Une fois la demande formulée de manière acceptable par le cliager, ou conjointement par le commagent et le cliager, le commagent n’a plus qu’à la satisfaire. Il arrive toutefois que la délivrance du bien soit précédée par un accusé de réception verbal de la demande.
Après la formulation adéquate de la requête, le commagent n’a normalement plus qu’à l’exécuter. L’exécution non-verbale de la requête est cependant fréquemment précédée par un accusé de réception verbal. On retrouve un accusé de réception de la part du commagent après les requêtes formulées de manière directe dans 100% des cas à la librairie-papeterie-presse, à la mairie et à La Poste, dans 42.8% au tabac-presse et 33.3% au Crédit Agricole. L’accusé de réception suit également 30.7% des requêtes indirectes à La Poste, 12% au Crédit Agricole, 10% à la librairie-papeterie-presse, 9.1% au tabac-presse et 4% à la mairie.
Les accusés de réception des commagents peuvent revêtir deux formes : soit il s’agit de la répétition du référent de la requête du cliager, soit il s’agit d’un petit mot signalant l’acceptation de la requête tel que « oui » ou « d’accord ». La répétition du référent de la requête, ou réponse-écho (Fornel & Léon, 1997 : 101) est tout de même la forme majoritairement employée. Elle présente l’avantage d’avoir une double fonction : elle permet, en effet, au commagent de faire savoir au cliager qu’il a bien entendu la requête, mais aussi de vérifier qu’il n’y a pas eu de problème de compréhension.
Corpus tabac-presse : interaction n°9
(3) | Client n°11 : un Marlboro s’i vous plaît |
(4) | Buraliste : un Marlboro (pause 6’’) |
Corpus mairie : interaction n°6
(2) | Cliente n°11 : moi c’est pour un bulletin de naissance avec (inaudible) c’est pour faire renouv’ler ma carte d’identité |
(3) | Guichetière n°2 : oui |
La présence des accusés de réception après la requête légitime la distinction posée par Eemeren et Grootendorst entre l’effet perlocutoire (L2 accepte la requête) et la conséquence perlocutoire (L2 exécute la requête). Les accusés de réception relèvent de l’effet perlocutoire. Si l’on admet, d’après les constats de Merritt (1976 : 339), que les demandes de précisions valent également pour une acceptation de la requête 118 , ce sont au total 65.3% des requêtes au tabac-presse, 65.2% à la librairie-papeterie-presse, 57% à La Poste, 52% à la mairie et 32.1% au Crédit Agricole qui trouvent une réponse verbale avant leur exécution. Il est par ailleurs intéressant de noter qu’accusés de réception et demandes de précision ne sont pas mutuellement exclusifs puisqu’il est possible de relever quelques cas où ils apparaissent conjointement.
Corpus Crédit Agricole : interaction n°41
(3) | Cliente n°52 : monsieur ou madame: Pierre Martin:… un carnet de chèques s’i vous plaît |
(4) | Attachée de clientèle n°3 : d’accord (pause 2’’) vot(re) numéro de compte… s’i vous plaît |
Selon Ervin-Tripp (1976 : 51), les requêtes orientées vers le destinataire constituent des stratégies qui lui permettent de répondre comme s’il agissait volontairement. Ce type de formulation lui offre l’opportunité d’exprimer verbalement son acceptation de la requête (Trosborg, 1995 : 206). En réalité, dans les interactions de commerce et de service, les accusés de réception ne sont pas réservés aux formulations indirectes de la requête orientées vers le destinataire : ils suivent tout aussi volontiers les formulations directes de la requête (cf. ci-dessus, corpus tabac-presse, interaction n°9) que les formulations indirectes orientées vers le locuteur (cf. ci-dessous, corpus La Poste, interaction n°1) ou empruntant des tournures impersonnelles ne mettant en scène ni le commagent, ni le cliager (cf. ci-dessous, corpus mairie, interaction n°6).
Corpus La Poste : interaction n°1
(59) | Cliente n°2 : je voudrais un carnet de timbres s’il vous plaît |
(60) | Guichetière : un carnet de timbres (pause 6’’) |
La présence de ces accusés de réception après tous les types de requêtes recensés semble pouvoir s’expliquer par le fait qu’en verbalisant son acceptation de la requête, le commagent s’engage dans l’échange transactionnel et semble ainsi accomplir une action volontaire plutôt qu’« obéir » au cliager. Ce constat contribue à renforcer la vision de la requête en contexte transactionnel comme un acte moins directif que dans d’autres types de contextes.
Sur les réactions conduisant au refus de la requête, cf. Davidson (1984).