La rencontre des anciens et futurs adoptants porte massivement les deux messages suivants : ‘’Ils ont réussi et nous ne sommes pas seuls dans cette situation’’. Le traitement quantitatif des entretiens nous donne d’abord cette indication 370 : ce que les futurs adoptants reçoivent des anciens est un « soutien moral » comme le soulignent Monsieur et Madame CHAPUIS 371 : « Ils peuvent vous remonter le moral… parce qu’ils sont de bons conseils, ils vous aident moralement ; ils ont vécu tout ça donc, ils vous comprennent vraiment très bien ; et même quelquefois ils voyaient tout de suite quand ça n’allait pas, sans que je dise… ». Écoutons encore la force des discours, pour se laisser persuader qu’il y a bien là quelque chose d’essentiel : seuls ceux qui ont ‘’réussi’’ à adopter sont reconnus comme à même de témoigner.
Pour le futur adoptant, rencontrer un ancien ou quelqu’un ayant le même projet d’adoption relativise la situation d’exception dans laquelle il a l’impression d’être. Le ‘’je ne suis pas tout seul à être dans cette situation’’ dédramatise. « Ça a été les premiers à nous dire ‘’bon, vous n’êtes pas tout seuls’’ et ça c’était hyper-important » Ce sentiment de solitude, faut-il le rappeler, nous dit aussi que les relations avec les professionnels, aussi bonnes qu’elles aient été pendant la phase d’agrément, ne comblent pas ce sentiment ressenti par les postulants après l’obtention de l’agrément.
Ainsi, la présence même de l’autre est totalité dans ce qu’elle signifie de réussite possible parce que physiquement rencontrée ; « ils démontrent simplement du fait qu’ils existent que le projet peut aboutir » 372 . La rencontre provoque le « pourquoi pas nous » de Madame TISSERAND. Nous donnerons donc plusieurs extraits d’entretiens tant ils nous paraissent de première importance dans la compréhension de cette notion d’accompagnement que nous recherchons. Pour Madame PERRET, la rencontre avec des adoptants dans le cadre de EFA a été pour elle « un coup de fouet… qui lui a redonné espoir…. (et lui a permis de se dire) … au bout le bonheur de fonder une famille… et on aura la même joie ». C’est bien de « bonheur » dont il s’agit aussi dans l’extrait qui suit, « parce que, nous dit Madame FOURNIER, dans ces réunions (EFA) la mère adoptive qui a adopté raconte le bonheur du quotidien ». Monsieur et Madame PONCET mettent l’accent sur la rencontre avec la « réalité… voir la réalité d’une famille, savoir que ça peut aboutir… voilà, c’est ça, c’est un espoir, ça fait voir concrètement…». « On a rencontré une famille, nous explique Monsieur VERNE, ça nous a montré seulement qu’on allait y arriver, c’était le seul réconfort, et on s’est dit ‘’ces gens-là y sont arrivés, ils n’ont pas l’air plus malins que nous, ils n’ont pas l’air d’avoir plus de contacts que nous, donc nous on va y aller et on va y arriver’’ donc c’était plutôt ça : là, ils montrent le but ». Monsieur MARTIN ajoute une autre dimension à ces rencontres avec ceux qui ont déjà adopté : « Les adoptants ils ont les sentiments en plus, sentiments que les professionnels n’ont pas parce qu’ils ne sont pas dans la même situation, sentiments d’attente que les professionnels n’ont pas ». Pour ce couple, seuls seraient en mesure de comprendre vraiment ceux qui « sont passés par là » ; la meilleure empathie d’un professionnel ne pourrait y parvenir .
Terminons par les propos de Monsieur et Madame MASSON qui, étant allés chez un couple adoptant, ont vu pour la première fois ce qu’était une famille adoptante : « Madame : c’est Madame T. C’est leur rencontre, elle nous a narré l’histoire, on a vu les photos, c’est là que… oui, voilà il y a une vie de famille, ce petit cocon que je trouve fabuleux, ce petit garçon que je trouve adorable – Monsieur : et c’est là que tu as relativisé l’âge. – Madame : et surtout par le fait, elle m’a dit ’’, vous savez, on a l’impression qu’il a toujours été là’’ et ça c’est… ». Et Monsieur de dire que son épouse n’entendait pas ce qu’il lui disait quant à l’âge de l’enfant attendu : « quand je disais qu’à deux ans, c’est encore un bébé, elle ne le concevait pas…. Si c’est Madame T. qui lui dit ce que je lui dis, ça a plus de portée parce qu’elle l’a vécu ».
Ceux/celles qui ont vécu ce que les futurs adoptants s’imaginent avoir à vivre dans le futur ont une légitimité incontestée. Le vécu et l’expérience prennent une valeur irremplaçable.
Annexe n° 11-18. p. 409 : «Relations actuelles avec les adoptants».
E 13, p. 218.
E 4, 1,5,20,24,6,11.