4 - Choix d’un corpus de « nouveaux romans » parus entre 1532 et 1564

En dépit de la multiplicité des traductions ou adaptations de romans anciens ou importés, il nous semble qu’entre 1532 et 1564, des facteurs historiques, intellectuels et littéraires donnent naissance à un genre narratif innovant. Ces ‘«’ ‘ nouveaux romans ’», s’il faut trouver une étiquette à l’emporte-pièce pour les distinguer de leurs concurrents contemporains, ont ceci de commun, malgré leurs disparités thématiques et stylistiques, qu’ils ne se définissent jamais comme des ‘«’ ‘ romans ’» : ils se veulent précisément autre chose que des récits d’aventures chevaleresques, ancienne ou nouvelle manière. Quels sont-ils ? Nous les avons recensés dans l’Annexe II ; dès le premier coup d’œil, ressort leur modestie quantitative face à la masse des innovations contemporaines dans l’écriture de nouvelles, que nous avons répertoriées pour la même fourchette temporelle que les éditions, imitations et traductions de romans 55 . Nous définirons provisoirement la nouvelle, avec T. Ozwald, comme la conjonction d’un ‘«’ ‘ projet réaliste ’», qui implique la construction d’une vraisemblance psychologique, sociologique et historique du récit, et d’une ‘«’ ‘ dramatisation critique ’», supposant l’intervention d’un événement signifiant qui bouleverse de manière décisive le cours de l’histoire 56 . Sachant que la nouvelle en prose vernaculaire n’existe en France que depuis la fin du XVsiècle et que les premières productions sont essentiellement des traductions du Décaméron, il aurait paru normal que le genre ne prenne que lentement son essor. Or non seulement il suscite un engouement formidable dès les incunables, mais tout se passe comme si la narration brève accomplissait en France presque en un même temps les stades littéraires de la traduction, de l’imitation et de la création. Les ‘«’ ‘ translations ’» infléchissent toujours l’évolution globale du genre : du temps de Boccace à celui d’A. de Guevara et P. Mexía puis de celui de Bandello à celui de Cervantes et M. de Zayas, donc entre 1412 et 1640, la nouvelle française hésite successivement entre la nouvelle-fabliau, à l’image des Quinze Joyes de mariage, l’histoire tragique, francisée fidèlement par P. Boaistuau puis librement par F. de Belleforest, et la nouvelle romanesque sur le modèle de la novela corta. Elle ne trouvera une forme proprement nationale qu’après l’avènement de Louis XIV, étant traitée sur le mode historique et galant ; nous l’avons dit plus haut, elle deviendra alors, sous la plume de M.-M. de Lafayette, Saint-Réal et Boursault, un substitut du roman. Cela n’a cependant pas empêché des conteurs du XVIsiècle de créer de véritables recueils français : ce sont, entre autres, les Propos rustiques, les Comptes du Monde adventureux, les Nouvelles Recreations…, les Contes et discours d’Eutrapel et l’Heptameron. Entre 1550 et 1560, la vitalité du genre narratif bref atteint un sommet, par la multiplication des publications originales et de collections de contes antérieurs. Est-ce à dire, comme le fait M. Jeanneret, que cette hégémonie du récit bref a conduit à la ‘«’ ‘ vacance des grandes sommes narratives’ 57  », tels le roman et le poème héroïque ? Au moment où l’Italie, principalement, continue à construire d’amples machines épiques et courtoises, la France aurait-elle jeté son dévolu, faute d’énergie créatrice, sur la seule nouvelle, au point d’assécher sa source d’Hippocrène pour les auteurs souhaitant cultiver un genre ancré dans sa tradition littéraire ?

Certes, le roman qui prend forme à la Renaissance impose au lecteur une initiation au déchiffrement des signes verbaux et entretient en cela un rapport privilégié avec les nouveaux modèles herméneutiques présents à la même période dans d’autres formes de fictions. Mais nous voudrions montrer, comme le reconnaît M. Jeanneret, que ‘«’ ‘ le roman continu peut aussi faire retour sur lui et inclure sa propre interprétation ’», devenir ‘«’ ‘ un laboratoire où s’expérimentent différents modes de lecture ’» 58 , en usant d’autres moyens que celles-ci. Pour élaborer notre corpus d’étude, nous nous sommes appuyée sur les quelques indications fournies à ce sujet par ce critique et par C. de Buzon et sur un précieux article d’A. Lorian consacré à une typologie des romans écrits entre 1450 et 1560 59 . La conscience de l’entrée de l’œuvre romanesque dans la logosphère, dans le monde de la parole ambiante, nous l’avons d’abord vue dans la production rabelaisienne, qui s’échelonne sur une trentaine d’années 60 . Dans Les horribles et espoventables faictz et prouesses du tresrenommé Pantagruel vendu à la foire d’automne de Lyon, probablement en 1532, puis La vie inestimable du grand Gargantua, pere de Pantagruel, a priori rien de bien novateur : ces ‘«’ ‘ chroniques ’» se placent dans la droite ligne du roman médiéval adapté par les imprimeurs à un public populaire, sur le modèle de livrets comme les Grandes et inestimables Cronicques du grant et enorme geant Gargantua. De fait, le succès remporté par ces œuvres tient à la parenté certaine du trajet éducatif suivi par deux géants et de celui des récits de formation. Le ton employé par le narrateur Alcofribas Nasier, anagramme pas nécessairement transparente dans les années 1530, est celui du boniment de camelot : il veut, dans le ‘«’ ‘ Prologue de l’auteur ’» de Pantagruel, offrir une médecine du rire et se pose un peu comme un compilateur anonyme s’effaçant devant une matière ancienne. Or ces deux œuvres, et les trois suivantes a fortiori, qui délaissent l’itinéraire chevaleresque, détachent thématiquement la légende gargantuine du cycle de la Table ronde : le héros principal, le fils puis son père, cesse d’être un géant naïf au service du roi Arthur pour devenir un individu emblématique des valeurs de civilisation de la Renaissance et parcourir des aventures intellectuelles, bien étrangères aux seules ruses de guerre bon enfant dont son prototype était capable. Par ailleurs, les personnages de ces textes se mettent à discuter, tantôt à la manière des convives de Platon, tantôt comme dans les dialogues de Lucien. Plus généralement, les niveaux d’interférence entre le récit et diverses formes de commentaire se démultiplient à l’infini par le biais d’emprunts faits constamment à d’autres genres : ce peuvent être la vita d’un saint, l’histoire, la nouvelle, le fabliau, l’épopée antique, les mises en prose de la chanson de geste ; interviennent plus ponctuellement d’autres genres non nécessairement narratifs, comme des extraits de traités juridique, philosophique ou ésotérique, ou encore la lettre et le poème ; des modes énonciatifs, comme le dialogue, la description, le lyrisme ou l’explication didactique, sont en permanence convoqués, ainsi que bon nombre de parlers sociaux du temps. La poétique du mixte s’intensifie au niveau de la structure globale du Tiers livre et du Quart livre : le style ‘«’ ‘ copieux ’» passe au premier plan d’un récit qui, ballotté entre les divers discours qu’il restitue, ne parvient plus conjointement à s’achever sur le plan narratif. Panurge interroge des sages et des moins sages sur la question de l’avenir de son mariage, de sorte que le rythme question-prédiction-interprétation-réfutation impose un schéma discursif qui tient lieu de trame romanesque. Si l’aventure revient au premier plan en 1548, le récit du voyage de Pantagruel et de ses amis en quête de l’oracle de la Dive Bouteille ne s’achèvera qu’à la fin du Cinquiesme livre, et sur un mot énigmatique. Nul doute que Socrate, figure tutélaire de Gargantua, en tant qu’individu qui parle et donne la parole, ne veille sur l’ensemble de ces compositions : la structuration linguistique des romans semble déterminer un parcours initiatique pour le lecteur, appelé à mesurer l’écart entre les signes avec lesquels chaque individu se représente la réalité. La déstabilisation langagière du lecteur se produit dans une autre fiction qui fait également le choix d’un traitement humoristique du récit. Publiée anonymement vers 1550, pour l’essentiel de ses chapitres, la Mythistoire barragouyne de Fanfreluche et Gaudichon n’a pas été attribuée à Guillaume des Autels avant la fin du siècle 61 . On pourrait ne voir dans ce texte que l’une des imitations serviles des romans rabelaisiens. Le récit à la troisième personne, fait par un serviteur, suit pas à pas le déroulement de Pantagruel : il présente la naissance, les études et la période de maturité des héros Fanfreluche et Gaudichon. La reprise des romans médiévaux, de l’épopée, le détournement de différents genres s’insinuent dans la matière des dix-huit chapitres. Or ce roman nous intéresse en ce qu’il est plus qu’un pastiche des Livres précédents 62  : il prend acte des mutations du genre en proposant, à la différence de son modèle, l’histoire de Dame Fanfreluche et de son ami, amants anti-courtois, et en ôtant d’emblée la dimension gigantale aux personnages.

Deux autres romans nous paraissent lier intrinsèquement problèmes formels et brouillage interprétatif : il s’agit des Angoysses douloureuses qui procedent d’amours d’Hélisenne de Crenne etd’Alector, ou le Coq de Barthélemy Aneau 63 . Sans entrer dans le débat sur l’identité réelle cachée derrière le pseudonyme Hélisenne de Crenne, nous pouvons affirmer que les Angoysses sont aujourd’hui reconnues comme ‘«’ ‘ notre premier roman sentimental’ 64  ». Publiées dès 1538, elles s’inscrivent dans la lignée des romans d’amour italiens, surtout Fiammetta et Il Peregrino : la première partie se présente sous la forme de la confession brûlante d’un je féminin dévoré par une passion adultère ; cela donne lieu à des passages élégiaques imités d’Ovide, lyriques à la manière des multiples recueils contemporains de poésie qui développent le thème de l’amour cruel, et enfin pathétiques sur le modèle de Boccace et de Caviceo. Mais H. de Crenne se distingue de ces multiples sources en adjoignant deux parties à cette pseudo-autobiographie : elle fait emprunt de passages conventionnels au roman de chevalerie en convertissant le drame tout intérieur d’une âme en récit des exploits guerriers de l’amant Guénélic et de son ami Quézinstra. L’ouvrage s’achève sur le testament spirituel de l’héroïne qui, sur le mode didactique, invite son ami à la repentance et à la conversion de son amour charnel en amour de Dieu. Quand nous aurons dit qu’Y. Giraud classe les Angoysses parmi les romans partiellement épistolaires du XVIsiècle, on aura compris que la facture de cet ouvrage est hétérogène et que les deux dernières parties, loin d’être un obstacle à sa cohérence, participent à son originalité romanesque. Nous prenons d’emblée le parti  mais nous y reviendrons  de ne pas rapprocher trop vite le Melicello, texte peu connu de J. Maugin, ni l’Amant resuscité de la mort d’amour de Théodose Valentinian, pseudonyme probable de N. Denisot, paru en 1557, des Angoysses. Ce dernier roman est, certes, caractérisé en partie par un principe d’écriture mixte : à un prologue d’aventures maritimes fait suite un récit enchâssé des amours malheureuses d’un Français mourant ; la résignation finale de celui-ci à la vie, après sa narration, constitue une brève conclusion. Or les débats sur la folle et la parfaite amour, les citations bibliques, les réflexions des philosophes, des historiens ou des jurisconsultes sont un matériau assez mal relié à l’affranchissement spectaculaire final du personnage de toute affection terrestre. L’agencement des constituants romanesques paraît nettement simplifié et artificiel par rapport au roman d’Hélisenne ; alors que celui-ci multiplie les emprunts textuels, tout en les réduisant le plus souvent à une phrase, les digressions sont longues ici et elles détonnent sur le fond dépouillé de la trame. Nous nous pencherons, en revanche, sur le cas d’Alector qui, en 1560, prolonge la voie ouverte par les romans précédents. Tout en rapportant le parcours initiatique d’un jeune descendant de la dynastie des Gals, cette ‘«’ ‘ Histoire fabuleuse ’» se dégage du roman de chevalerie merveilleux et des systèmes de réécritures à l’intérieur de cycles reconnus. Tôt dans le siècle, J. Lemaire de Belges avait présenté avec ses Illustrations de Gaule et singularitez de Troye, dédiées à Charles Quint, l’évolution imaginaire de la lignée royale celte jusqu’à son devenir franc et germain en multipliant les emprunts à l’épopée homérique, aux annales anciennes et de son temps et à la fiction mythologique. Il avait, le premier de son siècle, dégagé le roman de la narration longue du roman de chevalerie 65 . Aneau est l’héritier, peut-être facétieux, de cette forme d’historiographie en même temps que des ‘«’ ‘ croniques ’» rabelaisiennes : il crée un récit historiquement faux pour proposer une réflexion philosophique et politique ; il semble que son héros civilisateur était appelé dans un second livre à regagner la Gaule et à se métamorphoser en coq. Mais Alector est resté inachevé et dans ce texte, la volonté de donner une explication du monde matériel et divin ne va pas sans un certain scepticisme, qui se dévoile en partie dans la substitution du narrateur unique d’un récit linéaire à la technique des points de vue. Dès lors, la superposition des niveaux de sens et des tons utilisés brouille constamment le déchiffrement de la fiction et la saisie de sa facture compositionnelle.

Cette sélection de huit romans innovants ne va pas sans poser de problèmes : il demeure évident qu’une proximité particulière s’établit au XVIsiècle entre le genre romanesque et d’autres formes très proches, dans leur rapport tant à la fiction qu’à la compilation de matériaux empruntés. Les liens entretenus par le roman et la mythographie, la nouvelle ou le dialogue lucianique sont tels que nous rapprocherons de nos textes d’étude plusieurs œuvres contemporaines. Le travail que nous entreprenons consistera en partie à affiner les points de passage entre ces modes d’écriture. Pour l’heure, quelle cohérence pouvons-nous donner aux nouveaux romans pour qu’ils constituent, en dépit de leurs disparités, un ensemble homogène ? Celle-là même de leur hétérogénéité, on l’aura compris…

Notes
55.

Cette chronologie succincte a été réalisée à partir des bibliographies proposées par Les Origines du roman réaliste de G. Reynier, Genève, Slatkine Reprints, 1969 [1ère éd. Paris, 1912], pp. 336-340 et par les Nouvelles françaises du XVI siècle. Images de la vie du temps de G.-A. Pérouse, op. cit., pp. 502-527. Elle n’a mentionné que les recueils de nouvelles ou de contes qui paraissent essentiels à ces spécialistes pour la constitution du genre. Des ouvrages aussi riches que les Cent Nouvelles nouvelles de P. de Vigneulles ou le Grand Parangon des Nouvelles nouvelles de N. de Troyes, achevés respectivement en 1515 et 1536, n’ayant pas été imprimés, n’apparaissent pas. De même, pour rendre valable la confrontation proposée, nous nous sommes refusée à inventorier les nombreuses traductions des contes italiens, allemands puis espagnols. Il suffit de rappeler que les Cent Nouvelles de Boccace, traduites en 1485 par L. du Premierfait, sont réimprimées au moins sept fois avant les dix-huit éditions de la version qu’en donne A. Le Maçon en 1545. Le Pogge est aussi très réutilisé, en particulier dans la compilation lyonnaise de 1531, le Parangon de Nouvelles honnestes et delectables, qui recourt par ailleurs à la grasse plaisanterie des Aventures de Til Eulenspiegel. Cette dernière, pas plus que Les Facetieuses Journées de G. Chappuys, n’a paru assez originale pour nous intéresser ici.

56.

La Nouvelle, Paris, Hachette, « Contours littéraires », 1996, pp 34-35.

57.

Le Défi des signes. Rabelais et la crise de l’interprétation à la Renaissance, Orléans, Paradigme, « L’atelier de la Renaissance », 1994, p. 54.

58.

Ibid., p. 62.

59.

Nous renvoyons aux trois références suivantes : Le Défi des signes…, ibid., p. 54, où M. Jeanneret reconnaît des romans originaux dans les Angoysses douloureuses d’H. de Crenne, Alector de B. Aneau, Amadis et, en partie, la séquence romanesque de Rabelais, dont il est tenté d’exclure le Tiers livre et le Quart livre parce que leur mode de composition par accumulation n’aurait « plus grand chose à voir avec le déroulement chronologique d’un roman » (p. 55) ; l’introduction de C. de Buzon aux Angoysses douloureuses…, Paris, Champion, 1997, p. 39, fait état de l’exception que constituent les « chroniques de Rabelais », le « roman-fleuve d’Amadis, les Angoysses, l’Amant resuscité de la mort d’amour [de N. Denisot], l’Histoire palladienne [de C. Colet] et Alector [de B. Aneau] » ; quant à A. Lorian, dans « Vieux roman, roman nouveau et anti-roman à la Renaissance », Travaux de Littérature, Paris, Klincksieck, n° 7, 1994, pp. 53-64, il recense neuf romans sur la période indiquée, à savoir Jehan de Saintré, Le romant de Jehan de Paris, les œuvres de Rabelais, les Angoysses, Amadis, l’Amant resuscité, la Mythistoire barragouyne… de Des Autels, Daphnis et Chloé traduit par Amyot et Alector.

60.

Quoique l’édition princeps de Pantagruel ne porte pas de date, la mise à l’index des pouvoirs catholiques et l’anathème de Calvin n’ont pas empêché qu’il soit publié au moins dix-sept fois du vivant de Rabelais, c’est-à-dire jusqu’en 1553. Gargantua, également non daté, a dû paraître au début de l’année 1535 et a connu neuf autres éditions durant la même période. Douze ans plus tard, le Tiers livre renouvelle le genre de la chronique rabelaisienne ; onze rééditions suivront. Une publication partielle du Quart livre a lieu en 1548, mais la version complète date de 1552 : la première connaît trois éditions du vivant de Rabelais et la seconde, pas moins de neuf en deux ans ! Suivant les analyses de M. Huchon, nous considérerons le Cinquiesme livre de 1564 comme un ouvrage, certes apocryphe, mais composé par des éditeurs à partir de brouillons perdus écrits de la main de Rabelais. Nous utiliserons comme base de travail les textes proposés dans l’édition de M. Huchon et de F. Moreau : Œuvres complètes, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1994.

61.

Si l’on n’a retrouvé trace que des éditions de 1574, parue à Lyon chez J. Dieppi, et de 1578, parue à Rouen chez N. Lescuyer, l’étude des références historiques du roman a établi que l’édition princeps datait peut-être de 1550 et que la parution de 1578 pourrait en être la cinquième réimpression. L’édition moderne étant encore en préparation, la Mythistoire est aujourd’hui accessible dans le reprint de l’édition de 1578 qu’en a donné M. Françon en 1952, publié à Cambridge (Massachusetts) aux éditions Schoenhof’s Foreign Books ; dans la mesure où il ne présente pas de variations notables avec l’élégante édition lyonnaise, que nous avons consultée dans la réimpression d’A. Veinant de 1850, il servira de texte de référence pour notre étude. Il est regrettable que l’accès actuellement difficile au roman soit si peu en rapport avec le succès qu’il a rencontré en son temps.

62.

G. Reynier, dans ses Origines du roman réaliste, op. cit., p. 195, recense « quelques essais d’imitation directe » des romans de Rabelais : le Disciple de Pantagruel et la Mythistoire, où il ne voit, « entre des parodies peu spirituelles et beaucoup d’obscénités, que quelques traits de mœurs relatifs à la vie des Écoles ».

63.

Alector n’a connu qu’une édition, en 1560, tandis que les Angoysses ont eu quatre éditions séparées entre 1538 et 1541. En 1543, celles-ci sont intégrées aux Œuvres de Ma Dame Helisenne ; après une réimpression en 1544, elles sont revues et corrigées avec le consentement de l’auteur par C. Colet en 1551 ; cette nouvelle édition connaît trois rééditions de 1553 à 1560. Dans la suite de cette étude, nous nous référerons à l’édition des Angoysses douloureuses de C. de Buzon présentée plus haut et à celle de M. M. Fontaine : Alector, 2 t., Genève, Droz, « Textes littéraires français », 1996, t. I.

64.

Reynier, Le Roman sentimental…, op. cit., p. 11. Les spécialistes hésitent encore entre l’assimilation du pseudonyme à Marguerite Briet de Crenne, qui est par ailleurs l’auteur des Epistres familieres et invectives et du Songe de Madame Helisenne, et le parti pris de la facticité d’un nom qui servirait à masquer le travail collectif de plusieurs rédacteurs.

65.

Alors que G. Reynier refuse de concevoir cet ouvrage monumental comme un roman d’amour (Le Roman sentimental…, op. cit., pp. 13-14), l’équipe de J.-P. Guillerm n’hésite pas à en faire un précurseur du roman pastoral français (Le Miroir des femmes…, op. cit., pp. 95-96), en particulier par le long récit enchâssé des amours de Pâris. Dans son ensemble, il relève plutôt de la chronique  qui n’était pas alors tenue à une vérité factuelle, mais idéologique  et de la mythographie. Mais les Illustrations de Gaule rejoignent le projet politique de plusieurs romans de l’époque, comme les traductions françaises d’Amadis et du Roland furieux.