TROISIEME PARTIE :
La quête identitaire

Dans la première partie de notre travail nous avons procédé à une description scolaire du parcours romanesque des premiers héros de la littérature algérienne de langue française. Nous avons jugé nécessaire cette présentation descriptive pour un corpus peu connu et difficilement accessible. La conclusion de cette première partie nous permettait de distinguer, entre les œuvres du corpus, deux grands groupes suivant la réussite ou l’échec de la quête entreprise par le sujet du programme narratif. C’est ainsi que nous faisions la distinction entre les parcours impossibles et les parcours possibles. Dans le premier cas, le sujet se révèle incapable de réaliser la performance qu’on attend de lui, et la sanction qui clôture son action est négative. Dans le second cas, le sujet de la quête est en possession de la compétence nécessaire pour acquérir l’objet désiré. Il réussit au niveau de la performance et par conséquent la sanction qui vient clore son parcours est positive. Pourtant il faut bien reconnaître que ce parcours du possible effectué par Myriem et son frère Jean-Hafid, comporte une ambiguïté de taille, en vérité une contradiction. Au niveau explicite de la manipulation, comme les autres héros du corpus, ils sont chargés par le narrateur de démontrer les avantages de l’assimilation ; mais en fin de compte, leur parcours démontre le contraire de ce qui est proposé dans le contrat de lecture. Au cours de la seconde partie du travail, nous avons présenté les traits caractéristiques du roman à thèse, puis commencé à soumettre nos romans à ce cadre théorique en étudiant la manière dont ils se manifestent en tant que porteurs d’un discours idéologique. En s’appuyant sur les résultats de la première approche descriptive et sur l’apport théorique développé au cours de la deuxième partie, les objectifs de la troisième et dernière partie sont les suivants :

  1. Dégager les récurrences significatives de la narration qui caractérisent l’ensemble de cette production littéraire naissante.
  2. A l’aide d’une étude de la structure d’apprentissage exemplaire et des redondances structurales vérifier s’il s’agit oui ou non de romans à thèse.
  3. Etudier le mouvement oscillatoire de l’écriture entre le discours idéologique et la quête identitaire.

Cette troisième partie est divisée en trois chapitres qui s’articulent chacun autour d’un axe déterminant que nous pouvons définir à l’aide des modalités du programme narratif. Les trois axes retenus sont les suivants : vouloir, pouvoir et devoir. A chaque axe correspond une relation bipolaire du schéma actantiel de Greimas que nous reprendrons au début de chaque chapitre. Il s’agit de la relation qui s’établit entre sujet / objet, adjuvant / opposant, et destinateur / destinataire. Selon notre lecture la quête du héros est déclenchée par la modalité du vouloir et met en scène un sujet qui tente l’acquisition d’un objet. Dans le monde où évoluent les sujets de l’histoire les différents peuples entretiennent entre eux un rapport hiérarchique, et les opposants et les adjuvants de la quête interviennent selon le pouvoir qui est en leur possession. Finalement le destinateur qui mandate le sujet de l’action, le charge d’un devoir dont le résultat doit arriver au destinataire. Nous considérons que la quatrième modalité, celle du savoir, relève des capacités du héros acquises lors de la manipulation, et qui doivent l’aider dans l’accomplissement de sa quête. Les trois chapitres qui suivent, reprennent donc, chacun à leur tour, les trois modalités du programme narratif tel qu’il vient d’être défini.