Chapitre 1
L’innommable poétique de la variété

Avant de nous lancer dans l’étude de la nouvelle poétique romanesque, donnons un résumé des histoires qui nous concernent  pour les moins connues d’entre elles  et quelques éléments sur leurs auteurs et sur leur réception immédiate. F. Rabelais est le plus connu de ces romanciers. Nul de besoin de rappeler sa formation, scolastique puis humaniste, son travail au service de mécènes nobles ou royaux ni son triple domaine d’exercice : les lettres, la médecine et la religion. Précisons toutefois qu’en 1532 il est un érudit d’une cinquantaine d’années, à l’aube de sa carrière d’écrivain : après vingt ans de vie monastique, il a appris le grec ; tout en suivant un cursus de médecine, il exerce alors à l’Hôtel-Dieu de Lyon en tant que laïc. Les horribles et espoventables faictz et prouesses du tresrenommé Pantagruel ont sûrement paru à l’automne et ont connu pas moins de huit éditions en deux ans. Ce roman, publié sous une anagramme, n’a pu que surprendre : les milieux lettrés ont dû être déconcertés par la présence d’une érudition étendue dans un texte qui affiche son appartenance aux contes populaires ; quant au public des foires, les hyperboles du titre et la nature gigantale du héros lui ont certainement rappelé un des succès de la littérature médiévale vulgarisée, paru la même année, les Grandes Cronicques. Après l’histoire du fils, c’est au tour de La vie inestimable du grand Gargantua, pere de Pantagruel de paraître, peut-être au début de l’année 1535 568 . Les aventures restent du même ordre, quoique le ton général soit plus sentencieux. Après presque douze années d’effacement, qu’il a passées en partie dans le Piémont, Rabelais fait mettre sous presse à Paris, en 1546, le Tiers livre des faictz et dictz Heroïques du noble Pantagruel, qu’il signe de son nom. La matière s’avère bien différente de celle des récits précédents, Panurge occupant le devant de la scène. Deux ans plus tard est publié le Quart livre des faicts et dicts Heroiques du bon Pantagruel, dont la version définitive paraîtra en 1552. Pantagruel et sa flotte se déplacent ici d’île en île, allant à la rencontre de peuples chimériques. Les romans conçus jusqu’à leur terme par Rabelais sont donc au nombre de quatre, Le cinquiesme et dernier livre des faicts et dicts Heroïques du bon Pantagruel, pour sa part, étant une imposture éditoriale. Il est cependant admis aujourd’hui que son rédacteur a suivi fidèlement des brouillons rédigés de la main de Rabelais, mais peu lisibles et déclassés. L’existence d’une copie manuscrite du texte, datée du XVIe siècle, et la reproduction de la partie initiale de ces deux versions dans les seize chapitres de l’Isle Sonante tendent à prouver que divers intéressés ont eu en main deux groupes de brouillons, dont ils ont donné trois réécritures parallèles 569 . Les quinze premiers chapitres du Cinquiesme livre sont conçus comme une suite du Quart livre ; ils ont probablement été composés après ou en même temps que celui-ci. Ils s’attardent sur la manière de vivre des oiseaux de l’île Sonnante, qui donnent à voir les vices du clergé, tandis que l’épisode des Chats-fourrés stigmatise les travers de la basoche. Les derniers chapitres, que Rabelais a dû composer entre le Tiers et le Quart livre, voire pour certains d’entre eux plus tôt encore, réalisent, pour leur part, le programme de navigation annoncé à la fin du Tiers livre. Ils rendent compte d’une étape au royaume de la Quinte-essence, dont les officiers sont alchimistes, de l’arrivée des Pantagruélistes au temple de la Bouteille, de l’initiation bachique de Panurge par la prêtresse Bacbuc et de l’obtention du mot de l’oracle. À partir de 1553, les quatre premiers livres sont réunis sous le titre des Œuvres de Rabelais 570 . Notons qu’avec la mort de l’auteur, cette même année, le mouvement d’impression effrénée, depuis 1532, de tels contes à succès prend une allure plus mesurée : la forme des romans va à présent garder un état à peu près stable, même si on discutera encore longtemps de l’attribution de certains textes 571 . C’est le cas d’un des pastiches rabelaisiens les plus réussis, qui nous intéresse également : la Mythistoire barragouyne de Fanfreluche et Gaudichon. Si l’auteur la dédicace ‘«’ ‘ À F. R. ’», autrement dit à François Rabelais, il entend traiter, à la différence de son modèle, des amours de Dame Fanfreluche et de son ami Gaudichon. Le narrateur commence par donner la généalogie de celle-là puis rapporte les circonstances de la rencontre de ses parents, Trigory et Biétrix, leur mariage et la naissance et l’enfance de leur fille. Il s’attache ensuite à l’éducation de Gaudichon et à quelques événements qui ont marqué ses études à Paris. Tandis que celui-ci se rend à Peu-d’Études, il s’acoquine provisoirement avec une bande de gueux puis rencontre des satyres ; il gravit alors le Mont fourchu, en haut duquel se trouve l’Hélicon ; la muse Calliope lui fait rencontrer les poètes antiques et contemporains. À Peu-d’Études, il fera la connaissance de Fanfreluche, de passage dans la ville, la séduira et tous deux se rendront en Rusterie, pays d’origine de Trigory. L’ouvrage offre donc de multiples surprises, comme l’atteste le caractère énigmatique de la page de titre. Le texte se donne pour source fictive ‘«’ ‘ une exemplaire escrite à la main ’» et après le nom ‘«’ ‘ Autheur ’» sont énumérées les vingt-trois lettres de l’alphabet. Or le ‘«’ ‘ Proeme ’» inaugural ne revient pas plus sur cette idée d’un texte trouvé que sur le problème de l’anonymat ; de toute évidence, il s’agit d’un subterfuge, déjà employé par de précédents conteurs  comme Montalvo, Des Périers ou F. Giraud, l’auteur de la Grande et merveilleuse vie de Gargantua. Le roman a assez vite été attribué à G. des Autels, quoique des doutes aient plané jusqu’à aujourd’hui à ce sujet 572 . Cousin de P. de Tyard et apparenté au cercle littéraire lyonnais, Des Autels s’est illustré dans la polémique sur la réforme de l’orthographe et par des recueils pétrarquistes, le Repos de plus grand travail et l’Amoureux Repos. Vu la thématique spécifique des chapitres 13 et 14, la critique adressée aux poètes qui ‘«’ ‘ pindaris[ent] ’» et la référence qui y est faite au canzonière de Des Autels lui-même et à l’Uranie de Peletier, parue en 1555, on pourrait s’étonner de ces travaux poétiques 573 . V. Zaercher suppose que la première édition de l’ouvrage se situe vers 1550 mais que cet épisode a dû être ajouté plus tard, donc que l’auteur a fait une volte-face après ses recueils lyriques de 1550 et 1553 574 .

Certains doutes planent également sur l’identité d’un autre de nos auteurs, aux antipodes de cette production comique, Hélisenne de Crenne. Si l’on s’accorde assez largement aujourd’hui à voir derrière ce nom le pseudonyme partiel de Marguerite Briet de Crenne, on sait peu de choses sur la formation littéraire de cette dernière 575 . Outre une traduction en prose des quatre premiers livres de l’Énéide, H. de Crenne a signé un recueil de lettres, les Epistres familieres et invectives, et un récit allégorique, le Songe de Madame Helisenne. Publiées en 1538, les Angoysses douloureuses qui procedent d’amours vont nous occuper pour le caractère déroutant de leur facture, bien différent des traductions contemporaines de romans sentimentaux. Le récit s’ouvre sur l’histoire d’Hélisenne : sa naissance, son mariage avec un gentilhomme, la façon subite dont elle tombe amoureuse d’un jeune homme aperçu à la fenêtre, l’échange de deux lettres entre eux, leurs quelques entretiens et les scènes houleuses entre elle et son mari ; celui-ci finit par la faire enfermer dans une tour, au château de Cabasus. À l’aventure intériorisée d’une âme succède celle, tout extérieure, de l’amant, Guénélic, et de l’ami de celui-ci, Quézinstra. Nombreux sont les exploits guerriers accomplis par les deux compagnons à la recherche d’Hélisenne, en des lieux réels ou imaginaires. Quand enfin ils arrivent à l’endroit où se trouve la captive, ils l’enlèvent ; mais elle meurt d’épuisement et Guénélic la suit dans la mort. Le roman s’achève sur le transport par Mercure des âmes en souffrance aux champs élyséens ; après le compte rendu d’une querelle entre les déesses Pallas et Vénus, il est fait état de l’inhumation des corps par Quézinstra, qui a décidé de vivre en ermite près de leur tombeau. D’un point de vue éditorial, cet ouvrage foisonnant a reçu, comme ceux que nous avons évoqués, un bel accueil de la part du public : il a été réédité au moins huit fois durant une vingtaine d’années et a été lu par des lettrés comme Herberay, Corrozet ou Pasquier. Rien de commun entre ce type de réception et celle d’Alector, ou le Coq, qui n’a paru qu’une fois, en 1560, à Lyon chez P. Fradin. L’attribution de ce roman qui, lui non plus, ne se rapporte à aucun schéma narratif antérieur, ne fait pas problème : quoiqu’aucun nom n’apparaisse en page de titre, B. Aneau décline entièrement son identité dans sa dédicace à la demoiselle de Coq 576 . Il s’agit de la dernière création du régent du collège de la Trinité, publiée un an avant sa mort mystérieuse 577 . La fantaisie de celle-ci s’accorde assez mal avec l’austérité que l’on prête au personnage : probablement élève d’Alciat et de Wolmar, Aneau a rédigé des opuscules de droit, traduit les Emblemata et s’en est pris à la Défense dans le Quintil Horatian. Mais il a aussi donné une traduction en vers du troisième livre des Métamorphoses d’Ovide et son roman révèle qu’il possède un talent certain pour le récit. Comme Des Autels, il prétend que le texte n’est pas de lui : il aurait transcrit et collé les uns aux autres des ‘«’ ‘ fragments brouillés et de divers langages ’» ; trois d’entre eux, qu’il n’aurait pas réussi à rattacher au reste de l’histoire, sont placés en exergue. L’histoire est fort complexe, entre autre parce qu’elle s’organise autour de deux héros, dont nous allons évoquer le parcours de manière linéaire. Franc-Gal se présente comme un sage cosmopolite qui, monté sur un hippopotame volant, enseigne aux générations humaines la civilisation et le bien. Au cours de ses déplacements, il passe en Scythie, où il est enlacé par Priscaraxe, fille du Soleil et de la Terre ; au bout de vingt-deux jours, elle attend un enfant de lui. Avant qu’il ne reprenne ses pérégrinations, il constitue la femme serpente reine de la Tartarie orientale et commande d’appeler leur enfant Alector. Le personnage éponyme naît de manière prodigieuse et à l’âge de six ans  qui équivaut à vingt ans chez les autres enfants, nous dit-on , il part à la recherche de son père, alors âgé d’environ neuf cents ans. Il le trouve et ils sont réunis sur l’hippopotame, avant qu’une bourrasque de vent ne l’en fasse tomber. Alector arrive alors près d’Orbe, ville-centre du monde, juste à temps pour sauver la belle Noémie d’un hippocentaure ; les jeunes gens s’éprennent l’un de l’autre. Il est d’abord accueilli à bras ouverts par les Gratians, frères de la demoiselle ; mais surpris au matin dans la chambre de celle-ci, il doit riposter à une attaque des gens de la maison ; sa fiancée est tuée dans ses bras par une flèche lancée par on ne sait qui. Alector est accusé du meurtre ; il comparaît devant le tribunal orbitain et est condamné à affronter un serpent anthropophage. Franc-Gal arrive à temps aux arènes d’Orbe pour assister à la victoire de son fils et meurt de joie après qu’Alector aura reçu la couronne civique. Par le rassemblement de l’histoire du père et de celle du fils, nous avons affaire en quelque sorte à deux romans en un, Pantagruel et Gargantua, si l’on veut, ou Amadis de Gaule et Esplandian.

Le présent chapitre va s’appliquer à montrer que, quoique de nature et d’orientation différentes, ces huit œuvres réalisent une exigence de mixité et de disparité verbale. Rabelais, H. de Crenne, Des Autels et Aneau ne sont peut-être pas les seuls à renouveler par un tel moyen la narration romanesque entre 1530 et 1560 : l’Amant resuscité de la mort d’amour de Denisot et l’Histoire de Melicello et de l’inconstante Caïa de Maugin sont des productions sans véritables originaux antiques ou contemporains et qui concentrent également plusieurs styles et pièces rapportées. Mais l’hétérogénéité de la matière n’y est pas aussi poussée que dans nos œuvres 578  ; pour marquer leur relative servilité vis-à-vis de leurs emprunts, nous ne les avons pas répertoriés dans notre Annexe II, mais dans la catégorie des imitations de l’Annexe I. La question qui se pose à présent à nous est celle du nom à donner au principe d’écriture de nos romans : elle s’avère proprement ‘«’ ‘ innommable ’», tant en raison des lacunes de la théorie du genre au XVIe siècle que pour le jugement dépréciatif alors porté sur ce type de narration. Comme il existe quelques éléments de ‘«’ ‘ poétique transcendante ’» et qu’ils sont en accord avec la ‘«’ ‘ poétique immanente ’» 579 de nos livres, nous reprendrons la terminologie de l’époque et parlerons d’une ‘«’ ‘ poétique de la variété ’». Pourtant, dans nos œuvres, la varietas se réalise différemment que sous la plume de Gohory dans le paratexte du Trezieme livre d’Amadis et de Giraldi et Pigna : elle tient à une attitude réflexive vis-à-vis du langage et consiste dans la convocation d’un matériau certes disparate, mais surtout de nature verbale. Pour conceptualiser ce rapport des romanciers à la langue, l’analyse d’une autre théorie en vigueur au XVIe siècle peut être utile, à la fois pour saisir le contexte de création de nos praticiens et pour définir leur originalité : le concept de copia verborum et rerum véhicule une certaine idée de la pensée, du discours et de l’engendrement de celui-ci, mais suffira-t-il à cerner la mixité romanesque ? Pour répondre, nous commencerons par recenser les éléments de métadiscours que contiennent nos textes : s’ils recourent le plus souvent à la substitution lexicale, nous verrons que les auteurs usent de quelques termes précis pour désigner leur pratique et que leur emploi suppose une conception relativement homogène du nouveau roman. Nous analyserons ensuite le fonctionnement de la représentation de discours dans nos textes et la façon dont cela conditionne la création d’une prose spécifique. Nous nous interrogerons enfin sur la concurrence qui a tout lieu de se produire entre la trame du récit et les discours qui s’y insèrent : ceux-ci pourraient conduire à sa désintégration.

Notes
568.

Pour la datation de l’édition princeps, voir la notice de Gargantua dans l’édition des Œuvres complètes, op. cit., pp. 1054-1055.

569.

Pour les détails des arguments en faveur de cette thèse, voir la notice du Cinquiesme livre, ibid., pp. 1595-1601. M. Huchon précise que la première édition du Cinquiesme livre est peut-être antérieure à 1564.

570.

Selon M. A. Screech et S. Rawles, dans A New Rabelais Bibliography. Editions of Rabelais before 1626, Études rabelaisiennes, Genève, Droz, « Travaux d’Humanisme et Renaissance », 1987, t. XX, l’ouvrage, augmenté à partir de 1565 du Cinquiesme livre, connaît vingt-trois éditions de 1553 à 1600. Ce total est à ajouter aux nombres donnés pour la publication de chacun des romans en introduction, p. 31.

571.

Rappelons, pour exemple de la spéculation littéraire et éditoriale créée autour de cette production romanesque, qu’E. Dolet a donné en 1542 une édition pirate des deux premiers livres, non expurgés par Rabelais, auxquels il a ajouté le texte apocryphe du Disciple de Pantagruel. Or la même année, Rabelais fait imprimer une version corrigée de Pantagruel et de Gargantua ; en 1552, il révise le Tiers et le Quart livre selon son système de la « censure antique ». Quant aux Œuvres complètes qui nous serviront de base de travail, elles reproduisent les dernières éditions remaniées par l’auteur : il s’agit des éditions de 1542 de F. Juste et de 1552 de M. Fezandat.

572.

Évoquons rapidement les éléments du dossier constitué par M. Françon dans les notes qu’il ajoute à sa reproduction de l’édition de 1577. Pasquier, en 1555, dans une lettre adressée à Ronsard, fait mention de « deux singes » qui ont imité Rabelais : Leon l’Adulfy, dans les Propos rustiques, et un auteur anonyme, dans le « Livre des fanfreluches » ; il ajoute : « mais autant y profita l’un que l’autre : s’estant la memoire de ces deux livres perduz (sic) » (ibid., p. xxii). Du Verdier serait le premier à attribuer la Mythistoire à Des Autels, même si plus tard il confond le texte avec le Cinquiesme livre  notons que M. Screech est aussi tenté de donner aux romans le même auteur (A New Bibliography…, op. cit., p. 300).

573.

C’est ce que fait M. Françon (op. cit., p. xxi). Celui-ci date le texte de 1553 ou 1554, pour la raison que le roman fait allusion à des événements de la fin des années 1540 (p. xlvi). De son côté, Du Verdier le situe entre 1546 et 1549. Des remarques faites au XVIIIe siècle dans la réédition des Bibliothèques de La Croix du Maine et Du Verdier et dans la Bibliothèque des romans invitent à supposer l’existence de deux réimpressions en 1559 et 1560  outre celles de 1574 et 1577 ; il a pu y en avoir une autre en 1572 chez J. Dieppi.

574.

« La Mitistoire de Fanfreluche et Gaudichon de Guillaume Des Autelz : de l’imitation à la création romanesque », in Le Renouveau d’un genre…, op. cit.

575.

Pour l’identification provisoire de l’auteur à cette femme  dans l’attente de preuves contradictoires , voir l’introduction de C. de Buzon à son édition des Angoysses, op. cit., pp. 8-11 ; cette édition reproduit le texte de 1538 paru à Paris chez D. Janot.

576.

À la question que pourrait se poser la dédicataire « Qui est ce nouvel homme, qui m’envoie et dedie ce livre ? », l’auteur répond : « Je vous declare que c’est moy Barptolemy Aneau […] » (Alector, op. cit., t. I, p. 9). Il évoque ensuite une partie de sa vie à Bourges et à Paris.

577.

Pour des explications sur l’assassinat d’Aneau par une foule catholique fanatisée, voir en particulier l’introduction de B. Biot au numéro de Réforme, Humanisme, Renaissance intitulé Barthélemy Aneau et le milieu intellectuel lyonnais au début du XVI e siècle, Actes de la journée d’études de Lyon, 8 novembre 1997, Lyon, n° 47, 1998. Cette fin mal comprise, qui a fait du lettré un apôtre du protestantisme, ainsi que son opposition à la Pléiade ont dénaturé l’image du notable lyonnais, du pédagogue féru de rhétorique et du défenseur de la langue française ; la lecture de ses œuvres en a longtemps pâti.

578.

Dans le cas de l’Amant resuscité, Genève, Droz, « Textes littéraires français », 1998, p. 45, V. Duché-Gavet n’hésite pas à considérer qu’en tant que roman, le livre est un échec. Dans l’introduction à son édition du texte, elle y voit une « création née de la traduction, de la réécriture et du plagiat, […] [qui] ne parvient pas à se forger une personnalité » ; autrement dit, le récit est submergé sous une masse de passages didactiques plaqués assez artificiellement. De son côté, le roman de J. Maugin n’a été que récemment redécouvert. M. Malinverni a montré, dans « Il Melicello di Jean Maugin : echi di un dialogo ideale tra romanzi e poesia », in Il Confronto Letterario, Fasano, n° 33, mai 2000, pp. 83-107 et ici p. 87, qu’il s’agit d’un texte innovant, bien qu’il paraisse sous le titre de « traduction » et que l’épître liminaire le présente comme la version longue d’un « brief epitome Italien » : il s’agit d’un roman sentimental qui emprunte tout autant à la tradition italienne qu’aux Angoysses et à l’Heptameron.

579.

Dans « Littérature médiévale et théorie des genres », art. cit., p. 57, H.-R. Jauss crée ces expressions pour opposer les normes établies par une époque pour codifier une forme littéraire aux lois qui viennent de l’œuvre même que l’on veut décrire.