Nos travaux s’inscrivent dans le courant des recherches en Sciences de gestion qui elles-mêmes appartiennent au champ plus vaste des sciences sociales. La gestion des ressources humaines appartient à ce domaine. Nous aborderons successivement les spécificités propres aux méthodes de recherche en gestion des ressources humaines dans leurs objectifs et leurs approches.
L’observation sociale scientifique repose sur deux fondements méthodologiques :
La recherche en gestion des ressources humaines fait appel à d’autres disciplines scientifiques tant du point de vue conceptuel et théorique que méthodologique. Sur le plan méthodologique, la gestion des ressources humaines emprunte, principalement à trois disciplines voisines que sont la sociologie, la psychologie et le marketing. En effet, toutes trois étudient les attitudes et les comportements humains.
Les objectifs d’une recherche en gestion des ressources humaines sont variés et tentent tout à la fois :
Suivant la nature de son objet de recherche et des moyens dont il dispose, le chercheur va utiliser une des différentes approches de recherche utilisées fréquemment en gestion des ressources humaines qui sont l’expérimentation, l’expérience de laboratoire, l’expérience sur le terrain, l’expérience à partir de simulation et la quasi-expérimentation.
Les recherches qui relèvent de l’expérimentation se caractérisent pour l’essentiel par l’étude de liaisons causales entre variables. Les forces et les faiblesses de l’expérience de terrain sont à peu près symétriques de l’expérience de laboratoire, la différence principale vient du statut des participants. Dans un cas, le chercheur mène ses travaux en dehors de son champ d’étude, dans l’autre, il est inclus.
Comme nous le développerons dans les chapitres I et II, nos travaux sont issus de l’expérience de terrain pour tenter de résoudre un problème de gestion des ressources humaines qui se pose à nous en tant que Directeur des ressources humaines dans notre milieu de travail. Ils sont aussi une expérimentation car la solution retenue, dans ce cas là, est la révision d’un instrument de cette gestion des ressources humaines dont nous connaissons les composantes et les liens avec notre problématique. Ils mettent en relation des variables connues que sont les compétences, les rémunérations, les performances et leurs influences sur le potentiel humain, l’organisation du travail et leurs effets sur les comportements.
Igalens J. et Roussel P. (1998) 44 notent que, dans les expériences de terrain, la validité interne est faible, en particulier en ce qui concerne le contrôle des variables indépendantes, et la validité externe est davantage assurée. Ils citent l’expérience de l’effet « Hawthorne » où d’autres études n’ont pu reproduire l’effet malgré le contrôle de trois variables majeures. Nous ne pensons pas que la validité interne de nos travaux soit faible. En effet la mise en œuvre d’un système de classification basé sur les compétences a fait l’objet de concertations préalables avec les acteurs de l’entreprise pour s’assurer de la pertinence des variables mise en jeu. La validité externe de nos travaux ne peut être vérifiée puisqu’elle correspond aux limites de ceux-ci dans le champ de l’entreprise où nous sommes intervenus.
De plus nous avons pu concilier les contraintes de l’expérimentation, qui prend du temps, et celles du terrain dans le champ des ressources humaines. La résolution du problème qui s’est posé à nous s’est étalée sur une période de cinq ans, sans avoir à prendre en compte l’exigence de rapidité de la recherche d’une solution, ce qui est toujours un frein pour un responsable qui veut rapidement résoudre le problème qui se pose à lui.
En nous appuyant sur la typologie des chercheurs proposée par Eilon (1974) 45 qui s’applique bien à la gestion des ressources humaines : le chroniqueur, le dialecticien, le déchiffreur d’énigmes, l’empiriste, le classificateur, l’iconoclaste et l’agent de changement, nous clarifions notre positionnement de chercheur au sein de l’entreprise comme étant celui d’un agent de changement qui aide et cherche à influencer les acteurs. Il nous renseigne sur les relations interactives et transformatives que nous entretenions avec les acteurs de l’entreprise du fait de notre statut de Directeur des ressources humaines, et que nous retrouvons comme éléments essentiels dans la recherche-intervention.
Concernant l’agent de changement, Igalens et Roussel (1998) 46 soulignent que deux questions se posent à son sujet :
Nous pensons pouvoir répondre que notre statut de Direction des ressources humaines nous autorisait à intervenir sur les outils de gestion des ressources humaines remis en cause suite à la demande formulée par la Direction Générale. De plus les mouvements alternatifs que nous avons effectués entre l’entreprise et le centre de recherche nous ont permis de prendre le recul par rapport à nos observations et construire progressivement un corps de connaissances scientifiques. Nous y reviendrons à la section 0.3.3. de cette partie. Notre positionnement d’agent de changement ainsi défini nous amène à parler dès à présent de la méthodologie de recherche-intervention.
Nous verrons d’abord ses particularités pour l’aborder ensuite sous l’angle socio-économique.
IGALENS J. et ROUSSEL P., « Méthodes de recherche en gestion des ressources humaines » Ed. Economica, 1998, 203 p. op. cit.
EILON S., « Seven faces of research », Omega, vol. 2, n° 1. cité par IGALENS J. et ROUSSEL P., « Méthodes de recherche en gestion des ressources humaines » Ed. Economica, 1998, 203 p. op. cit.
IGALENS J. et ROUSSEL P., « Méthodes de recherche en gestion des ressources humaines » Ed. Economica, 1998, 203 p. op. cit.