5.2.1 La compétence individuelle

‘« La compétence s’analyse comme un ensemble de savoir-faire opérationnels validés, un savoir agir. ». « La compétence n’est pas un état, c’est un processus. L’opérateur compétent est celui qui est capable de mobiliser, de mettre en œuvre, de façon efficace, les différentes fonctions d’un système où interviennent des sources aussi diverses que des opérations de raisonnement, des connaissances, des activités de mémoire, des évaluations, des capacités relationnelles ou des schémas comportementaux. Elle se conjugue au gérondif » ( Le boterf, 1994) 321 .’ ‘« Elle définit les capacités d’une personne et a un caractère prédictif. Elle intègre des modalités variées, identifiables et utilisables dans différents contextes de gestion » (Aubert, Gilbert, Pigeyre, 1993) 322 . ’

Gilbert et Parlier (1992) 323 définissent la compétence comme « un ensemble de connaissances, capacités d’actions et de comportements structurés en fonction d’un but dans un type de situation donnée ». La compétence est finalisée.

« La compétence est un ensemble relativement stable et structuré de pratiques maîtrisées, de conduites professionnelles et de connaissances que des personnes ont acquises par la formation et l’expérience et qu’elles peuvent actualiser sans apprentissage nouveau dans des conduites professionnelles valorisées par leur entreprise ». (Gilbert, Thionville, 1990) 324 .

Selon Meignant (1990) 325 , la compétence est le savoir-faire opérationnel validé. Le savoir-faire est la capacité à faire, et pas seulement connaître. L’opérationnel est la mise en œuvre concrète de ce savoir-faire en situation de travail. La compétence est validée lorsqu’elle est reconnue par l’environnement.

Pour Courpasson et Livian (1991) 326 , la compétence dans son acception récente est individuelle, liée à des caractéristiques personnelles du salarié. Ces caractéristiques, selon le triptyque de Davignon (1991) 327 , sont :

  • - les savoirs : connaissances générales et spécifiques ;
  • - les savoirs-faire : expérience pratique et « tour de main » ;
  • - les savoirs-être : aptitudes et qualités personnelles.

Ces différents savoirs sont repérés et évalués en situation de travail. Cette définition rejoint celle de la compétence finalisée de Gilbert (1992) 328 .

Dans son ouvrage, Bommensath (1987) 329 définit la compétence des individus comme comprenant toujours trois caractéristiques :

  • - le savoir est un ensemble de savoirs finaux issus des filières de connaissances, un mix de savoirs techniques et managériaux ;
  • - le savoir-faire est issu du fruit de l’expérience et de l’apprentissage ;
  • - le savoir-vivre est l’expression de la synergie potentielle des individus lorsqu’ils savent travailler en groupes.

D’autres auteurs ont apporté des éléments de compréhension du concept de compétence. Nous retenons, de toutes ces définitions, les éléments constants qui permettent de définir la compétence individuelle, que résume Dejoux (1996) 330 :

  • - elle possède un caractère opératoire, finalisé par rapport à une situation de travail, à un projet ou à un objectif stratégique. La compétence n’existe que lorsqu’elle est mise en œuvre « on est compétent pour quelque chose » ;
  • - c’est une mise en situation (principe d’action) dans la mesure où elle n’a de sens que par rapport à l’action ;
  • - elle est de nature contingente, contextualisée. Elle ne précède pas l’action, elle lui est étroitement liée. Elle ne s’exprime que par rapport à une situation de travail et évolue en fonction de ces situations ;
  • - elle est un processus de construction permanente (principe dynamique) qui s’inscrit dans le temps.
  • - elle est une construction de nature combinatoire. Elle met en jeux de nombreux éléments qui ne s’additionnent pas mais s’imbriquent comme un puzzle ;
  • - elle est un construit social, en terme d’interactions entre le sujet et son objet. La compétence est le résultat d’une représentation que l’on se fait de la réalité et non celle de la recherche d’une réalité immuable ;
  • - elle possède un caractère transversal dans la mesure où elle s’adapte parfaitement à des emplois polyfonctionnels. Elle sert de référence aux actions de formation, aux systèmes de rémunération et constitue le support à l’évaluation. Elle est un dénominateur commun pour l’ensemble des métiers d’un secteur professionnel. Elle est commune à une famille d’emplois. Elle n’est pas liée à une technicité particulière mais correspond à un élargissement du métier initial à cause de l’évolution de l’organisation ou du développement d’un produit ;
  • - elle s’inscrit dans un processus d’apprentissage car les représentations et les styles cognitifs sont différents suivant les individus ;
  • - elle est apprise par un apprentissage guidé, en formation initiale ou continue, ou par un apprentissage en formation continue ;
  • - elle prend naissance à la suite de sa reconnaissance par un collectif sur le principe normatif du regard d’autrui. Elle fait référence au jugement des autres, de la hiérarchie. C’est la validation d’une compétence qui rend compétent ;
  • - elle possède une face cachée. La partie visible correspond aux capacités, aux savoir et aux attitudes. La partie invisible renvoie au rôle social, à l’image de soi, aux motivations, à la passion, aux valeurs… ;
  • - elle a une utilité économique. Elle est une ressource à maximiser en fonction des choix stratégiques de l’entreprise. Pour l’individu, elle lui permet de se valoriser à l’extérieur du contexte professionnel. Elle lui permet de gérer sa trajectoire professionnelle de manière proactive et volontariste.

Cette multiplicité des éléments permanents, qui définissent la compétence, montre les différents domaines dans lesquels nous pouvons la trouver. La Figure 5-1, page suivante, résume la richesse de cette notion et les disciplines qu’elle influence.

Figure 5- 1 : l’approche transdisciplinaire de la notion de compétence
Figure 5- 1 : l’approche transdisciplinaire de la notion de compétence

Notes
321.

LE BOTERF G., « De la compétence» » 1994 Ed. d’organisation p. 16-18, cité parPERETTI J.M., « Ressources humaines », Ed. VUIBERT, 7ème édition, 2002, 577 p.op.cit.

322.

AUBERT J., GILBERT Q., PIGEYRE F., « Savoir et prévoir, les compétences en question », PUF 1993, cité parPERETTI J.M., « Ressources humaines », Ed. VUIBERT, 7ème édition, 2002, 577 p.op.cit.

323.

GILBERT P. PARLIER M. « La gestion des compétences. Au-delà des discours et des outils, un guide pour l’action des DRH » Personnel, 02/1992, n° 330 ANDCP p. 42-46

324.

GILBERT P., THIONVILLE R., « Gestion de l’emploi et évaluation des compétences » ESF, 1990

325.

MEIGNANT A.,« Analyse des emplois, formation et décision de gestion » Education permanente 12/1990 n° 105 p.21

326.

COURPASSON D. LIVIAN YF., « Le développement récent de la notion de compétence. Glissement sémantique ou idéologie ? » Article parue dans la Revue de GRH, 10/1991 n° 1 Ed. ESKA p. 3-10

327.

DAVIGNON H., « La gestion prévisionnelle des compétences » L’enjeu humain 12/1991 vol.2, Ed. Productions publicitaires, p. 265-267.

328.

GILBERT P. PARLIER M. « La gestion des compétences. Au-delà des discours et des outils, un guide pour l’action des DRH » Personnel, 02/1992, n° 330 ANDCP p. 42-46

329.

BOMMENSATH M. « Manager l’intelligence de votre entreprise », Paris, Ed. d’Organisation, 1987, p.31, cité par BEYSSERE DES HORTS.

330.

DEJOUX C., « Organisation qualifiante et maturité en gestion des compétences » Colloque de l’AIMS, IAE Lille, 1996.