2 - La traduction : assimilation d’un langage romanesque préexistant

Attachons-nous à présent au cas spécifique de la traduction, indépendamment des thématiques romanesques sur laquelle elle porte. La conception qu’en donnent les praticiens en tête des romans  essentiellement de thématique chevaleresque  importés de l’étranger a la particularité de mettre au jour le fait que l’appropriation voire la transformation d’un modèle relève d’un travail sur la langue plutôt que sur des idées. En dépit des disparités entre les démonstrations exposées dans les différents textes liminaires, les romanciers-traducteurs de la Renaissance s’auto-définisent comme des ouvriers du langage : ils entendent démontrer par leurs réalisations la richesse et la maturité de l’idiome national. Contrairement à certaines positions théoriques de leurs contemporains, qui estiment que la traduction ne peut servir à l’illustration de langue française 354 , ils choisissent de donner une représentation idéalisée des performances de celle-ci.

Le premier impératif que se fixent les translateurs de romans est de n’être pas de mauvais traducteurs, ce en quoi ils rejoignent un postulat partagé par tous les théoriciens de la traduction. Cela implique, d’abord, de leur part un aveu de l’origine du texte proposé au public, donc une présentation de certaines données matérielles ou historiques : ils dévoilent sa provenance, son auteur, s’il est connu, et l’existence éventuelle de translateurs antérieurs du texte, voire de collaborateurs auxquels ils ont eu recours. Le titre des traductions de romans grecs est ainsi fort long : il rend compte du phénomène de migration de la matière grecque vers la prose latine ou italienne, puis vers la prose française 355 . Une des raisons alléguées pour la parution d’une nouvelle traduction est la nécessité de poursuivre un travail inachevé ou de corriger les erreurs des précédentes versions. La genèse du Premier livre de Palmerin d’Olive et des livres VII, VIII et IX de l’Amadis français est ainsi largement circonstanciée. Jean Maugin signe la traduction du premier en 1546 et affirme qu’il a été averti qu’Herberay en a traduit quelques cahiers ; cela le découragea d’abord d’entreprendre lui-même ce travail 356 . C’est dans un second temps qu’il mentionne l’existence d’un autre arrangement, qu’il a eu en sa possession mais dont il ignore l’auteur ; il aurait corrigé ce texte à grand peine, comme le signale le sous-titre du roman : ‘«’ ‘ Histoire plaisante et de singuliere recreacion, traduite jadis par un auteur incertain de Castillan en françoys, lourd et inusité, sans art, ou disposicion quelconque. Maintenant revuë et mise en son entier en nostre vulgaire, par Jean Maugin ’». L’histoire de la publication d’Amadis de Grece n’est pas moins tortueuse. Elle s’inscrit d’abord dans la longue durée : Herberay serait allé chercher l’original en Espagne en 1524, ce qui suppose qu’il a commencé à le traduire avant les livres d’Amadís de Gaula, rapportés deux ans plus tard par le roi ; c’est la traduction du sixième livre de la série, portant sur la destinée de Lisuart de Grèce, le père du héros, qui l’aurait amené à faire publier cette suite 357 . À la fin de sa dédicace, Herberay annonce qu’il possède encore ‘«’ ‘ aux Essars [l’histoire] d’un sien filz, nommé don Florisel de Niquée ’». Le cycle romanesque s’alimente donc de lui-même, si ce n’est qu’après 1548 Herberay, fortement affecté par la mort de sa femme, cesse de s’attacher à des livres frivoles : il donne encore le premier livre de Flores de Grece en 1552, mais renonce à la traduction de Palmerin d’Olive et de Florisel de Niquée. Quant au Neufiesme livre d’Amadis de Gaule, il est mis en français en 1551 par G. Boileau de Buillon, mais de manière très imparfaite, ce qui fait évoquer à C. Colet, auteur de la version révisée de 1553, les motivations véritables des imprimeurs :

‘[…] ayans les Libraires et Imprimeurs fait une espreuve en l’impression de la premiere feuille, et cogneu la mocquerie et perte evidente que ce leur seroit de mettre tel livre et de si grandz coustz en lumiere ainsi mal acoustré à la Françoyse, me prierent d’y mettre la main promptement, le corriger et rendre en nostre parler Françoys, sinon tel que je pourrois bien ayant le temps et loysir, à tout le moins qu’il peust estre entendu, à fin qu’ilz peussent recouvrer les fraiz qu’ilz avoient jà avancez pour l’Impression 358 .’

Sertenas s’est empressé de retirer cette malencontreuse traduction du commerce, mais l’histoire ne s’arrête pas là. Colet s’est livré à un travail intensif, étant ‘«’ ‘ contraint d’en revoir et escrire tous les jours autant que les Imprimeurs en pouvoient depescher ’» ; le résultat lui a semblé finalement si médiocre que, dit-il, ‘«’ ‘ je ne le voulu avouër mien […], ainsi le laissay usurper au Flaman ’». La traduction qui paraît en 1552 est donc signée par Buillon, tout en ayant été revue par Colet ; or des amis du Champenois vont révéler la paternité de la translation, ce qui va l’obliger à proposer l’année suivante un nouvel état du texte, publié cette fois sous son nom… Finalement, on ne sait quelle part du travail attribuer exactement à Colet, la version définitive n’étant peut-être qu’une seconde révision de la traduction de Buillon, aujourd’hui presque introuvable. De manière générale, un peu comme les adaptateurs des poèmes en vieux roman, les translateurs de la Renaissance affichent moins leur volonté de restituer le sens originel du texte, qui se serait corrompu au cours des versions successives, que celle de transcrire avec clarté et élégance la matière narrative dans l’idiome national. De cela nous assurent J. Vincent en tête de son Roland l’amoureux, J. Gohory dans sa dédicace du livre X d’Amadis et T. Sébillet au commencement d’Apollonius de Tyane. Pour ne citer que le dernier, l’essentiel de l’activité du translateur consiste à montrer ‘«’ ‘ à la posterité […] quel estoit […] le plus aisé et communément receu francois idiome, en la court du bon Henri second, roy de France, et en sa cour de parlement de Paris, du temps qu’il régna’ ‘ 359 ’ ‘ ’». La langue du parlement étant considérée à l’époque comme soignée, il s’agit de donner aux lecteurs un exemple de bon usage du français. Plantin fonde même sur l’idée d’une excellence du nouveau style romanesque sa campagne de diffusion à l’étranger des Amadis. En 1561, il destine son édition d’Anvers aux maîtres de français et à leurs écoliers, leur recommandant le texte comme manuel d’apprentissage ; il oppose ‘«’ ‘ l’ordre des mots fort rude et mal ajancés ’» des mises en prose du XVe siècle à l’‘» élégance, douceur et facilité du langage François ’» réalisée dans la prose d’Herberay 360 . Mais la version des huit premiers livres d’Amadis a d’autres qualités que la fixation d’un état temporaire de notre langue : c’est dans ce texte que se réalise la volonté des lettrés des années 1540 de voir se créer un état linguistique idéal, qui réalise à la fois les principes de la pureté et de l’élégance. Qui aurait cru qu’en 1552 Du Bellay participe à l’élaboration de ce mythe, lui qui affirmait trois ans plus tôt que le ‘«’ ‘ labeur de traduire ’» est chose ‘«’ ‘ inutile, voire pernicieuse à l’accroissement de [la] langue ’» ? Peut-être sa position dans la Défense était-elle d’abord dictée par la volonté de s’opposer systématiquement à celle de Sébillet ; quoi qu’il en soit, l’ode qu’il compose pour Flores de Grece fait l’éloge de la pure éloquence française de Des Essars, qui restera telle en dépit de sa corruption prévisible par le temps :

‘Peust estre aussi que les ans
Après ung long et long age
Par estrangers courtizans
Brouilleront nostre langage :
Adoncques la purité
De sa douce gravité
Se pourra trouver icy 361 .’

Le discours de Du Bellay, comme celui des défenseurs d’Amadis, insiste, par ailleurs, sur la victoire de sa douceur du français sur la rudesse du castillan. Il s’agit de faire admettre que la France a l’avantage sur l’Espagne du ‘«’ ‘ bien parler ’», que ‘«’ ‘ la Françoyse elegance ’» surpasse ‘«’ ‘ l’Espaignolle arrogance ’» et d’attribuer à Herberay les ‘«’ ‘ riches fleurs ’» sorties du ‘«’ ‘ translat d’Amadis ’», contre les ‘«’ ‘ orties ’» dont ‘«’ ‘ l’Espaignol ’» est rempli 362 . Outre une flagornerie inhérente au jeu de la dédicace et un contexte de rivalité politique et culturelle entre les pays européens, apparaît ici l’entreprise de démonstration linguistique à laquelle tout un siècle subordonne la traduction de romans étrangers : les doctes de la Renaissance voient dans la prose des traducteurs de fictions, et en particulier dans celle des versions romanesques les plus réussies, la preuve de la richesse et de la maturité de la langue française.

Or dans les appareils liminaires des traductions, cette promotion nationaliste s’avère presque toujours corrélée à un effort d’émancipation du traducteur. Les embellissements du style sont justifiés par l’obéissance du traducteur aux contraintes de son parler naturel ; autrement dit, on motive le changement opéré sur le texte original par l’idée que la transposition exacte d’un système verbal dans un autre est impossible. Qu’en disent les traducteurs eux-mêmes ? J. Vincent explique ainsi qu’il n’a pu ‘«’ ‘ suyvre [Boiardo] mot à mot, sinon d’autant que la phrase du langage Françoys l’a peu soufrir. Toutesfoys, ajoute-t-il, là où je n’auroys rendu toutes les paroles, je pense y avoir gardé le sens’ 363  ». Un tel cas de préoccupation affichée de la signification du texte-source ou de l’intentionnalité de l’auteur primitif semble rare : les traducteurs de romans traitent presque exclusivement la question de leur asservissement à l’original ou des libertés qu’ils ont prises par rapport à celui-ci en termes linguistiques. Prenons, d’abord, le cas des traducteurs qui postulent la nécessaire fidélité à l’original. Il s’agit surtout de Des Gouttes qui, en tant que porte-parole des membres de l’atelier de traduction du Roland furieux, s’avère un partisan de la sujétion langagière. Il blâme ceux qui pensent que le ‘«’ ‘ fidele interprete ne rendra mot pour mot ’» et établit une distinction entre paraphrase et glose, d’un côté, et paraphrase et traduction, de l’autre ; ce faisant, il entend réévaluer le statut de ceux que l’on compare habituellement aux ‘«’ ‘ blanchisseurs de murailles, ou laveurs de tableaux »’ ‘ 364 ’ ‘. ’Le ‘«’ ‘ Translateur ’» a donc suivi l’Arioste ‘«’ ‘ presque tout de mot à mot : tant s’en fault il qu’il ayt obmis un seul traict de sa nayve candeur ». ’Même ici, la proximité avec l’original est conçue comme une façon d’» enrichir son parler (là où il est indigent) de ceste copieuse phrase Tuscane » : l’éditeur revendique, pour les ‘«’ ‘ vocables nouveaux et par ce sentans plus leur sauvaige » ’que le traducteur a été contraint d’inventer, des ‘«’ ‘ lettres de naturalité pour asseurance ’». Mais comment couler notre vulgaire dans le moule du vers italien sans ôter au texte ‘«’ ‘ beaucoup de sa naifveté ’» ? Des Gouttes explique que seule la rime française aurait été de bonne grâce, mais cela eût demandé des années de travail ; pour a part, la prose présente l’avantage d’éviter le trop grand éloignement de la phrase primitive entraîné par les chevilles de la versification et de ‘«’ ‘ traicter et deduire [le] subject » ’fidèlement. Le traducteur a donc choisi la ‘«’ ‘ prolation » ’mais a dû ajouter du liant entre les huitains italiens… En somme, celui-ci a veillé à concilier respect de l’œuvre et réussite de la version en langue vernaculaire, faisant fi de ce que concluront les théoriciens en la matière 365  : le sous-titre du roman annonce que l’Orlando furioso est traduit ‘«’ ‘ partie suyvant la phrase de l’Autheur, partie aussi le stile de ceste nostre langue ». ’J. Martin, dans le ‘«’ ‘ Aux lecteurs » ’du Songe de Poliphile, insiste également sur la performance linguistique réalisée par le précédent translateur, un certain chevalier de Malte qui aurait proposé pour révision son texte à Herberay puis à Gohory ; ceux-ci ayant décliné l’offre, Martin a dû recevoir le texte de Gohory. Le traducteur loue, en effet, le personnage d’avoir éclairci l’original, mêlé de grec et de latin, obscur aux Italiens eux-mêmes : d’une ‘«’ ‘ prolixité plus que Asiatique ’», il l’aurait ‘«’ ‘ reduict à une briefveté Françoise’ ‘ 366 ’ ‘ ’». Si lui-même n’a pas souhaité restituer le texte-source, c’est que son prédécesseur a réussi à venir à bout de la complexité de la phrase toscane ; il s’est contenté de moderniser les graphies et de supprimer les italianismes. Si l’Hypnerotomachia Poliphili a finalement été largement transformée et qu’il est difficile de savoir si J. Martin n’a fait que corriger superficiellement une version antérieure, les modifications opérées par les traducteurs successifs vont toujours dans le sens de la naturalisation langagière du texte de Colonna et du développement des particularités stylistiques de notre langue 367 . Avec l’analyse que J. Maugin donne de sa révision de Palmerin d’Olive, exercice plus délicat en raison du caractère ‘«’ ‘ lourd et inusité, sans art ou disposicion quelconque » ’de la langue de son prédecesseur, l’idée de faire parler ‘«’ ‘ notre naturel » ’au texte étranger s’affirme plus ouvertement encore. La soumission à la trame narrative primitive est seule revendiquée ; ce qui relève de l’adaptation personnelle s’inscrit dans le projet de correction du mauvais langage du ‘«’ ‘ traducteur antique ’» et de démonstration des capacités de l’idiome vernaculaire :

‘[…] je n’ay prins de l’original que la matiere principale, sans m’assujetir aux propoz du translateur antique mal entenduz et pirement poursuyvis. Les discours des affaires ay abregez le plus succintement qu’il m’a esté possible ; les guerres selon leur forme ancienne, sans canons ou arquebuzes ; et les amours à la moderne, sauf les foles, pource que je les cuide faintes et qu’il n’en soit point de semblables. Et si en passant j’ay usé de metaphores, similitudes, et comparaisons, allegué fables, poësies, histoires, et inventé vers, excusez le desir que j’ay eu de monstrer qu’en cest endroit le François y est plus propre que l’Espaignol 368 .’

De la reprise à la réécriture en passant par l’abrègement et l’ajout, tous les degrés sont réalisés dans l’exercice d’appropriation et de transformation du texte-source, ce qui fait conclure à Maugin qu’il n’a eu ‘«’ ‘ moindre peine qu’à une invencion ’». Mais les notions de traduction et de création s’interpénètrent plus que jamais dans le métadicours portant sur l’Amadis de Des Essars, qui est à proprement parler une ‘«’ ‘ belle infidèle’ ‘ 369 ’ ‘ ’». Dans son prologue de 1540, Herberay lui-même rend compte de cette émancipation par rapport à l’original avec une désinvolture affichée : il justifie son choix de se ‘«’ ‘ delivrer de la commune superstition des translateurs ’» en alléguant l’évolution des mœurs ainsi que la frivolité de la matière romanesque, qui ne requiert ‘«’ ‘ si scrupuleuse observance ’» 370 . Mais un autre argument, singulier sinon fantaisiste, vient à l’appui de sa revendication d’affranchissement : il aurait modifié la version castillane en fonction d’un état antérieur de l’œuvre, rédigé en picard. Du coup, Herberay quitte l’habit de traducteur pour endosser celui de philologue ; il entend restituer au public français la version originale du texte, altérée par Montalvo et ses prédécesseurs :

‘[…] il est tout certain qu’il fut premier mis en nostre langue Françoyse, estant Amadis Gaulois, et non Espaignol. Et qu’ainsi soit j’en ay trouvé encores quelque reste d’ung vieil livre escript à la main en langaige Picard, sur lequel j’estime que les Espagnolz ont fait leur traduction, non pas du tout suyvant le vray original, comme l’on pourra veoir par cestuy, car ilz en ont obmis en d’aulcuns endroictz, et augmenté aux aultres […] 371 .’

La légende de l’origine française d’Amadis sera vivace au XVIe siècle : les contemporains ont rêvé que le récit appartenait à la matière de Bretagne et qu’un personnage nommé Amadis de Gaule était issu de la tradition romanesque nationale. Un mythe s’est alors créé selon lequel Des Essars rendait l’Amadis ‘«’ ‘ Gaulois ’» au moment où il le ‘«’ ‘ retourn[ait] en son premier langaige’ ‘ 372 ’ ‘ ’». Il est frappant que la justification de l’infidélité de la traduction tienne à des considérations historiques fallacieuses, qui restent corrélées à une volonté d’‘» illustrer » ’le français, de lui donner un prestige culturel. Tout se passe donc comme si les traducteurs et adaptateurs de romans italiens et espagnols  essentiellement de thématique chevaleresque  conceptualisaient la nécessaire obéissance du translateur au génie de son parler maternel, à ce ‘«’ ‘ je ne sais quoi [que] chacune langue a propre seulement à elle ’». Il nous semble que cette démonstration des capacités du français fonctionne comme un souvenir de la vieille activité de mise en roman.

À la Renaissance, la transcription de romans en langue vulgaire n’est donc pas invitation à découvrir quelque chose d’exotique, mais invitation à voir le travail d’appropriation et d’imitation d’une matière allogène. La frontière est souvent floue entre traduction, adaptation et réécriture, si bien que ces catégories modernes, utiles à l’analyse, trouvent leurs limites dans la confrontation avec la réalité de la production de cette période. Des propos des théoriciens et des praticiens de la translation de romans, émerge une autre idée à savoir que par la liberté qu’il s’octroie, le translateur est un second auteur.

Notes
354.

Du Bellay est de ceux-là : selon lui, « l’office et diligence des traducteurs » se trouve insuffisant pour donner au français sa « perfection » (ibid., I, 5, p. 212). Sébillet, pour sa part, fait un éloge sans partage de la « version », estimant « grand œuvre et de grand prix, rendre la pure et argentine invention des Poètes dorée et enrichie de notre langue » (Art poétique français, op. cit., II, 14, p. 146).

355.

Voici des exemples de titres : Les Amours de Clitophon et de Leucippe, escrits jadis en Grec, par Achilles Statius Alexandrin : et depuis en Latin, par L. Annibal Italien, et nouvellement traduits en langage François par Belleforest, parus en 1568 ; Les Amours d’Ismène et de la chaste Ismine, Nobles de la Grèce, Traduis de Grec en vulgaire toscan par Lelio Carani : et depuis fais François par Hierosme d’Avost de Laval, en 1582. L’identité du traducteur apparaît toujours ici, même sous la forme d’un pseudonyme  signalons que « l’Amoureux de Vertu », premier translateur des Amours de Clitophon et de Leucippe, est P. de Vienne.

356.

Nous résumons ici le contenu de la préface adressée « Aux nobles, vertueux et illustres Françoys », reproduite par B. Weinberg dans Critical Prefaces…, op. cit., pp. 131-134. De fait, la renommée de la traduction des Amadis par Herberay a entraîné le découragement… ou suscité l’envie, en l’occurrence chez l’auteur du « Au lecteur » du Roland furieux et celui du « Aux lecteurs » du Songe de Poliphile. Pour les rivalités existant entre le traducteur hispanisant et l’italianisant, voir La Traduction française des quatre premiers livres…, op. cit., pp. 25-26.

357.

Dédicace « À mon Seigneur, mon Seigneur de Montmonrancy »du Huitiesme livre d’Amadis…, 1548, op. cit., p. 70. Le Septiesme livre, paru en 1546,relatait déjà les aventures d’Amadis de Grèce, mais Herberay n’avait pas alors souhaité expliquer l’histoire de sa traduction.

358.

« À Monseigneur Jan de Brinon » en tête du Neufiesme livre d’Amadis…, op. cit., p. 88.

359.

Préface de La vie, ditz et faitz merveilleux d’Apollon le Tyanien, op. cit., p. 626. Le praticien ne va pourtant pas aussi loin dans la promotion des qualités linguistiques d’une bonne traduction que ne le fait le théoricien. Dans l’Art poétique français, il n’hésite pas, en effet, à faire d’Herberay, par le « langage » qu’il confère à Amadis et Oriane, ainsi que du traducteur J. Martin des exemples parfaits d’» Orateurs » participant à « l’illustration et augmentation de nostre langue française » (op. cit., I, 4, p. 61).

360.

« À tous ceus qui font profession d’enseigner la langue françoise en la ville d’Anvers », en tête de l’édition d’Anvers du Premier livre de Amadis…, 1561, in Amadis en français…, op. cit., p. 15.

361.

« Ode au Seigneur des Essars sur le discours de son Amadis » de Flores de Grece, in Œuvres poétiques de J. Du Bellay, 6 t., H. Charmard (éd.), Paris, Droz, 1934, t. IV, pp. 163-178 et ici p. 173.

362.

Respectivement, citations du dizain de « M. Le Clerc, Seigneur de Maisons » en tête du Premier livre de Amadis…, 1540, op. cit., p. IX ; du dizain de L. des Masures à l’ouverture du Quatriesme livre d’Amadis…, in Amadis en français…, op. cit., p. 28 ; du poème anonyme « sur le subject des quatre livres d’Amadis de Gaule », ibid., pp. 30-31.

363.

Roland l’amoureux, V. Gaultherot, 1549, livre I, « À treshaute et vertueuse dame Madame Dyane de Poictiers », fol. ãij r°.

364.

Roland furieux, op. cit., « À reverendissime Seigneur Monseigneur Hippolyte de Este », non paginé.

365.

D’un côté, Sébillet milite en faveur de la liberté du traducteur, recommandant de « ne jure[r] tant superstitieusement aux mots de [l’]auteur » et de servir de plus près la « propriété de [s]a langue » que la « diction de l’étrangère » (Art poétique français, op. cit., II, 14, p. 146). Inversement, Du Bellay et Peletier mettent l’accent sur la fidélité au style de l’original mais en restent à l’idée qu’» il ne se peut faire » que l’on rende « phrase pour phrase, mot pour mot » en suivant le « naturel de la Langue translative » (Art poétique, op. cit., I, 6, pp. 265 et 262). La Défense postule l’incompatibilité foncière des divers systèmes linguistiques (op. cit., I, 5, pp. 211-212) :

[…] chacune langue a je ne sais quoi propre seulement à elle, dont si vous efforcez exprimer le naïf en une autre langue, observant la loi de traduire, qui est n’espacer point hors des limites de l’auteur, votre diction sera contrainte, froide, et de mauvaise grâce.
366.

L’Hypnerotomachie, ou Discours du Songe de Poliphile, op. cit., « Aux lecteurs », fol. III v°.

367.

Sur le réagencement du matériau narratif et descriptif, sur l’infléchissement du sens de l’œuvre et sur le traitement du merveilleux et de l’amour dans la version française, voir les analyses de G. Polizzi dans l’introduction à son édition, op. cit., pp. XVII-XXI ; celui-ci suppose, par ailleurs, que « la récriture [de Martin] va un peu au delà de ce qu’il avoue » (p. XVIII).

368.

« Aux nobles, vertueux et illustres Françoys » du Premier Livre de Palmerin d’Olive, op. cit., p. 134.

369.

L. Guillerm, dans La Traduction française des quatre premiers livres…, op. cit., p. 32, définit l’expression comme le résultat d’un « travailparticulièrement visible de transformation d’un modèle prétexte ». C’est bien ainsi que les contemporains ont perçu l’œuvre ; voici comment le « seigneur de Maisons » exalte la liberté d’Herberay (poème placé en tête du Quatriesme livre d’Amadis…, op. cit., p. 31) :

Tu te fais tort (des Essars cher amy)
D’intituler Amadis translaté,
Car le subject tu n’as prins qu’à demy,
Et le surplus tu l’as bien inventé.
370.

Le premier livre de Amadis…, op. cit., « Prologue du translateur du livre d’Amadis », t. I, p. XIII.

371.

Ibid., p. XII. Comme l’explique Y. Giraud dans son introduction, on accorde aujourd’hui peu de crédit cette affirmation d’Herberay (p. [5]).

372.

Dizain de « M. Le Clerc, Seigneur de Maisons » en tête du Premier livre de Amadis…, op. cit., t. I, p. IX.