4.2 L’âge

D. Schnapper partait de l’hypothèse que le chômage risquait d’être le plus durement ressenti par les chômeurs et les chômeuses dans la force de l’âge, les plus jeunes pouvant se référer au statut d’étudiant ou d’apprenti et les plus âgés à celui de retraité. Son enquête a révélé une réalité moins simple. Même si elle confirme que l’âge est une variable décisive dans le sens où elle traduit des rapports différents aux normes du travail et des formes d’intégration diverses, l’enquête a montré que le problème se situait davantage autour du statut plutôt que de la non-activité. Il semble qu’il y ait des activités valorisées, acceptées selon le statut comme le bricolage, la promenade et la pêche pour le retraité. Les chômeurs très proches de la retraite peuvent davantage assimiler leur période de chômage à une forme de préretraite et adoptent, se préparent à adopter l’ensemble des comportements associés à ce statut. Les plus jeunes peuvent se conformer aux modèles de comportement issus de leur vie d’élève ou d’étudiant et en s’inscrivant à l’A.N.P.E., ils sont reconnus comme demandeurs d’emploi par la collectivité et obtiennent un statut même s’il est peu valorisé. (1994, pp. 82-89).

D’autres travaux de chercheurs 76 font état de résultats également hétérogènes « Si certains auteurs soulignent que les personnes d'âge moyen seront plus affectées par le chômage que les autres, d'autres résultats montrent que les chômeurs âgés et les jeunes seront eux aussi fortement affectés. Pour ces derniers, d'un côté l'importance de l'emploi est soulignée, de l'autre, la possibilité d'activités de substitution semble atténuer l'impact du chômage ».

Notre population est jeune. Près d’une personne sur deux est âgée de moins de trente-cinq ans. Nous n’observons pas de différence manifeste dans les vécus du chômage selon l’âge : il est ressenti par tous les âges d’abord comme une épreuve. Cependant, les plus anciens disent que le fait d'être au chômage avant l'âge de trente ans est plus facile à vivre dans la mesure où on a du temps devant soi :

‘« plus jeune on a tout l'avenir devant soi »
Mme S, 50-54 ans, secrétaire, 1e fois au chômage (n° 54)’

Inversement, les plus jeunes disent que le chômage est sûrement plus facile à vivre pour les personnes proches de la retraite car elles n’ont plus vraiment besoin de rechercher un emploi.

Le seul consensus qui se dégage de tout cela, c’est qu'il semble que le chômage soit toujours mieux vécu par l'autre plutôt que par soi-même.

Notes
76.
cité par Martine Roque, voir supra p. 10 (pp. 49-54).