Conclusion du cinquième chapitre

La maison parentale incarne un objet d'investissement affectif et de continuité du fait de son ouverture sociale et de sa transmission en héritage. Elle souffre cependant d'une carence en environnement naturel avoisinant (42,5%), et reflète des déficiences physiques de désordre, de laideur, et d'exiguïté architecturale (17,5%).

La demeure des habitants villages est tout d’abord un espace accessible, gaie et ensoleillé. Par ailleurs, elle illustre aussi un espace physique désordonné, froid, obscure, étroit et ancien (15%). Elle constitue un environnement stressant et accablant pour diverses raisons : abandon de la maison, inondation, étouffement, isolement géographique (tableau 5. 17).

Le groupe Institution identifie dans la demeure un espace accessible et, par conséquent, accueillant, gai et beau favorisant des sentiments de sécurité et de stabilité. Ses conditions climatiques lui défèrent l’ensoleillement, la chaleur et la tempérance du climat. Néanmoins, cette demeure est qualifiée de la part des 38,9 % des sujets par des attributs de froideur, d'exiguïté, de désordre, d’obscurité et d’ancienneté. Ces qualifications négatives créent des sentiments de rejet chez les habitants vis‑à‑vis de leur demeure, et renforcent le sentiment de tristesse et de manque de liberté.

Rappelons que les restrictions et les limites relationnelles imposées dans le cadre des Institutions et des Villages sont susceptibles d'accentuer la valorisation des pistes relationnelles plus accessibles dans les habitats Maisons. A titre d'exemple, mentionnons le renforcement affectif qu'offrent à l'enfant les grands-parents, les oncles et les tantes omniprésents dans l'environnement du foyer parental, mais moins abordables, en revanche, dans les autres types d'habitats.

Cet aperçu du vécu résidentiel montre donc que la «maison libanaise» offre des opportunités de continuité, de durée et de stabilité résidentielle et relationnelle. Ces opportunités semblent être plus remarquables et plus enrichissantes que celles disponibles dans le cadre des Villages et des Institutions. Il semblerait ainsi que l'expérience de continuité est plutôt associée à la maison parentale où le degré de mobilité résidentielle s'affiche faiblement. Cependant, l'expérience des changements répétitifs du cadre de vie entretient par conséquent des sentiments de discontinuité qui s'avèrent forts dans les habitats de type Village et Institution.

L'expérience émotionnelle du g. Maison est totalement basée sur les propriétés physiques des lieux habités. Tandis que celle du g. Village est essentiellement touchée par des caractéristiques psychiques et socio-relationnelles en premier lieu, et faiblement par des aspects physiques. Enfin, l'expérience du g. Institution semblerait être au premier abord influencée par les propriétés physiques des lieux, et par les aspects psychiques en second lieu. Reste à noter que la liaison entre émotions - religion - sexe s'affiche est non significative dans l'ensemble. Néanmoins les filles sont plus nombreuses que les garçons à attribuer à l'habitat des sentiments de tristesse et d'absence de liberté, tandis que les garçons évoquent plus que les filles la froideur, l'étroitesse et l'obscurité des lieux. Enfin signalons que les liens sociaux seraient irréductibles aux seuls rapports interindividuels et intra - individuels tissés avec autrui. Ils impliquent aussi l'individu dans une série de rapports aux espaces, aux endroits physiques et aux objets. L'élargissement du champ relationnel englobe donc les espaces fréquentés et les liens tissés avec eux, ce qui constitue le thème abordé dans le chapitre suivant.