2 LES SAPEURS POMPIERS

Erfurt en 1429, Francfort en 1458 ou encore Lubeck en 1461 impriment de nouveaux règlements assez performants et, à Nuremberg, en 1449, il en parait un qui prévoit six entrepôts, répartis judicieusement dans la ville pour recevoir des équipements et appelés «  cabanes du labeur « . Les seaux en cuir, les outils et les tonnelets d'eau y étaient entreposés. Une personne rémunérée était chargée exclusivement de leur gestion et de leur surveillance. Les artisans étaient également indemnisés lorsqu’ un incendie se déclarait et qu'ils luttaient pour le maîtriser. Ce facteur marque peut-être la véritable naissance de la répartition du travail et le principe de la direction technique unique chez les sapeurs-pompiers. D'après nos recherches, c'est en 1449, à Nuremberg, qu'apparaît pour la première fois le système de la rémunération et de la répartition précise du travail pour la lutte contre les incendies.

En France, en 1472, sous le règne de Louis XI, un arrêt royal daté du huit décembre certifie que les péripatéticiennes, nommées à l'époque « les ribaudes « , devaient obligatoirement porter des seaux lors des incendies, sous peine d'être punies et bannies de la ville. Dans certaines villes, comme Bourg-en-Bresse, elles furent même rassemblées dans une maison particulière, afin qu'on soit sur de les trouver et de les rassembler rapidement. L'origine des maisons closes a peut-être un rapport avec l'extinction des incendies !

A partir du dix septième siècle, pratiquement toutes les villes d'Europe possèdent leur propre règlement et beaucoup d'entre elles sont armées par des équipes de sapeurs-pompiers organisés.. Généralement, ils ont été recrutés parmi les artisans de différents corps de métiers, tels les maçons, les charpentiers, les menuisiers,...Dès que l'alerte est donnée, ils interviennent. Cependant, ce système comporte des failles. Quand l'incendie prend de l'ampleur, les pompiers sont vite dépassés et la maîtrise du feu demeure extrêmement difficile. L'exemple en est fourni par la ville de Montauban, où les maisons autour de la place des Couverts sont bâties en forme de trapèze irrégulier, dont l'originalité réside dans son architecture de doubles galeries de piliers de bois et de façades à colombages, qui sont une proie facile pour le feu. Ce dernier ravage en 1614 les côtés sud et ouest de la ville. La reconstruction demandera un siècle de dur labeur. Le second exemple caractéristique est celui de la ville de Londres en 1666. Le feu se propagea rapidement, car les maisons étaient construites en bois et les entrepôts du port, à proximité du feu, regorgeaient de marchandises. Les équipements d'extinction, en piteux état, s'avérèrent insuffisants, de même que l'approvisionnement en eau; la seule réserve est celle de la Tamise. Les pompiers, aidés des citadins, furent obligés de démolir les maisons afin de créer des pare-feu qui, de plus, furent placés trop près de l'incendie et s'avérèrent donc inefficaces. Cette technique n'est pas sans rappeler les destructeurs de murs à l'époque de l'empire Romain. Ce n'est que le cinquième jour qu'enfin le feu fût circonscrit. La destruction de la ville s'étendait sur deux kilomètres carrés et environ treize mille maisons avaient été brûlées. A la suite de cette catastrophe, les commerçants se réunirent et décidèrent de fonder une société amicale destinée à prendre en charge les dégâts occasionnés à leurs membres du fait du feu et à leur proposer une indemnisation. Ce système convainquit bon nombre de personnes, à tel point que même des particuliers furent volontaires pour cotiser. Le système des assurances-incendie venait de naître. Cette invention fonctionnait à merveille. Les sociétés d'assurances se développèrent rapidement et eurent bien vite l'idée de posséder leurs propres équipes de pompiers. La rentabilité en demeurait flagrante. Cela permettait de contrôler les incendies survenant chez les membres car, chaque fois qu'une maison était assurée, une plaque fort voyante était apposée sur le mur. Lorsque un incendie se déclarait, les équipes de pompiers vérifiaient cette plaque. Dans la négative, ils repartaient ! Cette organisation, avec ce type de système d'assurance, oh combien lucratif mais totalement inégalitaire car seules les personnes aisées pouvaient cotiser, va fonctionner environ pendant cent cinquante ans.

Ce n'est que vers la fin du dix-septième siècle qu’en Europe la lutte contre les incendies va connaître un nouvel essor. Cette dernière est largement confiée aux confréries et c'est vers 1685, à Vienne, que fût créé un des premiers groupes de sapeurs-pompiers professionnels d'Europe. En effet, la ville avait engagé quatre compagnons, chargés de lutter contre les incendies. Ils étaient rémunérés. Pas nombreux, ils utilisaient des gardes vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Ils portaient un uniforme, composé d'une veste blanche et d'un chapeau haut de forme en feutre, sur lequel étaient inscrites les armes de la ville. En 1759, sous le règne de l'impératrice Marie-Thérèse, l'équipe fut portée à dix-sept, plus quatre apprentis menuisiers et quatre ramoneurs.

A ce stade, il convient d'évoquer les premières pompes à incendie, car elles ont entraîné une petite révolution dans le domaine de l'extinction. Actuellement, les pompiers ne peuvent pas s'en passer. Leur apparition est donc primordiale dans l'évolution de l'histoire du feu. Jusqu'à la fin du quinzième siècle, l'usage du seau était de rigueur. Ce moyen demandait une main d’œuvre importante et fonctionnait lorsqu’un point d'eau accessible et possédant une réserve assez importante se trouvait à proximité. A la fin du quinzième siècle, les seringues à eau font leur apparition. Ces dernières avaient été utilisées par les Romains mais avaient disparu à la suite de l'effondrement de l'empire. Mais elles ne connaissent guère de succès, vu leur maniement difficile et leur rechargement extrêmement long.

Vers 1660, l'abbé Michel de Saint-Martin décrit des pompes utilisées en Flandres. Elles sont composées d'un baquet transportable et d'une lance rigide orientable. Elles fonctionnent grâce à un système de simple balancier qui refoule l'eau. En 1687, la ville de Strasbourg équipe chaque corporation de deux pompes à main. Ces dernières sont bientôt nommées « pompes à bras «  car, sans l'action de la force des bras des hommes, elles ne peuvent fonctionner. Au fil du temps, elles vont se perfectionner. Tout d'abord avec un système de double balancier, plus efficace mais plus difficile à actionner, car cela demande des équipes entraînées physiquement et techniquement pour «  pomper «  en cadence régulière. Les Pays-Bas ont fortement influencé les pompes françaises, leurs ingénieurs travaillant depuis longtemps sur des systèmes susceptibles de combattre le feu. En effet, ils avaient déjà compris que les villes représentaient des centres commerciaux et bancaires importants. Lorsque elles sont ravagées par un incendie, c'est tout un commerce qui peut s'écrouler. Cela explique leur avancée dans le domaine de la recherche de création de pompes performantes, par rapport à d’autres pays Européens.

A priori, il semble que l'on ait utilisé les pompes à double balancier pour la première fois, dans la ville de Douai, au début du dix-septième siècle. Puis, le sept mars 1670, Gabriel Nicolas de La Reynie, premier lieutenant de police de Paris, publie une ordonnance qui stipule l'organisation obligatoire de la lutte contre l'incendie. C'est le début d'un nouveau métier : les personnes qui luttent contre le feu vont être reconnues par les autorités, seront rémunérées, pourront s'entraîner techniquement et physiquement. C'est le début, en France, d'une certaine prise de conscience. Le feu peut éclater à chaque instant et, pour le dompter, il faut du personnel entraîné, qui en possède une certaine connaissance et soit donc capable de le maîtriser rapidement. Les personnes vont ainsi bénéficier d'une formation pour la lutte contre les incendies et, sur le terrain, tester leurs connaissances.

Un personnage, fort célèbre, va jouer quelques années plus tard un rôle important : il s'agit de monsieur Du Perier. Ses origines demeurent incertaines. En effet, selon les historiens, Georges Monval, Moreri et Bayle ou bien encore Ronant d'Amat, plusieurs hypothèses se contredisent et divergent, 2 . Cependant, nous retrouvons quatre feuillets ( liasse numéro E.3120 ) dans les archives départementales des Yvelines, qui décrivent son arbre généalogique. Il naît approximativement en 1647 et est rapidement confié à Molière pour devenir son valet. De son premier mariage naissent sept enfants. Après la mort de son épouse, il se remarie et a un fils, François Nicolas, qui lui succédera comme chef des gardes pompes. Il devient comédien auprès de Molière et continue son métier après la mort de ce dernier. Il entre à la Comédie Française, dont il est secrétaire jusqu'en 1705. Lors d'un de ses innombrables voyages, il ramène une pompe à incendie de Flandres, semblable à celle que décrit l'abbé de Saint-Martin. Seulement, monsieur

Du Perier est un personnage malin, qui recherche le profit. Astucieusement, il va effectuer une démonstration devant le roi Louis XIV et, ainsi, obtenir un privilège exclusif, qui lui permettra de construire et d'entretenir des pompes pour une durée de trente années. Il n'est en aucun cas l'inventeur des pompes à incendie, comme plusieurs livres l’affirment. Il a simplement eu l'idée de développer ce procédé pour son profit personnel, et cela grâce au rang qu'il occupait et à sa facilité de rencontrer le roi en personne. En 1722, soixante gardiens vont lui être affectés pour la surveillance et l'entretien de ces pompes. C'est du fait de ces événements que nous pouvons dire qu'il a permis la création du premier corps de gardes pompes en France. Seulement, sachant qu'il possède le monopole, il augmente fortement ses tarifs. A cette époque, les secours sont payants. La conséquence est qu'on ne va plus faire appel à lui pour stopper les incendies, ce qui en entraîne une recrudescence mais, le onze mars 1733, une ordonnance stipule la gratuité des services de secours pour la ville de Paris, avec extension à la totalité du royaume. A la suite de cette ordonnance, les grandes villes vont s'équiper et s'organiser rapidement. C'est le cas de Lyon, qui acquiert des pompes et organise un service de lutte contre l'incendie, assuré par des artisans du bâtiment. Ainsi, dans le souci de s'enrichir, Monsieur Du Perier a, en quelque sorte, bien involontairement et contrairement à l'idée qu'il pensait développer, inventé un processus qui existe encore aujourd'hui : la gratuité des secours.

Nos voisins Allemands, au début du dix huitième siècle, vont également s'équiper de pompes et organiser des sections de pompiers. A Sarrelouis, en 1717, une équipe de sapeurs-pompiers à vocation militaire est créée. Ces derniers portent l'uniforme et sont équipés de mousquets. En 1719, pratiquement toute l'Allemagne, à la suite de plusieurs règlements, fonctionne de cette façon. Suivant les villes, nous voyons apparaître des équipes de pompiers permanents, comme par exemple à Hambourg, où ils sont appelés «  les jaquettes blanches « . Ils effectuent des rondes, de nuit comme de jour, et sont rémunérés. Ces équipes à vocation militaire ont des astreintes de discipline. Les hommes marchent en rang par deux et pointent régulièrement auprès de gardes, responsables d'un secteur. Hambourg possédait déjà à cette époque seize citernes d'eau, vingt cinq pompes et six pompes-bateau. En fonction de l'alerte, différents moyens étaient mis en oeuvre. Ce sont les premiers balbutiements des départs avec les groupes de moyens, en fonction de l'ampleur du sinistre ou du type de l'alerte. Ce système est aujourd'hui étendu à beaucoup de centres de secours Français. La formation est de rigueur en Allemagne. Les équipes militaires travaillent dans la discipline et exécutent les gestes appris lors de leur entraînement.

«  C'est la faute à Voltaire,... c'est la faute à Rousseau,... ». Cette chanson célèbre, chantée par Gavroche sur les barricades en 1830, exprime cette filiation entre la révolution et les Lumières. Que le but recherché soit dépassé, que les disciples aillent plus loin que les maîtres, il est vrai de dire que, tout au long du dix huitième siècle, les grandes idées philosophiques ouvrent la voie de la révolution. Cette période grandiose de notre histoire va changer la France, ses hommes, ses idées et ses comportements.

Le service de lutte contre les incendies n'échappe pas à la règle. Le recrutement, la tenue vestimentaire, ( les attributs de la république remplacent la fleur de lys ), la nomination des chefs sont bouleversés. D'où deux idées antagonistes : soit cela désorganise totalement certains corps, principalement ceux qui sont intégrés de facto dans la garde nationale, soit cela renforce leur efficacité. Ces bouleversements furent la conséquence du changement de la législation Française qui, pendant cette période révolutionnaire, fût extrêmement important, pour ce qui concerne les textes réglementaires relatifs à la lutte contre les incendies.

La première loi importante est celle du 24 août 1790 qui, dans le titre onze, «  confie à l'autorité municipale le soin de prévenir par des précautions convenables et celui de faire cesser par la distribution des secours nécessaires les accidents et fléaux calamiteux tels que les incendies,... ».En fait, cela oblige les municipalités à prendre toutes les précautions possibles pour lutter contre ceux-ci. Cette loi sera réaffirmée par celle du 5 avril 1884, puis codifiée dans le code des communes. Le 6 octobre 1791, une loi oblige celles-ci à disposer de pompes et de seaux et, le 5 novembre 1792, la convention décrète que le service des pompes devient un objet de dépense locale. Puis plusieurs lois qui concernent la réorganisation des services incendies vont être également promulguées mais ne seront pas appliquées et resteront aux oubliettes. Seules les deux circulaires du dix huit décembre 1804 et du premier mars 1810 seront mises en place, non sans fierté, dans quelques villes comme Lille, Bordeaux et le Puy en Velay. Elles permettent l'installation de sapeurs-pompiers régis par un règlement uniforme, après une enquête menée sur les corps existants, en tenant compte de leur équipement, de leur coût et de leur composition. Pendant ce temps, le Comte Dessoles rédige des travaux sur l'organisation de ces services incendies, mais ils n'aboutiront pas. Il faut attendre le six février 1815 pour qu'une circulaire du Duc de Montesquiou-Fezensac 3 , alors ministre de l'extérieur de Louis XVIII, définisse un cadre d'organisation générale. Cette circulaire ordonne aux préfets de constituer un service civil de lutte contre le feu dans chacune de leurs communes. Le terme «  civil «  commence à apparaître et à se démarquer des corporations militaires.

Les hommes employés à ce service sont directement placés sous la responsabilité du maire, qui a l'obligation de rédiger un règlement et d'assurer l'entretien du matériel incendie ainsi que son utilisation à l'entraînement. Le terme «  manœuvre «  commence également à apparaître et signifie aux pompiers que, lorsqu'ils ne sont pas en action contre un incendie, ils doivent s'entraîner aux maniement des pompes et aux manœuvres à exécuter lors d'un sinistre. Bien que le terme « formation «  ne soit pas cité, il est inclus dans les méthodes d'entraînement. Tel monsieur Jourdain, les sapeurs-pompiers font de la formation sans le savoir véritablement. De plus, Montesquiou ajoute, dans sa circulaire, que le maire doit désigner les hommes non soldés mais dispensés du service de la garde nationale. En contre-partie, ces derniers doivent obligatoirement appartenir à un corps de métier du bâtiment, du cuir ou du métal. L'engagement des femmes demeure interdit, vu la force physique que requiert le métier de pompier et également parce que les métiers du bâtiment, eux non plus, ne sont pas autorisés aux femmes. Montesquiou a, semble-t-il, oublié que les ribaudes, par un arrêt royal du huit décembre 1472, sous Louis XI, étaient dans l'obligation de participer à la lutte contre les incendies sous peine d'être bannies et expulsées de la ville !

Le maire doit proposer les sous-officiers et les officiers. Mais c'est le préfet qui possède l'autorité pour les nommer. A cette époque, certains corps de sapeurs-pompiers possèdent des fusils, malgré l'avis contraire des autorités. En fait, la commune n'est pas totalement libre de la structure de son corps.

Le premier juillet 1810, sous le premier Empire, un incendie d'une rare violence se produit à l'ambassade d'Autriche et fait plusieurs victimes, notamment dans la haute société. Les gardes pompes, dont l'administration avait été transformée par la révolution, ne furent pas efficaces, selon l'avis de Napoléon. Par l'intermédiaire de son ministère de la guerre, le 10 juillet de la même année, il fait donc protéger ses demeures et ses camps par des sapeurs de la garde impériale, et non plus par des gardes pompes. Les sapeurs étaient simplement des militaires du grade de sapeur. Il semble donc que ce terme soit né ce jour d'été 1810. Le huit septembre 1911, Napoléon crée à Compiègne un bataillon de sapeurs-pompiers, dont la tâche spécifique est la lutte contre les incendies de la ville de Paris. Il est constitué de quatre compagnies de cent quarante deux militaires, qui proviennent de l'infanterie. Seulement, ils se voient attribuer un rôle de police et de sûreté, ce qui va entraîner des querelles d'autorité.

Après la révolution de 1830, qui a revigoré le prestige de la garde nationale, l'entrée dans cette dernière représente un rêve pour beaucoup de sapeurs-pompiers, mais aussi et surtout pour les corps des petites villes et des villages. En effet, leur appartenance est synonyme de maintien du service de lutte contre l'incendie. Le rejet, quant à lui, entraîne la formation de milices populaires de lutte contre l'incendie, mais également contre les calamités. Cette double activité, au lendemain de la révolution, ne convient pas à tous les sapeurs-pompiers. Mais une loi du 22 mars 1831 préconise la formation de compagnies ou de subdivisions chargées à la fois du service d'ordre, d'honneur, d'escorte et incendie. Désormais, et jusqu'en 1871, il existe deux sortes de corps soldés, donc municipaux, qui relèvent de la circulaire de 1815, indépendamment de toute organisation militaire, et des corps non soldés, inclus dans la garde nationale. Ces derniers sont armés, élisent leurs chefs, achètent leur tenue et paient parfois un droit d'entrée assez élevé. Seules les dépenses générales restent du domaine municipal. Cette appartenance, qui impose le port et le maniement des armes, explique en grande partie la survivance d'une hiérarchie et d'une discipline de type militaire, encore vivace aujourd'hui. A cette époque, la formation est essentiellement basée sur la structure militaire et elle est considérée comme de l'instruction. Le dix huit mars 1838, un texte qui réglemente les cinq compagnies d'ouvriers pompiers des arsenaux de la marine permet de créer les premiers pompiers au service exclusif de l'armée. Ces derniers sont remarquablement encadrés et fortement équipés. Leur instruction est rigide, d'où une efficacité réelle sur le terrain. Cela a pour conséquences que les villes qui abritent un arsenal, telles que Cherbourg, Brest, Rochefort,...,se retranchent derrière ces compagnies, ce qui leur évite d'équiper convenablement leur propre compagnie.

En 1845, le lieutenant-colonel Paulin, des sapeurs-pompiers de Paris, tente de militariser les corps des grandes villes. Il veut aussi remplacer les militaires par des volontaires en cas de guerre. Mais sa tentative échoue. Et le onze janvier 1852 Napoléon III décide de dissoudre la garde nationale. Il laisse en place les compagnies de sapeurs-pompiers, se réserve le droit de la nomination des officiers et institue un conseil de recensement composé du chef de corps et de deux délégués du préfet. En fait, il s'agit tout simplement d'un contrôle renforcé du gouvernement sur les sapeurs-pompiers. Le 14 juin de la même année, le ministère de l'intérieur réglemente le premier uniforme pour l'ensemble du territoire Français. Il est composé de deux tenues :une de parade et une de travail et de manœuvre. La seconde comporte une veste bleue à boutons d'uniforme, un ceinturon de manœuvre, un pantalon de treillis et un casque en cuivre jaune. Seulement , à cette époque, le recrutement des volontaires est difficile. La dispense du service de la garde nationale en compensation des risques encourus ne demeure plus un motif. La bourgeoisie villageoise boude ces fonctions, moins valorisantes que celles de la garde nationale. Les personnes qui appartiennent aux professions libérales, les rentiers, les employés aux écritures sont introuvables dans les compagnies. De même, l'obligation d'assurer des escortes ou d'assister à la messe rebute les artisans du bâtiments, qui sont de tendance républicaine. En conclusion, il faut exercer des pressions pour que les personnes signent leur enrôlement. Leur motivation pour se former demeure ainsi très faible. En 1867, nous comptabilisons deux cent quatre vingt mille sapeurs-pompiers, répartis entre huit mille sept cent communes.

Nous voyons donc le rôle de pionniers que jouent les pompiers dans une France encore très rurale. En effet, ils représentent un corps exemplaire aux yeux de la population et c'est certainement à cette époque que leur image de marque commence à prendre de l'essor. Ils utilisent des pompes, donc ils effectuent un travail mécanique. Ils participent aux premiers concours de manœuvres et ainsi voyagent beaucoup pour l'époque. Ce sont eux qui adhérent aux premières sociétés de secours mutuels, qui garantissent contre les accidents et versent une pension de retraite. Enfin, ils reçoivent une presse professionnelle : le journal des officiers des gardes nationales, fondé en 1848, et celui des sapeurs-pompiers, créé, quant à lui, en 1855. Mais le 25 août 1871, la Garde Nationale est définitivement et officiellement dissoute.

Notes
2.

revue « le sapeur-pompier »- juin 1998

3.

annexe n° I pages 1 à 4