À côté de ce jeu intertextuel avec l’art goethéen, on rencontre, dans les nouvelles de Tieck, de nombreuses références au mouvement Jeune-Allemagne, comme nous l’avons dit plus haut. Né au début des années 1830, le mouvement Jeune-Allemagne connaît, en effet, son heure de gloire en 1835, avant d’être censuré à la fin de cette même année par le parlement. 436 Et de fait, plusieurs nouvelles que compose Tieck dans les années 1830, l’évoquent : L’Homme-poisson (1835) précédemment cité, Le Vieux livre et le voyage dans le bleu (1835), L’Épouvantail (1835), Caprices et Lubies (1836), Le Soupirant (1838). Concernant L’Homme-poisson, nous renvoyons à notre analyse située plus haut. Au sujet du Vieux livre, notons que :
Rappelons que dans L’Épouvantail, Ledebrinna symbolise cette même tendance, « l’engagement de la littérature dans la réalité ». 438 En ce qui concerne Caprices et Lubies, nouvelle présentée par ailleurs dans le cadre du lien à l’architexte du « Schicksalsdrama », rappelons que la date de naissance emblématique de l’héroïne Emmeline, 1789, tout comme son aversion pour le mariage, évoquent des motifs récurrents du mouvement Jeune-Allemagne qui, comme on sait, plaidait pour une libération de la chair et une émancipation de la femme. Et dans le cas du Soupirant, remarquons que deux personnages caricaturent les « carbonari de la littérature » 439 , id est toute cette tendance révolutionnaire de l’écriture, en l’occurrence, Lindhorst et Amsel, présentés auparavant dans le cadre de notre étude sur l’architexte de la comédie.
Au-delà de ces références ponctuelles, on peut observer dans l’une des dernières nouvelles de Tieck, Vittoria Accorombona (1840), la reprise d’un roman de Karl Gutzkow (1811-1878), Wally la sceptique (1835), ce roman qui, précisément, fit scandale en Allemagne et fut largement responsable de l’interdiction du mouvement Jeune-Allemagne par la censure. 440 Mettons en lumière leurs liens, avant de souligner la distanciation qu’opère Tieck par rapport à son modèle romanesque.
« Der Beschluss des Bundestages vom 10. Dezember 1835 zum Verbot der Schriften des Jungen
Deutschland », in : Die deutsche Literatur in Text und Darstellung. Vormärz, 1993, pp. 73-76.
Pour plus de compléments, se reporter au même article évoqué ci-dessus.
p. 373 : „diese Carbonari der Literatur“. Cette nouvelle est également étudiée en annexe, dans le cadre du rapprochement à l’architexte du conte populaire.
Wally, die Zweiflerin.