7-Représentation du foyer

Les résultats montrent que la représentation de l'habitat est modulée par les expériences résidentielles quotidiennes actuelles ou précédentes de l'enfant aussi bien que par le contexte socio‑culturel libanais. Ce constat rejoint celui de Morval (1981) chez qui l'expérience d'un environnement influence la représentation que l'individu s'en fait. Les lieux les plus connus sont, en effet, ceux qui rappellent une expérience nécessaire ou investie. La représentation de la maison varie d’un groupe résidentiel à un autre justifiant ainsi le choix par des propriétés physiques et psychiques propres aux lieux.

Indépendamment du cadre de vie, les enfants évoquent des notions anthropomorphiques d’amour et d'apport de soutien aux autres. L'habitat est plus précisément représenté comme étant un espace de sociabilité, de rapports sociaux et d’ouverture à autrui différent. Partout, sont valorisés les particularités sociales et hospitalières de l'habitat. Nous considérons que cette représentation est foncièrement influencée par le contexte socio‑culturel libanais privilégiant les interactions sociales à l’individualisme et à l’isolement. Les valeurs sociales ancrées dans la société libanaise et véhiculées par les familles sont à la base de cette représentation positive du foyer.

Cette dimension sociale du chez soi est aussi avancée par d'autres auteurs. Tognoli (1987)considère que l'environnement du foyer est caractérisé par les relations sociales susceptibles de le transformer en espace d'accessibilité et de communicabilité (Pennartz, 1986). La dimension sociale impliquant les individus dans des rapports d'altérité sur les pôles d'intériorité et d'extériorité engendrant de ce fait un environnement émotionnel gai et chaleureux. Cette ambiance représente aussi l'un des aspects sociaux de l'habitation (Sixsmith, 1986).

L'habitat est également représenté comme un champ d'appartenance, d'appropriation et de propriété. Cependant, la propriété est différemment attribuée en fonction du cadre de vie. La maison appartenant à la famille proche est citée, en premier, par la population Maison. Elle appartient à l'enfant lui‑même dans le g. Village, à la fratrie et aux parents pour les habitants Institution. L'appartenance est ainsi synonyme d'appropriation et d'investissement. Elle est expérimentée par l'enfant ou par ses personnages préférés. Le sentiment d'appartenance à une collectivité (Pezeu-Massabuau, 1983), à savoir à la fratrie et à la famille nucléaire s'affiche fortement à l'Institution. La distance séparatrice du foyer parental semble accentuer un tel sentiment car ce groupe se projette davantage dans la maison parentale que dans le cadre institutionnel au risque d'une certaine dissonance. Pour le g. Institution, la maison parentale représente un espace de continuité expliquée par la transmission intergénérationnelle, à savoir l'héritage. La continuité est une des qualités caractéristiques du foyer pour certains auteurs. Tognoli (1987)l'attribue au foyer mais pas au logement. La continuité favorise la survie des liens psychologiques (Feldman, 1990, 1996) et elle est conjointement soutenue, chez le g. Maison, par le sentiment de sécurité. Le rapport entre continuité et sécurité est souligné par Fischer (1983) qui localise dans l'expérience de continuité, un renforcement du sentiment de sécurité, devenu la qualité la plus citée par des enfants concernant l'environnement de leur foyer (Sebba & Churchmann, 1986).

Le faible versant négatif dans la représentation de l'habitat dévoile trois ensembles d'aspects particuliers.

  • Le foyer est représentée (g. Maison) comme étant un espace exigu, étroit, marquant d'étendues et d'environnement.
  • La population Village le représente comme un environnement stressant et accablant car les éléments environnementaux produisent des effets d'étouffement, d'inondation, d'abandon et d'isolation.
  • Cependant le foyer est perçu (Institution) comme un espace de tristesse et de rejet. Sa tristesse est favorisée par des facteurs physiologiques et environnementaux tels que l'ancienneté, la laideur des traits et le désordre du cadre institutionnel.