3. L’approche organique de la formation militaire en Allemagne

L’architecture pédagogique de la formation des soldats de l’armée de terre de la Bundeswehr prévoit qu’ils doivent être incorporés dans les régiments, et qu’ils suivent plus tard des formations techniques dans l’une des vingt-sept écoles de la Bundeswehr.

La formation des sous-officiers et des militaires du rang de la Bundeswehr se réalise en cohérence avec l’organisation pédagogique de la formation professionnelle dans les entreprises allemandes. 131 Le modèle de formation est précisément le modèle social de leur futur emploi puisqu’ils évoluent à l’intérieur même de celui-ci. Cette approche met en évidence les différences entre les corps d’armée qui, à l’échelle de la Bundeswehr, sont alors comparables aux Länder. Tout en appartenant à la Bundeswehr, l’organisation du cursus du soldat allemand le détermine dans un champ social restreint, celui de son corps d’armée comme milieu naturel.

Cette observation corrobore la formation par les expériences de vie mise en évidence par Finger. 132 En référence à la philosophie de la vie, Finger précise : « La formation de la personne ne peut donc être pensée à partir de l’idéal de la connaissance scientifique de l’époque, qui est un idéal mécaniste et rationaliste. Au contraire, la formation de la personne devrait être pensée à partir de son rapport naturel, c’est-à-dire organique avec la ‘vie’. » 133

L’aspect culturel de la formation est alors organique puisque l’identité collective du sous-officier allemand est circonscrite au corps d’appartenance qui définit la cohésion sociale. Cette formation fournit des éléments identitaires nécessaires à un positionnement personnel, mais elle facilite aussi l’exclusion et elle limite, en revanche, l’émergence d’une transcendance, significative d’une référence métaculturelle. C’est encore ce que confirme Finger : « La seule véritable alternative épistémologique dans ce domaine est à chercher dans la tradition philosophique allemande, dont la réputation n’est pas des meilleures, puisqu’elle est associée au romantisme, à la critique du modernisme et parfois au fascisme. » 134

Notes
131.

Le général de brigade MILLOTAT est à la fois commandant en second le II Corps d’armée allemand et commandant de l’école des sous-officiers de Weiden. Le cumul de ces deux fonctions est comparable à l’entreprise la « Carl Benz Schule » qui a son école des apprentis dans le Länd du Bade Wurtemberg. La formation des sous-officiers français est donc plus conceptuelle et moins normée.

132.

FINGER (M). – « Apprentissage expérientiel ou formation par les expériences de vie ? », Revue Education permanente, décembre 1989, pp. 39 à 46.

133.

id p. 42.

134.

id p. 41.