Conclusion de la quatrième partie.

Nous avons, dans cette 4° partie, tenté de cerner mieux cette notion d’accompagnement. Nous l’avons trouvée dans la présence des anciens, témoignage vivant de l’adoption, véritables pairs ayant une fonction symbolique de ‘’passeur de génération’’. Ces anciens se voient alors investis d’une autre place, celle de guider les postulants dans les dédales de l’adoption internationale, mettant alors les professionnels départementaux dans la seule fonction d’intermédiaire pour l’adoption des pupilles de l’État. Ce système répond à l’exigence d’efficacité. Ayant massivement retenu qu’au-delà de l’agrément, ces professionnels départementaux avaient terminé leur travail, les adoptants se tournent vers ceux qui, espèrent-ils, les mèneront là où ils sont arrivés, la rencontre avec un enfant.

Cependant, le traitement quantitatif des données et l’analyse de contenu des entretiens disent encore le manque : les ‘’aînés’ ne peuvent répondre complètement aux attentes des postulants, et quand bien même ils le pourraient, individuellement et collectivement, les réponses apportées ont la limite de leurs expériences. Les demandes exprimées en direction des professionnels se situent alors sur deux niveaux : le professionnel est celui qui donnera un enfant pupille de l’État et il devrait être celui qui ‘’accompagnerait’’ les adoptants futurs vers cet intermédiaire ‘’donneur d’enfant’’. Cet accompagnement, centré sur le sujet et son projet, vise l’efficacité. Répondant en cela aux attentes des postulants, il offrirait un contenant assurant la permanence des liens dans l’espace et dans le temps, assurant la pérennité et la validité du projet, il offrirait aussi aux adoptants de pouvoir y déposer et trouver un contenu. Ce contenu est à construire ; si sa dimension d’opérationalité reste première pour les adoptants, les professionnels peuvent-ils/doivent-ils seulement y répondre  ? Nous voulons alors revenir à notre problématique et poser la question des finalités de l’adoption, dans l’équilibre à construire entre le droit de l’enfant à avoir une famille et des parents et le droit des parents à avoir un enfant.

Nous avons vu précédemment la valeur symbolique de l’agrément et le petit mais nécessaire pas de côté que les professionnels ont à faire pour évaluer la disponibilité des postulants, contenant et accueillant les désirs et attentes des futurs parents mais se dégageant finalement eux-mêmes d’une position en miroir. Invités, par un questionnement qui peut avoir une fonction maïeutique, à exprimer leurs représentations, les futurs parents, dans ce processus d’objectivation, majorent la dimension symbolique de leurs représentations. L’hypothèse d’une dialectique des dimensions narcissique et instituée de la filiation et donc des représentations de la filiation, nous conduit alors à penser qu’une majoration instituée de la seconde peut diminuer les effets (ou majorations) de la première ; cette dialectique peut également être mise en relation avec ce que P. FUSTIER nomme «le lien social » 486 . La notion d’accompagnement rejoint alors cette perspective, au regard des souhaits des personnes rencontrées : accompagner, c’est «faire lien ». Nous avons là des éléments qui donnent contour aux hypothèses construites en réponse à notre questionnement initial, c’est-à-dire qui répondent en partie à la question «dans quelles conditions…  ? ». Nous nous proposons d’étudier alors l’autre question qui est, rappelons-le, celle de la mesure, de la juste mesure, dans cet équilibre à trouver. Dans quelle mesure ?

Notes
486.

P. FUSTIER. Op. Cité. p. 217.