3.2.3. FRELIMO : à la recherche d’un système politique

Ni parti114 ni Etat au sens qu’on attribue à ce concept en occident115, le FRELIMO apparaît comme une organisation politique rassemblant des forces sociales autour d’un cercle intérieur. L’action politique étant associée à l’enjeu de la conquête du pouvoir, la dynamique du FRELIMO mérite d’être repensée. Du fait qu’il résulte de la coalition de groupes politiques au tour d’un noyau central, sa capacité d’intégration de divers espaces sociaux explique que l’organisation ne peut exister qu’en interactivité avec un environnement changeant. Son action politique ne saurait, d’ailleurs, pas être pensée comme l’initiative dont l’organisation serait le centre moteur ; elle ne saurait non plus la force ouverte qui ne laisserait aux acteurs sociaux d’autre possibilité que de se soumettre.

L’organisation politique, et le fond du pouvoir qui en est la base, n’agit pas seulement par la voie « autoritaire », à travers l’allocation hiérarchique de règles auxquelles les acteurs sociaux seraient tenus à obéir. L’organisation, suivant B. Lacroix, « propose, incite, invite, négocie, consulte, marchande et conclut en permanence, explicitement ou implicitement, accords ou compromis ; et cette logique du marchandage généralisé avec les partenaires qu’il suscite ou qu’il contraint à reconnaître suffit à attester les mille et une manières dont il est inextricablement encastré dans la société »116.

Mais, si ces pratiques illustrent bien l’expérience donnant naissance au FRELIMO, n’importe quelle organisation s’en tenant à cela n’éviterait pas le danger de se voir se diluer dans la société. Pour ce qui est des organisations dont la sociogenèse se présente semblable à celle du FRELIMO, leur cursus peut être appréhendé selon le parcours suivant : d’abord, les alliances sont vues par les acteurs politiques comme des moyens pour valoriser leurs atouts de pouvoir et pour dévaloriser ceux de leurs rivaux. Tout en se battant pour le contrôle des décisions, les acteurs politiques cherchent, en vue des décisions à venir, à se donner des ressources habilitant leurs rivaux et à leur imposer des ressources contraignantes ; ensuite, la recherche de cohésion et de connexité, en vue de la construction d’un système politique. A ce stade, les relations de pouvoir obéiraient à une exigence de connexité fondée sur l’instance dominante de l’appareil politique.

Dans ce cas, on serait en présence de la construction sociale du groupe qui apparaît sous la forme de collectivité politique, appuyée sur un système de rôles. Caractérisés par une sorte d’interdépendance fonctionnelle, leur réseau définit une organisation avec ses objectifs, ses règles régulant des échanges multiples et ses rivalités particulières. Hommes politiques, identifiés à des blocs rivaux ou clients, sont appelés ou se battent pour accéder à des instances pour y exprimer des opinions politiques. Celles-ci ne sont pas indifférentes aux préoccupations qu’ils partagent avec les proches ou les semblables dont ils se trouvent soudain en situation de porte-parole.

Il est donc question d’analyser l’ensemble des demandes et de soutiens favorisant l’évolution du FRELIMO vers un système. Supposant une structure hiérarchisée et la légitimation du pouvoir au commandement de l’action sociale, cette dynamique ne saurait être saisie en dehors de son environnement. Le contexte de la guerre a constitué la cause majeure des problèmes, de l’identification de solutions et de priorités politiques, pour le FRELIMO. Les politiques qui en découlaient, étaient indissociables d’un débat social dû au rassemblement de plusieurs tendances. La guerre débutée, la majorité s’accordait au sommet pour ce qui est du but de l’organisation : la conquête de l’indépendance et la formation d’une société globale. Les blocs en désaccord résultaient de différences quant à l’identification de stratégies auto-sustentables et des alliances pertinentes, dans le contexte de rareté et du danger de l’approchement du mouvement au conflit Est-Ouest117 ; D’autres, attachés à un discours de l’ethnisme, la guerre n’était nécessaire que pour la libération des régions (ethniques) respectives; Pour les officiers (militaires), issus des écoles de divers pays, l’avancement de la guerre supposait un rapport stratégique entre les combattants et la population ; A la base, les particularismes des communautés paysannes s’avéraient aux antipodes du projet de société globale. L’alliance avec les influents dans chaque espace, étant donné leur rapport conflictuel au système portugais, a néanmoins apporté des ressources importantes pour la mobilisation politique. Le retrait des portugais des zones de guerre créa un « vide de pouvoir » dans les zones libérées. Au moment où manquait l’articulation sommet-base, les exigences de l’avancement de la guerre rendaient pressante l’adéquation du système esquissé par E. MONDLANE au nouveau contexte.

S. MACHEL, officier formé en Algérie (1963) puis en Chine (1966), se reporte à des blocages auxquels l’organisation a dû faire face. D’après lui, le FRELIMO a eu des victoires importantes surtout le long du Lac Nyassa. Les rapports de forces ont toutefois changé en 1966 : les bombardements ennemis ont été intensifiés ; les zones sous le contrôle du FRELIMO ont été atteintes par la famine, entraînant la désorganisation au sein de la population et des combattants aussi bien que le désespoir de la direction. S. MACHEL associe ces blocages à l’absence d’une définition des tâches pour les masses et au fait que les militaires n’avaient qu’une seule tâche, celle de mener la guerre. Ces lacunes se trouvaient, d’après lui, à la base de la fragilisation de la mobilisation politique :

‘Nous n’avions pas encore la stratégie correcte pour la mobilisation politique aussi bien que pour l’organisation du peuple. Nous en parlions mais nous n’étions pas clairs au sujet du processus de mobilisation du peuple. Nous pensions que des réunions des membres de la direction suffisaient. Dans la réalité, il y avait un vide entre la base et le sommet, entre le peuple et nous118.’

Pour S. MACHEL, cette lacune s’expliquait par le fait que les membres du bloc ayant en charge des responsabilités importantes dans le FRELIMO n’avait pas d’expérience au sujet de la mobilisation politique. Par ailleurs, la ressemblance de leurs trajectoires ne les aidait point dans le sens de surmonter cette lacune :

‘Le Comité Central (CC) du FRELIMO, qui était simultanément le Comité Exécutif, se composait de tous ceux qui étaient des secrétaires des départements. De ce fait, ils étaient également membres du C C. D’où venions-nous ? Je venais du sud du Mozambique. Parce que j’étais instruit, on m’a toute de suite confié, ici dans le FRELIMO, un département à diriger. Mon camarade, Marcelino dos SANTOS, en provenance du Maroc, a eu un département à diriger dès son arrivée. Mon collègue, Mariano MATSINHE, qui venait de l’université au Portugal, a reçu un département à diriger. Nous venions de loin, du Portugal, du sud du Mozambique, des Etats Unis. Du fait de notre niveau d’instruction et des responsabilités que nous avions dans le FRELIMO, nous appartenions au CC. C’était pour autant l’organe qui dirigeait la guerre, l’organe qui planifiait la stratégie, l’orientation politique de l’organisation. Il y avait, faut-il le reconnaître, un certain vide entre nous et la base119.’

Cette réalité peut être appréhendée à la lumière de l’apport théorique de M. Crozier et E. Friedberg. Dans leurs études au sujet de la structuration d’un système d’action dans les organisations120, ces auteurs rendent compte du phénomène dont la constance nous permet de les prendre pour des faits universels. Dans quelque organisation que ce soit, les acteurs n’ont qu’une liberté restreinte et ne sont capables corrélativement que d’une rationalité limitée. Leur liberté, leur rationalité, leurs objectifs et leurs « besoins » ou si l’on veut leur affectivité sont des construits sociaux et non pas des construits abstraits. L’acteur, suivant M. Crozier et E. Friedberg, a rarement des objectifs clairs et encore moins des projets cohérents : ceux-ci sont multiples, plus ou moins explicités, plus ou moins contradictoires. L’éclairage de leurs choix oblige à chercher dans le contexte organisationnel la rationalité de l’acteur et à comprendre le construit organisationnel dans le vécu des acteurs.

Arguments clefs de la pensée stratégique, ces éclairages se présentent pertinents pour que nous puissions appréhender la nature ambiguë du comportement des acteurs en situation. Il est question d’associer le comportement stratégique des acteurs sociaux à la structuration du champ des relations de pouvoir entre les membres d’une organisation. Celle-ci non seulement rend possible le développement des relations de pouvoir mais en fonde aussi les bases de permanence. En effet, le pouvoir n’existe pas en soi. Il ne peut s’exercer que dans une relation par laquelle deux ou plusieurs acteurs acceptent de se lier et de s’intégrer, au moins provisoirement, dans un ensemble organisé.

Dans le sillage de la démarche stratégique, nous ne pouvons pas dissocier les changements, - et les conflits qu’ils ont entraînés - dans le FRELIMO de la dimension stratégique de l’action. Dans chaque contexte organisationnel, ce qui était question, c’était de perfectionner le pouvoir comme « capacité à structurer l’échange négocié de comportements en sa faveur »122. Ce processus ne pouvait s’appuyer que sur une base coalitive, puisque indissociable des alliances, et collusive, parce que fondé sur l’allocation inégalitaire des ressources d’action123. Envisager de la sorte le phénomène du pouvoir nous amène à reprendre la dimension relationnelle du pouvoir, base de quel que soit l’espace des relations humaines.

Mais les organisations ont la particularité d’être l’espace de construction d’acteurs dont la hiérarchisation obéit au principe d’inégalité de leurs puissances. Quelques-uns d’entre eux se distinguent par leurs pouvoirs de connecter, parce que plus entreprenants, d’autres acteurs dans l’organisation. Le pouvoir, dans ce cas, ne se réduit pas aux acteurs du cercle intérieur de la collectivité mais à l’ensemble des acteurs connectés par des relations formelles et informelles. L’analyse en termes de réseaux nous permet de soutenir que, dans le contexte organisationnel, le pouvoir manifeste aussi une propriété transitive. Plus l’univers organisationnel est hiérarchisé, plus cette transitivité est forte, les ressources circulant entre des acteurs connectés servant de moyens d’action sociale.

L’entreprise de cette collectivité, assise sur la connexion des acteurs, s’est présentée comme un défi pour le FRELIMO au fur et à mesure qu’il prenait en charge les différents espaces sociaux du Mozambique. Du fait de son environnement spécifique124 les efforts dans ce sens se sont traduits par la création d’un système administratif alternatif à celui de l’Etat colonial et par la réorganisation de l’armée. Ces actes étaient toujours complémentés par la mobilisation politique des populations, étant donné qu’elles étaient la source de soutiens pour une « guerre populaire », inspirée de la théorie de Mao Tsé-toung125.

En effet, au fur et à mesure que des morceaux du territoire étaient conquis par le FRELIMO, ceux-ci étaient découpés en des unités administratives. Il en découlait un système de rôles articulés au centre du pouvoir. Au sommet, on y distinguait le CC du mouvement de libération, instance de médiation et de formulation de l’orientation politique ; la présidence et le Comité exécutif prenaient à leur charge la mise en oeuvre, le contrôle et l’évaluation des politiques suivies dans plusieurs secteurs. Pour ce qui est des instances intermédiaires, fonctionnant de manière hiérarchique et articulée, la province figurait comme une unité politico-administrative fondamentale. Le Conseil provincial était, à ce niveau, doté de pouvoirs délibératifs tandis que le Comité, dont les membres avaient à leur charge plusieurs services126, s’occupait de tâches exécutives. Pour assurer le fonctionnement de la province, celle-ci se divisait en des sous-unités à savoir, le secteur, qui était sous le contrôle de militaires du fait de s’agir de zone de combats ; le Conseil districtal contrôlait plusieurs sous-unités composant le district, les localités. La tâche de faire faire les directives émanées d’en haut revenait à cette instance. De plus, il s’occupait de rendre compte de l’opinion « populaire »127 aux instances supérieures au sujet des problèmes courants. Pour ce faire, des réunions de masses étaient mises en place au niveau de Cercles et des Comités locaux. Nos sources permettent de vérifier que l’articulation et le fonctionnement organique de cette structure obéissaient à la logique d’un appareil :

‘Sous cette base, cette structure fonctionnait comme une courroie de transmission des expériences et des souhaits du peuple engagé dans une lutte de libération à touts les niveaux de responsabilité jusqu’au sommet de notre organisation. Il s’agissait également d’une structure nécessaire pour communiquer aux bases les principes et les directives de notre organisation – constamment réévaluées en fonction des expériences et de l’opinion populaire. C’était donc une structure fonctionnant dans deux sens : d’une part, elle assurait à tout moment l’articulation entre le peuple et leurs responsables ; d’autre part, cette organisation reliait le sommet à la base. Ainsi, le peuple se rendait compte du fait que les responsables étaient effectivement leurs représentants128’

Ce système de rapports sociaux fait état de l’une des ressources mises en œuvre pour entreprendre, bien que précairement, la nécessaire intégration pour l’action politique. L’unification d’une société a tendance à en faire une cité harmonieuse, basée sur un ordre ressenti comme tel par ses membres. Le processus d’intégration s’étant opéré de pair avec l’avancement de la guerre, elle a entraîné des changements à deux égards : sur le plan horizontal, elle a produit, autour du cercle intérieur et de leurs intermédiaires, le ralliement des divers éléments sociaux, économiques, religieux, ethniques et géographiques du pays ; sur le plan vertical, l’intégration a à la fois entraîné la structuration pyramidale et l’établissement d’une liaison étroite des dirigeants et des administrés, au sein d’un processus de participation politique. Suivant V.I. Lénine, M. Duverger considère le centralisme démocratique comme le support de ce contact permanent avec le peuple, parce qu’elle tend à corriger les inconvénients d’une structure centralisée. Les buts de cette pratique, d’après lui, sont les suivants :

‘D’abord, faire connaître au centre, avec la plus grande exactitude possible, le point de vue de la base, pour lui permettre de prendre une décision valable ; en second-lieu, assurer l’application de cette décision du centre à tous les échelons, d’une façon rigoureuse et précise, mais compréhensive : c’est-à-dire avec l’adhésion de la base. Ainsi, le système est centralisé, puisque les décisions sont prises en haut ; il demeure démocratique, puisqu’elles sont arrêtées en fonction des opinions de la base, et que l’accord de celle-ci est à tout moment recherché dans leur application129.’

Du point de vue du contexte du FRELIMO, ces rapports sociaux vont aménager un véritable réseau au sein de la population, de façon que soient perçues, comprises et réalisées les directives du pouvoir, et que ce dernier puisse rester à l’écoute des masses. Les critères du recrutement des tenants de postes dans cette structure sont de deux ordres : pour des instances d’en haut, l’opinion du chef et de son entourage s’avérait une source de crédits ; celle-ci se fondait sur l’expérience de l’individu dans le domaine de l’organisation de la résistance anticoloniale ; le niveau d’instruction, la fidélité130 à l’idéal de l’indépendance et de la construction du Mozambique comme une société globale ; les diplômes témoignant de la spécialisation dans un certain domaine ; Le capital social et la capacité d’influence (ou de mobilisation politique) d’un individu sur un certain espace ethnique, sans que cela veuille signifier un acte d’encouragement de l’ethnisme, tendance toujours combattue par le FRELIMO. Ce dont il était question c’était de mettre les ressources symboliques de l’individu, dans sa qualité de fils d’un espace ethnique, au profit de la mobilisation pour la cause anticoloniale.

Pour ce qui est de la base, un régime électoral a été mis en place, afin de combler le vide de pouvoir créé par le retrait des portugais des zones de guerre. Les écrits d’E. MONDLANE relèvent l’avènement, dans le cadre de la lutte coloniale, d’une nouvelle structure politique. Dans un rapport conflictuel avec les pratiques à travers lesquelles les Portugais légitimaient les chefs traditionnels131, le système du FRELIMO ne les empêchait néanmoins pas de participer à la vie politique. Deux préalables étaient requis à cela : d’abord, leur détachement du rôle de suppôts du régime colonial ; ensuite, leur engagement dans la lutte anticoloniale, ce qui était indissociable de l’abdication de leurs privilèges en tant que chefs.

Toutefois, au moyen de leur prestige social et de leur capacité connexionnelle, un bon nombre de chefs traditionnels se faisaient élire. Cela veut dire que, dans des espaces respectifs, ils devenaient tenants de postes de président ou de secrétaire de cellules, de sections, de districts ou de provinces sous le contrôle du FRELIMO132. Tout en se reportant à la même pratique, d’autres sources font remarquer que « les populations étaient organisées. Elles étaient organisées à travers des Comités, intégrées dans un processus au moyen duquel elles élisaient leurs responsables. Les populations ne savaient ni lire ni écrire mais elles connaissaient leurs problèmes aussi bien que les moyens de les résoudre »133.

Sous sa forme organisée, le combat anticolonial au Mozambique a donc entraîné le construit social d’un système de représentativité politique. Par des liens134 avec des acteurs placés au centre de l’organisation ou par des ressources symboliques se référant à des espaces sociaux respectifs, des acteurs individuels se voyaient légitimés à plusieurs postes, locaux, intermédiaires ou dans l’espace central du mouvement. L’effet de ce processus est, bien entendu, la mise en place d’un mécanisme de régulation, aux prises avec des sources de menaces pour l’organisation anticoloniale. Dans le cadre de sa structuration, en plus de la réorganisation de l’armée, il a été convenu qu’en ce qui concerne l’ancienne division de tâches politiques et militaires, tous les militants auraient dorénavant des activités politico-militaires135.

À l’état d’avancement de ces recherches, on a encore des difficultés à associer le mécanisme de régulation au principe du fonctionnement du FRELIMO à l’entreprise de classes au sens marxiste-léniniste. Les critères traditionnellement adoptés depuis K. Marx pour définir les classes sociales136 sont difficilement applicables pour caractériser la nature des groupes participant à l’organisation anticoloniale. Cette étude a permis d’identifier, dans l’environnement où se déroule l’action politique du FRELIMO, les deux sources qui en constituent les forces centrifuges : la première, découle de la dynamique de l’intégration/exclusion, qui va de pair avec la concurrence autour de moyens d’actions. Leurs acteurs étant attachés de façon concurrentielle à des discours politiques d’ethnicité, d’ethnisme ou à celui de société globale, la réussite dans la bataille pour la représentativité leur apporte des perspectives satisfaisantes, à deux égards : d’abord, ils se placent dans une position capable de définir le référentiel politique de l’organisation ; ensuite, à titre de tenants-lieu, la centralité leur permet d’identifier tous les bénéfices susceptibles d’être retirés par les acteurs mais aussi par le système politique tout entier.

Le conflit autour des ressources politiques entraîne ainsi des rivalités factionnelles. Étayé sur le discours de l’ethnisme ou celui de la société globale, ce conflit n’est point décryptable en dehors de l’analyse stratégique et de l’approche en termes de réseaux. Ces luttes factionnelles expliquent le regroupement des affiliés à l’organisation en termes de réseaux relationnels (les camarades), qui se traduisent par des liens d’identification à des chefs respectifs. Par ailleurs, le cadre de leur déroulement étant celui de la guerre, ces rivalités se présentent comme une ressource politique pour le camp opposé, celui du gouvernement colonial et son armée.

C’est bien sur cette base qu’on essaye d’interpréter les conflits et la deuxième crise connue par le FRELIMO, entre 1967 et 1969. Les conséquences majeures de cette crise furent l’assassinat d’E. MONDLANE et le tournant de l’organisation vers le marxisme-léninisme.

B. Campbell, J. Saul, B. Manslow, A. Isaacman, B. Egero137 associent les conflits survenus autour du système de l’administration des régions conquises par le FRELIMO à des contradictions de classes. Pour eux, il s’agissait de deux courants qui se disputaient jusqu’en 1968 la primauté politique pour mettre en oeuvre des stratégies respectives. Le premier était celui dont le chef était Lazaro N’kAVANDAME, alors attaché au poste de Secrétaire de la province de Cabo-Delgado ; Le second, ne s’opposant pas au projet d’E. MONDLANE, était symbolisé par des officiers, soucieux de faire progresser la guerre anticoloniale.

L’hypothèse de « conflit de classes » ne s’avérant pas satisfaisant pour cette thèse, on tient les forces sociales en conflit dans le FRELIMO pour des blocs d’individus, formés sur la base de liens, de la communauté de trajectoires et d’expériences biographiques. Ces affinités participaient à la formation des idéaux politiques et des rationalités qu’ils cherchaient à réaliser, dans le mouvement anticolonial. Lors des années 50, L. N’KAVANDAME s’était fait remarquer par l’organisation de coopératives de production et de commercialisation du coton, au sein desquelles se sont développées des aspirations indépendantistes. Inspiré du nationalisme ethnique, le mouvement social dirigé par L. N’KAVANDAME a débouché sur le massacre de Mueda en 1960. Avec le passage de certaines régions sous le contrôle du FRELIMO dans la province de Cabo Delgado (zones libérées), un système alternatif a été mis en place. La formation de celui-ci comprenait deux moments : d’abord, les guérilleros s’occupaient de la conquête d’une région du territoire et de l’encadrement des populations fugitives de l’espace sous l’administration portugaise ; ensuite, cette tâche accomplie, la zone libérée était confiée aux fils de l’espace, les vieux (Chairmen), qui y étaient les plus influents, à qui revenait la tâche d’organiser le système d’administration civile :

‘Un territoire étant déjà sous le contrôle du FRELIMO, était plus tard confié à une personne responsable pour organiser la population civile, connue sous la désignation de chairman. Dans la majorité des cas, le chef traditionnel devenait le chairman de l’espace et, aidé par un assistant, il y prenait des décisions sans consulter le Comité. Dans la réalité, cela signifiait qu’avant 1966, on opérait à un simple remplacement du pouvoir colonial par le pouvoir des chefs traditionnels. Entre autres, le chairman prenait en charge la distribution des habillements venus de l’extérieur, le ravitaillement des guérilleros en nourriture ainsi que l’organisation des milices de peuplement138.’

L. N’KAVANDAME (chairman), à l’instar d’autres fils de l’espace (Cabo Delgado), avec une trajectoire d’opposant aux échanges inégalitaires imposés aux paysans, s’est présenté avec des crédits pour intégrer l’appareil politique du FRELIMO. Il y devint le secrétaire provincial139. Ce fut avec ces ressources statutaires, symboliques et actionneuses que L. NKAVANDAME s’est engagé dans la mobilisation des paysans pour qu’ils adhèrent au mouvement de création de coopératives de production. Ce dont il était question c’était la création tant d’un support pour l’approvisionnement des guérilleros que d’un service de commerce pour la population, au moyen des établissements commerciaux mis en place par le FRELIMO.

Mancur Olson, dans son ouvrage, Logique de l’action collective, éclaire un phénomène qui est intrinsèque aux collectifs d’action. D’après lui, dans les systèmes d’action collective, les organisations se heurtent au paradoxe de l’association de biens collectifs et de biens individuels /…/ sinon pour les adhérents, au moins pour les militants ou les membres de l’appareil. Ils reçoivent évidemment en prestige, en genre de vie, en capacité d’action, en pouvoir, des avantages individuels140. Étayés sur une critique de la pensée du choix rationnel, James H. March et Johan P. Olsen141 ont pu rendre compte ce qui est au principe du fonctionnement des organisations politiques. Les activités de celles-ci ne sont pas surdérteminées par la force normative des institutions, qui auraient l’autonomie de modifier les mobiles individuels au bénéfice de l’intérêt institutionnel. Le fonctionnement des organisations ne serait redevable qu’à l’interactivité d’intérêts et de préférences individuelles et de sous-unités qui les composent, au niveau microcosmique et groupal. Pour J. H. March et J. P. Olsen, la dynamique des institutions repose à la fois sur le contrôle de ressources symboliques et d’autre type de supports, ce contrôle étant indissociable de la nature rationnelle et stratégique de la pratique politique.

Le rapport entre l’intérêt, le symbolique et le pouvoir comme ressource de structuration de l’action collective est bien mis en relief par des études qu’on vient d’évoquer. Le dépassement du paradoxe de l’action collective étant un préalable de la construction d’un acteur collectif, l’action sociale ne peut se dissocier de la création de la contrainte sociale. C’est à l’intérieur du système social créé par cette construction que les intérêts individuels sont bien définis et elle encadre donc la poursuite. Le premier effet de la contrainte sociale, qui est consubstantiel à l’action collective, est de définir l’acteur collectif dans son étendue et dans ses objectifs - ou les enjeux qu’il découvre dans chaque situation. La collectivité réunie par la règle et le projet que toutes deux visent à accomplir, sont étroitement interdépendantes.

La réforme qui a été mise en œuvre en 1966 dans l’organisation anticoloniale, a été produite par des blocages sur lesquels elle buttait en raison de l’indéfinition de la contrainte sociale nécessaire à l’action collective. Avec la légitimation de tâches politico-militaires, les portes s’ouvraient aux guérilleros pour qu’ils participent de plus en plus dans le processus décisionnel, sur la base du principe du centralisme démocratique. Cette pratique s’opposait aux procédés « autoritaires » des chefs traditionnels, étant donné que la légitimation de leur pouvoir s’assoit sur un système de croyances qui renvoie à l’action immémoriale des ancêtres. Le chef traditionnel s’inscrit dans une logique de rapports de domination où le pouvoir se transmet aux descendants du souverain comme un patrimoine de la famille régnante142. On identifie ici une potentielle source de conflits entre deux discours sociaux, celui s’inspirant sur la tradition vis-à-vis du discours de construction d’une société globale.

Allié aux chefs traditionnels (Chairmen), L. N’KAVANDAME voyait dans les établissements commerciaux et dans le système d’échange avec les paysans un atout pour le contrôle de ressources d’action, comme le remarque Lino MASSANO :

‘Au début, N’KAVANDAME semblait s’accorder avec nos principes. Mais après, nous nous sommes aperçus qu’il ne voulait que s’occuper de ses intérêts. Son projet n’était pas de lutter pour libérer le peuple. Il s’est montré très actif dans la création des coopératives mais ce qu’il voulait c’était de veiller à ses intérêts. S’il souhaitait en fait lutter contre la domination coloniale, NKAVANDAME ne refuserait pas de participer à la lutte ainsi qu’aux travaux plus difficiles. Il ne détournerait également pas des biens et de l’argent des coopératives, au bénéfice personnel. Lorsque nous l’avons dénoncé, il a choisi de s’allier à ses collaborateurs pour tuer certains responsables, comme ce fut le cas du commissaire Paulo KANKOMBA, qui était très estimé143.’

Contrairement à la théorie d’opposition de classes sociales, il est intéressant de remarquer que les réseaux relationnels débouchaient sur la formation de blocs politiques, à l’intérieur du FRELIMO. La cohésion entre les membres de ces blocs résultait d’une multiplicité de liens : l’appartenance au même espace social, la trajectoire biographique, les ressources statutaires et la capacité d’influence dans l’espace social respectif et dans l’appareil politique. La capacité connexionnelle dans ces blocs rivaux revenait sur celui qui se révélait le plus entreprenant dans un ensemble cohésif. Placé dans une position de centralité, la tâche de coordination du groupe n’était que l’effet de position du leader dans le système de rapports sociaux, donc de l’accès à des moyens d’action –matériels, humains, informationnels.

L. N’kAVANDAME et ses adeptes s’opposaient aux mécanismes de prises de décisions basées sur la consultation populaire aussi bien qu’à l’inclusion des militaires, depuis 1966, dans le cercle des responsables politiques. Titulaire du poste de secrétaire provincial de Cabo Delgado, le fis de l’espace (ethnie maconde), s’est entouré de quelques adeptes : les chairmen (les vieux), quelques membres de son village (N’tuche), à Mueda, et les milices sous son contrôle144.

La guerre avait produit un groupe d’officiers très influents dans l’organisation. Malgré l’origine multiethnique de ces officiers, leur cohésion s’expliquait également par des liens, fondés sur la trajectoire commune et le partage du même idéal politique : l’entreprise d’une armée, ravitaillée de façon satisfaisante et la mobilisation de la population pour la guerre. S. MACHEL apparaîtra au centre de ce bloc. Originaire du sud du Mozambique, sa trajectoire lui permettra de diversifier ses réseaux relationnels d’autant plus qu’il pouvait se placer dans une position de centralité au niveau de l’armée. Après sa préparation militaire en Algérie (1963), il devint le chef-adjoint de la défense et le responsable pour l’entraînement des guérilleros, à Kongwa puis à Nachingwea (Tanzanie). A ce titre, il a noué des liens avec des guérilleros des différents espaces ethniques, dont il apprit quelques langues. L’activité directrice de la préparation militaire à Nachingwea lui a apporté un certain savoir sur l’intérêt de l’imbrication des réseaux avec l’appareil, pour la légitimation d’un système hiérarchique. D’après lui, « le peuple s’enthousiasme du fait de voir son dirigeant près de lui, aime travailler avec lui, souhaite le connaître et apprendre à travers ses exemples pratiques, dans la recherche de solutions à leurs problèmes »145.

En effet, grâce à ce rapport de convivialité avec les militaires dans les camps d’entraînement de Nachingwea et de Kongwa, S. MACHEL parvint à les mobiliser pour améliorer les conditions de vie dans les camps d’entraînement146. L’approfondissement en 1966, en Chine, des techniques et de la stratégie militaire lui a apporté des outils importants pour le commandement. A la suite de la mort de Filipe S. MAGAIA, S. MACHEL est promu au poste de chef du département de la défense. Cet organe devient, après sa restructuration en 1966, un appareil et un moyen d’action fondamental. Militaire, commandant, mobilisateur, stratège, politique, son appartenance au CC, organe de médiation et de formulation de la politique du FRELIMO, S. MACHEL apparaît comme un acteur important pour la recherche de solutions au conflit déclenché par L. N’KAVANDAME et son bloc.

Composé de officiers les plus importants de l’armée, ayant fait des études militaires en Chine, le bloc de S. MACHEL147 s’est structuré à partir d’en bas, en fonction des problèmes et des blocages dans le commandement de la guerre. Appuyé par des intellectuels issus des Universités occidentales, ce bloc envisageait la fusion des activités militaires et politiques comme nécessaire. Pour eux, l’organisation des paysans se montrait souhaitable pour gagner la lutte contre le colonialisme148. Celle-ci devrait donc se fonder à la fois sur des idéaux nationalistes149 et anticapitalistes. Du coup, il fallait redéfinir la question du rapport entre l’action militaire et l’action politique, afin de rendre possible l’établissement de ce qui a été considéré comme “le pouvoir populaire”. Quant aux activités économiques des paysans, elles devaient être réorganisées sous forme collective, leurs excédents étant destinés à soutenir les besoins de la guerre. Ce faisant, le FRELIMO profiterait de l’appui de la paysannerie, acquis préalable à la création d’un support pour une guerre “populaire prolonguée”150.

On est ici devant la bataille pour la représentativité, qui constitue l’essentiel de toutes les luttes politiques ; elle en constitue l’élément structurant. Mais les luttes pour le pouvoir ne peuvent être appréhendées en dehors de la compétition des acteurs politiques, de leurs stratégies de mobilisation de ressources. E. MONDLANE, dans sa qualité de leader de l’organisation anticoloniale, chercha à en être le médiateur. Pour ce faire, tout en respectant l’exigence du bloc de L. N’KAVANDAME, un Congrès a été mis en agenda. Attaché à un discours ambigu, L. N’KAVANDAME et ses alliés n’ont toutefois pas coopéré dans le sens de mettre son orientation politique à l’épreuve de l’opinion générale. Au contraire, il entreprit de mobiliser les Chairmen pour qu’ils ne participent pas à cet événement. Il essaya en outre de convaincre ses amis politiques que le but de leur lutte était de former un Etat entre les fleuves Rovuma et Lurio. Ce projet amènerait à la désintégration du Mozambique.

Toutefois, le Congrès se réalisa en juillet 1968 à Macthecthe, à Nyassa ( Mozambique). La rupture est devenue inéluctable. Les différences opposant diverses fractions de l’élite furent l’objet du Congrès du FRELIMO. Il a légitimé l’orientation soutenue par les politiques-militaires. La lutte armée a été réaffirmée comme un processus nécessaire, qui devait déboucher sur la formation d’un Etat unitaire. La réorganisation du centre du pouvoir et la mise en place du système hiérarchisé des rôles seront un construit politique, destiné à des buts précis : d’abord, étouffer les tendances favorisant le particularisme ethnique ; ensuite, permettre au groupe qui prônait l’idéal de l’Etat unitaire la maîtrise du Mouvement, dans le cadre d’intégration, de cooptation et d’alliances complexes entre le noyau central de l’organisation et les fils de plusieurs espaces ethniques. Par ailleurs, cet événement a abouti à la légitimation du courant marxiste, tel qu’en témoigne E. MONDLANE, alors Président du FRELIMO :

‘Je suis maintenant convaincu que la ligne politique du FRELIMO est plus claire que jamais... La base commune que nous tous avions au moment de la formation du FRELIMO résultait du colonialisme et de la conviction que nous avions qu’il fallait détruire la structure coloniale et établir une nouvelle structure sociale. Mais quel type de structure, quel type d’organisation personne ne le savait. Non, il y en avait quelques-uns qui savaient, avaient des idées, mais ils avaient seulement des notions théoriques qui se sont elles-mêmes transformées au cours de la lutte. Mais maintenant, il y a une transformation qualitative de la pensée qui s’est développée pendant ces six années passées et j’en conclus qu’aujourd’hui le FRELIMO est plus socialiste, révolutionnaire et progressiste que jamais, et notre ligne est chaque jour plus orientée vers le socialisme marxiste-léniniste. Pourquoi ? Parce que dans les conditions de vie au Mozambique, notre ennemi ne nous laisse pas le choix. Je pense, sans compromettre le FRELIMO, qui jusqu’à ce moment n’a fait aucune déclaration officielle se réclamant du marxisme-léninisme, que notre mouvement va de plus en plus dans cette direction, de par les conditions dans lesquelles nous travaillons et combattons151.’

En réfléchissant sur ce processus, Hans Abrahamsson et Anders Nilson152 reprirent le mode de raisonnement relevant du paradigme de classes. Ils ont cependant réussi à développer une hypothèse prometteuse, dans l’effort du dévoilement des mystères politiques dans les sociétés à plusieurs ethnies. Selon ces chercheurs, le conflit décrit comme une conséquence de l’opposition entre les groupes « ‘révolutionnaire’ et ‘réactionnaire’, entre groupes représentatifs de classes opposées, celle de la bourgeoisie et celle de la classe exploitée », était un phénomène bien complexe. D’après H. Abrahamsson et A. Nilson, cette interprétation masque le fait qu’il y avait dans le mouvement de libération des désaccords dus à la fois à des questions ethniques, régionales et, voire, racistes153. Dans ce conflit, affirment-ils, un “révolutionnaire” ou un “réactionnaire” pouvait s’identifier simultanément à des croyances racistes/ethniques/régionales et cette question n’a été résolue que sur le plan politique. L’indépendance acquise, elle devint un problème à dimension nationale.

Pertinentes dans le cadre des traditions interprétatives respectives, ces approches n’aident néanmoins pas à rendre compte d’un aspect fondamental. Qu’elles aient eu comme base l’ouverture de la part des puissances coloniales au pluralisme politique154 ou entraînées par la nature fasciste d’autres155, les luttes de libération en Afrique furent animées par la croyance à la formation des systèmes de pouvoir. Les élites qui prirent le rôle du leadership voulurent que de tels mouvements s’appuient sur des organisations unitaires. Et cela dans un contexte bien précis : celui de la texture multiethnique de leurs sociétés ; de la convergence des groupes sociaux appartenant à de diverses structures sociales, relevant d’historicité et de systèmes de représentations différentes. La réaction de L. N’KAVANDAME et du bloc respectif après le deuxième Congrès du FRELIMO témoigne, semble-t-il de ce phénomène :

‘Il y avait des chairmen à Cabo Delgado, qui travaillaient avec les Commissaires politiques au niveau de la province. A l’époque, L. KAVANDAME était le Secrétaire provincial de Cabo Delgado. Les chairmen ont commencé à mobiliser la population et des milices qui travaillaient dans les districts et dans les cercles. L. N’KAVANDAME a mobilisé ces gens-là. Ils voulaient se battre avec nous, les forces du FRELIMO. Nous nous sommes opposés à cela car nous savions que notre ennemi était le colonialisme. Dès lors, le groupe de NKAVANDAME a entrepris de bloquer la frontière de Tanzanie : des matériaux, des médicaments ne pouvaient parvenir dans les bases. Notre commandant-adjoint des opérations est sorti de Nachingwea (Tanzanie) pour aller à Cabo Delgado pour assurer le ravitaillement des guérilleros. Les milices de L. NKAVANDAME ont encerclé notre commandant et l’ont tué. Ayant commis cet assassinat, L. NKAVANDAME et ses milices se sont alliés aux portugais156.’

L. N’KAVANDAME était manifestement devenu scissionniste car il souhaitait la création d’un Etat entre les fleuves Rovuma et Lurio, au Nord du Mozambique. Pour cela, il comptait sur l’appui de certains segments de son peuplement d’origine, N’Tuche, du plateau de Mueda, aussi bien que celui des chefs traditionnels, les chairmen. Mais son projet a été esquissé dans un cadre de rapport de forces qui lui était d’autant défavorable qu’il a dû passer au camp des Portugais, pour qui il devint une précieuse ressource d’action politique157. E. MONDLANE a été tué en février 1969 par un livre piégé, dans un contexte où les Portugais avaient renforcé leur capacité d’infiltrer leurs agents dans le FRELIMO. N’ayant pas éclaté, le CC créa une présidence collégiale, formée par U. SIMANGO, S. MACHEL et M. dos SANTOS, afin de s’occuper des affaires de l’organisation.

Le mouvement de libération doit donc être appréhendé comme un cadre d’interaction des structures sociales variées, comme un système de pouvoir en construction. Les crises ou les tendances au dysfonctionnement qui en découlent, peuvent être saisies en faisant appel tant au système de valeurs qui y prit corps qu’aux stratégies de leurs acteurs par rapport aux dynamiques internes du système politique. La question n’est nullement dépourvue de pertinence car, selon Bertrand Badie, toute organisation suppose, pour fonctionner, aussi bien la construction d’un centre (ou un noyau) politique que la mise en place d’un système de rôles. L’accomplissement de ceux-ci rend nécessaire la différenciation de statuts des individus et des groupes sociaux aussi bien que la régularisation des rapports entre eux. Support nécessaire à l’entretien de ce système de rapports politiques, la division progressive du travail social dans l’organisation rend ce centre politique une structure de contrôle d’allégeances, de coordination et de réintégration158.

Comme dans n’importe quel espace politique, à l’origine de ces affrontements il se trouvait, non pas un rapport conflictuel entre classes bourgeoise et prolétarienne se disputant les enjeux politiques, mais des fractions de l’élite. En fait, elles étaient partagées par des perspectives politiques opposées quant à ce qui devait être l’aboutissement de la lutte anticoloniale ; plus une imposition des différences de parcours historiques qu’une vraie situation de conflit de classes. Cela tenait au fait que ces groupes opposés puisaient dans leurs cheminements historiques des modèles politiques pour donner suite à leurs pratiques.

Il semble qu’il y ait des liens entre la formation de ce centre du pouvoir “marxiste-léniniste” et nombre de dissidences survenues dans le Frelimo entre la fin des années 1960 et le début des années 1970. Ceux qui ont eu le choix, s’exilèrent au Kenya, aux Etats Unis, en Allemagne et dans d’autres pays. Urias T. Simango, nationaliste, vice-président du FRELIMO dès sa fondation à l’assassinat de MONDLANE, fut suspendu en novembre 1969. Exclu du FRELIMO le 14 mai 1970 au nom de ses connexions avec le bloc des « réactionnaires » et de la nécessité de la centralisation du leadership, le sommet du FRELIMO resta sous le contrôle de S. MACHEL, Président, et de M. dos SANTOS, vice-président159.

Les lectures de ce processus politique sont partagées. Selon Urias Simango, la lutte était destinée à supprimer aussi bien le système colonial que le droit d’un groupe déterminé à opprimer et à exploiter les autres. Il fallait reconnaître l’égalité des droits à toutes les tribus durant la guerre et après l’indépendance. Ces objectifs, écrit Simango, pouvaient être réalisés sans conflits idéologiques ou de classes, parce que la priorité devait être la lutte anticoloniale, qui devait rassembler toutes les forces sociales, indépendamment de leurs conditions économique et religieuse160.

Samora Machel, tout en représentant le groupe qui a réussi à monopoliser le pouvoir et donc le rôle de coordinateur du système de rapports sociaux, avance l’explication suivante :

‘En l’absence de la solidarité ethnique, la seule base réelle favorisant l’unité nationale c’était la solidarité des classes ; une définition correcte des objectifs de la lutte supposait une correcte définition de l’ennemi. La question fondamentale de la révolution c’était la question du pouvoir populaire, le seul qui pouvait dépasser et détruire les divisions régionales, raciales et religieuses. Le pouvoir populaire n’est pas partageable par les groupes ethniques, raciaux, par les religions ou provinces. Le pouvoir populaire est unitaire et non pas pluriel ; le pouvoir de la classe travailleuse est dirigé par son Parti, le Frelimo161. ’

Bien que le concept de “classe” manque de précisions par rapport à la réalité mozambicaine, la pensée de S. MACHEL justifie la concentration du pouvoir par le groupe contrôlant le mouvement de libération. Cette stratégie politique renvoie à la hypothèse de Joseph Staline, qui affirme que là où n’existe pas de pluralité de classes il ne peut y avoir de pluralité de partis, car un parti n’est qu’un fragment de classe1 62. A ce stade, en tant que théorie de rapports politiques, le marxisme-léninisme devint un support de la création d’un parti-Etat, dont le programme sera, on le verra, non seulement de mener à bien la lutte de libération, mais aussi la création de l’Etat-nation.

Les données rassemblées jusqu’ici ont mis en lumière l’origine du marxisme-léninisme dans le contexte mozambicain. Il ne s’agissait pas d’un système de croyances socialement déterminées, tel que le prône Karl Marx, par le phénomène de scission de la société en bourgeois et prolétaires, étant fondé sur une base économique industrielle et capitaliste. L’explication de Raymond Aron sur les attraits du marxisme-léninisme et du communisme dans les pays sous-développés n’est pas non plus satisfaisante. Selon lui, “historiquement, le communisme conserve une signification progressiste, partout où les élites dirigeantes sont inférieures à leur mission, c’est-à-dire ou bien maintiennent une structure plus ou moins féodale ou bien ne poussent pas assez rapidement l’équipement du pays”163.

L’établissement des liens entre la condition du sous-développement et l’option marxiste-léniniste en l’occurrence, n’épuise donc pas l’explication des facteurs qui en sont à l’origine. Dans le contexte du Mouvement nationaliste mozambicain l’adoption du marxisme-léninisme serait due au risque de son éclatement, en tant que cadre d’action collective. Cette possibilité pourrait être entraînée comme un corollaire de sa précarité, suscitée par des affrontements et des conflits entre acteurs - les différentes fractions de l’élite - poursuivant des stratégies contradictoires164.

Si l’on saisit ce phénomène sous cet angle, l’adoption du marxisme-léninisme par le FRELIMO s’inscrirait dans ce que Pierre Ansart tient pour l’idéologie stratégique au profit d’une stratégie politique165. Elle apparaît ainsi comme un appareil symbolique remplissant des fonctions stratégiques au sein même du Mouvement menacé par les conflits. Ayant butté sur des dangers à l’encontre de l’existence du pouvoir naissant, les entrepreneurs de ce changement eurent recours au marxisme-léninisme comme un moyen pour figer les conflits dans une logique persuasive.

A ce titre, cette idéologie fut accaparée et proclamée par le groupe de dirigeants intéressés à exercer cette fonction d’imposition. Ainsi, elle s’avéra une ressource légitimant l’ordre et la structure du pouvoir hiérarchisé, où chacun est tenu d’accomplir son rôle et son rang, au profit de l’action collective - la lutte anti-coloniale. Action organisée sur cette base idéologique, le marxisme-léninisme fut également pris par le pouvoir émergeant comme un instrument contribuant tant à la définition, la préparation, qu’à la mise en oeuvre du programme politique du Mouvement. Ainsi, l’indépendance obtenue, il sous-tendra la vision tutélaire et “unifiée” de l’Etat, qui prendra à sa charge à la fois la fonction décisionnelle et organisatrice166 de la société.

“Produit” et imposé par “le haut”, en tant que théorie d’organisation de rapports sociaux, le marxisme-léninisme ne fut donc pas un résultat de l’imbrication de son symbolisme avec les représentations des acteurs sociaux. C’est pourquoi, semble-t-il, il ne parviendra pas à créer des supports légitimables pour le modèle de rapports sociaux qu’il proposa. Ceci explique également la difficulté de mettre en place un système de rôles typifiés et institutionnalisés, dans l’articulation entre gouvernants et gouvernés. Raisonnant autrement, la structuration du système se présentera inachevé, d’où le recours à l’imposition des contraintes de l’ordre bureaucratique pour assurer la mise en oeuvre de ses programmes politiques.

La comparaison d’autres contextes de Mouvements de libération à celui du Mozambique semble témoigner du fait que le marxisme mozambicain fut plutôt une idéologie stratégique, une idéologie d’un système de pouvoir. A ce titre, il fut une armature sous-tendant à la fois la suppression de la concurrence politique d’autres fractions de l’élite et la destruction de la société traditionnelle ; il s’agissait d’une théorie du pouvoir, d’une lecture politique permettant le monopole du centre organisateur de rapports sociaux par une fraction de l’élite. Si d’une part, cette théorie était à l’opposée de la totalité des socialismes africains, d’autre part, elle contenait des ressemblances avec la pensée de Mao Tsé-Tung.

Qu’ils soient attribués à L. Senghor, à S. Touré, à J. Nyerere ou à d’autres personnalités africaines, mis à part les nuances, les courants relevant du socialisme africain ne furent qu’une théorie de rapports de domination. Renvoyant les articulations politiques de nature conflictuelle à des représentations de sociétés capitalistes, les tenants du socialisme africain s’inspirèrent de l’univers de la société traditionnelle africaine. Ils y ont puisé des supports de l’ordre social pour décourager des soulèvements à l’encontre des systèmes de pouvoir mis en place. Le refus de l’existence des identités sociales diverses, la mise à l’écart des forces sociales du cadre du jeu politique, la glorification du mythe d’exemplarité de la société traditionnelle africaine, en constituent des traits essentiels. Ainsi, selon J. Nyerere :

‘Quand une société est organisée pour veiller au bien-être de ses membres, nul, pourvu qu’il soit disposé à travailler, n’a pas à se soucier de ce qui lui arrivera demain s’il n’amasse pas la richesse. La société veille sur lui, sa veuve et ses orphelins. La société africaine traditionnelle était parvenue à ce résultat. Riches et pauvres y étaient les uns et les autres en sûreté. Les catastrophes naturelles entraînaient certes la famine. Mais la famine existait pour tous, riches comme pauvres. Nul n’existait privé de nourriture ou de dignité humaine par simple manque de richesse personnelle. Chacun pouvait compter sur la richesse de la communauté dont il était membre. C’était le socialisme. C’est le socialisme. Le socialisme ne peut être tourné vers le profit, car il y a contradiction entre les deux termes. Le socialisme est par essence distributif. Son but est de veiller à ce que celui qui sème recueille une juste part de la récolte. Nous autres en Afrique n’avons pas plus de besoin d’être convertis au socialisme que d’être initiés à la démocratie167.’

On voit également dans la pensée du socialisme africain le souci de rendre l’espace public pacifié. Car, d’après les théoriciens de cette pensée, les rapports entre différentes identités sociales, l’articulation de gouvernés au politique doivent tenir l’éthique des sociétés traditionnelles pour une référence. Ainsi, écrit Nyerere “Le vrai socialiste ne considère pas les hommes d’une classe comme ses frères et ceux d’une autre classe, comme ses ennemis naturels. Il ne fait pas alliance avec ses frères pour exterminer les autres. Il considère tous les hommes comme ses frères, comme les membres de sa famille toujours en expansion”168. Dans une réflexion semblable, S. Touré affirme que le socialisme guinéen prétend négliger la lutte des classes. Le marxisme a été amputé de cet élément pour permettre à toutes les couches sociales africaines d’engager ensemble la lutte générale anticolonialiste. Car l’Afrique est essentiellement communaucratique. La vie collective, la solidarité sociale, donnent à ses habitudes un fond d’humanisme que beaucoup de peuples peuvent envier169.

Le glissement vers l’idéologie socialiste au Mozambique s’est opéré dans le cadre de la guerre, qui fut la source de sa spécificité d’idéologie stratégique. Aux antipodes du socialisme africain, l’élite gestionnaire de la guerre anticoloniale concentra en soi les rôles de porteur de science, de conscience sociale et professionnelle de la politique. Sur cette base, elle parvint à s’imposer comme le noyau politique ; le marxisme-léninisme en tant qu’un ensemble de représentations extérieures à la masse en fut la théorie de réorganisation de rapports sociaux dans le camp politique, dans un contexte de guerre. Moyen pour la conquête du pouvoir, cette violence organisée a généré quelques ressemblances entre le processus politique chinois et mozambicain.

Dans le premier cas, la lutte eut la guerre pour forme principale et son organisation s’est basée sur l’armée rouge, placée sous la direction absolue du Parti communiste. Cette armée s’appuyait sur les masses paysannes car elles étaient les bases rurales qui permettaient aussi bien son avance que l’encerclement des villes170.

Dans le cas mozambicain, tout en réfutant le principe de neutralité, la primauté du politique fut imposée dans le système du pouvoir structuré dans les zones conquises par le FRELIMO. Tous les secteurs de l’Organisation devaient se subordonner au politique. Dès lors, il était question tant pour les civils que par les militaires d’accomplir des tâches politiques et militaires171.

Ainsi, le noyau du pouvoir entama tout un processus de réorganisation du Mouvement visant à rendre possible l’articulation intersectorielle. Les activités économiques menées pour les paysans devaient être poursuivies sous forme collective, telles les coopératives et fermes du peuple. Outre leurs besoins, ils devaient assurer l’approvisionnement de l’armée.

Les conséquences politiques de ce processus furent inéluctables. Tenus pour agents de la déviance des allégeances des paysans par rapport à l’ordre structuré, les chefs traditionnels furent condidérés comme des cibles à détruire. Dès 1968, ils étaient donc exclus de l’exercice de leurs fonctions communautaires. Toute “opposition” au marxisme en tant que théorie formelle de l’organisation de rapports sociaux sera tenue par le centre du pouvoir pour une manifestation de l’ennemi ou du groupe aspirant à la condition sociale de la bourgeoisie. Le renforcement du pouvoir du noyau politique allait donc de pair avec l’exclusion de ceux qui ne sont pas parvenus à se convertir à la doctrine imposée. Samora MACHEL semble témoigner de cette pratique. Selon lui, “après le colonialisme, un des ennemis principaux est le tribalisme, même si naturellement c’est part de tous autres moyens qu’on lutte contre lui”172 .

Mais les dynamiques qui s’opérèrent dans le Mouvement de libération n’épuisent pas, à elle seules, l’explication de l’adoption du marxisme-léninisme par la direction du FRELIMO. Au carrefour de l’interaction des intérêts des Etats les plus puissants, la lutte de libération ne pouvait aboutir en dehors du cadre d’alliances internationales possibles.

A ce sujet, deux facteurs se présentaient en défaveur du FRELIMO. Premièrement, la guerre anticoloniale se déroula lors de la bipolarité. A l’époque, tel que le constate J. W. Lapierre, deux systèmes économiques internationaux se disputaient l’hégémonie173. Puisque cela allait de pareillement avec la lecture bipolarisée à l’égard des luttes de libération, cette concurrence explique que certains pays tenaient les mouvements anticoloniaux pour des manifestations de la guerre froide, tandis que d’autres y voyaient la revendication de la part des colonisés du droit à l’autodétermination.

Deuxièmement, la capacité diplomatique du Portugal de se créer des alliés au profit de la stratégie de faire face aux guerres de libération en Angola, en Guinée-Bissau et au Mozambique, aboutit à l’engagement de nombreux pays dans la question coloniale.

En effet, lorsque le MPLA174, en Angola, le PAIGC175, en Guinée-Bissau, et le FRELIMO, au Mozambique, firent éclater les guerres anticoloniales au début des années 1960, le régime de A. Salazar fut contraint d’engager des forces armées de quelque 180.000 hommes. Les guerres acoloniales ont amené le Portugal à avoir un budget militaire atteignant près de la moitié de son budget total176. Heurté à l’insuffisance de ressources pour subvenir à ses besoins, il organisa l’exploitation de ses colonies autrement. Cela se fit au profit de la mobilisation de capitaux étrangers : de l’Europe occidentale et de l’Afrique du sud, ce dernier pays animant depuis 1964 l’idée d’un marché commun en Afrique australe.

C’était grâce à cette capacité de la part du FRELIMO de redéfinir son orientation politique, d’une part, et la recherche de son insertion internationale, d’autre part, qu’il s’est en quelque sorte renforcé. En effet, il fut capable de faire face à la plus importante offensive militaire portugaise - le “nœud gordien” -, lancée en 1970, sous le commandement du Général Kaulza d’ARRIAGA pour “liquider le FRELIMO en quelques semaines”177. Pour cela, le Gouvernement portugais avait mobilisé “entre 35.000 et 50.000 soldats, sans compter les chasseurs spéciaux et les commandos, équipés de 15.000 tonnes d’armement. De plus, un grand nombre d’avions à réaction, de bombardiers et d’hélicoptères, de chars blindés et de chars antimines furent également mobilisés178. De la part du FRELIMO, il y avait 6.000 guérilleros armés, parmi d’autres armes, avec des mines russes et chinoises179.

Malgré l’intensité des attaques de la part de l’armée portugaise, le Frelimo a pu résister. De plus, sa réussite à ouvrir, à partir des années 1970, d’autres fronts de combats dans les provinces au sud de la vallée du Zambèze180 a démontré sa solidité en tant qu’entreprise politique. Du coup, la guerre anticoloniale devint coûteuse et socialement insoutenable pour le Portugal. Si à l’heure de son déclenchement elle absorbait 28,7% des dépenses publiques, en 1970 le coût de la violence armée pour maintenir l’entreprise coloniale était estimé à 44,4% (soit 9% du PIB)181.

De surcroît, le fait que le Portugal ait à faire face aux guerres anticoloniales à la fois en Angola, en Guinée-Bissau et au Mozambique creusa son dépouillement, au point de susciter en Métropole (Lisbonne) un mouvement d’hostilité au régime de Marcelo CAETANO. En effet, le Mouvement des Forces Armées (MFA) se constitua au Portugal sous le leadership du major Otelo SARAIVA. En vertu du soutien dont il bénéficiait dans le contexte de crise sociale, celui-ci parvint le 25 avril 1974 à faire un coup d’Etat. Tout en représentant le début d’un nouveau contexte politique, cet événement déclencha des processus politiques destinés à créer des consensus pour le cessez-le-feu. De plus, il visait l’établissement des accords qui conduirent les trois colonies portugaises en Afrique à l’indépendance.

Notes
1.

14 Voir notre réflexion supra.

1.

15 D’après certains chercheurs occidentaux, « l’Etat est définit comme une forme instituée du pouvoir légitime qui dispose d’un ensemble d’instruments de contrôle et de coercition par lesquels s’établit et se prolonge l’intégration interne de la société nationale et l’activité extérieure de la nation comme unité politique » ; pour d’autres, L’Etat est « Le pouvoir monopolisateur de la coercition légitime au sein de la société globale » ; ou, s’inspirant d’une perspective institutionnaliste, « Ensemble territotial organisé, envisagé comme sujet de Droit international (les Etats membres de l’ONU) ». Voir WEBER, M., cité, LACROIX, Bernard, « Ordre politique et ordre social », GRAWITZ, M.-LECA, J., Traité de science politique, vol. I, Paris, PUF, 1985, pp. 469-565, p. 479 ; BURGI, Noëlle, Fractures de l’Etat-Nation,….op. cit., p. 212 ; BRAUD, Philippe, Sociologie politique….op. cit., pp. 550-551.

1.

16 LACROIX, Bernard, ibidem., pp. 475-476.

1.

17 Il est intéressant de retenir, au sujet des motivations de cette lutte pour le pouvoir, la réaction (à l’époque) d’Artur VILANKULU, représentant du Comité Révolutionnaire du Mozambique (COREMO), aux Etats Unis : Sans vouloir m’engager dans la querelle idéologique Est-Ouest, je tiens comme une erreur grave l’attitude de juger le nationalisme africain comme le résultat de l’influence de l’Est ou de l’Ouest. Ces blocs devraient comprendre que nous nous battons pour la liberté et l’indépendance. Associer la lutte du peuple Mozambicain à « l’influence communiste » n’est qu’une conséquence du manque de connaissances sur l’essence du nationalisme africain. Face au rejet du gouvernement portugais à la négociation d’une solution pacifique du conflit colonial, la lutte est le seul langage de communication. Nous ne voulons point être considérés comme des citoyens portugais dans notre pays , Cf. VILANKULU, Artur, « Carta ao New York Times, que não foi publicada, en resposta a um artigo e enviada a 6 de Abril de 1972 por Artur VILANKULU, representante do Comité Revolucionário de Moçambique (COREMO) para os Estados Unidos », in BRAGANÇA, Aquino et al. Quel é o inimigo…op. cit., p. 177-180.

1.

18 Cf. MACHEL, Samora, « crítica et auto-crítica da luta de libertação », ….op. cit., pp. 3-4.

1.

19 Cf. MACHEL, S., idem.

1.

20 Voir CROZIER, M. –FRIEDBERG, E, L’Acteur et le système : Les contraintes de l’action collectiveop. cité. ; CROZIER, M., Le phénomène bureaucratique,…op. cit.

1.

22 Cf. FRIEDBERG, E., Le Pouvoir et la Règle : Dynamique de l’action organisée….op. cit., pp. 111-112.

1.

23 E. Friedberg nous renvoie à un raisonnement similaire lorsqu’il parle sur l’aspect suivant : « Des relations de pouvoir comprises comme des échanges négociés de comportement ne sont donc pas seulement, ni même le plus souvent, conflictuelles. Dès leur création, elles incluent aussi toujours une dimension collusive, dans la mesure même où chaque joueur, pour améliorer sa propre position de négociation, cherchera à réduire les possibilités de choix de ses partenaires, et contribuera ainsi, plus ou mois consciemment et volontairement, à la stabilité de la relation. Il y a d’autant plus intérêt que cette stabilité correspond pour lui à une stratégie minimale : faute de mieux, elle lui assure au moins le maintien des bénéfices qu’il en retire. C’est ici que le mécanisme du jeu entre en scène et qu’il a lieu la structuration sociale du champ », cf. FRIEDBERG, E, Ibidem., pp. 129-131.

1.

24 La guerre contre une armée dont les effectifs, à l’époque, étaient estimés à 35000 hommes (Cf. CHRISTIE, I, Samora. Uma biografia…op. cit., p. 75) , bien armés ; le besoin d’intégration des populations et de l’organisation des guérilleros.

1.

25 Etant parvenu au pouvoir par la voie révolutionnaire, Mao Tsé-toung s’est consacré à la conceptualisation de plusieurs pratiques de son organisation politique. Pour lui « Notre principe est le suivant : le parti doit être au commandement de l’armée ; l’armée doit se fondre avec le peuple, de sorte que le peuple identifie en lui sa propre armée ». Bien que S. Machel ne l’affirme pas catégoriquement, le recours à des emprunts de techniques d’organisation est en quelque sorte reconnu. D’après lui, « l’idéologie politique du FRELIMO s’est affirmée comme un construit originel et enraciné dans la réalité mozambicaine. Sans nier le modèle soviétique (de l’époque), chinois ou cubain –dont les expériences révolutionnaires, s’ils se présentent pertinentes, sont mises en valeur dans le contexte mozambicaine, l’idéologie du FRELIMO émerge de la pratique. Pour le FRELIMO, l’époque de modèles, imités à la rigueur, est déjà dépassée », cf. MACHEL, S., « Crítica e auto-crítica da luta de libertação », …op. cit., p. 6 ; voir « Citaçoes do Presidente Mao Tsetung », Tempo n°311, 19 de Setembro de 1976, pp. 57-64.

1.

26 Outre le responsable, participaient au Comité exécutif les titulaires de plusieurs postes, notamment le chef de la production, de l’éducation, de la santé, du commerce, de la défense, du service de transports, cf. GUEBUZA, Armando, « Como se organiza a FRELIMO », Tempo n°210, 6 de Outubro de 1974, pp. 60-64.

1.

27 La mise entre guillemets du terme populaire c’est pour retenir l’attention de la lectrice/du lecteur au sujet de la nature problématique de ce concept. Pour nous, l’opinion populaire n’existe pas. Le recours à la consultation des gouvernés cache l’inégalité de ressources à l’aide de laquelle, certains acteurs, parce qu’influents, participent au processus décisionnel.

1.

28 Cf. GUEBUZA, A., art. cit., p. 61.

1.

29 Cf. DUVERGER, M., Les partis politiques….op. cit. Voir aussi ROY, Maurice, Les regimes politiques du Tiers Monde….op. cit., pp. 343-344.

1.

30 Janet Rae MONDLANE, l’épouse d’E. MONDLANE, fait état de cette pratique en avouant qu’elle « s’est rendu compte de la différence entre les paysans macondes du Nord du Mozambique et les éduqués en provenance du Sud. Les premiers constituaient la plus grande partie de réfugiés jusqu’en 1965 et 1966. Les seconds, qui venaient d’arriver en exil ont eu le choix politique d’interrompre leurs études pour rejoindre la lutte de libération. Ils ne parlaient pas le même langage car ils ne venaient point du même environnement économique, social et culturel. Ils ont représenté une puissante contribution en termes de ressources intellectuelles pour la lutte », Cf. MONDLANE, Janet Rae, cité, MANGHEZI, Nadja, O meu coraçao esta nas maos de um negro…op. cit., pp. 260-261. Outre leur niveau d’instruction, rappelons que les réfugiés en provenance du sud avaient eu une certaine expérience de lutte anticoloniale dans le cadre des Associations civiques, crées à Lourenço Marques. Faut-il retenir qu’un bon nombre de ces réfugiés ont été affiliés au NESAM, organisation dont la création a été redevable à l’influence d’E. MONDLANE. Par ailleurs, le témoinage de Janet MONDLANE ne contredit l’interprétation de S. MACHEL, lorsqu’il parle de l’inexpérience des tenants de plusieurs postes dans l’organisation anticoloniale en matière de mobilisation politique et du décalage qui existait entre le sommet et la base. Voir page 280 (note 119) de ce travail.

1.

31Voir le chapitre II.

1.

32 Cf. MONDLANE, E., “A questão tribal na fase avançada da luta”, (Réponse à une question posée à E. MONDLANE, President du FRELIMO, dans une interview. Celle-ci a été faite en 1969, une semaine avant son assassinat, et publiée après dans la révue Tricontinental, n°12, Maio-Junho de 1969), in BRAGANÇA, Aquino et al. Quem é o inimigo…op. cit., p. 197-200.

1.

33 Cf. MACHEL, Samora, cit., « A partir do dia 25 »,Tempo n°363, …art. cit., pp. 46-49.

1.

34 Entendus comme ressource d’action, ces liens se présentent sous des formes variées, - trajectoire, niveau d’instruction, parenté, fidélité aux même idéaux politiques, rapports clientélaires - touts concourant pour des relations politiques.

1.

35 Il nous paraît intéressant de relever la restructuration de l’armée du FRELIMO en octobre 1966. On a décidé d’établir une haute instance de commandement de l’armée, fonctionnant à partir de l’Etat-major. Détachée des services de sûreté, qui jusqu’alors étaient sous le contrôle de l’armée, celle-ci sera sous le contrôle du Département de défense. Un Conseil national de commandement a été mis en place. Cet organe était composé par douze sous départements concourant à l’efficacité de l’appareil militaire : le Comissariat politique, les chefs des opérations, le recrutement et entrainement, la logistique, l’espionnage, le service de communications, le service de publications militaires, de l’administration, de finances, de santé, du personnel et celui de milices populaires. Cette structure a été également établit dans chaque province où se déroulaient des activités militaires, mais subordonné à l’Etat-major et au Conseil National de Commandement de la guerre. Cf. CHRISTIE, I, Samora. Uma biografia…op. cit., p. 80 ; FRELIMO : Documentos base da FRELIMO, Maputo, Tempografica, 1976, 282p, p. 87.

1.

36 D’après K. Marx, touts les rapports sociaux de domination ou de subordination politique et les superstructures idéologiques sont fondamentalement déterminées par les jeux de classes, issus de la participation à la propriété, de moyens de production et d’échange. Pour une critique plus approfondie, voir RIVIERE, M. Ed., Classes et stratification sociales en Afrique : le cas guinéen, Paris, PUF, 1978, 245p

1.

37 On s’est consacré à la critique des travaux de ces chercheurs dans l’introduction. Voir par exemple CAMPBELL, Bonniek, Libération nationale et construction du socialisme en Afrique (Angola, Guiné-Bissau et Mozambique)….op. cit. ; SAUL, John, “FRELIMO and the Mozambique Revolution” in ARRIGHI, Giovanni and SAUL, John S. (Editors), Essays on the Political Economy of Africa, London, Monthly Review Press, 1973, pp. 52-87 ; MUNSLAW, Barry, MOZAMBIQUE, The revolution and its origins……..op. cit. ; MUNSLAW, Barry (Edited by), Samora MACHEL, an African revolutionary (selected speeches and writings), London, 1985, 210p ; AFRICA : Problem in the transition to socialism……op. cit. ; EGERO, Bertil, “Peoples Power : The case of Mozambique”…..op. cit. ; MOÇAMBIQUE, Os primeiros dez anos da democracia, Maputo, AHM, 1992, 272p.

1.

38 Cf. MUNSLOW, B., MOZAMBIQUE. The Revolution and its Origins……op. cit., p. 91.

1.

39 Il s’agissait du poste le plus important dans la région. L. N’NKAVANDAME était donc au sommet de l’organisation au niveau de la province de Cabo Delgado.

1.

40 Voir OLSON, Mancur, Logique de l’action collective, Paris, PUF (1966), 1987, 287p ; voir également OLSON, M. cit., REYNAUD, Jean-Daniel, Les règles du jeu. L’action collective et la régulation sociale….op. cit., p. 67

1.

41 Voir MARCH, James G & OLSEN, Johan P., Rediscovering Institutions : The Organizational Basis of Politics, New York, A division of Macmillan, Inc. 1989, 320p, pp. 4-8.

1.

42 Voir à ce propos le chapitre II.

1.

43 Cf. MASSANO, Lino, cit., “Seis Combatentes”, Tempo n°304, …op. cit., pp. 23-31, p. 30. D’autres sources ne sont pas contradictoires à ces références. Voir par exemple « Eduardo Mpebo : a experiência de um veterano », Tempo n°654, 24 de Abril de 1983, pp. 17-18.

1.

44 Idem.

1.

45 Cf. MACHEL, Samora, « O povo quer, o povo exige que o seu Estado seja dirigido com disciplina : Discurso do Presidente Samora », Tempo n° 661, 12 de Junho de 1983, pp. 27-33, p28.

1.

46 Samora MACHEL est cité comme le dirigeant qui s’est batu pour améliorer le cadre de vie dans camps d’entraînement à Nachingwea et à Kongwa. Les guérrilleros eux-mêmes se sont apperçus de l’importance de se consacrer à la production agricole et à l’ouverture de puits, dotant ainsi ces camps de sources d’eau. Voir à ce propôs MOIANE, José, (Combatente veterano), « Uma direcçao sólida », Tempo n°677,….op. cit., p. 7 : MAKANGA, Alabi (Combatente veterano), « E um dirigente que dà exemplos », Tempo n°677, 2 de outubro de 1983, p. 4.

1.

47C’était le bloc dont dependait le commandement de la guerre. Entre autres, on y comptait les commandants Joaquim CHIPANDE, Raimundo PACHINUAPA, Sebastiao MABOTE, Cândido MONDLANE, MADENGO, MUTCHELE, Osvaldo TAZAMA et d’autres officiels, voir MOYANA, Salomao, « Em memoria do general Sebastiao MABOTE : Devemos distinguir guerrilha et terrorismo », SAVANA,art. cit.

1.

48 FRELIMO, II ème congrès, discours officiel du C.C., 1968, cit., VERSCHUUR, C. et all., op. cit., p. 41.

1.

49 Sur l’intérêt ou l’impertinence de ce concept, voir la note n°82

1.

50 CAMPBELL, Bonniek, op. cité, p. 77 et suiv.

1.

51 MONDLANE, Eduardo, cit., BRITO, L., op. cit., p. 22 ; Voir aussi la version portuguaise de cette prise de position de la part de MONDLANE, E., “A evolução da FRELIMO”, (Excerto de uma entrevista, até aqui nunca publicada, a Eduardo Mondlane, Presidente da FRELIMO, feita por Aquino de Bragança, gravada em Argel logo a seguir ao II Congresso em 1968 ), in BRAGANÇA, Aquino et al. Quem é o inimigo…op. cité, pp. 200-201.

1.

52 Cf. ABRAHAMSSON, Hans et NILSON, Anders, Moçambique em transiçao: um estudo da historia de desenvolvimento durante o périodo de 1974-1992. Maputo, CEEI-ISRI, 1974, 365p, pp. 32-35.

1.

53 Ce dernier aspect du problème découlait de l’engagement dans l’organisation anticoloniale des Blancs, également identifiés à la cause de la lutte contre le système portugais.

1.

54 Ce fut l’exemple de l’Angleterre et de la France

1.

55 On fait référence au cas du Portugal

1.

56 Cf. MWAKHONGUE, Martins, (Depoimento de um combatente do 25 de Setembro), « O povo é que vai saber a politica da FRELIMO », Tempo n°312, ….op. cit., pp. 25-32.

1.

57Accueilli par le Secrétaire-général, Commandat en Chef des Forces Armées et Gouverneur du District de Cabo Delgado, L. N’KAVANDAME fit publier dans la presse une lettre à travers laquelle il rend compte de son projet et de son projet politique. Il s’adresse ainsi aux populations Macondes, l’ethnie dont il est issu : « Ma présentation aux autorités portugaises : J’ai été bien reçu par monsieur Secrétaire-général, Commandant-chef des forces armées, Gouverneur du District de Cabo Delgado et beaucoup d’autres personnalités. Nous nous sommes convenus de mettre fin à la guerre dans le territoire appartenant au peuple Macondes. Pour cela, nous bénéficierons des autorités portugaises qui nous aiderons à établir des établissements commerciaux et développer notre région.

Le FRELIMO a trahi les Macondes. On va mettre fin au FRELIMO dans le territoire des Macondes. Venez vous présenter aux Postes ou à la Circonscription les plus proches car vous serez bien reçus. Le FRELIMO est fini dans notre territoire et la guerre va également terminer. C’est moi, le chairman L. NKAVANDAME, et je m’adresse à notre peuple, aux chairmen, pour que notre tribu connaisse enfin la paix. Je me suis déjà entretenu avec le Gouvernement portugais et notre problème a été déjà réglé. Vous serez bien reçus. J’ais confiance, tous les Macondes obéiront à cet appel et nous nous rencontrerons bientôt dans nos villages. Mort au FRELIMO. Vive aux Macondes Portugais ». Cette lettre a été publiée en portugais dans le bulletin du FRELIMO, Cf. « Lazaro Kavandame apresentou-se ao Governo Potuguês, porque a FRELIMO atraiçoou os Macondes », Mozambique Revolution, October-December 1970, n°45, p. 22.

1.

58 Cf. BADIE, Bernard, “Formes et transformation des communautés politiques”, in LECA, Jean - GRAWITZ, Madeleine (Sous la direction de) Traité de Science Politique, …op. cit., pp. 609-611.

1.

59 Voir “Editorial”, Mozambique Revolution n°43, April-June 1970, p. 3.

1.

60 Cf. SIMANGO, Urias T., “Situaçao sombria na FRELIMO”, in BRAGANÇA, Aquino e al., op. cit., pp. 206-207.

1.

61 Cf.MACHEL, Samora, cité, in Spectator, “The Mozambican revolution and the national question: for the nation to live the tribe must die”, The Africain Comunist,….art. cit., p. 33.

1.

62 Cf. STALINE, Joseph, cit., in SYLA, Lancine, op. cit., p. 262.

1.

63 ARON, Raymond, cité, BOTTOMORE, T. B., op. cit., p. 113.

1.

64 CROZIER, M.,- FRIEDBERG, E., op. cit., pp. 94-95.

1.

65 ANSART, Pierre, “Idéologie stratégique et stratégie politique”, in Cahiers Internationaux de Sociologie, Vol. LXIII, 1977, pp. 223-243, p. 223.

1.

66 Voir BRAUD, Philippe, “Du pouvoir en général au pouvoir politique”, in GRAWITZ, Madeleine - LECA, Jean (Sous la direction de), Traité de Science politique, ….op. cit., p. 384.

1.

67 NYERERE, Julius, cit., BENOT, Ives, op. cit., p. 203.

1.

68 Le raisonnement politique de Nyerere resterait inintelligible si l’on négligeait de retenir l’extrait suivant : “L’emploi du mot travailleur, dans le sens précis de salaire, opposé à patron, est l’expression d’une attitude d’esprit capitaliste. Il fut introduit en Afrique avec le colonialisme et est étranger à nos concepts. Jadis, l’Africain n’avait jamais aspiré à la possession d’une richesse personnelle destinée à la domination de ses concitoyens. Il n’avait jamais eu de main-d’œuvre ou d’ouvriers pour faire son propre travail. Puis vinrent les capitalistes étrangers, ils étaient riches et puissants. Les Africains voulurent aussi devenir riches. Il n’y a rien de blâmable dans le fait de désirer la richesse ni la puissance qu’elle peut supporter mais il est mauvais de désirer richesses et puissance pour dominer les autres. Malheureusement, certains d’entre nous se sont déjà mis à convoiter la richesse dans ce but, et aimeraient employer les méthodes capitalistes pour s’enrichir, certains d’entre nous souhaiteraient exploiter leurs frères pour édifier leur propre puissance et prestige personnel. Cette attitude d’esprit nous est parfaitement étrangère et incompatible avec la société socialiste que nous désirons construire dans ce pays (Tanzanie)” Ibid., p. 204-205.

1.

69 Cf. TOURE, Sekou, cité, CHATELET, François .PISIER-KOUCHNER, Evelyne, Les Conceptions politiques du XX ème siècle. Paris, PUF, 1981, 1081p, p. 520.

1.

70 Ibid., p. 536.

1.

71 MUNSLOW, Barry (edited by) Samora MACHEL, an africain revolutionary (selected speeches and writings). London, zed books, 1985, 210p, p. 53.

1.

72 BENOT, Ives, op. cit., p. 498.

1.

73 LAPIERRE, J. W., Systèmes politiques. Paris, PUF, 268p, p. 90.

1.

74 Mouvement Populaire pour la Libération d’Angola

1.

75 Parti Africain pour l’Indépendance de la Guiné-Bissau et Cap-vert.

1.

76 Cf. Benot, Ives, op. cit., p. 463.

1.

77 Cf. ARRIAGA, Kauza (Général), cité, MACHEL, Samora, op. cit., pp. 13-14.

1.

78 Ibid., p. 13. Selon d’autres sources, l’armée portugaise serait alors composée “par 40.000 hommes (dont la moitié seraient africains), faisant en moyenne cent dix opérations par jour”. Cf. GUERIVIERE, Jean de la, “Ventre mou de l’Afrique australe” In Le Monde, n° 8574, 9 août 1972, p. 4.

1.

79 Idem.

1.

80 Voir l’annexe 18 : Les bases du Frelimo en Tanzanie, en Zambie et au Mozambique.

1.

81 Cf. FERREIRA, Eduardo de Sousa, op cit., p. 44.