6.1.2.2. Le rapport de sûreté d'EDF1

Du côté d'EDF, une structure de sûreté fut effectivement mise sur pied sous forme d'un Sous-Comité d'Etudes Préliminaires des incidents et accidents nucléaires (SCEPIAN), qui s'est transformé en 1960 en CEPS (Comité pour l'étude des problèmes de sécurité) afin de compléter le rapport de sûreté d'EDF1 et le présenter à la Sous-commission de sûreté des piles. Le contact avec la CSIA est effectivement recherché par EDF, et au plus haut niveau, puisque quelques jours avant la réunion du 21 décembre de la Commission, Roger Gaspard lui-même, alors Directeur Général d'EDF, a demandé par lettre à Francis Perrin l'examen par la CSIA de la sûreté de Chinon A1.

Le témoignage de Georges Lamiral, outre un récit très détaillé du développement par la Direction de l'Equipement d'EDF des premières centrales nucléaires, est d'une grande valeur pour ce qui concerne les questions de sûreté : Lamiral était en effet présent aux premières séances de la CSIA consacrées aux réacteurs EDF. Il a pu défendre le point de vue d'EDF au cours de plusieurs réunions de travail avec la SCSP.

Lamiral se souvient de la qualité des relations EDF-CSIA, confirmant en quelque sorte le bien-fondé de l'attitude de Bourgeois consistant à établir un dialogue constructif : «Des relations furent programmées entre les représentants d'EDF, et la Sous-Commission de Sûreté des Piles présidée par M. Jean Bourgeois, qui travaillèrent en symbiose et les rapports qui s'établirent entre les deux organismes à cette occasion furent parmi les plus productifs.» 364 L'un des premiers travaux du groupe CEA-EDF consista à établir le plan du rapport de sûreté à présenter à la CSIA. «Après discussion et comparaison avec les pratiques anglaises et américaines, il fut décidé que le rapport comporterait 12 livres intitulés respectivement : Description du site - installations générales du site - notice descriptive de la tranche - choix et mise en œuvre des matériaux - montages et essais de mise en service - organisation et formation du personnel - codes et manœuvres - protection biologique - réglages et instrumentation - rejets d'effluents actifs - étude des accidents - rapport de sûreté résumé. Le rapport une fois discuté et mis au point représentait plus de 1700 pages de texte. Les 11 premiers livres furent diffusés le 1er février 1962; le livre XII ou rapport de sûreté résumé fut diffusé le 31 août 1962 et l'ensemble fut soumis à la CSIA, le 6 décembre 1962, avant la divergence du réacteur.» 365

Témoignant du fait que le vocabulaire n'est pas encore normalisé, le rapport d'EDF est intitulé rapport de «sécurité». Le livre XII du rapport, ou rapport de sécurité résumé comprend près de 150 pages. Il se décompose en deux parties sensiblement égales. La première présente une «Analyse de la sécurité», tandis que la deuxième résume chacun des 11 livres du rapport complet.

L'essentiel du chapitre consacré à l'analyse de la sécurité consiste à présenter les différents systèmes d'EDF1 importants pour la sécurité, et leur fonctionnement. Ensuite l'analyse des accidents distingue ceux considérés comme «techniquement possibles» de «l'accident maximal prévisible». Ce dernier accident, celui «qui peut être considéré comme le plus grave», serait provoqué par une rupture du circuit de CO2. L'hypothèse d'une rupture du caisson métallique a été exclue car il a subi une épreuve hydraulique à 1,5 fois le timbre et l'on prévoit de vérifier en fonctionnement que la répartition des contraintes en marche normale reste analogue à celle de l'épreuve. Par contre, l'hypothèse de rupture d'une tuyauterie principale a été étudiée ainsi que ses trois conséquences possibles : le risque de désorganisation de l'empilement de graphite pouvant empêcher l'action des dispositifs de sécurité, le risque d'endommagement des autres barrières des produits de fission, et le risque de libération de gaz radioactifs à l'extérieur de la sphère compte tenu de son étanchéité relative.

Notes
364.

Lamiral, op. cit., p. 290.

365.

Ibid., p. 290.