b – Une histoire dynamique.

Cependant l’histoire ne se répète pas toujours à vide, pour rien. Ainsi les révoltes étudiantes se réclament-elles de celles qui les ont précédées pour faire évoluer la situation :

The driving force everywhere were the students, young, angry, full of memories of other rebellions in history.(JIJ HNS 132)’

Les métaphores qui décrivent cette foule en révolte ne sont plus d’eaux stagnantes mais d’eaux vives (‘eddy; torrent; rolled […] like an implacable flood’ (JIJ HNS 132-133)).

De plus, la projection vers l’extérieur est soulignée : ’Out there, there is the world and action and history taking shape. And in here : waiting, helplessness – paralysis’ (AS IES 61). D’une histoire morte, Isabel qui vient de l’extérieur fait une histoire vivante en trouvant Horus le vivant, le troisième fragment de la tapisserie (AS ML ), réintroduisant le rythme ternaire qui brise la binarité stérile. Il est donc nécessaire de prendre du recul : ’There must be a way, only we can’t see it yet. A way of making a space for ourselves where we can make the best of ourselves.(AS ML 234). De ce point d’observation, passé et futur deviennent visibles : ‘I have found something with a future, and with a past as well.’(SA L 85). A partir de là peuvent se renouer les fils, les traces du passé qui permettent de tisser le tableau cohérent d’une histoire (‘the pattern of the weave that places them at this moment of history on this spot of land.’(AS ML 299)). Dans un des contes de The Wanderer , intitulé ’The Field of Zaad’  (GKG W 61-62), Gibran Kahlil Gibran raconte comment un voyageur interroge plusieurs personnes au sujet des événements qui se sont déroulés en un lieu donné : chacun lui donne une version différente. Perplexe, il interroge un vieux sage qui lui dit : ’Each every one of these men told you what was indeed so; but few of us are able to add fact to different fact and make a truth thereof’ (GKG W 62). Ce même auteur utilise plus longuement le même procédé dans Jesus, The Son of Man. Isabel et Amel reconstituent la tapisserie et l’histoire de leur famille, comme Anna elle-même avait tenté auparavant de trouver une cohérence aux différentes histoires auxquelles elle était mêlée : avec l’histoire fragmentaire d’Akhenaton, elle cherche des liens avec le christianisme (AS ML 89). Comme dans la  Mu’allaqah,  elle essaie de trouver une impulsion unique entre l’esthétique des églises et des mosquées (AS ML 87-88)). Retour ou quête des origines, recherche d’une cohérence avec un certain recul : n’y a-t-il pas un danger de vouloir construire à tout prix une cohérence? Et de réécrire l’histoire?