Le mensonge rompt la logique, en apparence seulement; il ne rompt que la logique du discours de surface (la promesse d’indépendance) car les faits qui correspondent à un non-dit obéissent à une autre logique souterraine. Des promesses contradictoires (RS NI 93) faites aux Arabes et aux sionistes créent l’illusion d’une rupture de la logique alors qu’il existe deux logiques parallèles avec des destinataires différentes.
Dès lors que cette rupture de logique est érigée en Loi (‘The British, through their highest man, delegated to Palestine to tell the truth, swore on their word that it was nonsense, a vile lie put around by irreverent and godless liars who had seized power, by force and without any right to it.’ (SA L 30)), il s’installe toute une série de paradoxes qui sont susbstitués au bon sens ou, ce qui est tout à fait pertinent dans ce contexte de la dualité, qui se trouvent à la fois du côté du vrai et du faux. 1278
Des situations paradoxales apparaissent : l’Occidental honni qui, par son mensonge et sa trahison, a causé l’éclatement de la Palestine, devient le modèle de structuration des camps de réfugiés, ersatz d’organisation sociale en exil (EA LP 93). De la même façon, l’Occident coupable d’abandon et de destruction (SA L ) devient le dernier recours pour la survie des réfugiés (EA LP 77). De tels renversements ironiques sont fréquents; ils mettent en lumière la perversion de la relation entre la Palestine et l’Occident.
La perversité du discours des sionistes est également soulignée grâce à ces formules proches du sophisme :
‘JACKSON : Tell me David, how come that your people find it blasphemous to stamp the papers of an old man on the Sabbath but completely O. K. to shoot him dead on the Sabbath? […]De la même façon, les sionistes appliquent aux Palestiniens leur mythe du retour : ’the Zionists would love us to believe we should all go back to the desert’ (JIJ HNS 84) comme si tous les Palestiniens étaient des bédouins du désert. C’est en outre, un autre glissement : en faisant glisser leur propre désir de retour vers les Palestiniens, les sionistes justifient la légitimité de leur occupation d’une terre vidée de ses habitants. D’ailleurs, la justification de l’éradication des Palestiniens passe par ce type de discours. Privés d’état et de justification d’appartenance à un état, ils sont en fait voués non pas à l’errance, mais à l’immobilité :
‘ How could she get a visa to enter Egypt ? Her Palestinian passport was useless now. She was a stateless person. Inside the country, or in Syria , where no passports would be needed, there was nowhere for them to go to. (EA LP 161)’D’autres formules, inspirées de la Bible, signent l’arrêt de mort des Palestiniens :
‘ Nothing saved our town of Christ. […] Where the angels had appeared to the shepherds two thousand years ago to sing of joy and peace to them, we daily faced the even-spluttering messengers of death. (JIJ HNS 11)’On remarque comment le discours religieux – le discours de toutes les religions impliquées dans le conflit - est perverti. Discours symbolique s’il en fût, discours de vie, il devient discours de mort.
Mais usant des mêmes formes paradoxales, les Palestiniens survivent : le poète assassiné survit grâce à son assassinat (‘How odd that the Zionists he so feared helped to immortalize him. So, he always wins!’(YZ BDG84)). Les territoires, malgré la tentative de détournement par les Anglais (‘the British Army was now in control of the Holy land, transmuted for the moment into Occupied Enemy Territory’ (SA L 25)) retrouvent en fin de compte leurs illégitimes, mais réels occupants, les Israéliens et l’ennemi son véritable nom, l’état d’Israel.
voir Le Robert.