I.2. Formes architecturales de la maison libanaise

L'histoire de l'habitation libanaise montre que la maison a connu une diversité de formes architecturales et une variété de matériau de construction, selon les étapes historiques. L'architecture ne consiste pas en un système de procédés statique et définitif, mais plutôt en un système ouvert. Celui‑ci est ouvert aux divers courants culturels et, est apte à intégrer de nouvelles techniques de construction.

La maison phénicienne du 4ème millénaire comprenait sept poteaux en bois qui supportaient la toiture. Dans cette maison, le pilier central, constituant une poutre principale, s'appelait «pilier de la sagesse»(Mayla, 1985, p. 73). Dans le classement des formes propres à la maison libanaise, les auteurs distinguent, principalement, deux périodes historico–architecturales.

Durant la première époque, dominaient les maisons aux formes rectangulaires simples (avant 17ème siècle). Leurs supports de base étaient les murs porteurs et les lames en bois massif. L'épaisseur des murs périphériques en pierres (environ 80 cm) conservait la nature ambiante. Quant à la toiture en terre battue, elle constituait un isolant thermique. Les matériaux de construction provenaient des diverses régions libanaises : la pierre noire de Akkar, la pierre sablonneuse de la côte et la terre battue de la Békaa (Sakr, 1999).

L'architecture interne divisait l'habitation en deux parties, sans distinction nette entre elles. La zone de jour / zone de nuit était séparée de la zone de travail / zone d'élevage des animaux. Cette séparation se faisait par l'intermédiaire d'un banc construit, à savoir «mastaba» (parler libanais). La fonction du «mastaba» consistait à protéger la maison de l'humidité et à servir généralement de divan (Feghali, 1985). Ces détails s'appliquaient à la simple maison paysanne, appelée actuellement, la maison à plan libre. Celle – ci a conservé les mêmes dispositions architecturales en dehors du temps et des effets de la mode. Longtemps donc, le type de maison le plus répandu était la simple maison à une seule pièce. Cet espace unique se confondait avec celui de la maison toute entière. Il servait aussi bien de lieu de travail, de séjour, de cuisine que d'espace de repos et de sommeil. Plus tard, la quête de confort et d'intimité a nécessité une spécialisation des espaces de la maison. Ainsi, de nouvelles additions apparurent : chambre des parents, cuisine, pièce de provisions, etc. Chacun de ces nouveaux compléments prenait à son tour le nom de «bayt», à savoir maison. Ainsi, le terme «bayt el mouneh» désignait la pièce servant à stocker les provisions, et «bayt el may» signifiait la salle d'eau, etc. Ces appellations n'ont pas été modifié au cours du temps et leur usage persiste, jusqu'à nos jours dans certaines régions du Liban.

La seconde époque historique (17ème siècle) a connu l'expansion des maisons carrées, principalement après le retour, de Toscane, de l'émir Béchir Fakreddine II (Kfoury, 1999). En fait, Béchir séjourna deux ans de son exil à Toscane‑Florence où il fût attiré et séduit par l'art italien. L'influence de l'art italien était telle que Béchir décida de s'en inspirer et d'introduire ses éléments dans l'architecture libanaise. C'est ainsi, qu'à son retour de l'exil, il fit appel à des techniciens et à des artistes florentins.

La division intérieure de la maison a donné place à l'apparition de pièces séparées : entrée, cuisine, chambres, salon, cave. A cette époque, les façades des maisons libanaises comprenaient des arcades dont le nombre variait entre 3, 5 et 7. Les galeries d'arcades constituaient un prolongement de la maison et lui fournissait des éléments de confort et d'esthétique. Ensuite, sont apparues les constructions en formes de U avec la mise en relief de l'entrée, de la façade et des toitures. Il semblerait que la maison libanaise a toujours reflété une notion de symétrie situant l'entrée au centre et l'opposant au salon dont les ouvertures devinrent des arcades.

Plus tard, les maisons ont pris une forme de carrés vides, sans piliers dans les plans et avec des toitures en bois. A cette époque, les motifs décoratifs affichaient une valeur considérable : balustrades en fer forgé, œil‑de‑bœuf, corniches, portes en bois et mandaloun. Les ouvertures (œil‑de‑bœuf) servaient, d'une part, à l'évacuation de l'air chaud et, d'autre part, à favoriser l'entrée de l'air froid (portes, fenêtres). Quant au mandaloun, il était constitué de deux petites arcades séparées par une fine colonnette. Sa présence indiquait habituellement la pièce d'apparat et de réception de la maison (Kfoury, 1999).