Quelques perspectives

Au cours de cette étude nous avons développé un modèle pour essayer de rendre compte de l'apprentissage des élèves. L'analyse des élèves à l'aide de ce modèle permet de reconstruire les idées sans formuler, a priori, d'hypothèses sur leur cohérence ou leur non-cohérence. Ce n'est qu'au cours d'une seconde analyse, se déroulant après cette reconstruction et comparant les idées des élèves avec le point de vue de la physique, que la non-cohérence entre certaines idées peut être soulignée. L'utilisation de ce modèle soulève certaines questions, dont la principale est de déterminer son domaine de validité. Ceci revient à sedeamnder si les différents types d'évolution des idées, que nous avons décrits dans ce modèle, sont suffisants pour rendre compte de la plupart des apprentissages. Notre étude ne traite qu'une partie des analyses qui pourraient être menées sur le corpus que nous avons recueilli et nous pensons qu'une analyse des autres élèves que nous avons filmés pourrait permettre de pouvoir éventuellement généraliser certains résultats sur le rôle des éléments du milieu et surtout de mieux cerner le modèle des idées, notamment en essayant de déterminer les apprentissages dont ce modèle ne peut pas rendre compte. De plus, nous pensons que ce modèle mériterait d'être développé afin de pouvoir tenir compte des aspects liés à la motivation, à la métacognition, et l'image que les élèves ont de la science.

Le grain d'analyse que nous avons choisi pour suivre les facteurs responsables de l'évolution des idées se situe à un niveau qui permet d'observer le rôle d'une phrase du modèle, d'une intervention de l'enseignante, d'une discussion entre les élèves ou encore d'un élément perceptible d'une expérience. Parmi les éléments du milieu, il nous semble que les échanges entre les individus pourraient être affinés, notamment en essayant de caractériser les types d'échanges à l'aide de travaux sur l'argumentation (Plantin 1996) ou sur la conversation (Kerbrat-Orrechionni 1996). De plus, le rôle des expériences ‘«’ ‘simples’» pourrait être approfondi en essayant de déterminer le rôle des différents sens (toucher, vue…) dans l'évolution des idées des élèves. Pour cela, il faudrait nous appuyer sur des travaux relatifs à la perception ou plus généralement à la phénoménologie (Merleau-Ponty 1945). Le rôle du simulateur n'a pas pu être vraiment analysé, car il a été utilisé sur une période trop courte. Néanmoins, nous pensons que l'utilisation d'une représentation dynamique du gaz au niveau microscopique peut jouer un rôle important pour que les élèves acquièrent le mouvement ‘«’ ‘incessant et désordonné’» des molécules.

Les résultats que nous avons obtenus à partir du grain d'analyse des idées montrent que l'acquisition des concepts de la physique sur les gaz proposés par le programme officiel, nécessite pour les élèves de construire un certain nombre de notions qui ne découlent pas directement de ce programme. Par exemple, l'acquisition du concept de pression ne se limite pas à la mesure obtenue à l'aide d'un pressiomètre. Elle nécessite aussi de construire la signification physique du mot pression, de s'appuyer sur des phénomènes perceptibles montrant que le gaz agit, de relier la pression à l'action du gaz et de savoir que la pression est homogène à l'intérieur d'une enceinte fermée. C'est pourquoi, nous proposons dans l'élaboration des séquences d'enseignement de tenir compte d'un certain nombre d'éléments qui n'apparaissent pas directement dans les instructions officielles, particulièrement :

  1. de tenir compte de la différence de signification dans le quotidien et en physique de certains mots (macroscopique, pression…) utilisés par l'enseignement. Il serait probablement utile d'expliquer aux élèves les différentes significations des mots et de les aider à les utiliser convenablement.
  2. de faire construire aux élèves certains phénomènes perceptibles (l'action du gaz, le mélange de deux gaz…) à l'aide d'expériences «simples» afin qu'il puisse s'appuyer dessus pour donner du sens aux concepts mis en jeu dans l'enseignement.
  3. de faire apparaître les propriétés implicites de certains concepts mis en jeu par le programme (répartition homogène des gaz, l'action du gaz dans toutes les directions…), notamment en construisant des modèles qui rendent explicites ces propriétés pour les élèves.

Nous avons tenu compte de ces différents points, ainsi que des résultats de notre étude pour améliorer la séquence d'enseignement sur les gaz. Cette séquence est disponible sur le site francophone Pégase ( http://nte-serveur.univ-lyon1.fr/pegase/ ) et sur le site de l'académie de Lyon ( http://www.ac-lyon.fr ). Ceci permet aux enseignants de pouvoir utiliser cette séquence en profitant de ces améliorations. De plus, le site Pégase offre l'originalité de montrer des vidéos des élèves au cours de l'enseignement. Ces vidéos permettent d'illustrer certains raisonnements des élèves, mais aussi de montrer la manière dont les élèves construisent certaines connaissances. De plus, le site Pégase propose aussi des séquences d'enseignements et des vidéos d'élèves du Maroc et de la Belgique. Une perspective de ce travail pourrait être de confronter les résultats sur l'évolution des élèves dans les séquences d'enseignement des trois Pays (Maroc, Belgique, France) afin d'essayer de déterminer les facteurs communs responsables de cette évolution.