3.4.4.3. François de Vathaire et le GTSP

Pour animer ce groupe, Bourgeois a recruté François de Vathaire. Premier responsable du GTSP (prononcer «JetSep»), M. de Vathaire signe les premiers textes spécialement dédiés à la sûreté nucléaire. En effet, Bourgeois est à partir de 1962 responsable du DEP, le département dont la tâche est le développement des réacteurs, et c'est sur cet aspect développement que Bourgeois s'exprime lors des colloques internationaux. Il faut bien garder en mémoire que Bourgeois porte cette double casquette : développeur, et responsable de la sûreté au plan technique pour le CEA. Il incarne un peu dans sa personne cette double aspiration 226 .

François de Vathaire sort de l'Ecole Polytechnique, promotion 1950, dans une «petite botte». il fait l'Ecole Nationale Supérieure du Génie Maritime (GM, promotion 1955) et s'occupe donc dans un premier temps de contrôler les navires pour la Marine. Il participe à l'étude du réacteur de ce qui aurait dû être le premier sous-marin nucléaire français. 227 Mais ne disposant que d'uranium naturel, d'eau lourde et de glycine, ce qui ne laissait qu'un bilan de réactivité bien maigre, le projet de moteur des ingénieurs de la Marine ne sera jamais construit car trop lourd, ce qui a valu à ce navire l'inélégant sobriquet de «veau marin». C'est donc en tant qu'expert de la Marine au CEA que François de Vathaire se forme aux questions atomiques et de protection. En 1958, il est détaché par la Marine au CEA. Responsable du GTSP dès le début, c'est à la demande de M. Bourgeois qu'il est nommé adjoint au Chef du Département des Etudes de Piles en 1964, «pour permettre à M. de Vathaire d'assurer efficacement la liaison entre les différents services s'occupant de sécurité des réacteurs et de coordonner les programmes d'études». 228 Ne croyant plus en l'avenir du nucléaire en France, François de Vathaire quitte le CEA en 1970 lors des réorganisations de la fin des années 60. 229

Notes
226.

C'est ce que nous verrons plus loin, quand Bourgeois parle des marges de sécurité et de l'importance des études de sûreté pour le développement de l'énergie atomique. Il est nécessaire de bien connaître les marges de sûreté pour permettre de les réduire et ainsi diminuer les coûts des réacteurs et assurer leur compétitivité économique, sûreté et compétitivité sont liées, argumente Bourgeois.

227.

D'après un entretien avec Jean Rastoin, qui suit le même parcours que M. de Vathaire. Jean Rastoin est également ancien élève de l'Ecole Polytechnique (1951), ingénieur du Génie Maritime (1956), puis expert de la Marine pour les questions de sûreté et de protection des sous-marins. Rastoin est détaché au CEA en 1958 pour suivre l’aventure des sous-marins. Après s'être occupé des protections des réacteurs français, il dirige le Département de Mécanique et de Thermique du CEA, puis l’étude des réacteurs du CEA, avant d'être nommé Directeur de l’Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire en 1991 et de terminer sa carrière comme Inspecteur Général au CEA.

228.

Note de Bourgeois, chef du DEP au cabinet du HC, 25.11.64.

229.

Cela peut faire sourire aujourd'hui, mais étant donné les faibles prix du pétrole de la fin des années soixante, il était presque officiel que le gouvernement souhaitait abandonner, avec la filière UNGG, le développement du nucléaire en France. F. de Vathaire rejoint ensuite l'industrie navale privée, puis l'Institut National des Transports. Il est décédé en 1980.