Observation 19 : Georges 94 ans.

Georges a 94 ans. Il a de la peine à accepter ma présence, tout en ayant à la fois envie de se confier au sujet de sa maladie.. Nous aurons deux entrevues, assez difficiles.

Il a été hospitalisé pour décompensation respiratoire: une pneumopathie infectieuse et une insuffisance cardiaque. Sur le plan physique, il a une autonomie restreinte du fait d’une coxarthrose majeure difficilement opérable dans le contexte poly pathologique. (selon le dossier des infirmiers)

Il est marié depuis vingt et un ans, avec sa deuxième femme. Ils ont eu trois enfants. Ils vivent actuellement dans la maison de leur fille où ils ont leur appartement.

Une infirmière vient deux jours par semaine ainsi qu’une aide ménagère. Ces indications seront données par son épouse qui est très présente auprès de son mari.

Peu à peu, Georges devient agressif verbalement. Il maugrée sur la nourriture, les soins, le personnel. Sa femme essaye par sa présence quotidienne de le calmer, de l’apaiser.

Puis, il cesse de parler, ne prononçant plus aucun mot.. L’équipe ne sait plus quelle attitude adoptée face à Georges.

Au bout de deux jours, il refuse la nourriture mixée. Il devient incontinent. Il refuse la prise de sang ainsi que les comprimés. . Il s’oppose avec force à l’équipe :

- "foutez-moi la paix"

Un essai est fait pour la prise des repas en salle à manger. L'équipe espère que le contact avec d’autres résidents peut influencer son comportement. Georges recrache alors la nourriture et serre les dents pour qu’on le ramène dans sa chambre. Il ne boit que très peu. La famille demande à l’équipe de ne pas le forcer à manger.

Il refuse tout : soins, toilettes, boissons, nourritures. Pourtant, en présence d’une de ses filles, il acceptera une fois les soins et la toilette. Sinon, il arrache les intraveineuses, refuse la perfusion. Il veut prendre la décision de sa vie et de sa mort.

Depuis son arrivée dans le service, le problème pulmonaire semble résolu. L'équipe est confrontée à des troubles du comportement, à une opposition. Il refuse d’ouvrir les yeux, tourne la tête lorsqu’on lui parle et ne répond que par des mimiques de la bouche ou bien en haussant les épaules. Si un soignant insiste, il raconte qu’il adore se faire examiner par les femmes car il est un ancien marin.

Il semble serein (sourire sur les lèvres) lorsqu'on le laisse tranquille.

Il ouvre la bouche pour dire bonjour à ses petits-enfants et à ses enfants qui sont très présents.

La situation est étonnante : il est régulièrement assis dans son lit, regarde la télévision, il refuse l’alimentation, refuse la parole avec le médecin, les soignants et moi-même. Il semble déterminé dans sa décision.

Il décède après un mois d’hospitalisation.