Section 1 : La concentration organique du système de règlement

Que la caractérisation d’une juridiction passe d’abord par la reconnaissance, au sein du processus de règlement, de l’existence d’un organe tiers au différend est une évidence 138 . Dans le cadre de la démonstration de l’existence de cette entité, condition organique première de la réalité d’un mécanisme juridictionnel, l’observation du Mémorandum et de la pratique du système qu’il organise montre une multiplicité d’acteurs divers, tous susceptibles du seul fait de leur existence de constituer un tel organe juridictionnel, et rend donc nécessaire une clarification. En réalité, une dualité organique peut être identifiée : coexistent, d’une part, des organes à la dénomination propre à l’Organisation et, d’autre part, des organes dont la dénomination est commune au système de règlement de l’OMC et plus généralement aux règlement des différends interétatiques dans le cadre du droit international public général 139 .

Les premiers organes participent au règlement des différends que le Mémorandum organise car leur effectivité et leurs missions sont prévues par ce texte. Ils sont l’ORD et son Président, le Secrétariat et le Directeur général qui le dirige, les groupes spéciaux et l’Organe d’appel aidé dans son travail par un secrétariat propre 140 . L’étude textuelle de cette participation permet de classer ces entités en deux catégories qui sont fonction de la mission particulière que le Mémorandum leur attribue ; et ce classement est utile à l’identification précise des organes susceptibles de constituer le fondement organique d’une juridiction mémorandaire.

Les premières entités sont d’ordre administratif dans le sens commun de ce terme : ces entités ont pour fonction de gérer la bonne application des règles et procédures que le Mémorandum prévoit 141 . Il s’agit de l’ORD et de son Président, du Secrétariat de l’OMC et du Directeur général, ainsi que du Secrétariat de l’Organe d’appel. D’abord, l’ORD ‘ « est institué pour administrer les (…) règles et procédures » ’ du Mémorandum et, sauf disposition contraire d’un autre accord OMC, les dispositions ‘ « relatives aux consultations et au règlement des différends » ’ que ces accords peuvent prévoir 142 . De même, le Président de l’ORD est cantonné par le Mémorandum à un rôle identique 143 . Ensuite, le Secrétariat est ‘ « chargé d’aider les groupes spéciaux (…) et d’offrir des services de secrétariat et un soutien technique » 144 , tout comme le Secrétariat de l’Organe d’appel qui fournit à ce dernier ‘ « le soutien administratif et juridique dont il aura besoin » 145 . Enfin, le Directeur général, selon l’article VI de l’Acte final de l’OMC, dirige le Secrétariat et possède également des attributions administratives que le Mémorandum lui confère 146 .

L’ORD comme son Président ont par conséquent le même rôle de formalisation et de référence pour les problèmes d’application du Mémorandum. Le Secrétariat de l’OMC et celui de l’Organe spécial restent dans les missions d’aide et de soutien attribuées par le Mémorandum. Le Directeur général exerce des fonctions de désignation quand un blocage du système de règlement menace. Ces cinq institutions ne sont pas déterminantes dans l’identification d’une juridiction car elles n’ont pas pour mission de traiter directement le différend. Leur action se limite à l’aspect procédural du système de règlement que le Mémorandum organise et à la gestion des règles et procédures que prévoit ce texte. Tout au plus le Président de l’ORD et le Directeur général peuvent-ils se départir de leur rôle administratif en s’intégrant dans un processus de bons offices, de conciliation ou de médiation, sous certaines conditions 147 , mais cette fonction annexe ne les fait plus agir en leur qualité de Président de l’ORD ou encore de Directeur général mais en tant qu’offreurs de bons offices, médiateurs ou conciliateurs au même titre que d’autres entités pouvant également constituer ces mêmes acteurs du règlement.

En revanche, les secondes entités sont, quant à elles, d’ordre opérationnel dans le sens où leur fonction, définie par le Mémorandum, est l’intervention directe dans l’aspect matériel du règlement du différend. Ce sont les groupes spéciaux et l’Organe d’appel, ainsi que, dans une bien moindre mesure, l’ORD. En effet, la fonction des groupes spéciaux est d’examiner le différend en procédant ‘ « à une évaluation objective de la question dont il est saisi, y compris une évaluation objective des faits de la cause, de l’applicabilité des dispositions des accords visés pertinents et de la conformité des faits avec ces dispositions  ’» 148 et celle de l’Organe d’appel est de connaître ‘ « des appels concernant des affaires soumises à des groupes spéciaux  ’» 149 . En outre, ces deux organes pourront, le cas échéant, arriver à la conclusion selon laquelle ‘ « une mesure est incompatible avec un accord visé ’ », pourront recommander ‘ « que le Membre concerné la rende conforme audit accord ’ » et pourront ‘ « suggérer au Membre concerné des façons de mettre en œuvre ces recommandations » 150 . Par ailleurs, l’ORD est susceptible d’avoir, malgré sa fonction générale essentiellement administrative précédemment établie, une fonction opérationnelle dans la phase des consultations dans la mesure où il constitue le seul organe tiers y participant. Encore faut-il plus précisément vérifier la réalité de cette fonction par une étude plus détaillée de ces consultations, dans la mesure où celles-ci ne semblent admettre d’autre organe tiers que l’ORD.

Ces consultations 151 constituent la première phase du système de règlement des différends interétatiques de l’OMC. Elles sont prévues à l’article 4 du Mémorandum qui stipule, avant de détailler des aspects procéduraux, que ‘ « chaque Membre s’engage à examiner avec compréhension toutes représentations que pourra lui adresser un autre Membre au sujet de mesures affectant le fonctionnement de tout accord visé prises sur son territoire et à ménager des possibilités adéquates de consultation sur ces représentations » 152 . Le Mémorandum précise que ‘ « les Membres affirment leur résolution de renforcer et d’améliorer l’efficacité des procédures de consultation utilisées par les Membres  ’» 153  ; ce faisant, ce texte affirme une continuité entre ces consultations et celles qui existaient déjà dans le cadre du GATT de 1947 154 et donne implicitement une définition des consultations : elles sont une phase de discussions entre Etats opposés par un différend.

Ces consultations se caractérisent par leur institutionnalisation visible à travers le rôle que joue l’ORD dans cette phase. En effet, cette dernière est encadrée par une exigence procédurale particulière : la notification 155 , qui est double. D’une part, l’article 4 : 4 prévoit que ‘ « toutes les demandes de consultations de ce type seront notifiées à l’ORD et aux Conseils et Comités compétents par le Membre qui demande l’ouverture de consultations ’ ». La discussion qui peut s’instaurer entre Etats séparés par un différend est donc précédée de formalités. L’Etat plaignant ne peut se contenter d’adresser une simple demande de consultations à l’Etat qui est à l’origine de la mesure en cause mais doit aussi informer l’ORD de cette démarche. Il conserve des rapports directs avec l’Etat partie au conflit car il lui adresse directement cette demande et les instances de l’OMC n’interviennent pas pour transmettre et donc éventuellement filtrer à la base les demandes de consultations. Cependant, par l’obligation de notification, l’ORD entre de façon systématique dans cette phase des consultations. Cette obligation de notification a deux effets : une information car, la demande de l’Etat plaignant parvenant à l’ORD composé des représentants de tous les Etats Membres de l’OMC, les Etats tiers peuvent être au fait de l’existence de cette demande et de sa teneur, et ainsi se déterminer sur leur éventuelle participation 156  ; une obligation formelle de motivation de la demande car celle-ci doit contenir des précisions quant aux mesures visées par l’Etat plaignant et un fondement d’ordre juridique 157 .

D’autre part, le Mémorandum prévoit dans son article 3 : 6 que ‘ « les solutions convenues d’un commun accord pour régler des questions soulevées formellement au titre des dispositions des accords visés relatives aux consultations et au règlement des différends seront notifiées à l’ORD et aux Conseils et Comités compétents, devant lesquels tout Membre pourra soulever toute question à ce sujet ». ’ Ici encore, l’ORD est impliqué de manière systématique dans ces consultations lorsque celles-ci s’achèvent par la résolution du différend. Cette affirmation doit cependant être nuancée : l’article 3 prévoyant cette notification est consacré comme l’indique son titre aux ‘ « dispositions générales ’ » et le mécanisme qu’il prévoit n’est pas encadré par une procédure stricte qui aurait pu rendre plus rigoureux le système de notification ; en outre, cette dernière notification n’est cependant pas automatique mais ne concerne que la moitié des affaires réglées à l’amiable 158 . Pourtant, le Président de l’ORD a rappelé dès 1995 ‘ « qu'"il importait, à ce stade de mise en place des pratiques de l'ORD, que les Membres envisagent la nécessité de faire connaître officiellement non seulement le début des différends mais aussi leur règlement". Ce précédent n'avait pas été suivi. Le Président a invité les Membres à mettre en oeuvre intégralement les dispositions de l'article 3: 6 du Mémorandum d'accord sur le règlement des différends pour assurer la transparence la plus complète en matière de règlement des différends » 159 .

Par conséquent, la notification double a une fonction ‘ « institutionnalisatrice ’ » des discussions menées dans le cadre des consultations, en raison de la participation de l’ORD qui est le destinataire de toutes les notifications. Si quelques défaillances sont notables dans cette notification et s’il n’existe pas d’organe particulier autre que l’ORD appuyant cette institutionnalisation, c’est parce que le principe même de ces consultations est la discussion libre entre parties à un différend. Il reste que cette institutionnalisation, fondée sur la présence de l’ORD, peut contribuer à constituer les prémices d’une assise organique juridictionnelle du système mémorandaire de règlement des différends puisque le concept de juridiction implique que l’agent de règlement des différends soit un organe institutionnalisé.

Certes, la fonction administrative de l’ORD ne lui permet pas de jouer réellement un rôle d’agent de règlement. Mais cette fonction lui attribue un rôle de catalyseur de dialogue interétatique voire, par voie de conséquence, de catalyseur de solution convenue d’un commun accord entre les parties au différend. Cette fonction opérationnelle minimale n’est pas très éloignée de celle d’un juge national qui permettrait une confrontation entre parties opposées dans un but par exemple transactionnel 160 . Ce faisant, l’ORD institutionnalise les consultations et les intègre dans le système plus vaste du règlement des différends mémorandaires dont l’éventuelle juridictionnalité pourra rejaillir sur cette première phase, alors même que ce procédé de discussions interétatiques peut être a priori qualifié de diplomatique et non de juridictionnel. La consultation, par le biais de l’institutionnalisation, entre grâce à la fonction administrative de l’ORD dans le giron d’un mécanisme général qui pourra plus logiquement être qualifié de juridictionnel. L’institutionnalisation semble constituer l’équilibre qui a pu être trouvé entre la rigueur d’un mécanisme complet de règlement des différends et l’incontournable respect des souverainetés étatiques dans le processus de consultations.

Aussi faut-il distinguer, dans la mise en évidence de cette matière organique créée de toute pièce par le Mémorandum, les entités administratives des entités opérationnelles. Si toutes administrent les règles et procédures mémorandaires, seuls les groupes spéciaux et l’Organe d’appel, en leur qualité préétablie d’organes opérationnels, joueront un rôle majeur dans la mise en évidence d’une possible juridictionnalité du système de règlement des différends qu’organise le Mémorandum. La qualification organique d’une juridiction ne peut se contenter d’organes administratifs qui gèrent des règles et procédures organisant un mécanisme de règlement des différends extérieur à leur participation matérielle. Elle nécessite au contraire l’identification d’organes agissant sur les questions matérielles que pose le différend, ce qu’opèrent les groupes spéciaux et l’Organe d’appel 161 . Par ailleurs, l’ORD peut être considéré comme indirectement opérationnel dans sa fonction particulière lors de la phase des consultations, car il institutionnalise cette phase par sa centralité dans le mécanisme de notification. Il ne faut donc considérer dans l’identification organique d’une juridictionnalité du système mémorandaire que les groupes spéciaux et l’Organe d’appel 162 , ainsi que l’ORD dans une moindre mesure quand il s’agira de traiter de la phase des consultations. La présence effective et les fonctions administratives précises des autres organes internes de l’OMC n’aura pour intérêt que de renforcer la consistance organique du système de règlement des différends organisé par le Mémorandum ; elles montreront simplement que les instances opérationnelles de règlement disposent d’une administration d’appui effective 163 .

L’existence des groupes spéciaux et de l’Organe d’appel est prévue par le Mémorandum 164 . Les groupes spéciaux qui existaient déjà sous la dénomination de panels dans le cadre du GATT de 1947 sont donc ‘ « désormais institutionnalisés ’ » 165 et l’Organe d’appel, création des fondateurs de l’OMC, bénéficie d’une attention particulière dans le texte l’instituant 166 . De plus, l’existence des groupes spéciaux 167 et de l’Organe d’appel est effective dans la pratique 168 , de même que la procédure de notification à l’ORD lors de la phase des consultations 169 . Cette considération suffit à montrer la présence d’entités, propres à l’Organisation, qui constituent le critère organique constitutif d’une juridiction. Qu’elles soient administratives ou opérationnelles, toutes ces entités attribuent une consistance organique certaine au système de règlement des différends que le Mémorandum organise ; mais leur distinction permet de réduire l’apparente complexité organique du Mémorandum et de dégager plus particulièrement une assise organique à la juridictionnalité de ce système de règlement : seules les secondes entités servent à l’établissement d’une consistance juridictionnelle, les premières ne constituant que leur appui administratif.

Le second membre de la dualité organique précédemment constatée est constitué par des mécanismes classiques de règlement des différends interétatiques que connaît le droit international public général et que le Mémorandum inclut formellement dans le système de règlement qu’il organise. Ils sont au nombre de deux : d’une part les bons offices, conciliation et médiation 170 et, d’autre part, l’arbitrage 171 .

En premier lieu, le Mémorandum contient un article 5 intitulé ‘ « bons offices, conciliation et médiation » 172 . Ce titre appelle naturellement l’existence d’organes participant à ces mécanismes : une entité offrant ses bons offices, un conciliateur et un médiateur. Aucune définition n’est donnée par le Mémorandum concernant ces trois points. De plus, l’article 5, de son intitulé à l’ensemble de ses paragraphes, les traite simultanément ; aucune distinction n’est faite entre les bons offices, la conciliation et la médiation au sein de cette disposition. La raison de cette double constatation paraît simple : ces trois mécanismes sont des modes interétatiques de règlement des différends déjà parfaitement connus, ayant un caractère traditionnel dans le domaine du droit international public. Il s’agit en effet de ‘ « procédures diplomatiques » ’ qui ‘ « appartiennent à l’arsenal des modes de règlement les plus classiques et les plus anciens » 173 . Les bons offices et la médiation sont deux modes ‘ « d’origine coutumière (…) codifiés par les Conventions de La Haye du 29 juillet 1899 et du 18 octobre 1907 ’ », et ‘ « la consécration du procédé de la conciliation a été apportée par la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités  ’» 174 .

Encore faut-il établir avec certitude la similitude totale entre ces mécanismes prévus par le Mémorandum et les mécanismes du même nom que le droit international public général connaît classiquement. Cette démarche semble à première vue malaisée puisque le Mémorandum rassemble dans le même article les trois mécanismes, avec un intitulé unique, et ne les distingue pas dans le corps de cet article quant aux procédures qui leur sont applicables. Trois mécanismes d’apparence complexe, puisque traitant des rapports entre Etats souverains dans le cadre d’un différend, sont contenus dans un seul article qui, par ailleurs, n’est pas très long.

Cependant, la présomption d’un accord total entre cet article 5 et les règles coutumières du droit international est forte. D’abord, le silence de définition du Mémorandum ne s’accompagne pas de dispositions nombreuses et denses traitant des fondements, des conditions d’application ou encore de procédures strictes et précises, applicables aux bons offices, à la conciliation ou à la médiation. Cette démarche textuelle laisse supposer la connaissance généralisée de ces procédures à caractère coutumier. Le paragraphe 1er dudit article confirme cette démarche en affirmant que ‘ « les bons offices, la conciliation et la médiation sont des procédures qui sont ouvertes volontairement si les parties au différend en conviennent ainsi » ’ et cette désignation semble participer à l’intégration au sein du Mémorandum de mécanismes déjà existants dont la concrétisation est subordonnée à la volonté des Etats opposés par un conflit.

Enfin, cette présomption paraît être confirmée par l’article 3 : 2 du Mémorandum qui dispose que le système de règlement des différends de l’OMC ‘ « a pour objet de préserver les droits et les obligations résultant pour les Membres des accords visés, et de clarifier les dispositions existantes de ces accords conformément aux règles coutumières d’interprétation du droit international public ». Il n’est pas fait explicitement référence à la clarification de la disposition consacrée aux bons offices, à la conciliation et à la médiation par les ‘ « règles coutumières d’interprétation du droit international public ’ », mais le principe est affirmé d’une confrontation entre les ‘ « accords visés ’ » et le droit international public. Or, le Mémorandum figure bien dans la liste de ces accords 175 et la reconnaissance de l’application de ‘ « règles coutumières  ’» du droit international pour ce texte permet de penser qu’est confirmée une identité entre ces trois mécanismes prévus par le Mémorandum et ceux dont l’existence est avérée en droit international.

En réalité, il n’est pas expressément précisé que les dispositions du Mémorandum doivent s’interpréter à la lumière des règles du droit international public. Mais la mise en parallèle flagrante des dispositions du Mémorandum et de ces ‘ « règles coutumières ’ » montre une volonté non équivoque des Membres de prendre en considération et d’utiliser l’acquis juridique international et non de s’en démarquer systématiquement. Le Mémorandum ne peut donc que refléter cette volonté et ses dispositions ne sauraient être distinctes voire contraires de manière automatique aux coutumes du droit international. La présomption d’une identité entre, d’un côté, les bons offices, la conciliation et la médiation, et, de l’autre, les mécanismes coutumiers du droit international, est donc confirmée.

De la sorte, le Mémorandum procède à l’institutionnalisation des mécanismes coutumiers de bons offices, conciliation et médiation dans un système plus vaste de règlement des différends tel qu’organisé par le Mémorandum. Pour autant, ces trois mécanismes ne suffisent pas à justifier la participation d’entités particulières à une consistance organique pouvant caractériser une juridiction. Au contraire, leur centralité pourrait faire perdre au système mémorandaire sa juridictionnalité organique dans la mesure où les bons offices, la conciliation et la médiation sont unanimement rangés parmi les modes diplomatiques – par opposition aux modes juridictionnels – de règlement des différends interétatiques 176 . Elle pourrait affirmer ainsi l’absence – ou du moins l’atténuation conséquente – d’une juridictionnalité appliquée au système mémorandaire. Le système mémorandaire s’inscrirait ainsi dans la continuité du mécanisme de règlement des différends du GATT de 1947 brillamment qualifié par M. Canal-Forgues de conciliation quasi judiciaire 177 .

Cependant, cette centralité ne saurait être affirmée. En effet, bien qu’explicitement prévue par le Mémorandum dans son article 5 comme un mécanisme à part entière et apportant à ce titre un aspect novateur au système de règlement des différends au sein de l’OMC en comparaison du système ayant eu cours au sein du GATT de 1947, cette conciliation 178 ne constitue qu’un mécanisme alternatif. Elle ne fait que s’ajouter, du fait d’une volonté commune des parties à un différend, aux divers autres mécanismes de règlement que le Mémorandum prévoit. Concernant l’identité des tiers participant au règlement des différends, cet article 5, en se référant aux mécanismes traditionnels de bons offices, de médiation et de conciliation, accepte implicitement l’entremise d’Etats et d’organes tiers, la libre volonté commune des Etats parties au différend désignant précisément pour chaque cas d’espèce l’entité extérieure au différend participant à sa résolution. Les parties à un différend ayant choisi la conciliation peuvent opter pour un organe de leur choix, pour une commission de conciliation qu’ils choisiront librement et qui n’aura pas forcément de rapport avec le système mis en place par l’OMC.

Cependant, le caractère alternatif du mécanisme conciliatoire pourrait être décisif. En effet, le Mémorandum semble ménager aux parties, en leur laissant le choix du mode de conciliation pour la résolution de leurs différends, une porte de sortie du système que ce texte organise. Cette issue est explicitement offerte aux Etats par la possibilité de choisir la conciliation, ce mécanisme étant explicitement inscrit dans le texte du Mémorandum. Néanmoins, cette institutionnalisation de la conciliation est paradoxale : d’un côté, elle en fait un mécanisme central en lui attribuant le statut de ‘ « porte de sortie ’ » du système et, de l’autre côté, elle lui impose la concurrence d’un système de règlement intégré, voire renforcé et exclusif 179 . Or, la conciliation est soumise, dans son enclenchement comme dans son déroulement, à la volonté commune des parties au différend. Les Etats ne peuvent sortir efficacement du système mémorandaire que d’un commun accord, par intérêt unilatéral convergent d’éviter le recours au groupe spécial et par volonté bilatérale d’un règlement conciliatoire. La soumission de ce règlement à la volonté commune de parties opposées rend ce règlement non-viable, et ce d’autant plus qu’un système intégré et renforcé le concurrence directement. Le plaignant n’aura que peu d’intérêt à demander au défendeur la conciliation dans la mesure où celle-ci aura toutes les chances d’aboutir à un ralentissement du règlement, voire à un blocage de la procédure ; il préfèrera un mode de règlement plus contraignant pour le défendeur. De même, à supposer que le plaignant formule une telle demande de conciliation, le défendeur, sûr de son bon droit, ne voudra pas d’un mécanisme diplomatique ; il préfèrera que son comportement ne fasse pas l’objet d’‘ » arrangements ’ » mais que sa ‘ « légalité ’ » soit consacrée par un mode de règlement intégré.

Aussi, en conciliant le caractère diplomatique de la conciliation et la concurrence exercée par le processus mémorandaire normal, l’institutionnalisation a pour effet de marginaliser la conciliation. De la sorte, la porte de sortie que celle-ci constitue ne sera pas empruntée par les Membres qui n’auront aucun intérêt particulier à le faire. La pratique confirme ce désintéressement généralisé des Membres pour la conciliation puisque cette dernière n’a jamais été employée comme mode de règlement des différends au sein de l’OMC. Cette sortie du système commun de règlement prévu par le Mémorandum était difficilement cohérente par rapport au caractère intégré, voire renforcé et exclusif, que ce système, novateur sur ces trois points, semble revêtir selon une opinion largement formulée par les analyses doctrinales du système mémorandaire 180 . Elle est ineffective en pratique. Les rédacteurs du Mémorandum ayant ainsi marginalisé la conciliation par une institutionnalisation paradoxale, cette conciliation ne peut plus constituer la grille de lecture du nouveau mécanisme de règlement des différends de l’OMC, alors qu’elle le pouvait dans le cadre du GATT de 1947, comme l’a établi M. Canal-Forgues.

Cette marginalisation soutient le souci de recherche d’une nouvelle grille de lecture remplaçant la conciliation périmée, à savoir la juridiction, comme semble déjà implicitement le supposer M. Canal-Forgues quand il affirme en conclusion de sa thèse sur le GATT que ‘ « la nouvelle régulation internationale des échanges commerciaux (…) pourrait (…) bénéficier de l’appui d’un système de règlement des différends "intégré" dans le cadre duquel un organe spécifique, de préférence permanent et composé de professionnels du droit et du commerce, serait chargé d’assurer notamment la consistance et la cohérence des interprétations relatives aux dispositions de fond des divers accords conclus » ’ ‘ 181 ’ ‘ .

Par conséquent, les bons offices, la conciliation et la médiation ne sauraient constituer les mécanismes classiques du droit international public assurant l’assise organique d’un système mémorandaire de nature juridictionnelle. Tout au plus peuvent-ils être considérés comme des compléments au mécanisme des consultations. Comme celles-ci, ils se caractérisent par un principe de libre volonté commune des parties, cette fois-ci assisté d’un organe tiers qui, à des degrés divers, a pour fonction de faciliter l’obtention d’un accord bilatéral sur le règlement du différend 182 . A ce titre, ils pourraient être assimilés à un mécanisme de médiation tel que les systèmes juridictionnels nationaux le prévoient généralement ; ce mécanisme serait géré par le Directeur général de l’OMC ou par le Président de l’ORD qui ne se comporteraient ainsi plus comme des entités administratives mais opérationnelles du règlement des différends. Cette médiation particulière complèterait le mécanisme transactionnel que la phase des consultations organise. En effet, ‘ « ces procédures peuvent être actionnées à tout moment et il peut y être mis fin à tout moment. Elles peuvent même continuer pendant l’examen du litige par un groupe spécial si les parties le décident, des règles de ‘coexistence’ des procédures étant aménagées. Mais il est clair que la période privilégiée pour y recourir est, dans l’esprit du Mémorandum, la phase des consultations et qu’il s’agit d’un préalable à la constitution d’un groupe spécial » 183 .

Néanmoins, même cette hypothèse doit être invalidée. L’institutionnalisation des bons offices, de la conciliation et de la médiation n’est que le fait du Mémorandum. Jusqu’à présent, ces mécanismes n’ont pas été utilisés par les Etats parties aux nombreux différends qui ont été traités. La multiplicité des tiers participant à la phase des consultations peut, certes, faire croire à l’application informelle de mécanismes tels que les bons offices ou la médiation, en raison de l’action que les tiers sont susceptibles de jouer dans les discussions interétatiques. De même, la conciliation pourrait être le fait de ces Etats tiers, même si elle nécessite généralement la participation comme tiers d’un organe préconstitué 184 . Cependant, l’action informelle de tiers pendant les consultations ne saurait être assimilée à une application de l’article 5 du Mémorandum. Celui-ci, en offrant les services du Directeur général 185 et en prévoyant que les tiers participant aux consultations doivent avoir ‘ « un intérêt commercial substantiel dans les consultations  ’» 186 , semble implicitement considérer que les Etats tiers à un différend ne sont pas à même de constituer le tiers indispensable au bon déroulement d’un mécanisme de bons offices ou de médiation.

L’ineffectivité de l’article 5 est confirmée par le Directeur général adjoint de l’OMC. Au cours de la réunion de l’ORD du 20 juin 2001, ce dernier ‘ « a fait remarquer que, à ce jour, presque tous les différends concernant les dispositions des accords visés avaient été réglés par le biais de la procédure de groupe spécial. L'article 5 du Mémorandum d'accord prévoyait le recours aux bons offices, à la conciliation et à la médiation mais cette disposition n'avait pas été utilisée depuis l'institution de l'OMC. Comme le Directeur général était d'avis qu'il fallait ménager aux Membres toutes les possibilités de régler leurs différends par voie de négociation chaque fois que cela était possible, le Directeur général souhaitait appeler l'attention des Membres sur le fait qu'il était prêt à les aider en rendant opérationnel l'article 5 » 187 . Depuis cette date, l’article 5 n’a toujours pas été activé par les Etats, malgré la volonté contraire explicite du Directeur général.

Par conséquent, la consistance organique qui peut être attribuée au système de règlement des différends au sein de l’OMC ne saurait être mise en évidence par l’institutionnalisation de mécanismes classiques de règlement comme peuvent l’être les bons offices, la conciliation et la médiation. L’ineffectivité réelle de ces mécanismes ainsi que leur marginalisation au sein du système mémorandaires s’opposent à leur institutionnalisation textuelle. Les entités susceptibles d’offrir leurs bons offices, leur conciliation ou leur médiation ne s’ajoutent pas en pratique aux autres organes ayant une fonction opérationnelle dans le règlement des différends organisé par le Mémorandum.

En second lieu, un dernier organe peut être identifié par l’existence d’une procédure traditionnelle du droit international public reprise par le Mémorandum et intégrée dans le système de règlement des différends interétatiques qu’il organise : il s’agit de l’arbitre incorporé au système de règlement des différends par les articles 25, 22 : 6 et 21 : 3 qui définissent trois mécanismes distincts d’arbitrage 188 . Leur fonction opérationnelle et, partant, leur contribution à la réalité organique d’une juridiction doit être précisée pour chacun d’entre eux.

D’abord, l’arbitrage de l’article 25 est ‘ « un arbitrage rapide dans le cadre de l'OMC, conçu comme un autre moyen de règlement des différends, [qui] peut faciliter la solution de certains différends concernant des questions clairement définies par les deux parties ’ » 189 . En réalité, ‘ « le recours à la procédure d’arbitrage dans le cadre institutionnel de l’OMC peut (…) constituer une alternative à la procédure de droit commun » 190 . La relative brièveté de cet article 25 indique que le Mémorandum n’entend pas remettre en cause l’économie générale de cette procédure d’arbitrage ; même ‘ « le champ d’application de l’arbitrage ne fait pas l’objet d’une détermination précise dans le Mémorandum ’ » 191 . Les procédures faisant rentrer le processus d’arbitrage au sein du mécanisme de règlement des différends organisé par le Mémorandum sont peu nombreuses et consistent simplement en une notification 192 ainsi qu’en la dévolution du processus exécutoire des articles 21 et 22 à la décision arbitrale 193 . Aussi ces deux mécanismes ne peuvent-ils modifier ni le déroulement du travail arbitral ni le contenu de la décision qui en découle. Tout au plus aboutissent-ils à une institutionnalisation de cet arbitrage au sein du système mémorandaire.

Le souci est donc constant de conserver les différends dans le giron de l’OMC et de ne pas faire de cette procédure d’arbitrage, forcément prévue car classique des rapports interétatiques, une échappatoire au système mis en place par le Mémorandum. Ce dernier organise des procédures complémentaires qui vont pouvoir accompagner ce règlement arbitral, avec une décision considérée comme définitive, pour le rendre plus rationnel et efficace grâce à l’applicabilité à l’arbitrage des articles 21 et 22. Par conséquent, l’arbitrage, procédure de règlement des différends interétatiques traditionnelle du droit international public, fait l’objet d’une institutionnalisation par le Mémorandum. Même si le Mémorandum n’identifie pas, contrairement aux bons offices, conciliation et médiation, une entité de l’OMC susceptible de pouvoir jouer le rôle d’arbitre, ce texte reprend et encadre l’arbitrage.

De plus, cette institutionnalisation de l’arbitrage de l’article 25 s’accompagne de sa marginalisation. En effet, le Mémorandum caractérise cet arbitrage de ‘ « rapide ’ » en le considérant ‘ « comme un autre moyen de règlement des différends ’ » pour ‘ « faciliter la solution de certains différends concernant des questions clairement définies par les deux parties ’ » 194 . Aussi cette disposition place-t-elle l’arbitrage dans le cadre d’un système plus général de règlement des différends en le cantonnant à un rôle subalterne : celui de régler des divergences de points de vue entre Etats et non forcément un différend naissant complexe caractérisé par de profonds antagonismes ; les Etats choisissent volontairement cette procédure dans la mesure où ils estiment pouvoir régler un léger différend clair de manière relativement rapide ; l’arbitrage ne saurait donc constituer un mécanisme efficace de règlement de différends importants dans lesquels les Etats opposés entre eux ne sont même pas d’accord sur les termes de ce différend et sur l’interprétation objective des faits en cause.

Cette marginalisation est discutable car l’article 25 offre en réalité aux parties la possibilité, d’un commun accord entre elles, de sortir du règlement mémorandaire normal. Cependant, cet arbitrage subit la même marginalisation que les procédures de bons offices, conciliation et médiation. Il est institutionnalisé de manière paradoxale, dans la mesure où il constitue une porte de sortie du système mémorandaire par accord bilatéral tout en étant concurrencé par le règlement normal que ce système intégré et renforcé prévoit. Les parties n’ont pas d’intérêt commun à enclencher et utiliser cet arbitrage. En particulier, le plaignant préfèrera la procédure normale du groupe spécial au cours de laquelle l’accord mutuel entre parties n’est pas incontournable. Cette institutionnalisation spécifique conduit donc à la marginalisation de l’arbitrage de l’article 25.

En pratique, la constatation de l’ineffectivité de cette disposition confirme la mise à l’écart de cet arbitrage particulier : il n’a été utilisé qu’une seule fois jusqu’à présent. Bien plus, cette utilisation unique atteste de la marginalisation d’un arbitrage alternatif au système mémorandaire. En effet, le seul recours effectif à l’article 25 195 n’a pas eu pour objectif de résoudre le différend en se substituant au processus mémorandaire intégré, ce règlement ayant déjà été opéré par la voie des consultations et du groupe spécial. Il a visé au règlement du différend induit relatif aux modalités de mise en œuvre du rapport de ce groupe spécial adopté par l’ORD 196 . Ainsi, l’article 25 s’est appliqué au désaccord minime intervenant à l’intérieur du mécanisme de règlement du différend originel. En outre, les arbitres désignés ont été choisis, à la demande des parties, à l’intérieur de l’OMC ; il s’est agi en l’espèce du groupe spécial initial 197 qui a rendu une décision en qualité d’arbitre 198 . Aussi cet arbitre n’a-t-il constitué qu’un outil technique pour régler un désaccord entre parties à l’occasion d’un différend traité dans le cadre mémorandaire. Certes, l’unicité de l’application de l’article 25 confirme la tendance à l’institutionnalisation de la procédure d’arbitrage : les conditions formelles énoncées par le Mémorandum ont été respectées 199  ; les parties ont choisi comme arbitre le groupe spécial initial et restent ainsi de leur plein gré dans le giron du système OMC de règlement des différends, alors même que le Mémorandum ne propose pas la participation de quelque instance de l’OMC, contrairement à d’autres procédures 200 . Mais cet approfondissement pratique de l’institutionnalisation ne fait que renforcer la marginalisation, puisqu’il n’a pas été question de sortir du système mémorandaire mais au contraire d’y faire entrer l’arbitrage comme procédure annexe de règlement d’un désaccord secondaire.

De plus, cet article 25 a été utilisé de manière dévoyée. Il a été employé pour résoudre un désaccord portant sur la détermination du niveau de l'annulation ou de la réduction d'avantages, ce qui semble peu conforme au texte. En effet, celui-ci prévoit que cet arbitrage est ‘ « conçu comme un autre moyen de règlement des différends ’ » dans son paragraphe 1er, organisant ainsi une possibilité pour les parties d’un commun accord de sortir du système mémorandaire. Les arbitres saisis dans cette affaire ont d’ailleurs implicitement reconnu le dévoiement de cette utilisation particulière de l’article 25 quand ils ont tranché la question en constatant, au terme d’un raisonnement complexe, ‘ « qu'en attendant une interprétation ultérieure donnée par les Membres, ils devraient se déclarer compétents au titre de l'article 25 ’ » 201 . Cette utilisation esseulée n’a concerné qu’un différend induit, et non-initial comme le laisserait pourtant supposer le Mémorandum. La question qui opposait les deux parties était celle de la détermination du niveau des avantages annulés ou compromis à la suite d’un manquement à des obligations découlant de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Accord ADPIC) et non la détermination même d’un manquement qui constituait l’objet de cette affaire 202 . Cette illustration unique atteste de la démarche étatique qui est non seulement de marginaliser l’arbitrage en tant que porte de sortie du système de règlement, mais également de ne le concevoir que dans le cadre de ce règlement mémorandaire. La concentration organique des instances de règlement s’en trouve renforcée.

Ensuite, la tendance à l’institutionnalisation de l’arbitrage est encore plus nette dans l’article 22 : 6. Ce dernier confie à un arbitre le soin de régler toute contestation émanant du destinataire des mesures de compensation et de suspension qui peuvent être prises à son encontre, mesures auxquelles peut recourir la partie plaignante quand les recommandations et décisions de l’ORD ne sont pas mises en œuvre. En effet, la désignation de l’arbitre est soumise à des conditions très restrictives 203 , de telle sorte que le Mémorandum ‘ « personnalise ’ » le droit commun du règlement des litiges interétatiques en ne confiant plus le soin du choix de l’arbitre aux seules parties au conflit mais en imposant un arbitre désigné précisément : le groupe spécial initial ou un arbitre désigné par le Directeur général. Dans la pratique, toutes les décisions arbitrales ont été le fait du groupe spécial reconvoqué 204 . De plus, l’arbitre de l’article 22 voit son existence comme son action contraintes : les cas dans lesquels il pourra être fait appel à l’arbitre sont strictement définis 205  ; l’arbitre voit sa désignation clairement définie 206  ; son domaine d’action est strictement prévu et ne concerne qu’une petite partie du processus plus vaste du mécanisme de règlement des différends prévu par le Mémorandum 207  ; l’arbitrage est enfermé dans un délai strict 208  ; l’ORD devra être informé ‘ « dans les moindres délais ’ » de la décision arbitrale et pourra se prononcer sur les suites de cette décision 209 . Un groupe spécial désigné comme arbitre a d’ailleurs admis que la procédure de l’article 22 : 6 était distincte de celle de l’article 25 et plus contraignante que cette dernière 210 .

Cet arbitrage de l’article 22 : 6 bénéficie d’un encadrement et de compétences strictement définis. L’institutionnalisation de cette procédure courante du droit international public est donc forte, d’autant plus que l’arbitre a toujours été en pratique le groupe spécial initial. Le degré d’institutionnalisation correspond bien à l’effectivité de cet arbitrage puisque, contrairement aux bons offices, conciliation et médiation n’ayant eu aucune application, et à l’arbitrage de l’article 25 n’ayant connu qu’une unique mise en œuvre, qui plus est dévoyée, l’arbitrage de l’article 22 : 6 est effectif, même s’il n’est pas d’application courante 211 . Néanmoins, il faut constater que cet arbitrage ne concerne que des différends induits par un premier différend principal en cours de résolution, ce qui ne laisse pas une place prépondérante à l’arbitre dans le règlement des différends au sein de l’OMC. En outre, il ne s’applique qu’à la phase non seulement la plus contraignante du processus d’exécution mais également, et à ce titre, la plus exceptionnelle ; des mesures de compensation ou de suspension ne s’appliquent qu’en cas de résistance durable et ferme de la partie sommée d’exécuter la décision réglant le différend. Ici, l’institutionnalisation ne mène pas à l’exclusion. Elle conduit cependant à une certaine marginalisation car ce mécanisme n’est pas central dans le règlement mémorandaire des différends et sa pratique n’est pas courante. L’arbitre de l’article 21 : 3 c) semble subir le même sort.

Enfin, la procédure d’arbitrage prévue à l’article 21 : 3 c) confirme l’institutionnalisation déjà observée par ailleurs. Cette dernière provient du cadre précis dans lequel cet arbitrage s’inscrit : cette disposition prévoit un ‘ « arbitrage contraignant ’ » pour déterminer le délai raisonnable de conformation de la partie défenderesse aux recommandations et décisions adoptées par l’ORD à la suite d’un rapport d’un groupe spécial ou de l’Organe d’appel 212  ; en plus de la référence explicite à la ‘ « procédure d’arbitrage » 213 , qui laisse à penser qu’il s’agit d’une reprise du mécanisme traditionnel du droit international public, un certain nombre de conditions prévues par le Mémorandum viennent préciser le sujet de cet arbitrage et les obligations lui incombant ; l’arbitrage contraignant est une des trois solutions permettant la fixation du ‘ « délai raisonnable ’ », les deux autres étant le fruit de la volonté du défendeur approuvé par l’ORD ou de l’accord entre les parties 214  ; un délai précis est donné pour la décision de l’arbitre 215  ; le choix de l’arbitre appartient aux parties dans un court délai 216 puis au Directeur général qui va le choisir en pratique parmi les membres de l’Organe d’appel alors que cette pratique n’est ni imposée ni même suggérée par le Mémorandum 217  ; et le Mémorandum suggère des limites que l’arbitre doit adopter dans sa décision puisque ‘ « l’arbitre devrait partir du principe que le délai raisonnable pour la mise en œuvre des recommandations du groupe spécial ou de l’Organe d’appel ne devrait dépasser 15 mois à compter de la date d’adoption du rapport » 218 .

Une institutionnalisation est effective. Elle provient du cadre précis dans lequel cet arbitrage s’inscrit et des règles et procédures rigoureuses qu’il doit observer. Là encore, elle marginalise cet arbitrage dans la mesure où ce dernier ne s’applique qu’à la fixation d’un délai consécutif au prononcé de la décision de règlement. L’arbitrage est ainsi conduit à la périphérie du système de règlement que le Mémorandum instaure, même si la mise en œuvre du présent arbitrage est effective 219 .

La prévision par le Mémorandum de la participation des trois procédures d’arbitrage au système de règlement des différends au sein de l’OMC montre un mouvement d’institutionnalisation de l’arbitrage, du fait de son intégration dans un système plus vaste et du fait de procédures et mécanismes particuliers que le Mémorandum associe à son application. D’aucuns ont tiré de cette conclusion la constatation d’une juridictionnalisation. En effet, ‘ « dans le cadre de l’OMC, l’arbitrage est conçu soit comme une procédure à part entière, alternative au mécanisme classique de règlement des différends, soit comme un moyen complémentaire, destiné à améliorer l’efficacité des procédures prévues par le Mémorandum d’Accord. Quelle que soit sa fonction, l’institutionnalisation de l’arbitrage participe très largement de la juridictionnalisation des procédures de règlement des différends de l’OMC. L’arbitrage, qui peut être défini comme le processus permettant de régler les différends sur la base du respect du droit au moyen de décisions liant les parties en cause, s’oppose fondamentalement aux voies diplomatiques de règlement des différends » 220 . De même, il a pu être affirmé que ‘ « la juridictionnalisation des procédures de règlement des différends résulte (…) de l’institutionnalisation de l’arbitrage ’ » 221 , que l’utilisation de l’arbitrage introduit par le Mémorandum ‘ « pourrait aboutir à un glissement vers le règlement juridictionnel ’ » 222 ou encore que le recours à la procédure d’arbitrage dans le cadre institutionnel de l’OMC est ‘ « un renforcement de procédures dans le sens d’une plus grande ‘juridictionnalisation’ des procédures ’ » 223 . Il faut d’ailleurs remarquer le glissement plus généralisé de l’arbitrage vers l’institutionnalisation 224 et l’inscription du système mémorandaire dans ce mouvement.

Cependant, le rapport entre institutionnalisation et juridictionnalisation n’est pas pertinent dans le cadre du système de règlement des différends de l’OMC. Le texte du Mémorandum et la pratique montrent un mouvement contraire de marginalisation de l’arbitrage. Les arbitrages des articles 21 : 3 c) et 22 : 6 ne sont que des ‘ « moyens complémentaires de la procédure classique de règlement des différends » 225  ; l’arbitrage de l’article 25 n’est qu’une ‘ « alternative ’ » 226  ; cette dernière disposition, du fait de son caractère ‘ « laconique ’ » 227 , montre que ‘ « l’arbitrage est conçu comme un moyen marginal ’ » 228 . ‘ « La brièveté des dispositions relatives à l’arbitrage en tant que procédure à part entière montre bien qu’il s’agit là d’un moyen secondaire de règlement des différends » 229  ; ‘ « la procédure classique des groupes spéciaux, renforcée par l’institution d’un Organe d’Appel (…) a vocation à rester la méthode privilégiée de règlement des différends au sein de l’OMC  ’» 230 . La pratique confirme cette marginalisation quand l’arbitrage de l’article 25 231 , qui pourrait s’intéresser au différend principal puisque le Mémorandum le prévoit, n’a comme application que le règlement d’un unique différend induit.

Certes, le Mémorandum organise une certaine consistance organique : il crée des organes particuliers agissant dans le règlement des différends, comme l’ORD, les groupes spéciaux et l’Organe d’appel ; il appuie ces organes opérationnels sur des organes à la fonction administrative ; il institutionnalise les mécanismes classiques de règlement des différends que sont les bons offices, la conciliation, la médiation et l’arbitrage. Certes, ‘ « il y a incontestablement un lien entre la création de juridictions internationales permanentes et celle d’organisations internationales » ’comme il existe un ‘ « lien entre juridictionnalisation et institutionnalisation » 232 . Certes, cette consistance organique, obtenue par création et par institutionnalisation, est de nature à contribuer à l’identification du critère organique indispensable à la définition d’une juridiction. Cependant, l’institutionnalisation textuelle et pratique de ces mécanismes classiques s’accompagne de leur marginalisation au profit des organes internes à l’OMC. Quant aux organes exclusivement mémorandaires, une distinction doit être faite qui exclut les entités à fonction administrative de l’assise organique juridictionnelle pour ne les considérer que comme un appui administratif.

Aussi, création et institutionnalisation organiques ne sauraient suffire à définir le critère organique de la juridiction. D’abord, une marginalisation des procédés traditionnels de règlement des différends interétatiques est patente. Bons offices, conciliation, médiation et arbitrage de l’article 25 ne constituent que des moyens secondaires de règlement des différends ; arbitrages des articles 22 : 6 et 21 : 3 c) ne s’appliquent qu’à des différends issus de procédures annexes au règlement principal du différend initial. Ensuite, la pratique de ces mécanismes traditionnels est d’une effectivité mitigée puisque seuls sont utilisés les arbitrages des articles 22 : 6 et 21 : 3 c). Les autres procédés traditionnels de règlement des différends ne sont pas effectifs car ‘ « le recours aux moyens alternatifs (bons offices, médiation, conciliation, arbitrage rapide) suppose un accord des parties alors que la procédure du groupe spécial peut être actionnée unilatéralement, si bien qu’elle domine en pratique et fonctionne même à titre exclusif ’ » 233 . Enfin, la distinction entre entités administratives et opérationnelles au sein des organes spécifiques à l’OMC exclut de l’assise organique juridictionnelle bon nombre d’organes mémorandaires.

Néanmoins, cette marginalisation n’est pas un obstacle à l’affirmation d’une consistance organique effective caractéristique du système de règlement OMC. Au contraire, elle pallie la complexité d’un Mémorandum prévoyant un enchevêtrement des mécanismes hétérogènes participant au système de règlement qu’il organise. En effet, l’institutionnalisation des bons offices, de la conciliation, de la médiation et de l’arbitrage de l’article 25 mène à leur marginalisation textuelle qui elle-même aboutit à leur exclusion effective. De même, l’institutionnalisation des arbitrages des articles 21 : 3 c) et 22 : 6 est telle que ces mécanismes sont relégués à la fonction subalterne de règlement de procédures litigieuses d’exécution des décisions traitant le différend initial. Enfin, l’institutionnalisation d’organes propres à l’Organisation s’accompagne de la dévolution d’une fonction administrative qui les exclut de la catégorie des organes potentiellement juridictionnels.

De la sorte, l’institutionnalisation est marginalisante et, de ce fait, écarte un nombre conséquent d’organes pour valoriser ceux qui participent effectivement au règlement des différends au sein de l’OMC. Ces derniers organes se trouvent mis en valeur dans leur contribution à l’établissement d’une consistance organique au système du Mémorandum. Plus clairement, l’institutionnalisation marginalisante, opérée par le Mémorandum et la pratique, aboutit à la concentration des entités participant au système, clarifiant ainsi l’assise organique dudit système de telle sorte que se trouve identifié le critère de l’existence organique d’une juridiction.

Cette concentration se déroule au profit des organes créés par les textes de l’OMC et propres à cette Organisation : les groupes spéciaux, l’Organe d’appel et, dans la mesure où il participe à la procédure des consultations, l’ORD. En effet, ceux-ci ont bénéficié d’une concentration textuelle des organes internes de l’OMC puisque le caractère administratif – et non opérationnel dans le règlement effectif des différends – de nombreuses entités présentes dans le texte du Mémorandum a fait considérer lesdites entités comme subalternes pour la définition de la consistance organique d’une juridiction. Ils ont également bénéficié d’une concentration textuelle et pratique au détriment des organes classiques du règlement général des différends interétatiques, le Mémorandum et la pratique les marginalisant, voire les désactivant.

Il peut sembler paradoxal, d’un côté, de tenter de montrer une institutionnalisation et de s’efforcer de la faire rentrer dans le cadre d’une création organique susceptible d’identifier la présence d’une juridiction et, d’un autre côté d’établir que ces procédures institutionnalisées sont marginalisées et que cette marginalisation pourrait affirmer la préférence pour des créations organiques nouvelles. Ce paradoxe n’en est pourtant pas un puisque, dans les deux cas, la contribution à la démonstration de l’identification organique d’une juridiction est opérée. Bien plus, le texte du Mémorandum crée la consistance organique de la juridiction par la création d’organes nouveaux centraux dans le système de règlement des différends de l’OMC et assure cette consistance en intégrant par institutionnalisation des mécanismes traditionnels du droit international public, de telle sorte que les Etats parties à un différend ne pourront pas réellement sortir du système puisque le Mémorandum inclut tous les mécanismes que le droit international prévoit dans le système qu’il organise et pose des conditions procédurales encadrant ces procédés classiques.

Le Mémorandum ne pouvait pas se permettre d’ignorer les mécanismes traditionnels du droit international, au risque de voir les Etats membres sortir du système qu’il organise. Il les a donc intégrés par l’institutionnalisation et rendus secondaires par une marginalisation formelle, confirmée et parfois intensifiée par la pratique. La marginalisation des mécanismes traditionnels du droit international public ‘ « atteste incontestablement de la bonne santé du mécanisme de règlement des différends ’ » 234 . Elle confirme également que les groupes spéciaux et l’Organe d’appel vont constituer les fondements organiques du système de règlement des différends organisé par le Mémorandum.

En définitive, ce sont les organes propres à l’OMC, Organe d’appel et groupes spéciaux, qui sont centraux dans l’identité organique du système mémorandaire. Cette consistance organique donne une assise stable et claire à la structure mémorandaire. Il n’est pas encore question, cependant, de qualification juridictionnelle de cette structure. La juridiction étant l’entité qui tranche le différend, cette assise doit être dotée d’une spécialisation particulière.

Notes
138.
Cette évidence se déduit aisément de la définition de la juridiction donnée en Introduction, définition selon laquelle la juridiction est une entité qui tranche un différend. Elle se retrouve dans la totalité des études doctrinales consacrées, de près ou de loin, au concept de juridiction et qui ne traitent que de manière tacite ce critère de l’existence d’organes comme composante de la définition d’une juridiction. Elle ressort également de la source jurisprudentielle de définition de la juridiction, à l’image de la CJCE qui a précisé que la juridiction doit avoir la qualité de tiers (30 mars 1993, arrêt C‑24-92, Corbiau c/ Administration des contributions ; voir sur ce point l’Introduction et plus particulièrement la note 117).
139.
Une autre dualité organique est celle qui distingue les organes préconstitués de ceux qui ne le sont pas. Cette préconstitution participe à la définition organique d’une juridiction est fait, à ce titre, l’objet d’une étude détaillée dans la première Section du Chapitre Suivant.
140.
Une première lecture du Mémorandum permet aisément l’identification de toutes ces entités. Seul le Secrétariat de l’Organe d’appel n’est pas explicitement mentionné dans ce texte mais résulte de l’article 17 du Mémorandum qui dispose, dans son paragraphe 7, que « l’Organe d’appel recevra le soutien administratif et juridique dont il aura besoin ». Ce soutien prend la forme d’un « Secrétariat de l’Organe d’appel » comme le prévoient les premières Procédures de travail pour l’examen en appel (WT/AB/WP/1) élaborées par « l’Organe d’appel, en consultation avec le Président de l’ORD et le Directeur général » (Article 17 : 9 du Mémorandum). Ce Secrétariat de l’Organe d’appel est, selon M. Kesavapany, Président du Conseil général en 1996, « une importante branche du Secrétariat » de l’OMC. Cette déclaration est retranscrite dans le document WT/GC(96)/ST/1.
141.
Pour un exemple de sens communément admis attribué au terme « administration », voir P. Robert, Le Nouveau Petit Robert, éditions Dictionnaires Le Robert, Paris, 2000, texte remanié et amplifié sous la direction de J. Rey-Debove et A. Rey, p. 34.
142.
Voir sur ce point le Mémorandum, article 2 : 1. En réalité, la fonction de l’ORD est complexe ; elle ne saurait se résumer à cette fonction administrative sommairement établie, et ce du seul fait de la composition politique de cette instance. Il est procédé à l’analyse détaillée de l’ORD par séquences dans la totalité des développements suivants, du fait de la centralité de cet Organe dans le système mémorandaire ; l’étude synthétique principale se trouve dans la Section consacrée à la force obligatoire (Deuxième Partie, Titre II) ; voir également en particulier la présente Section (infra), les deux Sections suivantes (relatives à la spécialisation et à la permanence des organes), ainsi que le Chapitre I du Titre suivant (consacré à la systématisation juridictionnelle. Sur le statut juridique de l’ORD ainsi que sur le détail de ses origines, sa formation, sa composition et son rôle, se reporter par exemple aux études suivantes : M.N. Andrianarivony, L’émergence progressive d’une juridiction internationale des échanges. Contribution à l’étude du système de règlement des différends au sein de l’Organisation mondiale du commerce, thèse soutenue le 27 septembre 1998 à l’Université de Saint-Denis de La Réunion, sous la direction de X. Philippe, pp. 289-294 ; V. Pace, L’Organisation Mondiale du Commerce et le renforcement de la réglementation juridique des échanges commerciaux, L’Harmattan, coll. Logiques Juridiques, Paris, 2000, pp. 216-219.
143.
Il intervient dans l’applicabilité des règles et procédures spéciales ou additionnelles (article 1 : 2), dans la définition du mandat du groupe spécial en consultation avec les parties quand ce mandat n’est pas, du fait de la volonté commune de ces parties, le mandat type prévu par le Mémorandum (article 7 : 3), dans l’information des parties sur la composition du groupe spécial quand celles-ci n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur ladite composition qui a, par voie de conséquence, été fixée par le Directeur général (article 8 : 7), ainsi que dans la décision de prolonger un délai de consultations quand une partie est un pays en développement Membre (article 12 : 10).
144.
Article 27 : 1. A ce titre, le Secrétariat « aide au choix des personnes appelées à faire partie des groupes spéciaux » et propose aux parties des personnes susceptibles de constituer le groupe spécial de l’espèce (article 8), reçoit les communications écrites des parties qu’il transmet au groupe spécial (article 12), et possède une activité très importante dans la pratique sans se départir de la mission de secrétariat et de soutien technique que le Mémorandum lui a attribuée.
145.
Mémorandum, article 17 : 7. Les Procédures de travail pour l’examen en appel décrivent plus précisément les différentes fonctions du Secrétariat de l’Organe d’appel. Se reporter pour détails à ces Procédures dans le document WT/AB/WP/7.
146.
Le Directeur général détermine la composition du groupe spécial en cas de désaccord persistant entre les parties (article 8 : 7), désigne l’arbitre de l’article 22 : 6 si les membres du groupe spécial initial ne sont pas disponibles (article 22 : 6) et de l’article 21 : 3 si les parties ne parviennent pas à un accord (note 12 du Mémorandum).
147.
Selon l’article 5 : 6, le Directeur général pourra « offrir ses bons offices, sa conciliation ou sa médiation en vue d’aider les Membres à régler leur différend ». De même, le Président de l’ORD effectuera également les bons offices, la conciliation et la médiation sur la demande d’un pays moins avancé partie (article 24 : 2).
148.
Article 11.
149.
Article 17 : 1.
150.
Article 19 : 1.
151.
Appelée par le Mémorandum « consultations », cette discussion est prévue dans son article 4 et concerne les rapports entre Etats membres parties à un même différend. Le terme de « consultations » est également prévu dans de nombreux autres articles mais il s’applique plus généralement aux discussions que les Membres peuvent entretenir avec les instances de l’OMC et n’a donc pas la signification des discussions interétatiques en vue du règlement d’un différend.
152.
Paragraphe 2. Comme le précise l’article premier du Mémorandum, « les règles et procédures du présent mémorandum d’accord s’appliqueront aux différends soumis en vertu des dispositions relatives aux consultations et au règlement des différends des accords énumérés à l’Appendice 1 du présent mémorandum d’accord (dénommés dans le présent mémorandum d’accord "accords visés") ».
153.
Article 4 : 1.
154.
Par ce premier paragraphe, les Membres affirment une continuité avec le GATT 47 qui prévoyait déjà la possibilité de consultations. Voir sur ce point : E. Canal-Forgues, L’institution de la conciliation dans le cadre du GATT – Contribution à l’étude de la structuration d’un mécanisme de règlement des différends, éditions Bruylant, coll. Organisation internationale et Relations internationales, Bruxelles, 1993, pp. 34-36. Voir également la thèse de doctorat, citée par M. Canal-Forgues, de J.L. Coste, Le règlement des différends au G.A.T.T., Lyon III, 1989, dans laquelle l’auteur procède à une typologie des consultations.
155.
Cette exigence procédurale n’est pas unique dans la phase des consultations. Elle est liée à une autre exigence : les conditions de délais, étudiées dans le Titre suivant (Chapitre I, Section 2).
156.
L’article 4 : 11 prévoit la participation sous certaines conditions de Membres tiers aux consultations. Cette disposition est utilisée dans la moitié des affaires et il n’est pas rare que les demandes de participations en qualité de tiers soient multiples pour une même procédure de consultations.
157.
Le Mémorandum prévoit en effet que « toute demande de consultations sera déposée par écrit et motivée ; elle comprendra une indication des mesures en cause et du fondement juridique de la plainte ».
158.
Sur les 295 plaintes notifiées à l’OMC entre le 1er janvier 1995 et le 26 juin 2003, les consultations en cours concernent 116 affaires. 43 affaires ont fait l’objet de solutions convenues d’un commun accord et 24 sont considérées comme des « autres différends réglés à l’amiable ou en suspens », soit 67 affaires susceptibles de s’être conclues formellement par la notification à l’ORD d’une solution convenue d’un commun accord, comme le prévoit l’article 3 : 6 du Mémorandum (Voir sur ces chiffres l’» état des différends soumis à l’OMC », WT/DS/OV/14 du 30 juin 2002). Sur ces 67 affaires, 37 ont réellement eu pour conclusion formelle cette notification. Les autres affaires ont bien souvent une conclusion amiable à la forme particulière, et non seulement une notification informelle à l’ORD. Par exemple, les conclusions suivantes sont envisageables : retrait de la demande d’établissement du groupe spécial dans les affaires DS1, DS13 (dans laquelle plusieurs demandes successives ont été formulées puis retirées devant l’ORD ou devant le Secrétariat), DS89 (retrait temporaire puis définitif), DS106, DS181, et DS240 ; interruption sur demande du plaignant de la constitution du groupe spécial dans les affaires DS32, DS35 et DS227 ; déclaration conjointe ou séparée des parties au cours d’une réunion de l’ORD dans les affaires DS6 et DS39 ; règlement paraissant avoir été fait par voie bilatérale sans notification officielle dans les affaires DS15 et DS228 ; règlement après une demande d’établissement d’un groupe spécial sans désignation effective de ses membres dans l’affaire DS9 ; affaires semblant implicitement jointes à une autre affaire dans DS16, DS17, DS25 et DS101 ; conclusion par notification unilatérale du plaignant considérant que les consultations ne sont plus nécessaires dans l’affaire DS23 ; caducité du pouvoir conféré au groupe spécial après suspension des travaux du groupe spécial à la demande du plaignant en vertu de l’article 12 : 12 du Mémorandum dans les affaires DS38, DS77, DS88 et 95 ; communiqués officiels émis par l’administration de l’Etat défendeur (DS49) ou plaignant (DS57) ; notification commune des deux parties au Secrétariat (DS93) ; « arrangement provisoire » signifié à l’ORD par deux communications distinctes des parties (DS193). Seules les affaires suivantes ont été formellement conclues par une notification officielle telle que la prévoit le Mémorandum dans son article 3 : 6 : DS5, DS7, 12 et 14, DS19, DS20, DS21, DS28, DS36, DS37, DS40, DS42, DS43, DS72 (pour laquelle la notification est intervenue après plusieurs suspensions des travaux du groupe spécial en vertu de l’article 12 : 12), DS73, DS74 et 102, DS83, DS85, DS86, DS91, 92, 94 et 96, DS99 (pour laquelle une solution d’un commun accord a été notifiée alors que le groupe spécial reconvoqué au nom de l’article 21 : 5, après rapport adopté du premier groupe spécial, était en activité), DS103 et 113, DS119, DS124, DS125, DS151, DS190, DS198, DS199, DS210, DS235 et DS237.
159.
Le compte-rendu de la réunion de l’ORD du 15 mai 1996 fait état de cette déclaration du Président de l’ORD qui rappelle avoir tenu le propos qu’il cite en juillet 1995. Voir le document WT/DSB/M/15, p. 6.
160.
Une qualification plus précise de cette phase des consultations au sein du système mémorandaire est formulée dans la Section suivante ainsi que dans le Titre suivant (Chapitre I, Section 2).
161.
Bien entendu, cette condition ne se fonde que sur une première lecture du Mémorandum et ne contribue qu’à la clarification de ce texte. La fonction matérielle précise de ces deux organes dans le règlement des différends interétatiques au sein de l’OMC est un thème d’étude majeur traité tout au long du présent travail.
162.
M. Andrianarivony reconnaît également que les instances principales de règlement sont le groupe spécial et l’Organe d’appel, bien qu’aucune démonstration ne vienne étayer son propos. Se reporter à sa Thèse, L’émergence progressive d’une juridiction internationale des échanges…, op. cit., pp. 25-26.
163.
A l’instar de l’administration de la justice existant dans le fonctionnement judiciaire interne.
164.
Voir pour les groupes spéciaux à titre principal les articles 6 à 16 du Mémorandum.
165.
V. Pace, L’Organisation Mondiale du Commerce et…, op. cit., pp. 195-196.
166.
Voir, pour l’Organe d’appel, l’article 17.
167.
Au 26 juin 2003, sur 295 affaires déclarées à l’ORD depuis la mise en application du Mémorandum, 62 ont été réglées sans qu’aucun rapport de groupe spécial ne soit adopté par l’ORD et 3 ont été réglées in fine à l’amiable malgré l’adoption d’un tel rapport (DS99, DS103 et 113). Au total, 71 rapports de groupe spécial ont été rédigés concernant 87 affaires distinctes. Les affaires restantes sont celles encore en suspens à cette date, n’ayant toujours pas bénéficié d’un règlement définitif. Plus de la moitié des affaires définitivement réglées ont vu l’intervention effective d’un groupe spécial. En outre, 12 rapports du groupe spécial initial reconvoqué au titre de l’article 21 : 5 ont été rendus. Il faut ajouter qu’à la même date, 18 groupes spéciaux étaient en activité, un rapport de groupe spécial était rédigé mais non encore adopté et un dernier faisait l’objet d’un appel. Voir l’Etat des différends soumis à l’OMC du 26 juin 2003, WT/DS/OV/14. Par ailleurs, ces chiffres ne prennent pas en considération les groupes spéciaux qui ont été établis mais n’ont pas commencé leur activité du fait de l’intervention d’une solution amiable (9), de même que les groupes spéciaux dont le travail a été suspendu au titre de l’article 12 : 12 et dont l’établissement est devenu caduc (6). Il faut noter que certains groupes spéciaux ont vu leur travail être suspendu et finalement arrêté du fait d’une solution amiable que lesdits groupes ont tout de même rendu un rapport succinct sur l’affaire dont ils étaient saisis.
168.
Au 26 juin 2003, 48 rapports de l’Organe d’appel ont été rédigés sur 61 affaires. De plus, 7 rapports de l’Organe d’appel au titre de cet article 21 : 5 ont été rendus concernant 9 affaires. Ces chiffres confirment les conclusions de M. Pace qui constatait en 2000 que l’Organe d’appel a une « charge de travail, considérable, (…) appelée à augmenter encore davantage » (in L’Organisation Mondiale du Commerce et…, op. cit., pp. 207 et 211).
169.
Il suffit pour s’en convaincre de comptabiliser toutes les notifications de demande de consultations adressées par les plaignants à l’ORD. Au 26 juin 2003, le nombre de ces notifications est de 295.
170.
Les bons offices, conciliation et médiation sont prévus à l’article 5 du Mémorandum. Le terme de conciliation est également employé dans le paragraphe 10 de l’article 3 du Mémorandum mais il a dans ce dernier cas une signification différente puisqu’il est question dans cet article des « dispositions générales ». L’expression « les demandes de conciliation et le recours aux procédures de règlement des différends » doit s’entendre comme une distinction entre, d’une part, les procédures à caractère diplomatique de règlement des différends, procédures destinées à l’élaboration d’une solution mutuellement convenue entre les parties, au besoin en ayant recours à l’intervention d’un tiers offrant son aide pour l’obtention d’une telle solution et, d’autre part, les procédures faisant intervenir les instances de l’OMC pour un règlement plus contraignant en cas d’échec des parties dans leur recherche d’une solution amiable. Cette interprétation correspond bien à l’esprit du Mémorandum car son article 3 : 7 prévoit que « le but du mécanisme de règlement des différends est d’arriver à une solution positive des différends. Une solution mutuellement acceptable pour les parties et compatible avec les accords visés est nettement préférable », « le mécanisme de règlement des différends » n’agissant qu’en « l’absence d’une solution mutuellement convenue ». Aussi l’utilisation dans l’article 3 : 10 de l’expression « conciliation » peut-elle sembler maladroite car elle contribue à une certaine confusion des dispositions du Mémorandum, du moins concernant la bonne compréhension institutionnelle du système de règlement des différends que ce texte organise.
171.
Trois procédures distinctes d’arbitrage sont prévues par le Mémorandum, aux articles 21 : 3 c) pour la fixation du délai de mise en œuvre des recommandations et décisions de l’ORD, 22 : 6 concernant le niveau de suspension des concessions ou d’autres obligations faisant suite à la non-conformation de la partie non respectueuse des accords OMC aux recommandations et décisions de l’ORD, et 25 pour une procédure alternative de règlement des différends.
172.
Force est de constater une certaine incohérence du Mémorandum. D’abord, les trois mécanismes ne sont pas distingués, comme le note M. Merrills (in International Dispute Settlement, Cambridge University Press, Third Edition, 1998, p. 216). Surtout, ce texte traite de ces trois mécanismes de règlement dans un ordre particulier. Ce texte, en effet, parle constamment des « bons offices, conciliation et médiation » alors qu’il aurait été plus rigoureux d’adopter comme ordre la variation croissante de l’intensité de participation des tiers au règlement du différend et, ainsi, plutôt traiter des «bons offices, médiation et conciliation ». Cette démarche aurait permis une meilleure lisibilité du Mémorandum sur ce point.Le présent propos reprendra l’ordre donné par le Mémorandum, par souci de clarté par rapport à l’étude de ce texte et de la pratique en découlant.
173.
P.-M. Dupuy, Droit international public, Dalloz, 4ème édition, Paris, 1998, p. 467.
174.
P. Daillier et A. Pellet (N. Quoc Dinh †), Droit international public, L.G.D.J., E.J.A., 7ème éd., Paris, 2002, pp. 833 et 837‑838.
175.
Le paragraphe 1er de l’article 1er du Mémorandum établit que les « accords visés » sont ceux qui sont énumérés à l’Appendice 1 dudit Mémorandum, appendice qui précise que l’» Annexe 2 : Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends » est l’un des « accords visés ».
176.
Voir pour exemple P. Daillier et A. Pellet (N. Quoc Dinh †), op. cit., pp. 821-927.
177.
Cette qualification est établie par M. Canal-Forgues dans sa Thèse, L’institution de la conciliation… Voir en particulier pp. 581-583.
178.
Le présent propos se consacre essentiellement à l’étude de la conciliation, dans la mesure où celle-ci constitue la question principale de la catégorisation du système mémorandaire, puisqu’elle est le mode de règlement caractéristique du mécanisme prédécesseur du système OMC (voir supra). En outre, la conciliation est sans doute le mode de règlement diplomatique le moins éloigné du mode juridictionnel, et ce d’autant plus qu’elle a pu être qualifiée de « quasi judiciaire » dans le cadre du GATT de 1947. Néanmoins, les présents développements axés sur la conciliation s’appliquent également aux mécanismes des bons offices et de la médiation.
179.
De nombreux auteurs établissent le caractère intégré, voire renforcé et/ou exclusif du système organisé par le Mémorandum. Voir pour exemples : T. Flory, « Chronique de Droit international économique- Commerce international », A.F.D.I. XXXIX, 1993, pp. 758-762 ; T. Flory, « Remarques à propos du nouveau système commercial mondial issu des accords du cycle d’Uruguay », J.D.I. 4, 1995, pp. 882-884 ; E. Canal-Forgues, « Le système de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce », R.G.D.I.P., 1994, pp. 692-694 ; Y. Renouf, « Le règlement des litiges », in T. Flory (Sous la direction de), La Communauté européenne et le GATT. Evaluation des accords du cycle d’Uruguay, Travaux de la Commission pour l’étude des Communautés européennes, publications du Centre de Recherches Européennes, Université Rennes I, éditions Apogée, Rennes, 1995, p. 47 ; H. Ruiz Fabri qui se réfère à un rapport de l’Organe d’appel rappelant le caractère intégré du système, in « L’appel dans le règlement des différends de l’OMC : trois ans après, quinze rapports plus tard », R.G.D.I.P., Pedone, Paris, Tome 103, 1999, p. 98 ; M.N. Andrianarivony, L’émergence progressive d’une juridiction internationale des échanges…, op. cit., pp. 288‑408.
180.
Voir note précédente.
181.
E. Canal-Forgues, L’institution de la conciliation…, p. 584.
182.
Dans le cadre des bons offices, de la conciliation et de la médiation, les tiers sont étrangers au différend, par opposition à la phase des consultations au cours de laquelle des Etats pouvaient se considérer comme impliqués dans la question posée par le différend et se joindre en leur qualité de tierces parties aux discussions concernant le litige. Dans ce dernier cas, ils ne pouvaient être considérés comme simples tiers qu’au début de la phase des consultations, c’est-à-dire lorsque était adressée une demande déclenchant cette phase, mais étaient par la suite des tierces parties au différend puisque participant aux discussions sous certaines conditions. Dans le cadre de la phase des bons offices, conciliation et médiation, ces tiers n’ont aucun rapport direct avec le conflit, ne sont pas des tierces parties, et leur aide extérieure est sollicitée par les Etats parties. Cette différence fondamentale particularise la phase des bons offices, conciliation et médiation de la phase des consultations.
183.
H. Ruiz Fabri, « Le règlement des différends dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce », J.D.I. 3, 1997, p. 720.
184.
Généralement, la conciliation est le fait de « commissions composées de personnes ayant la confiance des Parties » (P.-M. Dupuy, op. cit., p. 469), d’un « organe, pré-constitué ou accepté par les parties à l’occasion d’un litige » (P. Daillier et A. Pellet (N. Quoc Dinh †), op. cit., 2002, pp. 836).
185.
Article 5 : 6.
186.
Article 4 : 11.
187.
WT/DSB/M/106, p. 17.
188.
Une classification est parfois adoptée. Elle distingue entre la procédure d’arbitrage à part entière de l’article 25, alternative au mécanisme classique de règlement des différends, et les procédures complémentaires à ce mécanisme que sont les articles 22 : 6 et 21 : 3 c). Voir pour exemples de l’établissement et de l’utilisation de cette classification : V. Pace, L’Organisation Mondiale du Commerce et…, op. cit., pp. 231-239 ; V. Pace, « Cinq ans après sa mise en place : la nécessaire réforme du mécanisme de règlement des différends de l’OMC », R.G.D.I.P. 2000 n°3 spec., pp. 632-634. Il faut préciser qu’une quatrième procédure d’arbitrage, prévue par l’article 26 : 1 c), est consacrée à « une détermination du niveau des avantages qui ont été annulés ou compromis, et des suggestions concernant les moyens d’arriver à un ajustement mutuellement satisfaisant » ; ce mécanisme est, comme le précise cette disposition, inclus dans celui de l’article 21 : 3. De même, l’article 22 : 7 complète les dispositions relatives à l’arbitrage instauré par l’article 22 : 6.
189.
Article 25 : 1.
190.
T. Flory, « Remarques à propos du nouveau système commercial mondial issu des accords du cycle d’Uruguay », J.D.I. 4, 1995, p.883.
191.
Alors que tel n’était pas le vœu de nombreuses Parties Contractantes du GATT lors des négociations de l’Uruguay Round. Voir les développements que V. Pace consacre à ce thème in L’Organisation Mondiale du Commerce et…, op. cit., p. 233.
192.
L’article 25 : 2 dispose que « les accords sur le recours à l’arbitrage seront notifiés à tous les Membres assez longtemps avant l’ouverture effective de la procédure d’arbitrage » afin, entre autres, que ces Membres puissent devenir parties à cette procédure s’ils le souhaitent et si les parties à cette procédure l’acceptent (voir sur ce point l’article 25 : 3). Ensuite, d’après l’article 25 : 3, « les décisions arbitrales seront notifiées à l’ORD et au Conseil ou Comité de tout accord pertinent, où tout Membre pourra soulever toute question s’y rapportant ».
193.
L’article 25 : 4 prévoit que « les articles 21 et 22 du présent mémorandum s’appliqueront mutatis mutandis aux décisions arbitrales ». Ces articles 21 et 22 organisent la surveillance de la mise en œuvre des décisions de règlement ainsi que l’application de mesures contraignantes à l’encontre de la partie refusant l’exécution. Cette disposition ajoute donc au mécanisme traditionnel d’arbitrage un processus d’exécution des décisions de cet arbitre.
194.
Article 25 : 1.
195.
Affaire DS160.
196.
Voir sur ce point le document WT/DS160/15.
197.
WT/DS160/16.
198.
Voir cette décision dans le document WT/DS160/ARB25/1.
199.
Ces conditions sont : la notification à l’ORD de la décision de recourir à l’arbitrage, dans le document WT/DS160/15 ; la notification de la décision arbitrale, dans le document WT/DS160/17.
200.
Voir pour exemples les procédures des bons offices, conciliation et médiation pour lesquelles le Mémorandum prévoit la possibilité pour les parties de demander l’intervention du Directeur général, ou encore la procédure d’arbitrage de l’article 22 : 6, qui sera étudiée ci-après, et qui prévoit la participation du groupe spécial initial ou d’un arbitre désigné par le Directeur général.
201.
Décision des arbitres, document WT/DS160/ARB25/1, pp. 7‑9.
202.
Voir sur ce point l’affaire DS160 et en particulier le document WT/DS160/15 dans lequel les deux parties, conformément à l’article 25 : 2, notifient à l’ORD leur décision commune de recourir à l’arbitrage de l’article 25.
203.
Se reporter pour de plus amples détails à l’article 22 : 6 ainsi qu’aux notes 15 et 16 du Mémorandum.
204.
Cette affirmation est consécutive à l’étude de l’ensemble des décisions arbitrales prises en vertu de l’article 22 au 26 juin 2003. Ces différents groupes spéciaux ont parfois subit quelques modifications dans leur composition, modifications dues à l’indisponibilité de certains membres de ces groupes spéciaux.
205.
Voir les conditions énoncées à l’article 22 : 6.
206.
Voir sur ce point le paragraphe précédent.
207.
Voir sur ce point l’article 22, paragraphes 6 et 7.
208.
Article 22 : 6.
209.
Article 22 : 7.
210.
Dans leur décision WT/DS160/ARB25/1, paragraphe 4.19, prise au titre de l’article 25, « Les arbitres font observer qu'ils ont été désignés au titre de l'article 25 du Mémorandum d'accord. En conséquence, ils ne pensent pas être soumis aux contraintes découlant d'un certain nombre d'obligations imposées aux arbitres dans une procédure au titre de l'article 22: 6. ».
211.
Au 26 juin 2003, 11 affaires ont fait l’objet d’une procédure d’arbitrage au titre de l’article 22 : 6, dont 9 distinctes. Sur ces 11 affaires, 7 décisions arbitrales ont été rendues, les autres procédures ayant été suspendues ou semblant être tombées en désuétude.
212.
Voir sur ce point l’article 21 : 3.
213.
Article 21 : 3 c).
214.
Voir les paragraphes a), b) et c) de l’article 21 : 3.
215.
Ce délai est de « 90 jours suivant la date d’adoption des recommandations et décisions », comme le prévoit l’article 21 : 3 c).
216.
Voir sur ce point la note 12 du Mémorandum.
217.
Cette constatation a été formulée par V. Pace, « Cinq ans après… », op. cit., p. 633, note 47. Elle se confirme depuis lors par l’observation des différents cas d’arbitrage donné en vertu de l’article 21 : 3 c).
218.
Article 21 : 3 c).
219.
Au 26 juin 2003, 15 affaires distinctes ont fait l’objet d’une décision arbitrale en vertu de l’article 21 : 3 c).
220.
V. Pace, L’Organisation Mondiale du Commerce et…, op. cit., p. 231.
221.
E. Canal-Forgues, « Le système de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce », R.G.D.I.P., 1994, p. 705..
222.
M.N. Andrianarivony, L’émergence progressive d’une juridiction internationale des échanges…, op. cit., p. 95.
223.
T. Flory, « Remarques à propos… », op. cit., p. 883.
224.
Traditionnellement rangé parmi les modes de règlement juridictionnels non institutionnalisés, l’arbitrage est souvent l’objet de tentatives d’institutionnalisation. Sur ce point, voir pour exemple P. Daillier et A. Pellet (N. Quoc Dinh †), op. cit., pp. 879-883. Se reporter également à l’ouvrage de G. Agniel, Droit des relations internationales, Hachette, coll. Les Fondamentaux, Paris, 1997, p. 147 à 157, ouvrage dans lequel l’auteur estime que les tentatives d’institutionnalisation de l’arbitrage, jusqu’à une période récente, se caractérisaient par une institutionnalisation « fausse ».
225.
V. Pace, « Cinq ans après… », op. cit., pp. 632-633.
226.
H. Ruiz Fabri, « Le règlement des différends dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce », J.D.I. 3, 1997, p. 720.
227.
M.N. Andrianarivony, L’émergence progressive d’une juridiction internationale des échanges…, op. cit., p. 6.
228.
H. Ruiz Fabri, « Le règlement des différends… », op. cit., p. 720.
229.
V. Pace, « Cinq ans après… » op. cit., pp. 632-633.
230.
V. Pace, L’Organisation Mondiale du Commerce et…, op. cit., p. 234.
231.
Dans sa Thèse (op. cit., p. 6), M. Andrianarivony considère que l’arbitrage de l’article 25 a été prévu « pour parer à certaines faiblesses du règlement par les panels ». Or, cet arbitrage est qualifié par le Mémorandum de « rapide ». « Certaines faiblesses » pourraient donc se résumer à la lourdeur de la procédure du groupe spécial, lourdeur qui s’opposerait à l’efficacité d’un règlement par la voie de l’arbitrage. Il n’est pas du tout certain que l’arbitrage de l’article 25 aux dispositions floues et lapidaires puisse être le gage d’une procédure efficace et rapide alors même que le Mémorandum met en place des procédures rigoureuses encadrant la phase des groupes spéciaux dans un souci explicitement formulé de rapidité et d’efficacité. Le Mémorandum semble davantage, à travers l’article 25, tenter de rassurer les Membres sur la rigueur du système OMC de règlement des différends, en intégrant un mécanisme traditionnel et connu de règlement des différends et en ménageant pour les parties une « porte de sortie » du système instauré par le Mémorandum.
232.
H. Ruiz Fabri, J.-M. Sorel, « Organisation judiciaire internationale », Juris-Classeur de Droit international, Volume 5, Fascicule 215 du 21 mars 2001, éd. Du Juris-Classeur, 2001, p. 8.
233.
Ibid., p. 4.
234.
V. Pace, « Cinq ans après… », op. cit., p. 633, note 44. L’auteur ne traite dans cet article que de « la bonne santé » induite par « l’inutilisation de l’arbitrage en tant que procédure à part entière », mais l’extrapolation est possible pour les bons offices, conciliation et médiation qui n’ont jamais non plus été utilisés. Quant aux consultations, leur pratique est très courante mais les solutions négociées ne sont pas toujours trouvées, les parties utilisant souvent les mécanismes propres à l’OMC, comme les groupes spéciaux et l’Organe d’appel ; l’absence systématique de réussite des consultations montre également la bonne santé du mécanisme de règlement des différends puisque les parties à un différend n’hésiteront pas à se tourner vers les organes de l’OMC ne correspondant pas à un règlement traditionnel des différends.