II.2.4. Sites culturels

Par «sites culturels», nous désignons l'ensemble des lieux organisés et destinés potentiellement soit à communiquer le savoir, des modèles et des idées, soit à persuader ou encore à stimuler et favoriser l'expression du «moi». Les endroits culturels évoqués par les enfants sont les salles de cinéma, les théâtres, les restaurants, les monuments touristiques, les sites historiques et les lieux de prière. L'ensemble de ces endroits constitue l'objet de choix restreint, cependant significatif. Le g. Village est l'unique à ne pas désigner les salles de cinéma et les théâtres comme étant ses lieux préférés. Ce résultat dénote un contraste avec le vécu du groupe qui est l'unique à avoir déjà fréquenté le théâtre. En revanche, le théâtre constitue un lieu préférentiel pour des enfants (Institution) n'ayant pas encore bénéficié de l'opportunité de faire l'expérience du milieu théâtral.

Le restaurant est presque exclusivement désigné par le g. Institution comme un espace préférentiel, tandis que les lieux de prière le sont doublement par le g. Maison. Nous considérons sous un angle d'opposition un restaurant et un lieu de prière. Ce dernier traduit une quête de solitude, de sécurité et de relation intime et personnelle à l'Autre (Dieu). Cependant, le restaurant, rarement accessible financièrement, traduit une quête d'ouverture aux autres et de reconnaissance sociale. Il est supposé qu'un lieu de prière protège l'individu en lui épargnant le regard des autres, tandis qu'un espace aussi public que le restaurant l'expose aux regards. Qu'est- ce qui suscite, chez un sujet, le désir d'éviter les regards, et chez un autre la disposition à s'exposer volontairement aux attentions ? En d'autres termes qu'est ce qui suscite chez le g. Maison ce penchant vers les lieux de prière, et vers le restaurant dans le cadre institutionnel ? Serait‑ce dû à l'effet quantitatif des relations sociales tissées dans l'environnement de la Maison ? Ou plutôt à la défaillance relationnelle et à l'absence de reconnaissance sociale dans le cadre hermétique de l'habitat Institution ? Enfin, s'il est vrai que les choix préférentiels sont conditionnés par la structure résidentielle, ne sont‑ils pas aussi influencés par d'autres facteurs, notamment l'âge de l'enfant, la durée ainsi que la densité résidentielle ?

Il apparaît que l'appartenance sexuelle constitue un facteur d'influence sur l'attachement aux lieux (figure 6. 3).

Figure 6. 2 – Courbes avec lissage
Lieux favoris dans l'environnement résidentiel croisés avec le sexe

Les garçons privilégient les espaces de sociabilité et d'activités ludiques et sportives (55,8%) beaucoup plus que les filles (11,1%). Les filles, quant à elles, sont doublement séduites par les maisons de la famille proche (52,8%) par rapport aux garçons. Le genre féminin est davantage attaché au village natal (30,8%) et aux espaces de verdure.

L'ensemble des résultats montre que les endroits préférés des garçons sont ouverts vers l'extérieur tout en étant, généralement, qualifiés de «sociaux» et de «publics». Quant aux espaces privilégiés des filles, ils gardent un cachet intime, relativement personnel et familial. Sachant que la relation dialectique aux lieux ne saurait être réduite à l'attraction positive et appréciative, nous abordons cette relation sous un pôle opposé dont l'expression se traduit par le refus et l'évitement des lieux.