I.1.3. Agents environnementaux

Sous la diversité de ses formes culturelles, le cadre physique de la demeure [maison] représente le premier lieu de socialisation. Il ne constitue pas uniquement un «régulateur des rapports sociaux» (Eleb-Vidal, 1989, p. 6) mais également un espace environnemental physique, propice à «l'ancrage spatial de l'identité», et à «la représentation symbolique de l'image du corps» (Castellan, 1980, p. 14 ).

Cet espace habité règle les rapports entre le couple parental, les enfants et les parents, les enfants eux - mêmes et entre la famille et le monde extérieur. Ainsi la maison est non seulement le lieu où s'opèrent les premiers apprentissages, mais aussi l'endroit où se manifestent les premières interactions sociales et environnementales. A partir de la maison s'effectue l'ouverture sur l'environnement physique immédiat et lointain. Le rapport aux objets, aux animaux et aux plantes, l'usage des éléments naturels et l'exploitation des ressources physiques locales contribuent à la socialisation de l'enfant. Dans ce cadre, les animaux représentent les meilleurs objets pouvant offrir à l'individu une image de lui-même : les enfants s'approprient les animaux rembourrés, en jouent les rôles et apprennent - à travers ce lien - à les maîtriser et à distinguer le «nous» des «autres». L'importance de l'animal dans les jeux d'identification est illustré par les équipes sportives et les associations de scoutisme qui utilisent des emblèmes d'animaux comme symboles de valeurs et d'identité. L'exploitation des ressources environnementales locales dans les jeux enfantins est significative à ce propos. Ainsi par exemple, étant des passionnés de glissade, les enfants du monde entier, la pratiquent en tirant profit des ressources naturelles locales : les enfants de l'Afrique de l'Est se servent des épluchures de bananes; ceux de Chaga en Tanzanie utilisent le fruit de l'arbre Kigelia; les enfants des Esquimaux usent de leurs fourrures pour glisser (Tuan, 1978, pp.21-22) et les enfants de certains villages libanais employaient jadis des cuvettes en cuivre dans lesquelles ils s'installaient et se laissaient glisser.

L'aménagement et le design constituent des dispositifs à travers lesquels s'effectue l'intériorisation des normes et des manières d'être. Aussi, la demeure est le lieu où chacun s'installe en occupant une place. La contribution de l'architecte et du décorateur est éminente à cet égard. C'est par son intervention dans la «distribution des pièces, leur position, leurs dimensions, leur dénomination, [que] l'architecte assigne à chacun sa place» (Eleb-Vidal, p. 6). Cette place n'est autre qu'un espace organisé et qui devrait être favorable au développement physique et moral de l'enfant, voire à sa socialisation. Linton (1999) identifie par la place occupée dans un système, le statut de l'individu par rapport au même système.