1.2. Le cadre temporel

Les représentations du temps varient selon le type de culture, de société et plus spécifiquement en fonction de la place de l’individu dans la société – groupe d’appartenance, sexe, âge, etc. Ainsi, l’emploi du temps d’une personne ne sera pas le même selon qu’elle est cadre dynamique dans une jeune entreprise ou bien retraitée. Un étudiant n’aura pas la même conception temporelle s’il est en retard pour se rendre en cours ou pour prendre le train qui doit l’emmener en vacances. Ceci laisse percevoir un autre type de variation du concept de temps : la variation intra-individuelle. De plus, il convient de souligner que le temps d’une même journée est fractionné en un certain nombre de périodes : celles du lever, du travail, des repas, du repos, etc.

Il n’est pas inutile de préciser que le cadre spatio-temporel peut se modifier au cours de l’interaction. Une illustration de cette mobilité du cadre spatio-temporel peut être apportée par les interactions de commerce et de service. En effet, il n’est pas rare que des cliagers se rencontrent sur le site institutionnel et débutent une interaction qu’ils terminent sur le trottoir. Les corpus ne recèlent malheureusement aucun exemple de ce type puisque la position du micro empêchait l’accès à la fin de l’interaction.

Par ailleurs, on peut distinguer un cadre temporel en rapport avec le site, et un cadre temporel en rapport avec les interactions qui prennent place à l’intérieur du site. Le cadre temporel du site concerne principalement sa période d’ouverture, la répartition des tâches à effectuer par les commagents sur un empan temporel, ainsi que la fréquentation du site par les cliagers en fonction des différents moments de la journée.

Le cadre temporel d’une interaction de commerce ou de service est particulier dans le sens où il est temporellement contraint. L’existence d’un script indiquant à chacun des participants quelles tâches sont attachées à son rôle a pour but de « rentabiliser temporellement » (Traverso, 1998a : 4) le déroulement de l’interaction, c’est-à-dire d’économiser aussi bien le temps du commagent que celui du cliager en train d’être servi, mais par-dessus tout le temps des cliagers qui attendent d’être servis. En effet, les cliagers font la queue, selon le principe de la file d’attente, permettant ainsi de garantir « le principe de l’égalité de traitement des clients » (Goffman, 1988 : 223) en leur attribuant un tour, le premier arrivé étant le premier servi (Goffman, 1973b : 50). Contrairement aux autres sites, à la mairie, la gestion des tours n’incombe pas aux participants : un distributeur de tickets régit le fonctionnement de la file d’attente. Le principe de la file d’attente permet donc d’organiser de manière globale le temps à l’intérieur du site. Le cadre temporel de chaque interaction est également contraint : chaque cliager doit normalement essayer de se cantonner à un laps de temps minimum pour effectuer sa transaction afin de ne pas « "gaspiller" le temps de la vendeuse et des autres clients » (Traverso, 1998a : 4).