III- 3.4.1. L’Église luthérienne au Kazakhstan

L’Église luthérienne ne bénéficiait d’aucune reconnaissance officielle 671 . Son organisation était entièrement dissoute. Les églises étaient détruites. Les jalons ainsi posés, il fallait aussi aux luthériens allemandd construire leur église et l’organiser. Ce n’est qu’en 1955 que les prémices d’un renouveau religieux évangélique luthérien se firent sentir. J. Schnurr parle, dès 1955, d’une nouvelle diaspora religieuse officieuse. La réhabilitation partielle de 1955 672 a entre autres permis aux Allemands de se rassembler, de former de nouveaux groupes religieux. Au fil des ans, les « Églises des catacombes » n’étaient plus envisageables car trop risquées pour les fidèles. L’activité religieuse s’est donc déplacée progressivement à l’intérieur même des logements. L’amnistie de 1955 garantissait en théorie la liberté de culte, mais en pratique, il s’agissait d’une « diaspora catholique » 673 . La loi du 2 avril 1929, et notamment l’article 2 de cette même loi, entra de nouveau en vigueur en 1960, contraignant les croyants à faire recenser leurs groupements religieux et à s’efforcer d’ouvrir de nouvelles églises officielles :

‘« Une société religieuse et un groupe de croyants ne peuvent commencer leurs activités que si cette même société et ce groupe sont enregistrés à la commission d’examen des questions religieuses, auprès du soviet local concerné ou le comité exécutif du district » 674 . ’

Pour enregistrer une communauté religieuse, il fallait déposer une simple demande auprès des autorités. Néanmoins, pour que la demande soit étudiée, il fallait déclarer parallèlement au moins vingt fidèles rattachés à cette même communauté. L’accord ou le refus de la demande incombaient spécialement au Comité du Soviet régional et territorial et au Conseil en charge des affaires culturelles. Cette démarche administrative nécessitait un mois de traitement. Les raisons d’un refus n’étaient jamais données (parce que la loi n’exigeait aucune justification) 675 . Ainsi, la première Église luthérienne d’après-guerre vit le jour en 1956 à Tselinograd, au Kazakhstan. Dès lors s’opère peu à peu une renaissance spirituelle. La reprise de la vie religieuse, tolérée mais non encouragée, gardait dans les territoires placés sous contrôle soviétique, davantage la valeur d’un symbole que d’un mouvement de masse. Les autorités n’adoptèrent à ce moment aucune politique définie, mais ne donnèrent que peu d’autorisations nécessaires à l’organisation de la vie religieuse et à l’enregistrement officiel des communautés religieuses ce qui en freina le développement. Ce réveil religieux, tous les témoignages l’affirment, fut général, massif et spontané. Les fidèles prirent en charge la restauration des églises, leur décoration. Les objets du culte et les icônes soigneusement cachés par des fidèles réapparurent. Des chorales s’organisaient spontanément et chantaient lors des offices en attendant la venue ou le passage d’un pasteur. La liturgie pascale, à la cathédrale d’Alma-Ata a réuni en 1956 selon les estimations les plus modestes plus de 20 000 fidèles tandis que la revue de l’évêque a attiré à l’église du village de Roujany dans le diocèse de Jitomir 3 000 paysans. Ainsi nous pouvons affirmer sans risque de nous tromper que chaque église ouverte au culte groupait en moyenne une communauté de 2 000 fidèles. La capitale Alma-Ata comptait à l’époque trois églises pour 430 000 habitants dont la moitié était d’origine orthodoxe 676 . La ville de Tchimkent en possédait trois également, alors que sa population n’était que de 130 000 âmes. En 1959, selon le recensement, il y avait en Asie centrale environ 600 000 membres de l’Église luthérienne. Il existait alors deux centres religieux principaux, Akmolinsk et Karaganda au Kazakhstan. Dans chacun, les pasteurs ont fondé une toute nouvelle communauté.

L’exemple de Tselinograd peut être caractérisé comme symptomatique de l’évolution du luthéranisme allemand au Kazakhstan dès le milieu des années 1950. La communauté de Tselinograd (anciennement Akmolinsk) est la plus connue des communautés luthériennes au Kazakhstan. Elle existe depuis 1955, gérée dès sa création par le pasteur Eugen Bachmann* 677 . Ce dernier, diplômé du séminaire de théologie de Leningrad, a survécu à la déportation et aux travaux forcés. Il a géré cette communauté jusqu’en 1972. Originaire de Worms, près d’Odessa, son père était un instituteur sacristain tandis qu’un paroissien, Reinhold Müller, aidait le pasteur, notamment lorsque sa maladie l’empêchait de prêcher. En effet, au centre de la vie religieuse des communautés luthériennes réformées, à l’exception du pasteur, se trouvait le sacristain instituteur, un homme qui remplissait deux fonctions. Il était le représentant du pasteur en son absence, pouvait assurer un service religieux, mais aussi les baptêmes, les enterrements, les cérémonies, les cours de religion, les répétitions du chœur. Pendant l’été, il s’occupait de l’instruction religieuse des écoliers avec l’école du dimanche (Sonntagsschule). L’hiver, il prenait en charge l’instruction de la majorité des enfants et des jeunes. Le mercredi et le samedi étaient réservés au catéchisme et les autres jours à l’histoire biblique 678 . Il devait donc avoir reçu une bonne formation pédagogique, notamment pour donner des cours de religion, de chant, de musique, d’allemand. Il devait pouvoir s’occuper d’enfants de 7 à 15 ans. Ainsi, le taux d’analphabètes chez les Allemands du Kazakhstan était faible.

Auprès du pasteur Bachmann, Müller a reçu une véritable formation théologique et biblique. Ainsi, Bachmann l’a ordonné prédicateur de la communauté luthérienne de Tselinograd. Bachmann est parti ensuite le 22 mars 1972 en Allemagne pour des soins médicaux et a pris sa retraite à Korntal près de Stuttgart dans une paroisse évangélique. Müller lui a succédé. Bachmann considérait que Tselinograd était une communauté évangélique exemplaire. Dans cette ville, Bachmann put rassembler une communauté allemande luthérienne dès 1955, ce qui est précoce par rapport aux autres communautés, catholiques par exemple. Bachmann recevait au départ les paroissiens dans son propre logement, qui se révéla rapidement trop exigu. Dès l’automne, il se mit en quête d’un bâtiment plus grand, car l’hiver approchant, il n’était plus envisageable de faire le service à l’extérieur. La paroisse fit donc l’acquisition d’une maison qui avait auparavant abrité deux familles allemandes. L’argent nécessaire à l’acquisition provenait de dons de familles allemandes. La moitié du bâtiment fut transformée en salle de prière tandis que la seconde fut transformée en cure. Le pasteur emménagea le 1er décembre et commença aussitôt le culte dominical et les services religieux. Cependant, la communauté n’était pas recensée et donc pas reconnue d’un point de vue officiel, autrement dit illégale. À la mi-décembre 1955, les paroissiens accompagnèrent le pasteur Bachmann qui se rendait à Alma-Ata afin de procéder à l’enregistrement de leur communauté, mais en vain. Au printemps 1956, l’église ne pouvait plus contenir le nombre grandissant de pratiquants. Tous les paroissiens, et à leur tête un certain Gustav Pidde, décidèrent d’agrandir la salle et se mirent au travail. Pour la Pentecôte, l’agrandissement était terminé.

À l’occasion de la Fête de la Réforme, la communauté invita tous les Frères des environs de Tselinograd, ainsi que ceux d’Ukraine, de la Volga ou du Caucase. Le samedi après-midi était réservé à chaque communauté : les Frères présentaient la situation de leur communauté, parlaient de l’organisation de l’Église luthérienne dans son ensemble. Le soir était réservé aux prières (la salle pouvait d’ailleurs accueillir environ 600 personnes). Le dimanche, les Frères se levaient tôt pour les prières. Dès dix heures du matin était célébré le culte sur le thème de la Réforme. Le pasteur Bachmann en était chargé, aidé du Frère Friedrich Schäfer, venu de la communauté de Karaganda. Le soir, vers 22 heures, la réunion se terminait en extérieur. L’association Gustav Adolf de Leipzig (Gustav Adolf Werk) envoya alors des dons : un harmonium, une icône pour l’autel, un crucifix, des bibles, des livres de chants et d’autres livres religieux, etc. Il est assez étonnant que le matériel soit parvenu à destination. La communauté vivait alors une période décisive (1956-1957). Le pasteur Bachmann a réussi à réunir des communautés autour de Tselinograd pour la grande fête qu’il avait organisée. Après quinze ans d’isolement, la ville et la communauté religieuse nouvellement créée pouvaient enfin fêter une nouvelle ère. Le comité d’aide aux Personnes déplacées luthériennes a autrefois également soutenu la communauté de Tselinograd (par l’intermédiaire de la société biblique du Wurtemberg ou Württembergische Bibelgesellschaft) en envoyant des bibles, des livres de prédication et de chants. Ils furent envoyés directement au pasteur Bachmann et à ses paroissiens, et ce jusqu’au début du combat idéologique antireligieux. Le gouvernement, ayant vent des festivités, envoya rapidement deux officiers pour la régularisation et le contrôle des activités religieuses. Ils interdirent l’utilisation de la salle pour des raisons, officiellement, de sécurité. Afin de ne pas perdre leur communauté, le pasteur et les fidèles missionnèrent une femme à Moscou en mai 1957 auprès du Soviet Suprême afin de procéder à l’enregistrement de la communauté. La demande resta sans réponse. La même personne se rendit à Alma-Ata pour réclamer l’autorisation et la reconnaissance de la communauté. Elle fut rejointe par le pasteur, qui souhaitait régler ce dossier. L’autorisation pour les festivités leur fut donnée mais des contraintes furent établies en contrepartie pour la communauté :

  • le pasteur se vit attribuer pour ses activités pastorales la ville de Tselinograd uniquement ;
  • les cours de religion, le travail religieux des jeunes, les cours pour les candidats à la confirmation étaient interdits ;
  • les œuvres de bienfaisance étaient interdites ;
  • les aides aux autres communautés étaient interdites ;
  • les services religieux étaient interdits aux enfants et aux écoliers ;
  • la croix ne devait pas être placée sur la rue mais devait donner côté cour ;
  • le bâtiment n’était pas reconnu comme lieu de prière.

Malgré toutes ces restrictions, ce fut donc la première communauté allemande religieuse reconnue par l’État soviétique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Par la suite, en 1959, en raison de la propagande politique, une campagne de diffamation fut lancée à l’encontre de Bachmann, notamment au travers des journaux tels que l’Akmolinskaïa Pravda 679 . Cela a fragilisé la vie religieuse allemande locale. Pendant les dix années qui suivirent, donc de 1957 à 1967, aucune autre communauté ne fut recensée officiellement. Les communautés luthériennes recensées sont au nombre de huit à l’époque : trois dans les villes sibériennes de Novossibirsk, Omsk et Tomsk, et les autres en Asie Centrale, et notamment à Tselinograd donc, Alma-Ata, Karaganda (où le pasteur Friedrich Schäfer exerçait son ministère) et Tokmak (en Ouzbékistan). Les communautés non recensées sont les plus nombreuses. Le pasteur Hansen écrit à ce sujet :

‘« C’est un tort envers les très nombreux croyants désirant exercer leur croyance dans le cadre étatique légal que de mettre en avant et d’admirer les membres des communautés non enregistrées, subissant des vexation et punis en raison du maintien des cours de religion et des écoles dominicales, comme les chrétiens les plus sincères (c’est régulièrement le cas da,s certains journaux et magazines de l’ouest). Ces croyants sont reconnaissants de la liberté limitée que leur accorde l’État athée pour vivre leur religion » 680 . ’

On estime qu’au Kazakhstan environ 51 communautés n’étaient pas recensées. Ceci étant, certains pensent que l’on peut multiplier ce chiffre par dix, et notamment J. Schnurr :

‘« Le nombre des communautés non enregistrées qui affichent volontairement leur confession luthérienne est difficilement définissable. On estime pourtant qu’il y a parmi les évangéliques dispersés une centaine de ces communautés, ce que confirment des communiqués de presse comme celui-ci : le secrétaire du P.C. dans le territoire de Koktchetav (Kazakhstan), dans lequel presque 25 % des habitants sont de nationalité allemande, a fait un discours pour l’ouverture d’un séminaire athée devant des Allemands réunis pour l’occasion. Il a loué l’efficacité des fermiers allemands et a souligné leur importance pour l’exploitation économique du nouveau pays, mais a cependant désapprouvé le fait qu’il existait dans le territoire 51 communautés religieuses » 681 . ’

La communauté luthérienne de Tselinograd poursuivit son évolution. Dans les années 1980, le pasteur de la communauté luthérienne de Tselinograd était Rudolf Mann. Sa communauté comptait à la fin des années 1980 environ 300 âmes. L’église (ou Maison des Prières) se trouve aujourd’hui toujours dans la rue Kuibyshev et appartient à la communauté luthérienne depuis 1956. Elle a été rénovée et agrandie 682 . Rudolf Mann œuvrait avec un autre membre actif de la communauté, Eduard Bolender : ils organisaient ensemble des rencontres religieuses, comme celle qui eut lieu à l’été 1988 avec le Dr Gunnar Johan Staalsett, secrétaire général de la communauté luthérienne mondiale, dont le siège est à Genève. Ils étaient en constante relation avec des Allemands établis au Canada et travaillaient surtout les problèmes linguistiques (les Allemands du Canada reconnaissant pour leur part qu’ils connaissent souvent mieux l’anglais ou le français que leur propre langue maternelle). Notons enfin que chaque trimestre, la communauté reversait 500 roubles au fonds soviétique pour la paix.

Ceci étant, dans les années 1980, les laïcs géraient toutes les communautés luthériennes d’Union soviétique. Il n’y avait plus aucun pasteur allemand en U.R.S.S., à l’exception de Bachmann et du pasteur Pfeiffer (décédé en 1972 à Moscou). Sept à dix personnes ont été donc envoyées dans les territoires en tant que prédicateurs laïques 683 . Les principales communautés luthériennes allemandes étaient concentrées dans les villes de Karaganda, Alma-Ata et Tselinograd dont nous avons parlé. Cependant, cette dernière était faiblement fréquentée par les jeunes. Le principal problème que connaissaient ces communautés était le manque de littérature religieuse, notamment de bibles, de nouveaux testaments, de catéchismes, de recueils d’histoire biblique, de livres de chants, de dévotion ou de prédication mais aussi de matériel administratif tel que des formulaires d’obsèques. Il était clair que l’Église au sens large avait besoin d’une organisation centralisée :

‘« Une direction religieuse pour les communautés allemandes évangéliques […] est fondamentalement nécessaire, et notamment dans la République où vit la majorité des Allemands. Le cœur de la vie religieuse évangélique est la ville de Tselinograd avec sa communauté luthérienne. Une direction religieuse devrait y être établie ; le gouvernement devrait donc s’efforcer de permettre l’établissement d’une telle direction religieuse » 684 . ’

De plus, il semblait nécessaire de former davantage les pasteurs à la théologie pour que leurs activités soient plus efficaces. L’église de Tselinograd semblait répondre ainsi le mieux aux besoins des fidèles, qui venaient parfois de très loin (parfois plus de 1 000 km) pour intégrer la communauté. La communauté de Tselinograd était ainsi très appréciée :

‘« Que Tselinograd, au Kazakhstan, possède une communauté allemande luthérienne avec un pasteur était un fait connu dans la région rapidement après sa création. Cette communauté fut un point d’attraction pour tous les nombreux chrétiens évangéliques de près et de loin » 685 . ’

L’Union mondiale luthérienne (LWB ou Lutherischer Weltbund) et la communauté de Tselinograd ont été en contact dès la création de la communauté par l’intermédiaire du pasteur Bachmann. Ce sont ces relations qui ont poussé le gouvernement soviétique à s’intéresser à la communauté de Tselinograd. Pendant l’été 1965, une délégation de la LWB, sous la direction du secrétaire général le Dr Paul Hansen, vint à Moscou afin d’obtenir l’autorisation de se rendre dans la communauté de Tselinograd. L’autorisation fut d’abord donnée, sous haute surveillance des autorités. La communauté kazakhe prépara une cérémonie de grande ampleur pour l’arrivée de la délégation. Tous les villages allemands environnants furent prévenus de l’arrivée de la délégation et s’y préparèrent. Une autorisation exceptionnelle pour un service religieux fut donnée, bien que ni la communauté ni les maisons ne fussent recensées et donc reconnues. En fait, les autorités veillaient à ce que tout soit fait pour que les membres de la délégation voient dans quelles (bonnes) conditions vivaient les citoyens allemands soviétiques.

‘« L’amical président nous a mis son automobile à disposition afin que nous puissions nous rendre aussitôt dans les villages choisis pour la visite et y donner aux dirigeants des communautés les recommandations nécessaires. Une représentation de l’administration de l’État nous accompagna afin de clarifier, le cas échéant, la position du gouvernement auprès de l’administration des villages, qui pourraient certainement s’horrifier de ces extraordinaires libertés accordées aux croyants. Tout ce qui était prévu pour les communautés des villages fut effectué ce jour-là, au grand étonnement et à la grande joie des membres des communautés […]. À Tselinograd même, nous, les membres de la communauté, le conseil religieux, la paroisse, nous mîmes aux préparatifs afin de recevoir dignement nos invités de Genève et de rendre leur séjour le plus agréable possible. Comme notre salle de prière ne pouvait accueillir à elle seule le nombre prévu de visiteurs, une grande tente devait être mise en place. Nous invitâmes quelques familles, qui appartenaient à la communauté, à décorer leurs logements, afin d’accueillir correctement les invités » 686 . ’

Si les autorités moscovites avaient au départ accepté cette venue, les autorités locales (en l’occurrence le Parti) refusèrent au dernier moment l’arrivée de la délégation, sans invoquer aucune raison.

L’église de Tselinograd, aussi symptomatique soit-elle de la situation, n’est pas l’unique communauté luthérienne. Les luthériens sont aussi présents à Alma-Ata : Otto Palmer était l’un des représentants de la communauté luthérienne à la fin des années 1980. Avec 31 ans d’expérience, il dirigeait les communautés luthériennes (assez conséquentes en nombre avec un millier de croyants) bien que sa profession principale fut mécanicien - monteur. Le service religieux, bi-hebdomadaire, se faisait dans une salle de prières réservée. Les luthériens fêtaient Noël, le Nouvel An, Pâques, la Pentecôte, la fête de la moisson. Pour les jeunes, communions et confirmations y étaient célébrées. Peu de jeunes participaient aux services religieux, aux messes. Les fêtes au contraire attiraient du monde, par goût des cérémonies, des cantiques et de la musique religieuse. Le service se faisait en allemand. Dans les pays d’Europe de l’Ouest, les radios, comme la Deutsche Welle, répandaient l’idée qu’il était impossible aux Allemands d’Union soviétique de pratiquer leur religion, de suivre des services religieux, de se réunir, de lire de la littérature religieuse et que les croyants et pratiquants étaient persécutés. Otto Palmer s’est longtemps insurgé contre ces préjugés, expliquant que cela ne l’a jamais concerné, pas plus que la plupart des autres Allemands depuis les années 1960. Les droits des croyants sont respectés et protégés par l’État. Otto Palmer a prétendu avoir toujours eu de bons contacts avec les soviets. Il affirme s’être également rendu plusieurs fois à Moscou pour des lectures religieuses en allemand.

Notes
671.

Plusieurs mouvements issus du protestantisme sont présents en Asie centrale dès la seconde moitié du XIXe siècle, tels les mennonites, les baptistes, les adventistes du septième jour ou encore les pentecôtistes. Composés pour une large part d’Allemands, ces mouvements avaient commencé à pénétrer en Russie au siècle précédent sous l’impulsion des immigrants allemands. Nombre d’entre eux entre temps choisirent l’émigration et d’autres descendirent vers les marges de la Russie (parce que ce qu’on leur avait promis sur place n’avait pas été accordé). En Asie centrale, ces communautés contribuèrent à la colonisation par le peuplement : appréciées pour leurs capacités de mise en valeur des terres, elles bénéficient d’une plus grande tolérance dans la région que dans le reste de la Russie, malgré les protestations de l’Église orthodoxe. Les persécutions staliniennes changèrent cette situation. Nombre de pasteurs prédicateurs et adeptes furent envoyés dans les camps. Après 1945, désireuses de contrôler ces mouvements encore actifs et qui avaient fait des adeptes parmi les orthodoxes, les autorités soviétiques ont voulu les regrouper dans l’Union des Chrétiens évangélistes et baptistes. Elles tentèrent d’y faire entrer les mennonites ainsi que les pentecôtistes. Cette union provoqua des divisions et eut pour conséquence d’affaiblir les mouvements autres que baptistes dont, dont beaucoup n’avaient pas d’édifices de cultes. Les adventistes du septième jour refusèrent d’entrer dans l’« Union ». L’éclatement de l’U.R.S.S. et la liberté religieuse relative qui en résulta donnèrent à ces mouvements un regain d’activité qui inquiéta l’Église orthodoxe. Cette dernière, aux côtés du clergé musulman, tente de faire pression sur les autorités des républiques afin de limiter leur prosélytisme devenu particulièrement actif et efficace. Cf. B. PINKUS, I., FLEISCHHAUER, Die Deutschen in der Sowjetunion, Baden-Baden, 1987, p. 250.

672.

Voir ANNEXE XLIV.

673.

« Die neue inoffizielle katholische Diaspora » = expression utilisée par Walter Kolarz dans son ouvrage Die Religionen in der Sowjetunion et reprise par J. SCHNURR, Die Kirchen und das religiöse Leben der Russlanddeutschen, Katholisher Teil, 1980, p. 112.

674.

A. BELINSKY, « Kommentar zur Novelierung der Verordnung vom 8. 4. 1929 Über religiöse Vereinigungen », in Religion und Atheismus in der UdSSR, Monatlicher Informationsdienst, n°4, Munich, 1976, p. 103 : « Eine religiöse Gesellschaft und eine Gruppe von Gläubigen können mit ihrer Tätigkeit erst beginnen, wenn die Gesellschaft und Gruppe in der Kommission zur Prüfung religiöser Fragen beim betreffenden Stadtsowjet oder Rayonexekutivkomitee registriert sind ».

675.

Selon J. R. SCHAFAREVITCH, Sakonodatel’stvo o religyj v SSSR (Loi fondamentale régissait la religion en U.R.S.S.), Paris, 1973, 60 p.

676.

« Parvenue dans les steppes kazakhes puis dans le reste du Turkestan avec la colonisation russe aux XVIIIe et XIXe siècles, l’Église orthodoxe eut pour rôle de préserver les valeurs religieuses nationales au sein des armées russes et parmi les colons qui s’installaient sur ces terres nouvelles. Le culte a d’abord été célébré dans les églises ambulantes puis dans les nombreux édifices construits dans toute la région jusqu’à la Révolution. L’Église orthodoxe d’Asie centrale fut organisée en éparchie (évêché) en 1871 et ouvrit une « mission anti-musulmane » dans les steppes kazakhes puis dans le gouvernement du Turkestan (Missions orthodoxes). Les communautés orthodoxes (clergé et laïcs) ont subi les persécutions du régime soviétique, en particulier dans les années 1930 sous Staline puis au cours de la campagne antireligieuse lancée par Khrouchtchev dans les années 1960. Durant cette période, elle reste cependant un vecteur de l’identité russe, s’affirmant, tant face à un État athée que face à un milieu majoritairement musulman. Les orthodoxes représentent aujourd’hui encore la première minorité religieuse d’Asie centrale, bien qu’ils subissent la concurrence d’autres Églises et confessions chrétiennes, en particulier des mouvements d’obédience protestante », in Guide culturel des Juifs d’Europe, Paris, 2002, p. 231.

677.

Le pasteur Eugen Bachmann, sorti du séminaire de pasteurs de Leningrad et ancien élève de l’évêque Artur Halmgren, est arrivé à Akmolinsk en 1954. Depuis janvier 1956, il s’est occupé des paroissiens et dès 1957, le 28 juillet, sa communauté fut enregistrée par les autorités. Les paroissiens étaient en charge de l’entretien de la salle qu’ils avaient transformée en salle de prière.

678.

H. Roemmich, « Die Evangelisch-lutherische Kirche in Russland unter der Sowjetherrschaft », in Heimatbuch 1962, 1962, pp. 105-106 : « Am Sonntag begann der Gottesdienst um 9 Uhr mit der Taufe. Danach war Konfirmation. Es hatten sich über 100 Konfirmanden gemeldet, es traten aber noch viele herzu, die nicht die Möglichkeit gehabt haben, sich vorher zu melden und vorzubereiten. Die Mehrzahl ist verheiratet und hat schon mehrere Kinder, es waren aber auch Kinder dabei. Es war eine geräumige Scheune und davor ein großes Zeltdach gemacht, alles mit Kiefergrün und schön gemalten Sprüchen geschmückt, und doch war es so voll, dass ein Teil der Konfirmanden den langen Gottesdienst durch standen. Nach so vielen Jahren hörte ich wieder wunderschönen Chorgesang, und die Lieder wurden nach den Melodien gesungen wie zuhause. Ihr könnt Euch gar nicht vorstellen, wie erhebend es war, der brausende Gemeindegesang (die Lieder werden vorgesagt, da es doch fast keine Gesangbücher gibt), die wunderschönen Ansprachen : an die Eltern und Taufpaten, dann am die Konfirmanden, dann an die Abendmahlsgäste, dann zur Trauung. Welch eine Geisteskraft gehört dazu, um einen Gottesdienst von 9 Uhr morgens bis 4 Uhr nachmittags zu halten in überfülltem Raum und dann noch Krankenabendmahl und von Anfang bis zu Ende auf der Höhe zu sein. […] Erst wurden die Konfirmanden aufgerufen, die sich vorbereitet hatten, dann hieß es : möchte noch jemand herantreten ? Es ist doch die Not der Zeit. […] Es waren so viele Abendmahlsgäste und so eng, dass es schien keine Ende zu nehmen ».

679.

Cf. Deutsche Allgemeine Zeitung, n° 3, 1994.

680.

J. SCHNURR, Die Kirchen und das religiöse Leben der Russlanddeutschen, Evangelischer Teil, 1980, p. 59 : « Die Mitglieder der nichtregistrierten Gemeinden, die wegen Abhaltens von Religionsunterricht und Sonntagsschulen schikaniert und bestraft werden, als die aufrichtigsten Christen hervorzuheben und zu bewundern – wie es ständig in gewissen westlichen Zeitungen und Zeitschriften geschieht-, ist ein Unrecht den vielen, vielen Gläubigen gegenüber, die ihren Glauben im Rahmen der Gesetze ihres Staates ausüben wollen. Sie sind dankbar auch für die begrenzte Freiheit, die ihnen vom atheistischen Staat für ihr kirchliches Leben gewährt wird ».

681.

« Die Zahl der nicht registrierten Gemeinschaften, die sich bewusst zur lutherischen Konfession bekennen, lässt sich auch nicht annähernd feststellen. Dass es aber unter den zerstreuten Evangelischen Hunderte solcher Gemeinschaften gibt, bestätigen auch Pressemeldungen wie die folgende : der Sekretär der kommunistischen Partei im Gebiet Koktschetaw (Kasachstan), in dem fast 25 % der Einwohner deutscher Nationalität sind, hielt vor hundert zu einem atheistischen Seminar versammelten Deutschen die Eröffnungsrede. Er lobte die Tüchtigkeit der deutschen Bauern und unterstrich ihre Bedeutung für die wirtschaftliche Erschließung des Neulandes, tadelte jedoch den Umstand, dass im Gebiet 51 religiöse Gemeinschaften bestünden », Ibid., p. 53.

682.

Voir photographies en annexe (PHOTOTHEQUE).

683.

Ibid., p. 94.

684.

« Eine Kirchenleitung für die deutsche evangelischen Gemeinden […] ist äußerst notwendig, und zwar in der Republik, in der die meisten Deutschen wohnen. Der Mittelpunkt des evangelischen kirchlichen Lebens ist die Stadt Zelinograd mit ihrer lutherischen Gemeinde. Dort müsste diese Kirchenleitung etabliert werden ; die Regierung müsste dazu bewegt werden, eine solche Kirchenleitung zuzulassen », Id., p. 96.

685.

« Dass in Zelinograd, Kasachstan, eine deutsche evangelisch-lutherische Gemeinde mit einem Pastor bestehe, war bald nach ihrem Entstehen weithin im Lande bekannt geworden. Diese Gemeinde wurde nun Anziehungspunkt für viele evangelische Christen aus nah und fern », Id., p. 97.

686.

« Der freundliche Vorsitzende stelle uns sein eigenes Auto zur Verfügung, damit wir sogleich die für den Besuch auserwählten Dörfer aufsuchen konnten, um den Gemeindeleitern die nötigen Anweisungen zu geben. Ein Vertreter der Stadtverwaltung fuhr mit uns, wohl um gegebenenfalls der Dorfverwaltung, die gewiss über solch unerhörte Freiheiten der Gläubigen entsetzt sein würde, den Standpunkt der Regierung klarzumachen. Alles, was für die Dorfgemeinden vorgesehen war, wurde an diesem Tag, zum Staunen und zur großen Freude der Gemeinden, erledigt. [...] In Zelinograd selbst machen wir uns (Gemeindeglieder, Kirchenrat, Kirchendorf) am die Vorbereitungsarbeiten, um unsere Gäste aus Genf würdig zu empfangen und ihnen den Aufenthalt bei uns angenehm zu machen. Da unser Bethaus allein die zu erwartenden Besucher nicht fassen würde, sollte ein großes Zelt bereitgestellt werden. Einige Familien, die zur Gemeinde gehören, wurden aufgefordert, ihre Wohnungen festlich zu gestalten, um die Gäste entsprechend aufnehmen zu können », Ibid., pp. 107-108.