2.1. La manufacture Jean Zuber & Cie à Rixheim (1802-1853)

Écrire l’histoire de la manufacture Jean Zuber & Cie au XIXe siècle ne va pas sans difficultés. Tout d’abord, l’entreprise a suscité au XXe siècle un mythe autour de son nom à cause de la qualité de ses papiers peints et plus précisément du renom de ses panoramiques, ce qui obscurcit la réalité941. Par ailleurs, la famille a entretenu ce mythe par des publications ad usum Delphini alors même qu’elle n’a plus aucun poids dans l’entreprise942. L’existence d’archives plus abondantes qu’ailleurs permet, au moins partiellement, de séparer mythe et réalité, ici tout d’abord pour la période 1802-1853943.

Alors que l’histoire de la firme peut être assez facilement écrite pour le XVIIIe siècle, grâce à l’abondance des archives et aux mémoires de Jean Zuber944, nous sommes moins à l’aise pour le XIXe siècle : les archives sont lacunaires sauf pour les inventaires annuels presque complets945 ; la comptabilité se révèle souvent (volontairement ?) opaque, et ses normes ont changé à plusieurs reprises, au fur et à mesure des associations ; il nous manque aussi la quasi totalité des copies de lettres946. En revanche, nous disposons de traces de documents à travers la saga familiale, d’enquêtes industrielles inégales sinon contradictoires et des rapports d’Expositions industrielles jusqu’en 1867. A partir de 1891, l’entreprise devenue société en commandite par actions, la gérance a laissé des rapports annuels conservés et fiables, souvent très bien documentés , mais trop tardifs pour la période qui nous concerne ici947.

L’entreprise restant étroitement familiale pendant toute la période, nous avons simplement repris le découpage lié aux générations qui se sont succédées à la tête de l’entreprise, Jean Zuber (père) de 1802 à 1835 puis ses fils Jean et Frédéric jusqu’en 1853.

Notes
941.

Le monde germanique continue d’utiliser l’expression Rixheimer Tapete comme synonyme de papier peint de qualité, quelle qu’en soit l’origine. Et bien sûr, aux yeux du grand public, il n’est de panoramique que Zuber « a Zuber » disent même certains Américains, qu’il s’agisse d’un original ou d’une médiocre réimpression récente.

942.

Paul-René Zuber (1898-1992) a publié sa vie durant vingt trois Cahiers de la famille Zuber : témoignage tardif des valeurs du patriciat calviniste mulhousien, ils sont au moins à ce titre intéressants encore que très inégaux ; ils pullulent de documents mal ou pas référencés issus des archives familiales pour l’essentiel inaccessibles alors que l’histoire de la famille et de l’entreprise ont tendance à se confondre ; on rêve d’un regroupement systématique de ces archives, fort riches, dans un dépôt public, de façon à les rendre accessibles aux chercheurs. L’entreprise a quitté les mains familiales en 1969. Les descendants restent encore très liés autour de deux associations familiales.

943.

Outre les papiers peints : voir pour les archives BSIM 1984/2, p. 68-72.

944.

Zuber 1895. Ils s’achèvent en 1815.

945.

MPP Z 8-26. Mais l’entreprise deveient de plus en plus importante au cours du siècle si bien que nous ne possédons souvent que des résultats de l’inventaire, les « détails » n’ayant été que médiocrement conservés.

946.

Complet de 1802 à 1821 avec une lacune pour 1816-18 ; par la suite, nous avons quelques rares volumes quasi illisibles. MPP Z 99-122.

947.

MPP Z 5.