18.5.3. Le changement de contexte pour EDF

Du côté d'EDF, le tournant des années 80-90 marque également une période difficile qui voit les premières visites décennales pour le palier CP0 (Fessenheim et Bugey), conformément à la législation sur les appareils à pression.

Mais outre ce bilan de santé pour les tranches après environ dix ans de fonctionnement, l'arrêt prolongé des réacteurs est l'occasion de procéder à des réévaluations de sûreté ¹⁰⁷² pour adapter le niveau de sûreté des premières centrales à celui des dernières construites. C'est l'occasion pour l'autorité de sûreté d'exiger le renforcement de certains dispositifs, des modifications pour d'autres en fonction de l'évolution des connaissances et de la doctrine. C'est une spécificité de la législation française en matière nucléaire par rapport notamment aux Etats-Unis, qui veut que ce n'est pas parce qu'une installation a été jugée conforme aux normes en vigueur à un moment donné qu'elle ne doit pas être modifiée pour suivre l'évolution de ces normes. C'est par exemple le cas pour les aspects liés à l'environnement comme la réévaluation du Séisme Maximum Historique Vraisemblable pris en compte pour le dimensionnement de la centrale de Fessenheim, la qualification des matériels aux conditions post-accidentelles, le risque de chute d'avions ou d'inondation interne. Les études et analyses menées pour la réévaluation de la sûreté des tranches conduisent pour certaines - après des discussions qui peuvent être âpres avec les experts de l'IPSN et de l'autorité de sûreté - à des modifications importantes qui sont effectuées au cours de l'arrêt décennal.

La fin des années 80 marque également la fin d'une époque pour EDF, la fin de la construction du grand programme : certains diront qu'à EDF on a pu faire preuve d'un certain triomphalisme, l'exploitant étant à la tête du plus grand parc nucléaire au monde, mais aussi d'un certain relâchement conduisant à une dégradation de la sûreté. On ne construit plus, il faut désormais gérer.