2.2.1. Changement d'ontologies

Plutôt que de refaire une description du changement de catégorie ontologique de Chi, nous nous appuyons sur la synthèse faite par Buty & Cornuéjols (2002 p.51) à ce sujet, qui présente de façon axiomatique la construction théorique élaborée par Chi (1992) par les énoncés suivants :

  • Toute entité est classable dans une catégorie ontologique. Il y a trois grandes classes ontologiques : les entités (objets/substances), les processus (événements/complex dynamic systems), et les états mentaux (les états émotionnels/les états cognitifs).
  • Une catégorie ontologique est pourvue d’attributs ; par exemple la catégorie ‘«’ ‘ événements ’» a cinq attributs principaux : il peut y avoir des sous-événements distincts ; un événement est limité dans le temps ; une suite d’événements peut présenter un ordre chronologique ou séquentiel ; il peut y avoir des liens de causalité entre événements ; un événement peut être déterminé par ses buts.
  • Face à une situation donnée, les attributs donnés par l'apprenant à l’entité qui est en jeu peuvent être repérés dans son discours et classés dans une catégorie ontologique. L’entité ou le concept hérite de tous les attributs de la catégorie.
  • Les concepts scientifiques appartiennent à des catégories ontologiques particulières.
  • Le particularisme de la catégorie des concepts scientifiques fait que l’apprenant a du mal à les acquérir, parce qu’il les catégorise la plupart du temps comme des événements.
  • Chi en conclut qu’il faut donner aux élèves une méta-instruction explicite en même temps qu’on leur enseigne le concept en jeu.

Cette théorisation se fonde essentiellement sur le processus de catégorisation. En effet, elle envisage le fonctionnement des connaissances de l'élève par la catégorisation d'une entité dans une catégorie ontologique donnant ainsi à l'entité l'ensemble des attributs de la catégorie. Ce modèle offre l'avantage de pouvoir suivre l'évolution d'un concept d'une catégorie ontologique à une autre (changement conceptuel fort) ou d'une sous-catégorie à une autre (changement conceptuel moins fort). Cependant, il soulève un certain nombre de critiques :

  • à propos du choix des catégories ontologiques : pourquoi choisir matière, processus et états mentaux comme catégories ontologiques et pas d'autres ? Comment être sûr que ces trois catégories sont à même de décrire l'apprentissage dans sa globalité ? (Duit 1999).
  • Ce modèle ne prend pas en compte la différenciation entre certains concepts, par exemple comment expliquer la différentiation entre champ magnétique et excitation magnétique alors que ces deux entités sont classées dans la même catégorie (Duit 1999).
  • On reste toujours dans le changement conceptuel sans tenir compte des aspects affectifs et sociaux.
  • Et surtout, le problème de ces classifications ontologiques est ‘«’ ‘qu'à un niveau fin, elles supposent une monosémie des termes désignant les concepts qui ne peut être demandée qu'aux concepts scientifiques, alors même qu'elles prétendent expliquer l'activité langagière d'acteurs qui s'expriment en général en langue naturelle.’ ‘»’ ‘’(Buty & Cornuéjols 2002, p.52).