2.2 Un traumatisme inaugural…

Quand le chômage leur est annoncé (question 134), les réactions sont diverses :

Toutes ces réactions ont un caractère distancié qui semble factice avec une note affective presque infantile : on l’a voulu, on n’est pas surpris, on est soulagé ; autant de tentatives de récupération finalement symptomatiques d’un grand choc.

Nous retrouvons ici la deuxième phase évoquée par les chercheurs en psychologie sociale.

Plus tard, quand le chômage est devenu une réalité (question 137), les personnes interrogées avouent avoir vécu de fortes réactions émotionnelles, avec abattement, une certaine amertume :

‘« révolte, haine, incompréhension, lassitude puis remise en route de la machine »
M. M, 50-54 ans, musicien, 1e fois au chômage (n° 27)

« un sentiment de dégoût par rapport à tout ce que j'avais apporté à l'entreprise »
M. B, 40-44 ans, assistant de direction, 3e fois au chômage (n° 65)

« je suis de plus en plus aigrie car je trouve que les employeurs prennent les gens pour de la main d'œuvre uniquement et manquent de civilité, d'humanisme… »
Mlle E, 25-29 ans, assistante d'études, 1e fois au chômage (n° 64)

« après le soulagement est venu un grand abattement ; une grande fatigue m'est tombée dessus ; j'ai plongé quelques temps dans la dépression ; je n'avais pas envie de me mettre de suite à chercher du travail »
Mme F, 35-39 ans, surveillante, 3e fois au chômage (n° 24)’

On retiendra de ce qui précède que ces chômeurs, soit parce qu’ils n’imaginaient pas être concernés un jour, soit parce qu’il pensaient pouvoir s’adapter à un aléa de la vie professionnelle devenu tellement « banal » ces dernières années, n’ont absolument rien anticipé. À ce stade de leur chômage, ils manifestent un grand désarroi. Eux qui pratiquent, ont pratiqué ou vont pratiquer le bénévolat, ne lui ont pas attribué la fonction qu’il occupera plus tard ; et à ce stade, de stratégie il n’y a point.