VII. Besoins et aspirations

Les rapports de l'homme au cadre de vie reflètent une double résonance : personnelle et collective ou sociale. Les désirs et les motivations sont matérialisées dans des constructions culturelles affectant les aspirations, les comportements individuels et collectifs aussi bien que les milieux culturels et les modes de vie. En effet, la compréhension des désirs, des motivations et des sentiments s'avère nécessaire à la compréhension de la forme bâtie (Rapoport, 1972).

Les aspirations représentent «un processus psychosociologique par lequel un sujet –individu ou groupe- est attiré et poussé vers un objet proche ou lointain, à travers des images, des représentations, des symboles et qui contribue à définir et à orienter ses projets…L'objet peut se rapporter à un élément matériel de l'environnement ou à des idéaux lointains»(Chombart de Lauwe, 1976, p. 7). Les aspirations incluent et impliquent donc des représentations, des intérêts, des besoins, des valeurs et des projets. Elles reflètent la personnalité des individus et se modifient en fonction de celles des autres, des besoins et des moyens disponibles. En situation de confrontation et d'opposition à celles des autres, les aspirations prennent une forme de revendication. Par ailleurs, elles risquent l'étouffement en cas d'absence de moyens minimaux nécessaires à leur réalisation. L'étude des aspirations «sert de guide pour suivre l'évolution des besoins, l'apparition de nouveaux centres d'intérêt et la modification des échelles de valeur»(Chombart de Lauwe, 1969, p. 23).

Jusqu'à une date récente, les besoins en matière de logement étaient principalement considérés sous un angle fonctionnel. Les échelles d'appréciation des logements étaient constituées selon des critères fonctionnels tel que le système Suisse, «système d'évaluation des logements» [SEL]. Les critères d'appréciation du logement s'y ordonnent en plusieurs catégories ayant des pondérations minimales et maximales propres à chacune dont nous soulignons les grands thèmes (Noschis, 1983, p. 440).

Cependant, les échecs retentissants des habitats de masse ont suscité des réflexions et, par conséquent, de nouvelles conceptions des besoins. Ainsi, le concept de besoin est reconsidéré sous un angle récent. Il est lié, d'une part, à l'expérience et à l'histoire de l'individu ayant un impact sur les préférences résidentielles. D'autre part, les critères d'habitabilité vont au-delà des considérations fonctionnelles pour inclure des valeurs d'ordre psychologique.

Noschis souligne la relativité de la valeur fonctionnelle de l'habitat dont les aspects constituent un support à l'investissement psychologique de l'usager. Ce dernier voit dans son habitat un symbole de soi (Cooper, 1974) le ramenant au langage affectif «des sentiments et des expériences vécues et concrètes» (Piaget, 1978). L'évaluation du logement acquiert, dès lors, de nouveaux aspects introduisant des besoins symboliques par nature, voire affectifs. En conséquence, l'appréciation de l'habitat s'appuie non seulement sur les satisfactions en confort physique, mais également sur les conditions sociales, les expériences passées et le système représentationnel et mémorial des individus et des collectivités. Dans les premières pages de son ouvrage, «l'image de la cité» , Lynch souligne le rôle de l'environnement «ordonné» comme cadre et support aux activités et aux symboles favorables à «la sécurité émotionnelle» des individus (Lynch, 1998). Le concept de besoin occupe - d'ores et déjà - une place dans le système des transactions résidentielles personnelles et socio‑culturelles mais aussi symboliques et mémoriales des souvenirs (Noschis, 1983).

S'inspirant de Maslow, Gehl (1971) construit un système bidimensionnel de besoins répondant aux interactions physiques et sociales des cadres d'habitation. Les «besoins de l'habitation» selon Gehl se constituent de besoins physiologiques et de besoins psychologiques. Des champs couverts par les besoins physiologiques, nous en soulignons :

Les besoins psychologiques, quant à eux, endossent divers domaines dont nous citons les suivants :