de sujets russes. Au début de la guerre, il fut banni en tant que sujet de l’Empire allemand vers Tobolsk ; le consistoire évangélique luthérien de Moscou s’efforça en mai 1918 de poursuivre son activité dans cette paroisse 657 .

Les communes allemandes catholiques dans le territoire de Tourgaï furent principalement prises en charge par des prêtres catholiques d’Orenbourg, d’Akmolinsk et d’Omsk. Les Allemands de confession catholique domiciliés au Kazakhstan représentait presque un cinquième de la population. Le plus grand groupe ethnique parmi les catholiques dans ce territoire était composé des Polonais, suivis des Lituaniens, des Biélorusses et des Ukrainiens. Dans les colonies allemandes d’Osiornoye (Koustanaï) et Kellerovka (Koktchetav) furent construites des salles de prières catholiques. Depuis 1910, c’est Peter Iosov Servaïtis qui prit en charge les communes agricoles dans les cercles de Koktchetav et Petropavlovsk. Une personne sur neuf était mennonite 658 dans cette région. Ils vivaient dans les cercles d’Omsk, de Petropavlovsk, de Pavlodar et d’Aulie-Ata. Presque chaque village mennonite, ainsi constitué en communauté religieuse et fraternelle, avait son propre prédicateur. Dans les colonies mennonites comme Alexandrovka et Margenau dans la région d’Omsk furent construites de grandes salles de prière dans lesquelles on donnait des services religieux comme dans les églises. Les hommes d’Église venaient prêcher près de la communauté de Peter, officiellement appelée la commune mennonite évangélique et apostolique. En raison de la dispersion des Allemands sur ce large territoire et en raison du manque de contacts avec les milieux religieux, surtout pour les simples paysans, allemands certes mais également russes, ce sont des courants comme celui des Baptistes 659 ou Adventistes 660 qui eurent le plus grand écho. Les sectes furent, du moins en partie, soumises à des contrôles sévères. Ainsi, la commune adventiste de Petropavlovskoie (dans le cercle de Saisan, dans le territoire de Semipalatinsk) fut dissoute en 1911 en raison de ses croyances. La révolution russe de 1917 paralysa les activités religieuses dans les années 1920 et 1930 661 . Le mélange de la religion et de l’école fut interdit ce qui concernait directement les communes allemandes puisque les cours scolaires étaient principalement organisés dans les églises. Les activités religieuses des Allemands perdirent de leur importance avec le début de la Seconde Guerre mondiale : les activités ecclésiastiques furent suspendues en raison de l’utilisation de la langue allemande lors des services religieux et les groupes religieux furent dissous en raison des déplacements et des persécutions.

Notes
657.

J. STACH, Das Deutschtum in Sibirien, Mittelasien und dem fernen Osten, von seinen Anfängen bis in die Gegenwart, Stuttgart, 1938, pp. 39-42.

658.

Membres d'une Église évangélique issue du mouvement anabaptiste du XVIe siècle. Voir Partie I, la définition est donnée en note dans la sous-partie I- 1.1.2.

659.

Doctrine religieuse protestante du XVIIe siècle, selon laquelle le baptême ne doit être administré qu’à des adultes professant foi et repentir. La première communauté baptiste fut fondée en Hollande, au début du XVIIe siècle, par John Smyth, pasteur anglais qui s'y était réfugié et y avait rencontré des mennonites, issus du mouvement anabaptiste. Le baptisme se répandit ensuite en Angleterre, puis, avec les émigrés du Mayflower (1620), aux États-Unis, où l'on en compte 29 millions sur les 32 millions qui se répartissent dans le monde. Cf. Hachette encyclopédie électronique, 2001. Les baptistes ont fondé une association appelée Bund der Evangeliumschristen – Baptisten à Moscou dans les années 1950.

660.

Cette communauté religieuse, protestante, a été fondée autour de 1831 par un prédicateur baptiste, William Miller, en Amérique du Nord. Les adventistes appliquent les préceptes de la Bible, célèbrent le dimanche comme jour saint, attendent l’arrivée d’un nouveau messie, croient en la fin du monde, interdisent l’alcool et le tabac. Cette communauté a eu une influence certaine en Europe au XIXe siècle. En Union soviétique, les adventistes étaient présents surtout sur la partie occidentale de l’Union. Cf. C. BÖTTGER, Lexikon der Russlanddeutschen, Berlin, 2000, p. 8.

661.

Voir ANNEXE XCII : tableau sur les confessions des Allemands de l’Union soviétique, comparaison 1929-1939. Bien qu’incomplètes, les statistiques nous permettent de distinguer les confessions majeures et de savoir en quelles proportions elles étaient présentes avant la Seconde Guerre mondiale. Les absences de données sont révélatrices du manque d’informations sur certains domaines tabous dont la religion a longtemps fait partie en U.R.S.S.