1.5. Remarques conclusives

Au terme de ce cheminement au sein des interactions de commerce et de service, il s’avère toujours impossible de répartir les cinq sites étudiés dans deux catégories cloisonnées. Un certain nombre d’axes classificatoires en rapport avec des éléments externes à l’interaction, ainsi que le fonctionnement global et local de l’interaction sont cependant apparus. Plutôt que de les exposer dans un développement reprenant plus ou moins les conclusions intermédiaires du travail descriptif et comparatif et des propos développés ci-dessus, je les synthétise dans un tableau.

critères internes ou externes axes classificatoires librairie tabac poste banque mairie

Cadre spatial
Libre-service X X      
Demande auprès d’un commagent     X X X
Contact visuel     X    
Contact visuel et tactile X X   X X
Cadre temporel
Principe de célérité très affirmé X X      
Principe de célérité moins affirmé     X X X
Fréquence des rencontres
Cliagers habituels X X X    
Cliagers occasionnels ou de passage     X X X
Fonctionnement global de l’interaction
Script minimal       X X
Ajouts au script minimal X X X    
Rituels d’accès
Actualisés de manière minimale       X X
Ajouts aux rituels minimaux X X X    

Actes de langage
Requête directe   X      
Requête indirecte X   X X X
Remerciement lié à la rémunération X X X    
Pas de remerciement : absence de rémunération     X X X
Modules conversationnels
Généraux X X X    
En rapport avec les territoires X X X    
Histoire conversationnelle Récente ou ancienne X X X    

En combinant les axes classificatoires externes et internes identifiés comme pertinents pour différencier les cinq sites et les interactions qui s’y déroulent, on peut opérer des regroupements : la librairie-papeterie-presse et le tabac-presse fonctionnent de manière relativement similaire, comme le Crédit Agricole et la mairie. La Poste ne peut être rattachée à aucun des deux groupes : elle se rapproche tantôt de l’un, tantôt de l’autre. Identifiés comme commerces prototypiques dans la typologie établie à partir des éléments glanés dans le droit et la mercantique et de l’opinion de l’individu « ordinaire » proposée au chapitre 1, la librairie-papeterie-presse et le tabac-presse confirment leur similarité. En revanche, la proximité entre la librairie-papeterie-presse et le tabac-presse d’une part, et le Crédit Agricole d’autre part basée sur le principe du service commercialisé ne se confirme pas. De la même manière, la similarité de fonctionnement entre la mairie et La Poste ne s’affirme pas non plus. En coordonnant les critères externes et internes, la mairie présente des similitudes avec le Crédit Agricole tandis que La Poste se pose comme intermédiaire entre les deux groupes en affichant des symétries avec la librairie-papeterie-presse et le tabac-presse dans certains cas, ou avec le Crédit Agricole et la mairie dans d’autres cas. La mairie ayant été identifiée comme un service prototypique, il faut donc envisager aussi le Crédit Agricole comme un service, perspective plutôt ironique si l’on se remémore le fait que les attachés de clientèle du Crédit Agricole se défendent, parfois vigoureusement, d’être des guichetiers. Les résultats des analyses effectuées vont dans le sens du regroupement entre librairie-papeterie-presse et tabac-presse puis Crédit Agricole et mairie. De cet état de fait à la conclusion que tabac-presse et librairie-papeterie-presse relèvent du commerce, et mairie et Crédit Agricole du service, tandis que La Poste serait un site hybride où se côtoient les deux types d’interactions, il ne reste plus qu’un pas que je franchis maintenant. Subsiste cependant le problème des cliagers auxquels l’étude présentée ici ne permet pas de rendre le statut de client ou d’usager.