14.2.1. Une annonce de la CFDT

Au cours de deux conférences de presse de septembre 1979, la CFDT rendait publique l'existence de fissures dans l'acier des tubulures de sorties des cuves de réacteur et dans la plaque tubulaire des générateurs de vapeur. Ces fissures causées par des défauts de fabrication, concerneraient 832 toutes les centrales du programme.

Les premières fissures avaient été découvertes dans le courant de l'année 1978 sur des plaques tubulaires de générateur de vapeur dans les ateliers de Framatome à Châlon-sur-Saône. Les plaques tubulaires sont des pièces massives de 3,5 m de diamètre et 53 cm de hauteur, séparant la partie basse du générateur de vapeur par laquelle entre et sort l'eau primaire de la zone où l'eau secondaire s'échauffe au contact de 3 361 tubes en U parcourus par l'eau primaire. La face inférieure de ces plaques en contact avec l'eau du circuit primaire est revêtue d'un «beurrage» de 7 à 12 mm d'un alliage d'inconel, qui préserve le métal de base de la corrosion. Les fissures ont été découvertes sous le revêtement d'inconel au cours de la fabrication d'une des dernières tranches du programme PWR 900 (la 21ème).

Le même procédé de revêtement, mais en inox, est utilisé sur les cuves de réacteur. C'est au cours d'un contrôle au printemps 1979 dans les ateliers de Framatome que des fissures ont également été décelées sur les tubulures d'une cuve. Les tubulures sont des pièces assurant la liaison entre la cuve du réacteur et les tuyauteries des trois boucles primaires. Il y a deux tubulures par boucle, l'une pour l'arrivée de l'eau froide dans le réacteur et l'autre pour la sortie de l'eau chaude. Les tubulures par lesquelles sort l'eau chaude sont soumises à des cyclages thermiques très importants, les températures pouvant varier de 100° à l'arrêt à 350° C en fonctionnement.

Le dépôt du revêtement se fait par soudage en un certain nombre de couches successives pour atteindre l'épaisseur voulue. Comme toute opération de soudure, le dépôt de métal porté à fusion induit des contraintes thermiques importantes dans le métal, qu'on limite par une montée progressive en température de la plaque avant l'opération de beurrage : c'est l'opération de préchauffage pendant laquelle la pièce est maintenue en température (200° environ) et le revêtement est déposé. L'opération terminée, il est nécessaire de baisser très progressivement la température de la plaque. Il est procédé ensuite à un post-chauffage, ou détentionnement, qui consiste à placer le générateur de vapeur dans un four, à une température d'environ 600°C de façon à homogénéiser la structure et à réduire les tensions internes. Après dépôt de la première couche de métal, des abrasions de surface et des contrôles sont effectués à l'aide d'un dispositif à ultra-sons.

Tandis que la première passe de revêtement a toujours fait l'objet d'un préchauffage et d'un post-chauffage, les couches suivantes ne faisaient pas l'objet de telles précautions, jugées superflues 833 pour les plaques comme les tubulures. Cet «allègement» du procédé s'expliquerait par des impératifs de planning et certainement aussi par des motifs économiques, qui peuvent être également à l'origine de l'apparition des fissures pour les plaques tubulaires. En effet, la fissuration a surtout été rencontrée sur les plaques revêtues côté «tête» du lingot d'acier dont elles étaient issues. Or cette partie du lingot de coulée comporte de nombreuses impuretés et défauts divers. Dans chaque lingot sont découpés trois à quatre plaques. Les lingots auraient été insuffisamment chutés, et des zones comportant une plus grande quantité de défauts auraient ainsi été recouvertes.

A la suite de ces découvertes, toutes les plaques tubulaires qui étaient en usine ont été testées et réparées : chacune comportait entre 30 et 200 défauts, dont la longueur variait jusqu'à 15 et 20 mm de long pour 6 à 8 mm de profondeur.

Notes
832.

Nous nous appuyons ici sur le texte présenté en Annexes du N°29 de La Gazette Nucléaire, organe du Groupement de Scientifiques pour l'Information sur l'Energie Nucléaire, de septembre 1979, qui livre à ses lecteurs une part importante des dossiers de presse qu'a diffusés la CFDT au cours des conférences de presse.

833.

Bulletin sur la sûreté des installations nucléaires, N°11, septembre-octobre 1979, p. 11.