4 - The Crime of Julian Masters .

The Crime of Julian Masters (1959) marque un retour au roman policier psychologique. Un enchaînement de circonstances fantastiques fait de Charles Pearson, professeur et champion de tir, le suspect du meurtre de Vera et Jennifer Taylor, son ancienne maîtresse et sa fille illégitime. L'objet qui le discuLPerait, son revolver, reste introuvable. Il a été emprunté par un élève de son école, Julian Masters (le maître du jeu), grand admirateur de Charles Pearson et des armes à feu. Embarrassé par cet objet encombrant, le jeune garçon le cache avant de le jeter dans la Tamise de peur des représailles. Tout finira bien, Julian avouera son forfait et Charles sera sauvé de la peine de mort in extremis.

Le roman repose sur une série de confessions de Charles et de Julian, plus ou moins tronquées, plus ou moins crédibles, selon le contexte ou les événements qui les entourent (la fièvre due aux oreillons ne fait elle pas délirer Julian?). Ces confessions sont ajustées, taillées sur mesure pour leur destinataire. Ceci rappelle la problématique de l'autobiographie, son authenticité, et la manipulation des faits : comment les mêmes faits peuvent être lus diversement selon leur agencement, leur articulation par le destinateur ou leur réception et l'usage qu'en veut faire le destinataire. Le lecteur se trouve devant une réflexion sur les faits et leur falsification, sur le lien entre autobiographie et fiction. D'une autobiographie qui se présenterait comme une résolution d'un conflit intérieur à un (ou plusieurs) récit(s) de fiction qui mettrai (en)t en scène une faille dans le sujet, auquel faut-il faire confiance?

De nouveau, comme dans The Thin Line , un contexte résolument anglais gomme toute arabité du texte à l'exception de deux brèves allusions aux petits Egyptiens qui plongent pour récupérer les pièces jetées à la mer par les voyageurs de Port Said et aux pêcheurs de perles du Golfe Persique. (EA CJM 153-154) Ces détails seraient anodins s'ils n'étaient à l'origine du dénouement. L'allusion à caractère racial ( ’little Gippy boys’  (EA CJM 153)) réinstaure une possibilité de lecture métaphorique du roman comme texte colonial. Charles Pearson serait l'Angleterre coloniale, au-dessus de tout soupçon ( ’civilised and humane’  (EA CJM 153)) et le colonisé serait ce couple embarrassant constitué par sa maîtresse et sa fille ( ’Something of an unpleasant complication in his life’  (EA CJM 158)) qui commence à résister à un silence imposé : Vera essaie de faire chanter son ex-amant. Le meurtre cynique et brutal serait la répression aveugle dont Edward Atiyah soupçonne l'Angleterre capable, malgré son attachement à son pays d'accueil. La mise en cause de la justice britannique (qui frôle l'erreur judiciaire) s'inscrit également dans cette condamnation d’un colonialisme aveugle. De même, la réflexion proposée auparavant sur la manipulation des faits peut tout aussi bien s'appliquer à des textes politiques tels que la déclaration Balfour - quelques années auparavant, Edward Atiyah avait jugé utile de prendre la plume pour élucider les textes dans What was Promised in Palestine. Tirer ce roman vers ces préoccupations serait sans doute impertinent s'il était isolé du reste des écrits d'Edward Atiyah. Une certaine tentation du tragique - commune à l'ensemble de l'oeuvre d'Edward Atiyah - lui donne une dimension qui dépasse le sort individuel d'un professeur, fût-il membre de la meilleure société.