Dans ce qui suit, l’engagement des chômeurs-bénévoles est appréhendé dans ses aspects les plus pondérables, à partir de trois modalités de participation contenues et explorées dans notre questionnaire.
Les questions (192, 195 et 197) permettent d’apprécier le niveau d’investissement des chômeurs-bénévoles en termes de participation horaire hebdomadaire, de fréquence de participation et de niveau d’implication au sein de l’organisation.
Utiles à l’élaboration d’une bonne représentation du « volume » de leur engagement au profit des associations sous l’angle du temps pris sur leurs disponibilités personnelles, ces approches simplement chiffrées ont permis des comparaisons avec les résultats d’enquêtes menées par le Credoc 79 ; et au terme d’une analyse combinée, de distinguer au sein de notre population deux principales catégories. Ces dernières ont pu ensuite être rapprochées d’une typologie élaborée en 1998, toujours par le Credoc, qui est une référence nationale dans le domaine de l’étude des conditions de vie.
Le volume horaire hebdomadaire consacré au bénévolat peut sembler relativement faible – en moyenne entre 2 et 6 heures – au regard du temps libéré dont notre population dispose.
Mais on remarquera qu’un nombre non négligeable de personnes – chiffré à 13 – va jusqu’à consacrer 12 heures de son temps à l’activité bénévole, ce qui équivaut presque à un mi-temps salarié.
Il n’y a à notre connaissance aucune étude rapportant la participation horaire par groupes de bénévoles (les actifs, les retraités, les étudiants, les femmes au foyer et les chômeurs).
La dernière moyenne mensuelle nationale connue (tous types de bénévoles confondus) – établie par le Credoc en 1996 – évaluait à 23 heures la participation horaire mensuelle du bénévole français, soit un volume horaire hebdomadaire national situé entre 5 et 6 heures alors qu’il est de 7 heures pour notre population.
La participation horaire de notre population est supérieure à la moyenne nationale. Cependant, il y a de d’importantes disparités dans le nombre d’heures consacrées au bénévolat associatif, qui apparaissent bien sur l’histogramme. On voit ainsi que 30 % investissent de 2 à 4 heures par semaine, 20% de 4 à 6 heures et 25 % plus de 6 heures dont presque la moitié plus de 12 heures.
Ces disparités ne sont en rien spécifiques à notre population mais typiques du milieu associatif en général, le Credoc affirme : » il n'y a pas un modèle unique d'investissement temporel dans une association : alors que 18 % des membres y consacrent plus de vingt heures mensuelles, 7 % n'y sacrifient aucunement leur temps ».
Sur cet histogramme apparaissent aussi d’importantes disparités dans la fréquence de participation, même si globalement elle peut être qualifiée de régulière et assidue puisque 60 % de notre population participe de façon hebdomadaire aux activités de l'association ( 27,9 % en moyenne une fois par semaine et 32,2 % plusieurs fois par semaine).
Deux groupes fort inégaux apparaissent sur le graphique, les « inscrits et actifs » sont les plus nombreux avec 61,1 % de représentation contre 28,4 % d’ « inscrits ».
La question ne suggérait dans son énoncé que deux types de réponses ce qui a induit la répartition qui figure sur l’histogramme, mais la suite du questionnaire donnait la possibilité de justifier les choix et l’analyse de contenu de ces justifications oblige à un réajustement.
En effet, dans la réalité, un certain nombre d’inscrits sont des « inscrits et actifs » qui ne se sont pas comptés parmi les actifs parce qu’ils estimaient que leur participation horaire hebdomadaire était faible, mais ce sont des actifs et si leur participation horaire est faible elle n’en est pas moins régulière. Ce sont des « inscrits et peu actifs » si bien que l’on peut considérer, relativement au degré d’implication et de participation, une nouvelle répartition de notre population en trois groupes :
Cette tripartition qui rend mieux compte de la réalité vient d’ailleurs s’inscrire graphiquement dans le profil des réponses aux questions (195 et 197).
Elle trouve par ailleurs un écho dans les travaux de F. Passy 80 .
Dans la continuité d’études qui cherchaient à comprendre comment un individu va passer de l’attentisme à l’activisme dans l’action collective, et de travaux qui commençaient à montrer l’hétérogénéité de l’engagement, F. Passy s’est intéressée à l'investissement individuel des militants altruistes et a montré l’existence de degrés distincts d’engagement, dégageant alors un concept d’ « engagement différencié »
Elle a élaboré une typologie en trois groupes : les adhérents qui contribuent passivement à l’action collective, les participants quiprennent une part active à l’action de l’organisation, s’engagent activement dans un processus de mobilisation et les activistes quiparticipent activement à la poursuite des objectifs de l’organisation et de façon régulière en étant les éléments moteurs de l’organisation du mouvement.
Bien que nous soyons parfaitement consciente que le domaine d’étude de F. Passy est fondamentalement différent du nôtre, nous nous sommes permis une transposition à notre population de chômeurs bénévoles. Cela nous donne :
Il va sans dire que si un mouvement militant peut s’enorgueillir de s’appuyer sur une large base d’adhérents, cela ne vaut pas pour une association bénévole, l’adhérent cautionne le mouvement militant tandis que « le membre adhérent » (donc inactif) désole le dirigeant de l’association mais le concept d’engagement différencié vaut, lui, dans les deux cas de figure.
Indépendamment de cette approche, nous souhaitions pouvoir positionner clairement notre population dans le monde associatif à partir de ce qui relève du « comparable » et c’est la raison pour laquelle nous nous sommes tournées vers les conclusions des travaux que le Credoc 81 a publié en 1999.
Le Credoc a élaboré une typologie en cinq degrés d’implication dans les associations sur la base d’une enquête approfondie dont voici la structure :
Le Credoc en a extrait la typologie suivante :
L'ensemble de ces deux catégories avance deux séries de raisons d’agir :
Notre questionnaire constituant une base d’enquête analogue à celle du Credoc, nous avons rapproché notre population de la catégorisation issue de ses travaux, utilisé ses chiffres à des fins de comparaison et devant l’évidence, nous avons classé ces enquêtés dans les deux premiers groupes de cette typologie (les membres impliqués et les membres ordinaires).
Puis, partant d’une combinaison des trois modalités de participation [ce que ces enquêtés déclaraient être : simplement « inscrit » ou « inscrit et actif » (question 192) ; le volume horaire mensuel consacré à l’activité bénévole (question 197) ; la fréquence de participation (question 195)], nous avons pu au terme d’une analyse plus fine scinder notre population en deux groupes bien distincts :
Voir supra p. 37.