Toutes les pré-clôtures verbales sont matérialisées par des marqueurs. Il s’agit donc de la forme dominante représentant 97.5% des pré-clôtures verbales à la mairie, 92.7% à la librairie-papeterie-presse, 89.7% au tabac-presse, 86.6% au Crédit Agricole, et 61.5% à La Poste.
Selon Schegloff et Sacks, les marqueurs ne sont que des pré-clôtures potentielles (possible pre-closings) (1973 : 305) que l’on peut retrouver au fil de la conversation avec une autre valeur.
‘OK OK are only possible pre-closings. […] [They] occur in conversation in capacities other than that of « pre-closing ». It is only on some occasions of use that these utterances are treated as pre-closings, as we have been using that term (ibid., souligné par les auteurs).’Comment passer de marqueurs à valeur potentiellement conclusive à des marqueurs à valeur conclusive ? Deux facteurs doivent être pris en compte ici : le type de marqueur et le contexte au sein duquel ils font leur apparition. On les rencontre, comme les excuses, à la fin de la transaction, mais contrairement aux formules d’excuse conclusives, ils ne sont pas obligatoirement rattachés à la transaction. C’est la raison qui a motivé un traitement différent pour ces marqueurs de structuration. De plus, ce sont tous des marqueurs de structuration qui contiennent déjà en eux-mêmes une valeur conclusive. Ici, ils indiquent la fin du développement, du corps de l’interaction et annoncent en même temps le début de la conclusion, c’est-à-dire la fin de l’interaction. D’après le classement que propose Auchlin, les marqueurs de structuration identifiés comme pré-clôtures des interactions de commerce et de service indiquent un « décrochement ascendant » (1981b : 95), c’est-à-dire le « passage d’un argument à une conclusion » (ibid.).
Les pré-clôtures verbales sont initiées aussi bien par les commagents que les cliagers, même si l’initiative incombe majoritairement aux cliagers.
Le fait que ce soient les cliagers qui produisent le plus grand nombre de pré-clôtures dans la plupart des situations n’est absolument pas surprenant. Les commagents se trouvent sur leur territoire et occupent leur poste de travail tout au long de la journée. Le cliager, lui, est en territoire moins familier, parfois même inconnu, et peut donc être assimilé à un visiteur, les commagents aux hôtes. Comme le fait remarquer Traverso à propos des visites,
‘il est évident que dans le cadre d’une visite, ce sont régulièrement les visiteurs qui émettent les pré-clôtures (1976 : 79).’Les chiffres révélés par l’analyse des pré-clôtures à la mairie vont à l’encontre des constats émis pour les autres sites. Une explication peut justifier cette différence : la mairie est un lieu institutionnel où l’on se rend assez rarement. On a plus souvent besoin d’un journal ou d’un timbre que d’un extrait d’acte de naissance ou d’une carte d’identité. Les cliagers sont donc moins familiers avec le script et ne savent peut-être pas très bien identifier la fin de la transaction. Les commagents leur signalent donc que l’opération administrative est terminée et le service rendu en produisant une pré-clôture.
Cette hypothèse se confirme en recherchant les pré-clôtures dans le corpus de la mairie lyonnaise (Chaboud, 1997) où les commagents prennent l’initiative de la clôture en énonçant une pré-clôture verbale dans 62.3% des interactions.
Un cas à part mérite d’être signalé : celui de la boulangerie où le corpus de Sitbon (1997) ne fait état d’aucun marqueur de structuration à valeur clôturante et d’une seule formule d’excuse conclusive de la part de la boulangère. Ceci ne signifie toutefois pas que les pré-clôtures sont inexistantes : rappelons que certains remerciements peuvent fonctionner comme pré-clôtures, et que la présence des remerciements en boulangerie est très importante avec une moyenne de 2,7 remerciements par interaction.
Si l’on revient au cas le plus fréquent où les cliagers sont considérés comme des invités, et les commagents comme des hôtes, il peut sembler surprenant de constater que les commagents eux-mêmes produisent des pré-clôtures. Il sera donc nécessaire de s’intéresser au(x) contexte(s) les amenant à mettre un terme à l’interaction.
Résultats présentés en pourcentages et obtenus à partir du nombre total de pré-clôtures recensées.