Quatrième Chapitre
Cadre Historique et Communautaire : Maisons, Institutions et Villages d'accueil au Liban

« La Maison constitue la première propriété, mais elle est la dernière vente. » Proverbe Libanais

Pays d'émerveillement cité dans la Cantique des Cantiques : »il est beau comme le Liban». Situé sur les côtes Est de la mer Méditerranée, au carrefour des continents, le Liban constitue un point de rencontre entre l'orient et l'occident d'une part, et entre des civilisations éparses, d'autre part. D'une superficie de 10 452 Km2, sa population est de quatre millions habitants. En dépit de sa modestie géographique et humaine, il est porteur de richesses extrêmement variées sur des plans divers. Son célèbre cèdre, illustrant l'une de ses richesses, et symbolisant le peuple libanais, a été mis en lumière par François Mauriac : «Les cèdres du Liban étendent bien au‑delà de ses étroites frontières leurs ombres mystérieuses. Nous l'avons toujours su : l'importance d'un pays ne se mesure pas à son territoire ni au nombre de ses habitants» (Ammoun, 1997, p. 7). Cet arbre symbolique du Liban s'enracine essentiellement dans les massifs montagneux et enneigés. «Loubnan» vient d'un mot araméen signifiant «la montagne blanche», toujours enneigée et abritant l'arbre biblique. Cette terre offre des contrastes géographiques saisissants donnant lieu à une double cohabitation. D'une part, Il s'agit d'une cohabitation harmonieuse entre la mer, les plaines, les fleuves, les forêts, les vallées et les deux grandes chaînes de montagnes culminant à 2814 m et 3086 m d'altitude. D'autre part, cette cohabitation s'effectue dynamiquement entre 17 communautés religieuses officielles. Celles‑ci interviennent dans la construction identitaire du Liban sur la base des échanges, des confrontations et des appartenances multiples Les musulmans sont majoritaires à 60 % ; les Chrétiens représentent les 40% restants. La moitié de la population est âgée de moins de 20 ans, selon les estimations de 1997. Beyrouth, sa capitale, abrite à elle seule, un million d'habitants. Les principales villes libanaises sont Anjar, Baalbeck, Batroun, Byblos, Jezzine, Jounieh, Saïda, Tripoli, Zahlé, etc.

Par sa situation humaine et géographique, le Liban se présente, donc, comme un pays multiple ouvert aux «contacts de cultures» (Lahlou, 2001a) et aux interactions historiques et socio–politiques. Ces relations que le peuple libanais entretient avec des cultures, spécifiques et universelles, font de lui un peuple extrêmement attentif à autrui, et véritablement accueillant et hospitalier. L'hospitalité libanaise s'observe sur le plan communautaire, familial et individuel. De ce fait, l'Homme en est le reflet ainsi que ses productions, ses organisations et ses constructions, notamment ses habitations.

Entre l'universalité et la spécificité de l'habitat, se situe la symbolique propre à la maison libanaise et se structure le système des significations à son égard. Ce chapitre aborde, d'une part, l'organisation de la maison libanaise, à la recherche des particularités culturelles dont elle est porteuse. Il trace, d'autre part, l'itinéraire historique des démarches, privées / publiques et communautaires, entreprises dans l'objectif de remplacer l'habitat familial absent. Il décrit le fonctionnement, l'agencement des Institutions sociales et des Villages d'enfants, ainsi que l'organisation de la vie quotidienne.

Sous une perspective historique et symbolique, nous abordons la diversité des trois cadres de vie libanais désignés pour l'étude. Conformément aux Maisons parentales, nous identifions dans les Villages d'enfants et les Institutions sociales des lieux de vie stables et relativement permanents. Si le Foyer familial, premier refuge de l'Homme, semble être une nécessité universelle, le cadre des Villages et des Institutions, en revanche, constitue une spécificité culturelle. Cette spécificité socio–culturelle est engendrée par des conditions historiques et événementielles bien déterminées.