Deuxième partie :
un roman à thèse(s) ?

La première partie de notre travail a été consacrée à une présentation essentiellement descriptive des romans du corpus. Nous avons volontairement limité le champ d’investigation de cette première partie au niveau de l’histoire, et laissé de côté l’autre niveau constitutif de tout texte narratif, celui du récit. Cette approche intuitive à caractère descriptif et thématique, nous permet déjà d’avancer que l’ambiguïté et la contradiction sont deux éléments essentiels conditionnant cette production littéraire naissante. Des tensions profondes traversent les différents constituants du texte littéraire : on les retrouve aussi bien au niveau du champ lexical, avec l’utilisation régulière de vocables arabes ou berbères dans un texte rédigé en français, qu’au niveau des différents parcours impossibles, ou au niveau du discours sur l’assimilation. Il est clair que nous avons affaire à une littérature de rupture et de recherche, où s’élabore l’identité algérienne de la première moitié du XXe siècle. Il est également évident que ces œuvres des premiers balbutiements portent en elles et sur elles les signes de la situation d’énonciation inconfortable des auteurs, ou si l’on veut adopter une formulation plus sévère à leur encontre, de l’engagement intellectuel et politique ambigu de ces partisans de la politique d’assimilation. Mais ces observations sont insuffisantes pour comprendre en profondeur les mécanismes de fonctionnement de cette littérature en gestation. Nous allons continuer notre étude en élargissant le champ d’investigation à tous les niveaux du texte narratif, et nous allons tenter de mettre en place une approche plus rigoureuse du point de vue méthodologique. Nous tiendrons compte des travaux théoriques dans le domaine de la narratologie et de la sémiotique, et nous allons essayer de les mettre à l’épreuve dans l’étude des romans de notre corpus.