1.1.1. La découverte des rayons X et de la radioactivité 11

La découverte des rayons X par Wilhelm Conrad Röntgen fin 1895 marque incontestablement une date clé pour l'histoire de l'énergie atomique, pour plusieurs raisons : d'une part, les propriétés physiques des rayons X sont immédiatement utilisées par le corps médical pour traiter certaines maladies; d'autre part, la découverte des rayons X initie une révolution dans la physique ouvrant la voie aux découvertes du début du XXe siècle sur la constitution de la matière.

Sur le plan de la physique, plusieurs déductions sont en effet tirées de la découverte des rayons X. Röntgen découvre que les rayons X ont le pouvoir de rendre un gaz conducteur de l'électricité, à travers un phénomène que J. J. Thomson explique comme étant dû à l'ionisation des atomes. Une seconde déduction des rayons X conduit à la découverte de la radioactivité. On avait observé que la production des rayons X par l'impact des rayons cathodiques sur les parois de verre du tube à décharge était accompagnée de la fluorescence du verre. Plusieurs scientifiques examinèrent alors différents matériaux susceptibles de donner naissance à la fluorescence pour voir s'ils émettaient également des rayonnements pénétrants. L'un de ces scientifiques était Henri Becquerel qui s'intéressait aux sels d'uranium. En mars 1896, il découvre que ces sels émettent des rayonnements qui, comme les rayons X, impressionnent la plaque photographique à travers un papier noir. Becquerel pense d'abord que cette propriété est une conséquence de la fluorescence induite par le soleil sur les cristaux, avant de conclure que l'émission du rayonnement est une propriété intrinsèque de l'uranium; il baptise ces rayonnements particuliers «rayons uraniques». C'est ainsi que quelques mois après la découverte des rayons X par Röntgen, Henri Becquerel met en évidence ce que Marie Curie qualifiera deux ans plus tard de radioactivité. Marie Curie, sur les conseils de Pierre Curie, reprend en effet les expériences de Becquerel mais de façon plus quantitative en se référant à l'ionisation produite dans l'air par ces rayonnements. Elle montre ainsi que d'autres corps, comme le thorium, émettent aussi naturellement des rayonnements. En Juillet 1898, avec Pierre Curie, elle annonce la présence d'un nouvel élément, le polonium, puis, en décembre 1898, l'existence du radium, ce dernier étant des millions de fois plus actif que l'uranium. De très nombreuses expériences sont entreprises par les scientifiques pour découvrir de nouveaux éléments et déterminer les lois de la radioactivité. Ainsi, Ernest Rutherford, s'intéressant à l'ionisation produite par l'uranium, découvre en 1899 que les rayonnements émis sont de deux sortes : les rayons  et les rayons . Rutherford et le chimiste d'Oxford Frederick Soddy expliquent ainsi en 1900 que le phénomène de radioactivité consiste en ce que chaque seconde, une certaine fraction des atomes d'un matériau radioactif se transforme spontanément un atomes d'une autre sorte, en émettant une particule. Cette même année, Paul Villard met en évidence un troisième rayonnement des matériaux radioactifs, les rayons gammas (. 12

Mais rapidement, les scientifiques constatent que ces rayonnements ionisants émis par radioactivité produisent des effets sur l'homme, nocifs mais aussi curatifs : Henri Becquerel, peu de temps après sa découverte s'aperçoit qu'un tube de matière radioactive, gardé dans la poche de sa veste, a provoqué un érythème sur sa peau, comparable à celui d'un coup de soleil. En 1901, Pierre Curie observe également les effets de brûlure des rayonnements en plaçant une source de radium pendant plusieurs heures sur son propre bras. Quelques mois plus tard, il entre en contact avec des médecins dermatologues de l'hôpital Saint-Louis à Paris qui utiliseront les effets des rayonnements dans un but thérapeutique pour traiter certaines affections cutanées.

Notes
11.

Ce résumé de la découverte de la radioactivité s'inspire en particulier de l'ouvrage de Pierre Radvanyi et Monique Bordry, La Radioactivité artificielle et son histoire, Seuil, Paris, 1984, et de l'article de Jean Teillac et Annie Chetioui, «Radioactivité», Encyclopaedia Universalis, 1998, pp. 448-454;

12.

Frédéric Joliot et Irène Curie mettront en évidence la radioactivité artificielle en 1934, c'est-à-dire la possibilité pour certains éléments d'être rendus radioactifs artificiellement : ils se désintègrent alors par émission d'un électron positif.