b – A general strike, a revolt, a repression.’

The tire burns in an empty square.
One child, pockets filled with
Carefully collected stones
Stares at the army patrol.

At his funeral we chanted
“Mother of the martyr rejoice,
All youths are your children”
(HM. ‘Demonstration’ 144)’

L’image de l’enfant évolue vers celle de l’enfant martyr. La disparité des forces est toujours flagrante (l’enfant seul avec ses pierres face à une patrouille organisée et armée) mais il existe désormais une détermination, une volonté (carefully collected) inexistante auparavant. La réaction à la violence subie s’organise selon différentes lignes.

Une suspicion à l’égard de l’Autre s’instaure, à cause de l’effet de surprise des premières attaques. Si la leçon n’a pas été tirée dès la première fois, lorsqu’elle l’est enfin, il en résulte une sorte de paranoïa qui fait de tout inconnu un ennemi potentiel :

They were to watch for anything suspicious, such as enemy military personnel coming to Petra disguised as foreign tourists; they were also to note any tourists carrying maps and walking in the mountains around Petra. […]
“That’s what happened ,” he told them, “in the West Bank before 1967. The invasion was well prepared, but this time we will be ready for them.”
(YZ BDG5)’

Ce comportement paranoïaque fait écho à celui des Israéliens affectés à divers postes de garde : Checkpoint Allenby Bridge et The Song of the Bulletdémontent cette paranoïa en faisant ressortir les excès auxquels elle conduit. Sur Allenby Bridge, ce sont des os qui représentent un danger alors que Yakov refuse de reconnaître son frère de lait, ce qui les conduit à s’entretuer. La paranoïa agit comme un refus de l’Autre, refus mutuel puisque les deux camps ont des attitudes analogues. La paranoïa comme repli sur soi n’a pas d’effet structurant. En outre, ce type de comportement nuit à l’image des Palestiniens puisque le lecteur qui est pris à témoin est également considéré comme suspect : ’[A searchlight] moves slowly from the depths of the stage out over the audience  (AB SB 61) : difficile ainsi de s’attirer sa sympathie.

Les révolutionnaires, ceux qui veulent renverser l’ordre nouvellement établi et revenir au précédent, arrivent sur le terrain en se cherchant, en hésitant entre être‘a Romantic Revolutionary’et‘a Molotov-Cocktail-Throwing Revolutionary’  (AS IES 28), c’est-à-dire entre idéalisme et action. De nombreux étudiants ou intellectuels, comme on en voit dans Hunters in a Narrow Street ou In the Eye of the Sun , tendent à tenir des discours infinis, révolutionnaires dans la mesure où ils ont tendance à tourner sur eux-mêmes et à se contredire : ’No one knew for certain whether he was a « progressive » […] or a « reactionary »’  (JIJ HNS 34). Souvent le fait des réfugiés qui ont opté pour le confort des villes du Proche-Oriental, ces discours vides irritent ceux qui sont dans une condition précaire et préfèrent l’action (‘I prefer actual dynamite’ (JIJ HNS 34)) pour hâter le renversement de la situation. Ces derniers ont souvent recours à des grèves ou des manifestations (JIJ HNS chp.18 ; SA L 101-103) : mouvements collectifs, ce sont des actions qui suscitent l’effroi (‘How I hate the mob. It is a fearful monster. But that is the way life’s energy, life’s will, can be asserted. God bless the loathsome monster. 1282 (JIJ HNS126-127)).

Les camps sont un gage de visibilité, et il en va de même pour manifestations et grèves. De plus, le pouvoir qu’a la foule de susciter la peur, transforme l’Autre en animal; s’il apparaît au début comme menaçant (‘he predatory shadow of police and soldiery’ (JIJ HNS 131)), le rapport de force s’inverse et c’est lui qui se sent menacé (‘in their eyes one could detect the fear and incipient ferocity of an animal turning at bay’ (JIJ HNS131)). L’Autre, qui détenait le pouvoir, se transforme en victime devant la foule des manifestants : ‘hough they were the visible symbols of authority and interdiction, they could think of themselves only as unfortunate individuals’  (JIJ HNS31). Révolution en effet, puisque ces actions inversent les statuts respectifs des forces en présence. L’autre aspect intéressant de ces manifestations est leur force structurante : comme les camps et leur apparent désordre, cette foule une et plurielle (‘one and many simultaneously’ (JIJ HNS 132)) s’organise : du désordre naît un sens :

Scattered groups coalesced into crowds, and each crowd after some confusion, after some swaying and milling, ordering and contradicting, presently became a massive body which moved forward in a solemen mysterious rhythm, slow and relentless. […] A vast multitude rolled towards us like an implacable flood. It moved unimpeded with a roar of indistinct cries. After a time the cries, synchronised with the heady marching, became a regular choral response to somebody shouting words of denunciation. (JIJ HNS132-133)’

On remarque comment la multiplicité se fait unicité et comment le rythme, l’ascension, l’organisation textuelle font surgir un ordre et une direction commune. Même si les manifestations se heurtent pour la plupart à une répression (souvent) sanglante (JIJ HNS 131 ; 133-135) qui renvoie les manifestants à leur morcellement initial, leur trace subsiste, devient un maillon dans une chaîne d’événements qui devient l’histoire d’un peuple, trait commun autour duquel se rallier (‘The driving force everywhere were the students, young, angry, full of memories of other rebellions in history .’ (JIJ HNS132)).

La visibilité palestinienne, son altérité font peur et engendrent la répression, des Anglais (SA L 171), des autres gouvernements arabes (AS IES chp. 5 sc. 2). La répression a souvent un contre-effet : ’unfortunately the bandits also continued apparently more galvanised into activity than terrorised by the punishment of Jaffa’ (SA L 125). En renvoyant les Palestiniens restructurés à la situation de départ, la répression les force à une nouvelle forme d’action : ‘In our impotence, unarmed and defenceless, we vowed revenge  (JIJ HNS10). La vengeance, dès lors que le Palestinien ne parvient pas à faire reconnaître qu’il a été lésé, consiste à renvoyer l’Autre dans le chaos dans lequel il a conduit les Palestiniens (‘if there is any change it’s for the worse, a sort of sliding down to chaos’ (JIJ HNS68)). La vengeance est un renversement de l’ordre imposé par l’ennemi :

It is because they have denied you the light
that you will purge and scourge
until a new day is forced upon the earth
and you on his brow!
(RB WHT34) ’

La vengeance est vécue comme une renaissance : ‘[we shall] equivocate martyrdom on baptism! ’ (RB WHT34)

Notes
1282.

Voir à ce sujet Burke, Edmund. Reflections on the Revolution in France.(1790). On retrouve ici le discours du Sublime, évoqué lors de l’étude de l’espace.