CHAPITRE 2
FORMER LE SOLDAT DE LA PAIX

Dans le chapitre précédent, nous avons défini le soldat de la paix et noté aussi l’absence d’une conception éducative et de formation commune aux soldats de l’armée française et de la Bundeswehr. Dans ce chapitre nous devons donc envisager comment former le soldat de la paix tel que nous l’avons défini.

Le soldat de la paix devrait maîtriser les effets de son action, pouvant aller jusqu’à la destruction, par la graduation mesurée de ses interventions. Cela réclame une pratique de la médiation entre la situation qu’il peut observer comme déréglée, mais dans une évolution permanente, et l’idée qu’il se fait, individuellement, de la situation rétablie. Ce réajustement permanent de l’application des savoirs aux contingences des situations toujours particulières écarte toutes planifications d’actions préétablies.

Il en résulte que le soldat de la paix devrait pouvoir réinterpréter des savoirs explicites et implicites jusqu’à pouvoir produire des savoirs expérienciés pouvant infirmer les précédents. Ceci impose, pour la formation, de développer chez chacun des soldats de la paix la faculté de comparer des situations et de lui faciliter une prise de position sensée dès lors qu’elle est éclairée par le refus de soumettre les hommes à une volonté aliénante.

Il serait tentant, maintenant, de considérer ce savoir comme un savoir acquis qui devrait être transmis. Nous pratiquerions alors une démarche de conditionnement confortée par l’apport scientifique d’une référence qui ne génèrerait qu’une démarche positivo-sociologique. Cette observation pose le statut de la production des savoirs sociologiques mais elle met en évidence, aussi, la possibilité de dévoiler des conditions d’un savoir-faire pédagogique sous l’éclairage de la Bildung. Ainsi, après avoir rappelé la conception de Pestalozzi dans la lettre de Stans qui sera le crible de notre action de formation, nous pourrons élaborer des critères de précaution pour l’éducation d’un soldat de la paix.