Partie II :
marketings Spécifiques sur les sites Web de marques de luxe

Avant de débuter cette deuxième partie, il est intéressant de reprendre un passage du livre Luxe, mensonge et marketing publié en 2003 par Marie-Claude Sicard 141 . Citons exactement ce qu’elle a dit dans cet ouvrage à propos des sites Internet des marques de luxe :

«  Notons également que dans l’ensemble, cet espace virtuel reste timidement exploré par les marques de luxe, même les marques contemporaines. Elles ont tendance à y transporter les codes habituels du luxe, par exemple sa prédilection pour les fonds sombres. Elles y transportent aussi les photos de leurs catalogues ou de leurs campagnes publicitaires, et souvent rien de plus. Les animations sont lentes et peu inventives. L’ergonomie laisse parfois à désirer : écrans surchargés, caractères illisibles. Enfin, les interactions avec le visiteur sont inexistantes. Ne parlons même pas de la vente, à laquelle la plupart des sites se refusent pour toutes sortes de raisons, de principes ou techniques, dans lesquelles on n’entrera pas ici. Parlons simplement d’interaction, de dialogues, d’échanges : il n’y en a pas. Nulle part on ne peut entrer dans un vrai forum. La vocation même du média Internet est niée : incomprise, ou refusée par les marques de luxe. (…)

L’espace virtuel demeure un espace vierge, ou presque, pour l’univers du luxe. Les marques
, classiques, modernes ou contemporaines l’utilisent, dirait-on, contraintes et forcées par l’air du temps, mais sans réelle envie de s’en servir. Le message est clair : on ne peut pas communiquer avec elles. Tout se passe à sens unique : elles parlent, on écoute et on se tait. Attitude hautement révélatrice de l’inconscient du luxe, même le plus moderne. Attitude intenable, à terme, si on lui applique la première loi des sciences des communications, selon laquelle, au contraire, on ne peut pas ne pas communiquer. Cette loi ne doit pas être comprise comme une injonction (vous devez communiquer) mais comme un contrat : il est possible de ne pas s’exprimer, autrement dit tout ce qu’on fait – on ne fait pas – a du sens, et donc est interprété par autrui. Même le silence signifie quelque chose : les refus ou l’impossibilité de parler. Les sites Internet du luxe trahissent à leur insu une position de hauteur et de recul très mauvaise conductrice de communication. Leurs visiteurs, à la longue, ne peuvent pas y être insensibles ».

Nous ne sommes pas entièrement d’accord avec cet auteur puisque nous avons pu déjà beaucoup apprécier l’originalité des aspects de marketing des sites Web de marques de luxe. Vitrine ouverte sur le monde, Internet a de nombreux atouts pour tenter les marques internationales du luxe. D’abord, ce média permet d’être présent sur les réseaux en permanence et défie tous les décalages horaires. Chacun peut le consulter aux quatre coins de la planète et bénéficier d’informations en temps réel et peu coûteux. Internet donne la possibilité à ces créateurs de sites d’optimiser l’approche de leur clientèle potentielle en réactualisant et en enrichissant à la demande leurs offres, en utilisant donc une des plus ancienne fonction marketing. On peut malgré tout se poser légitimement encore des questions sur la vente de produits de luxe sur Internet et redouter ses effets sur la distribution sélective. C’est à chaque marque d’en évaluer les risques et de se fixer ses objectifs sur le Net.

Les sites Web des marques de luxe puisent leurs origines dans trois grands aspects du marketing spécifique : d’abord dans celle du marketing interactif, ensuite dans celle du marketing de l’ambiance sonore et enfin dans celle de marketing multi-versions. Les marques, en général, prennent en considération ces nouveaux marketings pour la conception de leurs sites Web mais ces éléments coexistent particulièrement au sein d’un site Web du luxe. Bien entendu, les conceptions d’»interactionalisation», desonorisation et d’internationalisation sont concernées par leur intégration formelle au sein du site.

Tableau 16
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Notes
141.

Marie-Claude SICARD, Luxe, mensonge et marketing, Paris, Village Mondial, 2003, p.132.