1.2.3.1.3.Evolutions des modes de vie

Les changements dans les modes de vie ont entraîné une modification dans les besoins de déplacement. On constate que la mobilité est désormais plus diffuse dans le temps et dans l’espace. En effet, si les heures de pointe perdurent, les heures creuses ne sont plus vraiment « creuses », ce qui conduit à une demande généralisée de services en continu (Bailly et Heurgon, 2001). Cette évolution découle de l'augmentation du temps libre, et donc par contrecoup des loisirs, qui structurent désormais fortement les temps sociaux. Dans les réseaux de transport en commun, on ne peut plus simplement considérer les déplacements pendulaires domicile - travail, et les autres qui seraient accessoires. Les déplacements de journée ou de soirée représentent une source nouvelle de clientèle pour les transports en commun qu'il s'agit d'attirer, par des services et des tarifications adaptées. De plus, comme nous l’avons déjà signalé, du fait de l’étalement urbain, mais également de l’extension des bassins de vie aux villes voisines, les clients souhaitent se déplacer de plus en plus loin (allongement des trajets périphérie / centre-ville) et partout (déplacements en périphérie).

D’autre part, comme nous l’avons précédemment souligné, la précarisation des conditions de travail, l’augmentation des temps partiels et des contrats à dure déterminée (qui va de pair avec la tendance précédente), le travail intérimaire (comme solution ponctuelle pour certains, mais comme choix pour d’autres) relativisent l’intérêt des forfaits mensuels actuels pour des personnes ayant des besoins ponctuels nécessitant des titres plus adaptables à des situations spécifiques.

On constate également que la part des déplacements « chaînés » (par exemple travail – courses – amis – domicile) augmente, ce qui relance l’intérêt des réflexions concernant la tarification du « petit parcours ». Hensher et Reyes (2000) montrent que ce phénomène se traduit par une baisse de l’utilité pour les individus de l’usage des transports en commun.

Par ailleurs, l’individualisation des comportements, donnée centrale dans l’évolution des rythmes de vie quotidienne des personnes, à la fois produit et opérateur des changements précédemment mis en évidence, rend plus fortes et plus différenciées les exigences en matière de confort et de personnalisation des services (Bailly et Heurgon, 2001) : la clientèle est désormais plus volatile et plus exigeante quant au service qui lui est proposé, ce qui pousse les exploitants à porter davantage d’intérêt aux services associés au titre de transport (envoi à domicile, prélèvement automatique etc.).

On constate qu’une partie de ces évolutions ne sont pas favorables aux transports en commun, ce qui est confirmé par la stagnation des recettes commerciales, voire leur diminution dans le financement des transports publics urbains (les recettes commerciales se sont maintenues à 23% du financement depuis 97, elles ne représentent plus que 21% en 2000 selon le GART, 2000), même si évidemment d’autres phénomènes, propres au secteur, concourent à cette situation (fraude en recrudescence dans certains réseaux, grèves). En effet, ces évolutions sont essentiellement caractérisées à notre sens par ce que l’on pourrait appeler «l’occasionnalité régulière» qui correspond à des déplacements de « temps libre », en soirée ou en journée, mais également pendant les vacances, sur un ou plusieurs réseaux (ferroviaire + urbain), et aussi à des déplacements professionnels durant la semaine, moins facilement captables par les réseaux de transport en commun que ne le sont les déplacements réguliers pour des motifs contraints. Le véritable enjeu qui est posé par ces nouvelles évolutions est la capacité des réseaux à mettre en évidence dans un premier temps les nouveaux besoins et attentes des différentes clientèles, puis de les intégrer dans leurs réflexions sur les évolutions de la gamme, pour enfin proposer des titres adaptés. Nous verrons dans le paragraphe suivant comment les responsables de réseau s’adaptent à ces évolutions.