I.1.1. Agents primaires

Les agents primaires de la socialisation sont représentés par la famille et l'école en tant que facteurs jouant un rôle capital dans le processus de socialisation. Celles - ci constituent des cadres permanents favorisant l'insertion de l'individu dans les structures sociales environnantes. Castellan évoque l'interdépendance active entre la famille et le système sociétal. La famille semble être unifiée par un «système de valeurs et de normes comportementales qui sous-tendent conduites et attitudes» (1980, p. 50). La famille représente alors un terrain d'apprentissage, d'éducation et d'imprégnation des codes sociaux notamment du langage. Le rôle éducatif de la famille occupe une place éminente dans les travaux de Durkheim. Il en définit la finalité qui consiste à «faire l'être social» par un processus incessant d'efforts visant à «imposer à l'enfant des manières de voir, de sentir et d'agir auxquelles il ne serait pas spontanément arrivé» (Durkheim, 1988, pp. 99-100).

Quant à Moréno, il majore le rôle de la famille dans la construction sociale et affective de l'individu. La famille incarne «l'institution sociale qui contribue le plus à développer la sociabilité de l'homme et à donner sa forme propre à son besoin d'expansion affective» (1970, p. 194). Dans la famille, l'enfant acquiert la distinction entre les différents rôles sociaux et intériorise les normes et les valeurs familiales par l'intermédiaire du jeu. Les parents et la fratrie jouent un rôle de base dans la socialisation de l'enfant : les parents comme couple, la mère–nourricière, le père–loi ou la loi du père, les frères et les sœurs comme modèles ou comme complices contribuent tous à socialiser l'enfant. La contribution apparaît sous deux aspects : l'aspect conscient qualifié d'explicite et se définissant par l'apprentissage des normes, et l'aspect inconscient se basant sur l'imprégnation implicite (Montoussé & Renouard, 1997). L'essentiel de cette tâche consiste dans l'apprentissage de l'indépendance personnelle, loin d'une «aliénation» possible, voire d'une «soumission passive à l'invasion des autres» (Cooper, 1978).

L'habitat qui favorise cet univers affectif et social sera aussi «investi comme un lieu d'interaction sociale avec le monde extérieur» (Fischer 1992, p.148).Par l'accueil de la famille proche, des voisins et des amis, la demeure devient une ouverture sociale à travers laquelle s'installe un réseau d'échanges avec le «dehors» environnemental.

L'école prend le relais éducatif de la famille dont elle complète et renforce les choix sélectifs. Son rôle, comme instrument de socialisation, a été renforcé suite à la salarisation et à la technicité croissante des emplois. Son statut fait d'elle un lieu de transmission de la culture. Ainsi elle participe à l'élaboration du savoir et à la maîtrise des règles sociales. Elle contribue avec la famille à léguer aux jeunes «le capital culturel»(Bourdieu, 1987, p. 152).Le capital culturel est constitué du «langage, des connaissances culturelles, de la maîtrise des codes sociaux et des diplômes» (Montoussé & Renouard, 1997, p. 78).